Test DVD / Mon garçon, réalisé par Christian Carion

MON GARÇON réalisé par Christian Carion, disponible en DVD et Blu-ray chez Diaphana le 23 janvier 2018

Avec :  Guillaume Canet, Mélanie Laurent, Olivier de Benoist, Antoine Hamel, Mohamed Brikat, Lino Papa…

Scénario : Christian Carion, Laure Irrmann

Photographie : Eric Dumont

Musique : Laurent Perez Del Mar

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Passionné par son métier, Julien voyage énormément à l’étranger. Ce manque de présence fait exploser son couple quelques années auparavant. Lors d’une escale en France, il découvre sur son répondeur un message de son ex-femme en larmes : leur petit garçon de sept ans a disparu lors d’un bivouac en montagne avec sa classe. Julien se précipite à sa recherche et rien ne pourra l’arrêter.

Etrange film que Mon garçon, réalisé par Christian Carion, découvert en 2001 avec Une hirondelle a fait le printemps, grand succès avec Michel Serrault et Mathilde Seigner, suivi de Joyeux Noël (2005), fresque historique sur fond de Première Guerre mondiale qui réunissait un casting franco-allemand composé notamment de Diane Kruger, Daniel Brühl et de Guillaume Canet. Ce triomphe dans les salles avait permis à ce dernier et au cinéaste de se retrouver pour un thriller d’espionnage inspiré de faits réels, L’Affaire Farewell, dans lequel le comédien donnait la réplique à Emir Kusturica. Cette fois, le public n’avait pas suivi, pas plus pour le film suivant de Christian Carion, En mai, fais ce qu’il te plaît, échec commercial grave. Une fois n’est pas coutume, le réalisateur se lance alors dans une production au budget modeste, avec des prises de vues prévues sur une seule semaine, un thriller pour lequel l’acteur principal, Guillaume Canet une fois de plus, ne serait pas mis au courant du scénario, mais de quelques bribes de l’histoire juste au moment de tourner. Mais l’improvisation et le sentiment d’urgence peuvent-elles réellement créer une vérité à l’écran ? Rien n’est moins sûr et c’est ce qui fait la grande faiblesse de Mon garçon.

Comme dans un nouveau volet de l’émission Rendez-vous en terre inconnue, le cinéaste est venu un matin chez Guillaume Canet afin de lui dire quels vêtements emporter pour le tournage. Quand dans la première scène le personnage principal débarque Gare de Lyon avec sa valise, il s’agit réellement du comédien avec son propre bagage, prêt à embarquer pour rejoindre une équipe réduite dans le Vercors, sans réellement connaître l’histoire qu’il s’apprêtait à tourner. Il en sera de même durant six jours, avec un tournage réalisé quasiment en temps réel et dans l’ordre chronologique de l’intrigue. En amont, ses partenaires, Mélanie Laurent, Olivier de Benoist et les seconds rôles s’étaient préparés pendant deux semaines avec Christian Carion grâce à un acteur doublure représentant Guillaume Canet. Le but était d’anticiper les réactions et de conduire ce dernier à se mettre réellement dans la peau d’un père de famille dont le petit garçon avait été enlevé en haute montagne et qui d’indice en indice parvient à retrouver la piste des ravisseurs, en agissant seul. Guillaume Canet n’avait donc pas de dialogues, ne savait pas où se diriger et devait se laisser guider par la mise en scène, en arpentant chaque recoin du décor et en découvrant le récit à travers les répliques et le jeu de ses partenaires. Chaque scène ayant été tournée en une prise, afin de préserver l’authenticité.

En toute honnêteté, ces partis pris sont bien plus intéressants que le résultat final qui fait penser au surestimé Prisoners de Denis Villeneuve, car il faut bien admettre que Mon garçon est un mauvais film qui pâtit justement des intentions du réalisateur. Guillaume Canet fait partie de ces acteurs qui partent facilement en roue libre quand ils ne sont pas ou mal dirigés. C’est le cas ici. S’il n’est pas l’acteur le plus fin de sa génération, Canet a déjà su se montrer très convaincant chez André Téchiné, Jacques Maillot, Nicolas Saada et Cédric Kahn. Dans Mon garçon, il se montre bien peu inspiré en ayant recours à ses tics récurrents, trogne renfrognée, moue boudeuse, hyperventilation, tandis que ses répliques – improvisées donc – témoignent d’un évident manque d’imagination. C’est notamment le cas lors d’une séquence de torture, vulgaire et gratuite, où son personnage utilise un chalumeau pour faire parler un des sbires qui ont enlevé son rejeton. Ses « Tu vas parler putain de ta race ! » à répétition, font malheureusement plus rire que triturer les tripes et les situations ne vont guère en s’arrangeant. Du coup, l’acteur paraît gêné, tout comme Mélanie Laurent, toujours aussi mauvaise, et Olivier de Benoist, dans une apparition ridicule et grotesque.

Platement filmé, Mon garçon aurait pu aboutir à un thriller tendu, organique et réaliste, mais le résultat est diamétralement opposé puisque ni l’équipe technique ni les comédiens ne semblent guère en mesure de transcender leur dispositif et de maîtriser l’art de l’improvisation.

LE DVD

Le test du DVD de Mon garçon, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Cette édition contient un making of (46’) bien plus intéressant que le film. Quelques semaines après sa sortie sur les écrans, Christian Carion revient sur les lieux du tournage de Mon garçon et explique comment les prises de vues se sont déroulées sur six journées. Quelques images de tournage dévoilent l’envers du décor avec un Guillaume Canet évidemment paumé, qui tente de créer son personnage avec les indices donnés par le réalisateur et ses partenaires. Ces derniers, ainsi que le producteur Christophe Rossignon et le chef opérateur Eric Dumont, apparaissent également au cours de ce documentaire, pour parler des répétitions destinées à leur donner des clés pour guider Guillaume Canet là où le cinéaste voulait l’emmener. Christian Carion développe donc longuement et posément ses intentions et partis pris, à savoir plonger son comédien principal dans l’inconnu le plus total, sans scénario, afin de voir si les réactions de Guillaume Canet allaient correspondre à celles du personnage principal. Tout cela pour que l’acteur ne mente pas, ne compose pas, ne triche pas face à la caméra.

L’Image et le son

Cette édition DVD est plutôt soignée et claire. La propreté de la copie est assurée, les couleurs désaturées et glaciales sont superbes et bien restituées. Le piqué est aléatoire, mais s’en tire honorablement, surtout que les partis pris esthétiques auraient pu avoir du mal à passer le cap du petit écran. La gestion des contrastes est solide, même si nous pouvions attendre plus de détails. Heureusement, l’encodage consolide l’ensemble avec brio et toutes les séquences tournées en extérieur sont très belles.

Le mixage Dolby Digital 5.1 impose une spatialisation qui happe le spectateur dans un flot d’ambiances naturelles qui ne se calment que durant les scènes en intérieur, axées sur les dialogues. Le cinéaste fait la part belle aux éléments environnants et la scène arrière ne manque pas l’occasion de briller. L’éditeur joint également une piste Stéréo de fort bon acabit, sans oublier les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Nord-Ouest Films  / Diaphana Distribution /  Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Grand froid, réalisé par Gérard Pautonnier

GRAND FROID réalisé par Gérard Pautonnier, disponible en DVD le 7 novembre 2017 chez Diaphana

Acteurs :  Jean-Pierre Bacri, Arthur Dupont, Olivier Gourmet, Féodor Atkine, Sam Karmann, Philippe Duquesne…

ScénarioGérard Pautonnier, Joël Egloff d’après son roman « Edmond Ganglion & Fils » (Gallimard)

Photographie : Philippe Guilbert

Musique : Christophe Julien

Durée : 1h23

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Dans une petite ville perdue au milieu de nulle part, le commerce de pompes funèbres d’Edmond Zweck bat de l’aile. L’entreprise ne compte plus que deux employés : Georges, le bras droit de Zweck, et Eddy, un jeune homme encore novice dans le métier. Un beau matin, pourtant, un mort pointe son nez. L’espoir renaît. Georges et Eddy sont chargés de mener le défunt jusqu’à sa dernière demeure. Mais, à la recherche du cimetière qui s’avère introuvable, le convoi funéraire s’égare et le voyage tourne au fiasco.

Vous savez chez nous c’est très simple ou ça bat, ou ça bat plus et là en l’occurrence, ça bat !

Sans faire de mauvais jeux de mots, Grand froid agit comme un vent de fraîcheur sur le cinéma français ! Venu de la publicité et de la télévision (la série Samantha, oups!) et remarqué en 2015 avec son court-métrage L’Etourdissement, adapté du roman de Joël Egloff et primé dans de nombreux festivals en France et à l’étranger, Gérard Pautonnier signe son premier long métrage Grand froid, également inspiré d’un livre du même auteur. Pour ce film, le réalisateur retrouve les comédiens Arthur Dupont et Philippe Duquesne, mais offre surtout à l’immense Jean-Pierre Bacri l’un de ses meilleurs personnages depuis près de quinze ans. Cocktail insolite entre le Fargo des frères Coen, les films d’Aki Kaurismäki, le western italien à la Sergio Leone et le cinéma inclassable de Bouli Lanners, Grand froid est une comédie-dramatique qui détonne dans le panorama cinématographique hexagonal.

Les affaires ne sont pas bonnes pour Edmond zweck, patron d’une entreprise de pompes funèbres qui périclite dans une petite ville. Il a dû se séparer d’une partie de son personnel. Il est secondé par Georges et Eddy, un jeune homme plein de bonne volonté mais sans expérience. L’embellie survient quand on demande à l’équipe de s’occuper d’un mort. Alors qu’il transporte le corps, direction le cimetière, elle se perd et surtout perd de vue la famille qui suivait le convoi. Edmond, Georges et Eddy vont tout tenter pour retrouver leur chemin et mener à bien leur mission.

La mort, ce n’est pas contagieux, c’est héréditaire.

Cette transposition du premier roman de Joël Egloff, Edmond Ganglion & fils, publié en 1999 chez Gallimard, qui contrairement au film se déroule durant un été caniculaire, est empreint d’un humour noir cynique, typique du cinéma anglo-saxon. Avec ses personnages de croque-morts fatigués, Olivier Gourmet dépassé par les événements et en attente d’un coup de fil de sa fille, Jean-Pierre Bacri moumouté qui passe ses journées à chercher son épitaphe à inscrire sur son caveau, et Arthur Dupont, jeune trentenaire déjà voûté par sa condition, Gérard Pautonnier met en scène un road-movie inattendu en corbillard, joliment absurde et très attachant. En se mettant à la recherche d’un cimetière introuvable, Georges (Bacri), 40 ans de métiers, amer et proche de la retraite et Eddy (Dupont), novice quelque peu paumé, vont faire le point sur leurs situations respectives et surtout apprendre à se connaître, en parlant de la mort, comme d’habitude, mais aussi de la vie, ce qu’ils sont moins habitués à faire.

Il y a deux métiers incontournables : la sage-femme et le fossoyeur. La première accueille, le second raccompagne. Entre les deux, les gens se débrouillent.

Ces récits initiatiques se déroulent lentement – ce qui vaut quelques soucis de rythme – sur l’asphalte glacé qui traverse de vastes paysages enneigés, désolés et boisés (le film a été tourné en Pologne), comme si la route qu’ils suivaient ne menait nulle part, sauf au carrefour de leur propre existence. Mais c’était sans compter la présence du cadavre d’un homme pas vraiment mort. Sur la forme, la photo de Philippe Guilbert (Les Convoyeurs attendent), subjugue avec ses couleurs évidemment froides et grisâtres, tandis que les décors naturels de la Pologne et de la Belgique donnent au film un cachet post-apocalyptique, notamment avec cette petite bourgade non-identifiée composée principalement d’une seule rue, du magasin de pompes funèbres et d’un restaurant chinois, où les habitants s’observent, se scrutent dans l’attente d’un événement qui pourrait relancer les affaires. N’oublions pas la composition tout aussi décalée de Christophe Julien (Au revoir là-haut, 9 mois ferme), composée de blues et de chants amérindiens, qui appuie le caractère bizarre, pour ne pas dire excentrique et intemporel de cette comédie-dramatique, mélancolique et existentielle, aux dialogues très soignés, à voir absolument.

LE DVD

Le test du DVD de Grand froid, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur offre une heure de suppléments. On commence par la douzaine de scènes coupées (13’ au total), non mixées et non étalonnées, qui dévoilent les petits bouts de séquences laissés sur le banc de montage, probablement pour des raisons de rythme. Rares sont les scènes qui durent plus de 50 secondes. Nous retiendrons surtout deux génériques de début alternatifs. A noter que ces séquences sont souvent muettes et focalisées sur les réactions des personnages.

Un petit montage de trois minutes montre le travail invisible à l’écran des magiciens des effets spéciaux, notamment pour créer un environnement enneigé alors que la végétation était verte au moment des prises de vue.

Merci à Diaphana de nous permettre de (re)découvrir le court-métrage de Gérard Pautonnier, L’Etourdissement (2015-22’), adapté du roman éponyme de Joël Egloff. Suite au décès accidentel d’un collègue de travail (Nicolas Vaude), Eddy (Arthur Dupont) est chargé, malgré lui, d’aller annoncer la terrible nouvelle à l’épouse (Pascale Arbillot) du défunt. Georges (Philippe Duquesne), un autre collègue, lui propose de l’accompagner pour le soutenir dans cette délicate mission et dans l’idée de rentrer chez lui plus tôt par la même occasion. Arrivés chez la veuve, les deux hommes vont cependant avoir bien du mal à être à la hauteur de la situation. On retrouve déjà dans ce court-métrage, le rapport de la vie avec la mort, ainsi que celui entre deux générations qui s’affrontent et se questionnent sur l’existence. L’humour absurde contraste avec la situation pourtant dramatique et se clôt sur un retournement bouleversant.

Ensuite, nous ne trouvons pas le making of de Grand froid, mais étrangement celui de L’Etourdissement (17’). Dommage que ce documentaire soit si mal réalisé et surtout entièrement musical !

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

En raison de son échec dans les salles (120.000 entrées), Grand froid est privé d’une sortie en Haute-Définition et c’est bien dommage. Malgré cette déconvenue, cette édition DVD s’avère plutôt soignée et claire. La propreté de la copie est assurée, les couleurs désaturées et glaciales sont superbes et bien restituées. Le piqué est aléatoire, mais s’en tire honorablement, surtout que les partis pris esthétiques auraient pu avoir du mal à passer le cap du petit écran. La gestion des contrastes est solide, même si nous pouvions attendre plus de détails. Heureusement, l’encodage consolide l’ensemble avec brio et les nombreuses séquences tournées en extérieur sont très belles.

D’emblée, le mixage Dolby Digital 5.1 impose une spatialisation qui happe le spectateur dans un flot d’ambiances naturelles qui ne se calment que durant les scènes en intérieur, axées sur les dialogues. Le cinéaste fait la part belle aux éléments environnants et la scène arrière ne manque pas l’occasion de briller avec notamment la restitution de la Toccata et Fugue en Ré mineur de Jean-Sébastien Bach. Le souffle du vent détonne sur l’ensemble des baffles. L’éditeur joint également une piste Stéréo de fort bon acabit, sans oublier les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © ELZEVIR FILMS / LAURENT THURIN-NAL / Diaphana / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Aurore, réalisé par Blandine Lenoir

AURORE réalisé par Blandine Lenoir, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez Diaphana

Acteurs :   Agnès Jaoui, Thibault de Montalembert, Pascale Arbillot, Sarah Suco, Lou Roy Lecollinet, Philippe Rebbot, Laure Calamy, Marc Citti…

Scénario :  Blandine Lenoir, Jean-Luc Gaget, Benjamin Dupas, Anne-Françoise Brillot, Océane Michel, Agnès Jaoui d’après une histoire originale de Blandine Lenoir

Photographie : Pierre Milon

Musique : Bertrand Belin

Durée : 1h29

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Aurore est séparée, elle vient de perdre son emploi et apprend qu’elle va être grand-mère. La société la pousse doucement vers la sortie, mais quand Aurore retrouve par hasard son amour de jeunesse, elle entre en résistance, refusant la casse à laquelle elle semble être destinée. Et si c’était maintenant qu’une nouvelle vie pouvait commencer ?

Excellente comédienne, notamment vue chez Gaspar Noé (Carne, Seul contre tous), Blandine Lenoir est aussi la réalisatrice de sept courts-métrages, d’Avec Marinette (2000) à L’Amérique de la femme (2015), traitant souvent de l’amitié et de la solidarité entre femmes, du rapport mère-fille et de la sexualité féminine. Ces thèmes sont d’ailleurs au centre de son premier long métrage, Zouzou, sorti en 2014, qui évoquait entre autres la sexualité après 60 ans. Son second film, Aurore, découle de ses œuvres précédentes et s’avère un film-somme de tous les sujets que la réalisatrice avait abordés. Né d’expériences personnelles, notamment l’angoisse d’arriver à la quarantaine et tout simplement la peur universelle de vieillir et du temps qui passe, Aurore est une comédie délicate qui témoigne d’une qualité d’écriture déjà évidente dans les courts-métrages de Blandine Lenoir, notamment Ma Culotte (2005) et L’Amérique de la femme déjà mentionné. Le film offre également un de ses meilleurs rôles à Agnès Jaoui, lumineuse, de tous les plans, attachante, belle, pour ainsi dire caressée par la cinéaste et la photo de Pierre Milon.

Elle incarne Aurore, 50 ans, divorcée, qui apprend cour sur coup qu’elle perd son travail, que sa fille aînée Marina attend un enfant et donc qu’elle va être grand-mère, que sa plus jeune fille Lucie souhaite quitter le domicile familial pour rejoindre son copain, que son ex-mari va se remarier avec une femme plus jeune. Mais le pire pour Aurore, ce sont ces bouffées de chaleur dues à la ménopause. Consciente d’être à un carrefour de sa vie – « Vous êtes en train de passer d’abeille à reine des abeilles » lui dit-on – Aurore va faire le point sur sa propre existence et penser à elle pour la première fois. C’est alors que ressurgit le premier homme de sa vie, Christophe alias Totoche. Sur les conseils de sa meilleure amie Mano, Aurore apprend à accepter et surtout à recevoir les belles choses qui lui arrivent.

Aurore est une comédie en apparence simple, mais qui traite de la vie sentimentale et sexuelle d’une femme de plus de cinquante ans, rarement représentée au cinéma, avec une énergie revigorante et une douceur qui réchauffe le coeur. Le choix d’Agnès Jaoui est aussi malin qu’évident, puisque la comédienne apparue pour la première fois à l’écran dans Le Faucon de Paul Boujenah en 1983 (oui oui, le film où Francis Huster souhaite manger un hamburger), devenue célèbre en 1996 grâce à Cuisine et dépendances de Philippe Muyl qu’elle avait coécrit avec Jean-Pierre Bacri, d’après leur pièce de théâtre, a su traverser les années ou jouant et en profitant de ses nouveaux atouts physiques de femme mûre et plantureuse comme dans Comme un avion de Bruno Podalydès en 2015. Elle est parfaite dans Aurore, drôle et émouvante, féminine et sensuelle, toujours séduisante. La comédienne s’épanouit devant la caméra de Blandine Lenoir dans la peau de ce personnage qui lui va comme un gant. Elle est également solidement épaulée, notamment la toujours pétillante Pascale Arbillot, Thibault de Montalembert, Sarah Suco (la révélation de Discount), Lou Roy-Lecollinet (découverte dans Trous souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud Desplechin), sans oublier les apparitions des indispensables Samir Guesmi, Marc Citti, Laure Calamy, Florence Muller (la scène de Pôle Emploi est hilarante) et Philippe Rebbot.

Aurore est une comédie lumineuse et optimiste, tendre et spontanée, engagée et pertinente, rythmée par ses répliques soignées et le peps de ses acteurs. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui un feel-good movie.

LE DVD

Le test du DVD d’Aurore, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. La jaquette reprend le visuel de l’affiche du film.

Après Aurore, précipitez-vous sur les courts-métrages de Blandine Lenoir proposés en guise de suppléments et qui évoquent les thèmes et certains motifs repris dans Zouzou et le second long métrage de la réalisatrice. Ne manquez pas la leçon sur le clitoris par la sublime Laure Calamy dans L’Amérique de la femme.

Ma culotte (2005 – 14’), avec Christine Boisson, Anaïs Demoustier : Claire, la cinquantaine, a très envie de faire l’amour avec ce type qu’elle a ramené chez elle. Depuis le temps qu’elle attend ça, un homme. Comment fait-on déjà ?

Pour de vrai (2006 – 12’), avec Nanou Garcia, Anaïs Demoustier : Une femme de quarante-cinq ans, bouleversée à l’idée de perdre son enfant actuellement dans le coma, erre chez elle, paralysée par son désespoir et son impuissance. Elle est totalement accaparée par sa petite voix intérieure qui répète toujours les mêmes mots d’amour fou pour son enfant endormi, et l’obsession de sa culpabilité de n’avoir pu éviter la chute fatale. Il y a quand même un truc qui cloche dans tout ce désespoir.

L’Amérique de la femme (2014 – 18’), avec Jeanne Ferron, Florence Muller, Laure Calamy, Sarah Grappin : Trois sœurs entre trente-cinq et quarante-cinq ans (Agathe, Lucie et Marie) débarquent chez leur mère, Solange, pour un week-end prolongé à la campagne. La fille d’Agathe, Zouzou, est là depuis une semaine, et d’après Solange, le séjour s’est bien passé. Mais quand les quatre femmes découvrent que la jeune fille de quatorze ans est en train de faire l’amour à l’étage, certainement pour la première fois, c’est la panique.
Qu’est-ce qu’on fait ? On monte les voir ? On les interrompt ?
Un dialogue commence alors autour de la question de l’éducation sexuelle : est-ce qu’Agathe a bien préparé sa fille ? Est-ce qu’elle a su mettre les mots ?

Finissez par le très bon entretien de Blandine Lenoir (18’) réalisé en juin 2017. La cinéaste revient sur la genèse d’Aurore, né d’observations sur ses amies et sur elle-même au moment de l’arrivée de la quarantaine et plus particulièrement sur les inégalités entre les hommes et les femmes de 40 voire plus de 50 ans. Son deuxième long métrage est aussi issu de l’envie de parler de la vie amoureuse et sociale d’un personnage féminin de 50 ans, peu représenté au cinéma. Blandine Lenoir évoque ensuite le choix d’Agnès Jaoui (dont elle voulait filmer le corps) pour incarner le rôle principal, mais aussi les autres comédiens qui l’accompagnent depuis de nombreuses années. Les thèmes du film sont longuement analysés et l’ensemble ne manque pas d’anecdotes de tournage.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Seule l’édition DVD a pu être testée. Evidemment, le piqué n’est pas aussi pointu qu’en Blu-ray et la colorimétrie peut avoir tendance à baver quelque peu, mais cette édition SD s’en tire avec les honneurs. Les contrastes sont corrects, les détails plaisants et l’encodage suffisamment solide pour pouvoir faire profiter de la photographie de Pierre Milon (Les Neiges du Kilimandjaro, Au fil d’Ariane). La clarté est appréciable, les teintes chaleureuses et solaires. Notons toutefois quelques baisses de la définition.

Outre une piste Audiodescription et des sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, la version Dolby Digital 5.1 parvient sans mal à instaurer un indéniable confort phonique. Les enceintes sont toutes mises en valeur et spatialisent excellemment les effets, la musique et les ambiances. Quelques séquences auraient peut-être mérité d’être un peu plus dynamiques ou les dialogues parfois quelque peu relevés quand la partition s’envole. La piste Stéréo est de fort bon acabit et contentera largement ceux qui ne seraient pas équipés sur la scène arrière.

Crédits images : © Eddy BrièreKaré Productions / Diaphana Distribution / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Cigarettes et chocolat chaud, réalisé par Sophie Reine

CIGARETTES ET CHOCOLAT CHAUD réalisé par Sophie Reine, disponible en DVD et Blu-ray le 18 avril 2017 chez Diaphana

Acteurs : Gustave Kervern, Camille Cottin, Héloïse Dugas, Fanie Zanini, Thomas Guy, Franck Gastambide

Scénario : Sophie Reine, Gladys Marciano

Photographie : Renaud Chassaing

Musique : Sébastien Souchois

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Denis Patar est un père aimant mais débordé qui se débat seul avec l’éducation de ses filles, Janine, 13 ans et Mercredi, 9 ans, deux boulots et une bonne dose de système D. Un soir, Denis oublie, une fois de trop, Mercredi à la sortie de l’école. Une enquêtrice sociale passe alors le quotidien de la famille Patar à la loupe et oblige Denis à « un stage de parentalité ». Désormais, les Patar vont devoir rentrer dans le rang…

On dirait que le Festival de Sundance fait des émules dans nos contrées ! Cigarettes et chocolat chaud est le premier long métrage de Sophie Reine, monteuse de profession, ayant oeuvré sur les très réussis Ma vie en l’air, Le Temps des porte-plumes, J’ai toujours rêvé d’être un gangster, Foxfire, confessions d’un gang de filles, My Sweet Pepper Land et récompensée par un César pour Le Premier jour du reste de ta vie. Une carrière riche et éclectique qui l’a conduite vers la mise en scène. Son premier court-métrage Jeanine ou mes parents n’ont rien d’exceptionnel (2010) démontre déjà un univers constitué de collages, d’animations, de couleurs sur fond de crise familiale. Sophie Reine attendra six années avant de passer au long-métrage avec Cigarettes et chocolat chaud, prolongement et approfondissement de son précédent travail cinématographique.

Extrêmement foutraque, mais très attentionné, Denis Patar est un paternel épatant, mais débordé qui se débat pour élever et éduquer ses deux fillettes Mercredi et Janine, depuis la mort de son épouse. Compressé par plusieurs boulots alimentaires, ce veuf rate, une fois de trop, la sortie d’école de sa fille Mercredi (c’est son prénom) de 9 ans, interprétée par la jeune Fanie Zanini, confondante de naturel, qui se retrouve au commissariat. Cette garde d’enfant à vue va entraîner l’entrée en scène d’une enquêtrice sociale. S’il veut conserver la garde de ses enfants, Denis va devoir suivre un stage de responsabilisation parentale. Comme très souvent pour une première oeuvre, Cigarettes et chocolat chaud foisonne d’idées – certaines inspirées par la propre enfance de la réalisatrice, passée dans un appartement parisien où le bordel était roi – et Sophie Reine s’avère très généreuse envers les spectateurs, quitte à créer un trop-plein.

La photo éclatante et colorée du chef opérateur Renaud Chassaing, les costumes et les décors plongent l’audience dans un monde singulier, celui de la famille Patar, qui a su rester optimiste et liée malgré le drame qui l’a touchée. Ce film très attachant part un peu dans tous les sens, mais cela traduit en même temps la façon de vivre des Patar. A mi-chemin, l’histoire se focalise sur la fille aînée atteinte du Syndrome Gilles de la Tourette, qui arrive un peu comme un cheveu sur la soupe. Mais cette fois encore, cela reflète le fait que le père (génial Gustave Kervern) est tellement désorganisé dans sa façon de vivre et de s’occuper de ses deux enfants, qu’il ne s’est même pas rendu compte des nombreux tics qui agitent sa fille Janine (Héloïse Dugas, jolie révélation). Il faudra un électrochoc, l’arrivée d’une enquêtrice (l’excellente Camille Cottin), pour que Denis fasse le tri dans sa vie, parvienne à faire son deuil, pour mieux s’occuper de ses enfants et penser à lui.

Cigarettes et chocolat chaud s’inscrit dans ce genre de comédies américaines et anglaises du style Little Miss Sunshine et Captain Fantastic, une sensibilité Sundance comme nous le disions en début de critique, un film qui fait du bien, qui fait chaud au coeur, avec des personnages bourrés de charme menés par un Gustave Kervern nounours en diable. A la fin, il n’est pas interdit de fredonner Cigarettes and chocolate milk de Rufus Wainwright, chanson qui a inspiré le titre du film (et qui le clôt), qui devient comme qui dirait l’hymne entêtant et caractéristique de la famille Patar et de cette chronique irrésistible, fantaisiste, tendre et poétique.

LE DVD

Le DVD de Cigarettes et chocolat chaud, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film et la jaquette reprend le visuel de l’affiche du film.

Malgré le petit score du film dans les salles, Diaphana prend soin du service après-vente de Cigarettes et chocolat chaud, en livrant tout d’abord un making of (31’) très sympathique, composé de nombreuses images de tournage et de propos de l’équipe. On y voit Sophie Reine à l’oeuvre avec ses comédiens, tandis que ces derniers reviennent sur l’histoire et les personnages. Quelques images montrent les bouts d’essai des acteurs, ainsi que la préparation des décors et des costumes.

S’ensuit la court-métrage Jeanine ou mes parents n’ont rien d’exceptionnel, réalisé par Sophie Reine en 2010, avec Denis Ménochet et Léa Drucker. Jeanine, 10 ans, n’en peut plus de ses parents, anciens hippies, qui ne pensent qu’à s’amuser. Afin d’accéder à la vie « carrée et organisée » à laquelle elle rêve elle s’inscrit en cachette à un concours de gymnastique. Comme nous l’indiquons dans notre critique de Cigarettes et chocolat chaud, les thèmes et les bases formelles du long métrage de Sophie Reine sont déjà posés dans cet excellent Jeanine ou mes parents n’ont rien d’exceptionnel.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce du film, une autre alternative, ainsi qu’un petit questionnaire auquel se sont pliés les quatre comédiens principaux.

L’Image et le son

Seule l’édition DVD a pu être testée. Evidemment, le piqué n’est pas aussi pointu qu’en Blu-ray et la colorimétrie peut avoir tendance à baver quelque peu, mais cette édition SD s’en tire avec les honneurs. Les contrastes sont corrects, les détails plaisants et l’encodage suffisamment solide pour pouvoir faire profiter de la photographie de Renaud Chassaing (Pattaya, Présumé coupable). La clarté est appréciable, les teintes chaleureuses et solaires. Notons toutefois quelques baisses de la définition.

Outre une piste Audiodescription et des sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant, la version Dolby Digital 5.1 parvient sans mal à instaurer un indéniable confort phonique. Les enceintes sont toutes mises en valeur et spatialisent excellemment les effets, la musique et les ambiances. Quelques séquences auraient peut-être mérité d’être un peu plus dynamiques ou les dialogues parfois quelque peu relevés quand la partition s’envole. Le caisson de basses s’invite également à la partie, notamment lors de la fête finale. La piste Stéréo est de fort bon acabit et contentera largement ceux qui ne seraient pas équipés sur la scène arrière.

Crédits images : © Mandarin Cinema / Alexis COTTIN / Diaphana / Captures du DVD :  Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Petit locataire, réalisé par Nadège Loiseau

LE PETIT LOCATAIRE réalisé par Nadège Loiseau, disponible en DVD et Blu-ray le 21 mars 2017 chez Diaphana

Acteurs : Karin Viard, Philippe Rebbot, Hélène Vincent, Manon Kneusé, Antoine Bertrand, Stella Fenouillet

Scénario : Nadège Loiseau, Fanny Burdino, Mazarine Pingeot, Julien Guetta

Photographie : Julien Roux

Musique : Guillaume Loiseau

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Le test de grossesse est formel : Nicole, 49 ans, est enceinte. Sa fille, qui a eu un enfant jeune, n’en revient pas. Sa mère, bien que charmante, n’est pas forcément d’un très grand soutien. Dépitée, Nicole finit par accepter la situation. Sauf qu’elle n’est pas vraiment aidée par Jean-Pierre, son mari qui cherche mollement du travail depuis deux ans. Il faut que cela change pour que le nouveau-né soit accueilli dans de bonnes conditions. Nicole voit l’arrivée du bébé comme un signe, celui d’un nouveau départ pour toute la famille…

Voilà un premier long métrage très prometteur ! En 2013, la réalisatrice Nadège Loiseau met en scène Le Locataire, court-métrage avec Fabienne Babe et Alice David, qui raconte l’histoire d’une femme, mariée et mère de famille, qui tombe enceinte à l’âge de 54 ans. Le Petit locataire est l’adaptation en « grand format » de ce court-métrage. Ce projet s’inspire de la propre grossesse de Nadège Loiseau, qui explique « J’avais du mal à concevoir mon état de femme enceinte. J’ai établi le contact avec mon bébé en l’appelant mon locataire parce que je sentais bien, passé les premiers mois, qu’il y avait une vie déjà très autonome à l’intérieur de moi, qui ne respectait pas mes horaires, qui gigotait n’importe quand, qui essayait de pousser les murs… Bref, je me suis sentie habitée dans le sens premier du terme. Et je me suis dit que je n’étais forcément pas la seule à avoir ressenti ça ». Au-delà du thème de la maternité, Nadège Loiseau signe surtout un portrait de famille formidablement interprété.

Karin Viard est parfaite dans le rôle de Nicole, mariée depuis toujours à Jean-Pierre (le toujours génial Philippe Rebbot), mère de Vincent (Raphaël Ferret), cuistot engagé dans la marine et d’Arielle, incarnée par Manon Kneusé, grande révélation du film et qu’on a hâte de revoir sur le grand écran. Nicole travaille dans un péage d’autoroute, tandis que Jean-Pierre, ancien espoir gymnaste, est au chômage depuis deux ans et passe son temps à entraîner la jeune équipe sportive de sa ville. Alors que Vincent travaille dans un sous-marin, Arielle, 27 ans et éternelle adolescente vit encore chez ses parents et survit financièrement grâce à un petit boulot dans une usine. Tout irait (presque) pour le mieux, si ce n’est qu’Arielle est aussi mère d’une petite fille de six ans, Zoé (Stella Fenouillet), dont Jean-Pierre et Nicole doivent toujours s’occuper quand Arielle sort avec ses copines. Ajoutez à cela la présence de la mère de Nicole, Maimillette (formidable Hélène Vincent, vieillie pour le film), dont les absences s’accentuent, mais qui refait surface de temps en temps avec des propos bien sentis sur chacun et la situation dans laquelle ils se trouvent. La grossesse inattendue de Nicole, pilier de cette famille, va être l’occasion pour chacun de faire le point sur sa propre vie alors que ces quatre générations semblent être sur le point d’imploser.

Le Petit locataire est un premier long métrage généreux, drôle, dynamique, qui se penche avec délicatesse et une vraie sensibilité sur les thèmes de la transmission et de la maternité. Comment l’individu peut-il s’imposer dans un groupe et plus particulièrement dans une famille ? Qu’est-ce que devenir parent ? Nadège Loiseau réussit son pari de faire réfléchir tout en livrant une comédie sociale très divertissante, bien réalisée, chaleureuse, parfois émouvante et toujours pleine de charme avec des couleurs acidulées et une musique électro également très réussie composée par Guillaume Loiseau qui reste longtemps en tête. Pour son scénario, la réalisatrice a fait appel à Fanny Burdino et Mazarine Pingeot, qui avaient également signé celui de l’excellent dernier film de Joachim Lafosse, L’Economie du couple, dont nous retrouvons ici la qualité d’écriture. Ajoutez à cela le soutien de personnages secondaires bien campés par le québécois Antoine Bertrand (vu dans Starbuck) et Côme Levin (Radiostars, Patients), des répliques bien senties et sans aucune méchanceté, un petit clin d’oeil à la recette du Cake d’amour de Peau d’âne et un univers qui fait parfois penser à La Smala, classique de Jean-Loup Hubert et vous obtenez une très agréable surprise qui méritait bien plus que ses 193.000 entrées au cinéma. La famille Payan mérite largement de trouver son public grâce aux prochaines diffusions du film à la télévision et à sa sortie dans les bacs.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Petit locataire, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur l’excellente composition de Guillaume Loiseau.

L’entretien avec la charmante réalisatrice Nadège Loiseau (14), a été réalisé à Paris en janvier 2017. Cette interview permet d’en savoir un peu plus sur la genèse du Petit locataire, les éléments personnels qui ont nourri le scénario, les thèmes abordés, le casting, le choix des couleurs et les petites références à Jacques Demy.

Ne manquez pas le petit quart d’heure de scènes coupées au montage, qui s’avèrent très réussies et qui permettent entre autres d’en savoir un peu plus sur le personnage de Vincent (Raphaël Ferret).

Nous en parlons dans la critique du film, Le Petit locataire est en réalité la version étendue du court-métrage du Locataire, court-métrage réalisé par Nadège Loiseau en 2013, avec Fabienne Babe, Alice David et Stéphan Wojtowicz. La plupart des scènes de ce film très réussi et excellemment interprété, ont été entièrement reproduites pour le long-métrage.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et les credits.

L’Image et le son

Ce transfert HD (1080p, AVC) s’avère soigné. Les partis pris de la photo signée Julien Roux (Tristesse club, Five) sont très bien retranscrits avec une prédominance de couleurs vives et pétillantes (les teintes bleue, jaune, rose foisonnent), les contrastes sont au beau fixe et le piqué agréable. Ce master s’avère un bel objet, le relief est omniprésent, les détails omniprésents sur le cadre large, les séquences en extérieur sont magnifiques et étincelantes.

La musique est admirablement délivrée et spatialisée par le mixage DTS-HD Master Audio 5.1. Les dialogues s’imposent sans mal sur la centrale, toujours clairs et distincts. Quelques ambiances naturelles parviennent à percer sur les latérales, la balance gauche-droite est dynamique, avec parfois un petit soutien du caisson de basses. La version Stéréo est également à l’avenant avec une minutieuse homogénéité des voix, de la composition et des bruitages annexes. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Les films du Worso / SRAB Films/ Captures du Blu-ray :  Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / La Fille inconnue, réalisé par Jean-Pierre et Luc Dardenne

LA FILLE INCONNUE réalisé par Jean-Pierre et Luc Dardenne, disponible en DVD et Blu-ray le 21 février 2017 chez Diaphana

Acteurs : Adèle Haenel, Olivier Bonnaud, Jérémie Renier, Louka Minnella, Christelle Cornil, Nadège Ouedraogo, Olivier Gourmet

Scénario : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne

Photographie : Alain Marcoen

Durée : 1h53

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Un soir, alors qu’elle travaille avec son assistant, Jenny Davin, médecin généraliste, n’ouvre pas la porte de son cabinet à une jeune femme. Cette dernière est retrouvée morte quelques heures plus tard. Jenny l’apprend au cours de l’enquête et découvre en même temps que la victime ne peut pas être identifiée. Jenny comprend également que cette affaire n’est pas vraiment une priorité pour la police. Rongée par la culpabilité et contre l’avis des forces de l’ordre, elle décide de mener sa propre enquête. Mais Jenny est vite confrontée à l’agressivité de témoins récalcitrants…

Un miracle se produit à chaque film des frères Dardenne. Le spectateur au fait de leur cinéma, un tant soit peu vaniteux, peut déclarer s’attendre à retrouver la même recette habituelle des réalisateurs et que ce nouveau film risque d’être du réchauffé. Seulement voilà, les cinéastes parviennent toujours à nous cueillir et leur dernier opus, leur dixième long métrage, La Fille inconnue ne fait pas exception à la règle et s’avère même un de leurs plus grands films.

Le personnage du médecin trottait dans la tête des frères Dardenne depuis de nombreuses années, pensant déjà l’intégrer dans l’intrigue du Gamin au vélo. Enfants, Jean-Pierre et Luc Dardenne ont longtemps observé leur oncle médecin, une profession qui les a toujours fasciné. Après avoir rencontré la formidable Adèle Haenel, ils décident de lui écrire ce rôle sur mesure, celui de Jenny, une jeune femme médecin généraliste se sentant coupable et responsable de la mort d’une jeune fille immigrée sans identité, à qui elle a refusé d’ouvrir la porte de son cabinet après une longue journée et parce que l’heure d’ouverture était largement dépassée. Elle se met ensuite à la recherche de son nom une fois que la police lui ait annoncé la mauvaise nouvelle. A travers son quotidien fait de visites à domicile ou à son cabinet, Jenny commence une véritable enquête obsédante en recoupant les témoignages de quelques patients.

Après avoir offert à Marion Cotillard un de ses plus grands rôles dans Deux jours, une nuit, les Dardenne récidivent avec Adèle Haenel, qui n’a de cesse d’éblouir après les grandes réussites de L’Apollonide : Souvenirs de la maison close, Suzanne (César de la meilleure actrice dans un second rôle), Les Combattants (César de la meilleure actrice) et Les Ogres. De tous les plans, du début à la fin, la comédienne illumine La Fille inconnue par son charisme, son immense talent, sa sensibilité à fleur de peau. Filmé comme un véritable polar, ce drame réaliste, social et anxiogène prend aux tripes grâce à la virtuosité discrète de la mise en scène qui s’attache à ce personnage alors au début de sa vie professionnelle, dont la moue boudeuse reflète encore l’innocence et même la naïveté de son jeune âge. A l’instar de leurs autres longs métrages, les frères Dardenne se focalisent sur un personnage dont on ignore le passé et la vie privée, pour ainsi mettre en relief les choix cruciaux que Jenny doit faire au moment présent, qui risquent d’avoir une incidence sur le reste de sa vie. Ainsi, Jenny décide d’exercer sa profession dans un cabinet de la ville de Seraing, dans la Province de Liège, située le long d’une voie rapide où la circulation se fait entendre de jour comme de nuit, plutôt que d’accepter une place convoitée dans une clinique privée confortable aux patients aisés. Ce choix découle tout simplement de sa décision d’en savoir plus sur cette jeune fille assassinée, dont elle se sent en partie responsable de la mort.

Avec un réalisme quasi-documentaire, les frères Dardenne suivent donc Jenny pas à pas dans son quotidien. C’est l’écoute au stéthoscope du coeur d’un patient âgé, la peau massée, les regards, les gestes techniques, la parole qui se libère liée au lien unique entre un médecin et son patient, une proximité parfois inattendue qui se crée et qui agit alors comme un confessionnal. Ou comment soulager sa conscience, les mots guérissant les maux. Jenny avance à tâtons, parfois sans le vouloir ou après avoir voulu jeter l’éponge suite à quelques menaces qui planent au-dessus de sa tête, au fil de rencontres singulières (dont celles avec les fidèles Jérémie Renier, Fabrizio Rongione, Olivier Gourmet et même le gamin au vélo Thomas Doret), bonnes ou mauvaises, qui vont l’aider à aller vers l’acceptation pour mieux renaître.

Après avoir été accueilli froidement au Festival de Cannes, où ils ont pourtant leurs habitudes, les Dardenne ont décidé de remonter leur film en coupant notamment sept minutes. Aujourd’hui, La Fille inconnue apparaît comme étant l’un des chefs d’oeuvres de l’année 2016.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de La Fille inconnue, disponible chez Diaphana, repose dans un boîtier classique de couleur blanche. La jaquette reprend le visuel de l’affiche du film. Le menu principal est animé sur une séquence clé du film.

Réalisée par N.T. Binh à Paris en octobre 2016, l’interview de Jean-Pierre et Luc Dardenne (26’) est posée, passionnante, dense et en apprend beaucoup sur le processus créatif des deux frères cinéastes. Ils reviennent sur le personnage de médecin dont ils voulaient parler depuis longtemps, l’usage des silences, le choix des décors, la précision du cadre, le travail avec Adèle Haenel, la manière pour happer le spectateur, la longue phase du montage, l’importance du son, bref tout est abordé avec précision et surtout une passion contagieuse pour le cinéma.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et les credits.

L’Image et le son

L’éditeur prend soin de La Fille inconnue et livre un service après-vente tout ce qu’il y a de plus solide. Les partis pris esthétiques du chef opérateur Alain Marcoen, fidèle collaborateur des frères Dardenne sont respectés et la colorimétrie habilement restituée. La clarté est de mise, tout comme des contrastes fermes et des noirs denses, un joli piqué et des détails appréciables sur l’ensemble des séquences en extérieur et du cadre en général, y compris sur les gros plans des comédiens. Notons de sensibles pertes de la définition et des plans un peu flous, imputables aux partis pris qui privilégient souvent la caméra portée, qui n’altèrent cependant en rien le visionnage. Un master HD élégant, propre et clair.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 fait ce qu’elle peut pour créer un semblant de spatialisation avec de légères ambiances naturelles (la circulation près du cabinet médical notamment), mais n’hésitez pas à sélectionner directement la Stéréo qui étonnamment l’emporte sans conteste du point de vue restitution des dialogues, prépondérant dans un film de cet acabit. L’éditeur joint également une piste Audiodescription pour les spectateurs aveugles et malvoyants, ainsi que les sous-titres français pour sourds et malentendants.

Crédits images : © Christine Plenus / Captures du Blu-ray :  Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Divines, réalisé par Houda Benyamina

DIVINES réalisé par Houda Benyamina, disponible en DVD et Blu-ray le 3 janvier 2017 chez Diaphana

Acteurs : Oulaya Amamra, Kevin Mischel, Jisca Kalvanda, Farid Larbi, Déborah Lukumuena, Yasin Houicha

Scénario : Houda Benyamina, Romain Compingt, Malik Rumeau

Photographie : Julien Poupard

Musique : Demusmaker

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Dans un ghetto où se côtoient trafics et religion, Dounia a soif de pouvoir et de réussite. Soutenue par Maimouna, sa meilleure amie, elle décide de suivre les traces de Rebecca, une dealeuse respectée. Sa rencontre avec Djigui, un jeune danseur troublant de sensualité, va bouleverser son quotidien.

C’est le choc du Festival de Cannes 2016. Le petit film que personne n’attendait et qui pourtant a créé un raz-de-marée auprès de la critique, quasi-unanime et des spectateurs. Récompensé par la Caméra d’or, trophée destiné à un premier film, Divine est le premier long métrage de la réalisatrice Houda Benyamina. L’action se déroule en banlieue parisienne. La jeune Dounia suit des cours pour devenir hôtesse d’accueil, mais envoie balader sa prof après l’avoir humilié devant toute sa classe. Elle ne rêve que de liberté, de respect et de pouvoir, que seul l’argent pourrait lui offrir. Aux côtés de sa meilleure amie Maimouna, elle souhaite proposer ses services auprès de Rebecca, la dealeuse charismatique du quartier, que ceux de son âge envient, Dounia la première. Son rêve de partir du camp de roms où elle vit avec sa mère semble à portée de main. Elle rencontre alors Djigui, le vigile du supermarché qu’elle aime charrier, jusqu’à ce qu’elle apprenne que ce beau jeune homme, rêve lui aussi de s’en sortir en devenant danseur professionnel.

A l’origine de Divines, il y a les émeutes qui ont agité la banlieue parisienne en 2005. La réalisatrice explique « Mon besoin de créer vient toujours d’un sentiment d’injustice. J’ai raisonné mes proches, mais j’avais moi aussi envie de sortir et de tout défoncer. Je me suis ensuite demandé pourquoi cette colère n’avait pas abouti à une véritable révolte ». Femme engagée, « mais pas révoltée », Houda Benyamina signe un premier film choc, qui ne peut laisser indifférent. Divines, dont le titre était à l’origine Bâtarde, est littéralement porté par le tempérament volcanique de la cinéaste, mais également par le naturel confondant des comédiens, Oulaya Amamra, la propre sœur de la réalisatrice, qui incarne Dounia, Déborah Lukumuena (Maimouna), Jisca Kalvanda (Rebecca) et Kevin Mischel (Djigui).

Si Divines n’échappe pas à certains défauts souvent liés à un premier long métrage, à savoir un trop-plein d’idées pas forcément toutes exploitées, quelques égarements, un désir d’en mettre plein la vue à travers une démonstration technique qui prend le pas sur l’émotion, une hystérie peu contrôlée (bien que contagieuse), Divines est un film extrêmement généreux, qui ne s’adresse pas une communauté, mais qui a le désir de toucher tous les spectateurs de tout âge, voulu avant tout comme une histoire d’amour et d’amitié, thèmes universels par excellence. Ici, ce sont quatre destins qui s’imbriquent, qui se confrontent, qui se repoussent, qui s’attirent sans cesse.

Divines est également un roman d’apprentissage, une éducation sentimentale, mais aussi un thriller, même si le film manque de conviction durant cette partie où Dounia tente de piéger un mec plein aux as, afin de lui voler son argent pour le compte de Rebecca. Ce qui n’empêche pas Divines d’être parfois violent, de mettre mal à l’aise, de bousculer (la fin tragique n’est pas sans évoquer celle du Parrain III), tout en faisant réfléchir et en divertissant les spectateurs. En ce sens, Houda Benyamina se rapproche du cinéma d’Abdellatif Kechiche, pas une mince référence. Une première œuvre riche, libre, souvent puissante, sombre, non dénuée d’humour et qui reste en tête bien après la fin de la projection. Une belle réussite, qui s’avère au final bien plus réussi que Bande de filles de Céline Sciamma auquel on pense forcément vu le sujet, le contexte et les personnages principaux.

Réalisé avec un budget de 2 millions d’euros, Divines, d’ores et déjà nommé sept fois à la prochaine cérémonie des César, a attiré plus de 300.000 spectateurs dans les salles.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Divines, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

La section des suppléments propose tout d’abord quatre entretiens. Dans chaque interview nous retrouvons la réalisatrice Houda Benyamina. Elle est ainsi accompagnée de son coscénariste Romain Compingt (11’), puis de la scripte Julie Darfeuil (11’), de ses deux monteurs (8’) et enfin de son superviseur musical et compositeur (10’). Chaque aspect technique du film est posément abordé, mais également la genèse du film, l’écriture et l’évolution du scénario, la création des personnages, le travail avec les comédiens, les thèmes abordés, la recherche de la structure du film, le rythme, les décors. Un commentaire audio n’aurait pas été de trop tant l’équipe s’avère prolixe et surtout passionnante à écouter.

S’ensuivent quatre petites scènes coupées (7’), vraiment pas mal du tout, même si rien n’indique la raison de leur éviction au montage final. On y voit Dounia s’exercer à la boxe, Dounia qui imite une chanteuse de gospel, Dounia et Djigui déambuler dans le magasin avec des cagoules Aristochats, et une scène plus longue des deux personnages partagés entre la danse et le combat qui mène finalement au premier baiser.

Un tout petit making of (7’), compile des images du tournage avec la réalisatrice à l’oeuvre avec ses comédiens, quelques propos de l’équipe, puis la présentation de Divines au Festival de Cannes.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et les credits.

L’Image et le son

Diaphana livre une édition HD de Divines de très grande classe et même irréprochable. Full HD (1080p), cette édition restitue les superbes couleurs de la photo signée Julien Poupard (Voie rapide, Party girl, Les Ogres) qui fait la part belle aux teintes chatoyantes, parfois ambrées, le piqué est acéré, les détails abondants sur le cadre large et les contrastes tranchants. La luminosité des scènes diurnes flatte constamment la rétine, le relief est omniprésent.

Le mixage DTS-HD Master Audio 5.1 est immédiatement immersif et permet au spectateur de plonger dans le monde de Divines avec une musique percutante sur les enceintes latérales. Les voix sont d’une précision sans failles sur la centrale, la balance frontale est constamment soutenue, la composition spatialisée de bout en bout. La piste Stéréo devrait satisfaire ceux qui ne seraient pas équipés sur les enceintes arrière.

L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Diaphana / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Voir du pays, réalisé par Delphine Coulin et Muriel Coulin

VOIR DU PAYS réalisé par Delphine et Muriel Coulin, disponible en DVD le 10 janvier 2017 chez Diaphana

Acteurs : Soko, Ariane Labed, Ginger Romàn, Karim Leklou, Andreas Konstantinou, Makis Papadimitriouw…

Scénario : Delphine Coulin, Muriel Coulin d’après le roman de Delphine Coulin

Photographie : Jean-Louis Vialard

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Deux jeunes militaires, Aurore et Marine, reviennent d’Afghanistan. Avec leur section, elles vont passer trois jours à Chypre, dans un hôtel cinq étoiles, au milieu des touristes en vacances, pour ce que l’armée appelle un sas de décompression, où on va les aider à « oublier la guerre ». Mais on ne se libère pas de la violence si facilement…

Depuis 17 filles, prix Michel-d’Ornano au Festival de Deauville en 2011, on attendait le retour de Delphine et Muriel Coulin derrière la caméra. Leur deuxième long métrage, Voir du pays est adapté du propre roman de Delphine Coulin et narre le retour d’Afghanistan de deux jeunes militaires françaises, interprétées par Soko et Ariane Labed. Mais avant d’être « relâchées », elles doivent comme leurs camarades passer dans un « sas de décompression », autrement dit un programme supposé leur apprendre à se détendre avant de retourner à la vie civile, si toutefois le retour à la vie normal s’avère possible.

Depuis 2008, les soldats français revenant du front sont ainsi accueillis dans un hôtel cinq étoiles à Chypre. Dans un cadre de carte postale, ces soldats sont soumis à des entretiens avec des psychologues, des cours d’aquagym, de relaxation, des sorties en bateau, mais aussi des tests et thérapies de groupes durant lesquels ils arborent des lunettes projetant en trois dimensions une reconstitution d’événements survenus qui ont pu les traumatiser. Pendant leur confession, un scientifique reconstitue en direct certains assauts dont ils ont les témoins, les acteurs et même les victimes au cours de ces six derniers mois. Si le terrain change du tout au tout, les soldats, programmés, demeurent sur le qui-vive et les réflexes conditionnés ne peuvent s’éteindre en un claquement de doigt. Chaque personnage porte en lui un trauma et apprend à vivre avec. Soko (A l’origine, Augustine, La Danseuse) et Ariane Labed (Une place sur la terre, Fidelio, l’odyssée d’Alice, The Lobster) sont remarquables et campent deux jeunes femmes venant de Lorient, deux amies, Marine et Aurore, entre 25 et 30 ans, qui doivent s’imposer face à leurs camarades de sexe masculin, constamment moquées et souvent menacées. En filigrane, le film interroge sur les raisons qui poussent une femme à partir à la guerre, mais aussi pourquoi est-ce toujours étrange et singulier de voir des jeunes femmes s’engager pour affronter un monde violent habituellement « réservé » aux hommes.

Si la dernière partie s’avère plus classique, Voir du pays vaut non seulement pour l’originalité de son sujet, pas ou peu abordé au cinéma, mais aussi et surtout pour la puissance du jeu de ses deux comédiennes principales, vibrantes et magnétiques, très investies (elles ont d’ailleurs suivi un entraînement militaire avec une coach qui a participé aux vrais sas avant de quitter l’armée), définitivement lancées. Voir du pays, titre ironique sur la promesse de dépaysement faite aux soldats qui souhaiteraient s’engager et qui finalement restent la plupart du temps confinés une fois arrivés sur le terrain, est une œuvre difficile, mais frontale, juste, sèche, documentée et surtout passionnante avec ce décor luminescent qui contraste avec la noirceur des témoignages des soldats. Projeté au Festival de Cannes 2016 dans la sélection Un certain regard, Voir du pays obtient le prix du meilleur scénario.

LE DVD

Le test du DVD de Voir du pays, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur une des séquences du film.

Les suppléments sont malheureusement un peu limités. Les essais des comédiens (8’), Sylvain Loreau, tout d’abord seul puis rejoint ensuite par Karim Leklou et Alexis Manenti demeurent facultatifs.

En revanche, les séquences laissées sur le banc de montage (8’), au nombre de trois, sont un peu plus intéressantes, d’autant plus qu’elles sont introduites par un carton indiquant la raison de leur éviction. La première prolonge la fin en montrant les soldats accueillis par leur famille à l’aéroport. Les réalisatrices ont finalement préféré rester dans cet objectif du sas, en préservant la vie privée de leurs deux personnages. S’ensuivent quelques images d’un groupe de soldats en plein entrainement, parmi lesquels Soko. La troisième montre une scène de « détente » où toute la section se retrouve à chanter Gaby oh Gaby d’Alain Bashung lors d’un karaoké organisé par l’hôtel.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Comme d’habitude, Diaphana soigne le service après-vente. Si Voir du pays ne bénéficie pas d’une édition Haute-Définition, l’image du DVD est pour ainsi dire quasi-exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, à part peut-être durant les séquences sombres où l’image paraît plus douce. Le reste du temps, la clarté demeure frappante, le piqué est affûté, les nombreux gros plans détaillés et la colorimétrie marquée par les décors naturels ocres et le bleu pastel du ciel reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les partis pris esthétiques de la photo signée Jean-Louis Vialard, chef opérateur talentueux ayant officié chez Apichatpong Weerasethakul (Tropical Malady), Christophe Honoré (Dans Paris) et sur le premier film des soeurs Coulin.

Les pistes habituelles stéréo et DD 5.1 offrent un large confort suffisant pour un film de cet acabit. Le deuxième mixage est à privilégier en raison d’une spatialisation très convaincante et une délivrance des dialogues dynamique. Les ambiances naturelles ne sont pas oubliées tout comme le beau soutien des basses qui interviennent aux moments opportuns comme lors de la scène en boîte de nuit. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription pour aveugles et malvoyants.

Crédits images : © Jérôme Prébois – Archipel 35 / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr