Test DVD / L’Arbre de Noël, réalisé par Terence Young

L’ARBRE DE NOËL réalisé par Terence Young, disponible en DVD depuis le 22 novembre 2017 chez LCJ Editions & Productions.

Acteurs : William Holden, Virna Lisi, Bourvil, Madeleine Damien, Mario Feliciani, Friedrich von Ledebur…

Scénario : Terence Young, d’après le roman éponyme de Michel Bataille

Photographie : Henri Alekan

Musique : Georges Auric

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1969

LE FILM

Comme chaque année, depuis qu’il a perdu sa mère, Pascal revient à Paris pour passer les vacances avec son père Laurent. Ils partent en Corse, et au cours d’une promenade en mer, un avion explose au-dessus de leur embarcation et une bombe retenue par un parachute tombe lentement dans l’eau. Laurent décide de ramener Pascal à Paris pour lui faire subir des examens médicaux qui s’avèrent négatifs. Quelques jours plus tard, Pascal revient d’une promenade avec une marque bleuâtre à la tempe.

On l’a vu maintes fois à la télé, certains jeunes spectateurs ont même été traumatisés à vie à cause de ce film, tandis que leurs parents resserraient sur eux leurs étreintes, essayant de dissimuler leurs larmes en prétextant avoir une poussière dans l’oeil. L’Arbre de Noël, librement adapté du roman de Michel Bataille, sort sur les écrans français en octobre 1969, soit près d’un an avant le décès prématuré de Bourvil, qu’un cancer emportera à l’âge de 53 ans. S’il allait trouver son dernier rôle dramatique dans Le Cercle rouge, sa prestation dans L’Arbre de Noël restera son ultime composition bouleversante. Cette coproduction franco-italienne est réalisée par Terence Young, scénariste et metteur en scène britannique, évidemment célèbre pour avoir créé le personnage de James Bond au cinéma avec James Bond 007 contre Dr No Dr. No (1962) et contribué à élaborer l’une des franchises les plus lucratives de l’histoire du cinéma à travers Bons Baisers de Russie From Russia with Love (1963) et Opération Tonnerre Thunderball (1965). Installé dans le Sud de la France, Terence Young enchaîne les tournages et les années 1960 seront d’ailleurs pour lui les plus prolifiques. Après avoir passé le relais à ses confrères pour les futurs opus de 007, il signe la superproduction Opération Opium The Poppy Is Also a Flower (1966) et réunit un casting ahurissant, de Yul Brynner à Angie Dickinson en passant par Marcello Mastroianni et Trevor Howard, très vite suivi de Peyrol le boucanier L’Avventuriero avec Anthony Quinn et Rita Hayworth. Eclectique, il se montre tout aussi à l’aise dans le film d’aventure comme La Fantastique Histoire vraie d’Eddie Chapman Triple Cross que dans le thriller angoissant (le fantastique Seule dans la nuit Wait Until Dark avec Audrey Hepburn, Alan Arkin et Richard Crenna) et le drame historique (Mayerling, qui réunit rien de moins que Catherine Deneuve, Omar Sharif, James Mason et Ava Gardner). L’Arbre de Noël est un drame psychologique, sans doute l’un des films les plus connus du réalisateur, qui parvient à éviter le pathos dans lequel il aurait pu aisément se vautrer et qui repose sur le jeu de ses merveilleux comédiens, Bourvil donc, l’immense William Holden et la magnifique Virna Lisi.

Riche homme d’affaires franco-américain, Laurent Ségur est heureux de présenter sa nouvelle compagne, Catherine Graziani, à son jeune fils, Pascal, dix ans, dont la maman est morte. C’est le début des vacances d’été. Pascal veut les passer en Corse. Là, au bord de la mer, son père et lui voient exploser un avion militaire dont le pilote a pu larguer en parachute le précieux chargement : une bombe atomique. Irradié, Pascal est atteint de leucémie et n’a plus que six mois à vivre. Laurent, qui doit son propre salut au fait d’avoir été sous l’eau au moment fatidique, décide d’offrir à l’enfant la vie la plus merveilleuse qui soit et l’emmène vivre au château qu’il a acheté, où les attendent Verdun, qui fut son compagnon de résistance, et la vieille gouvernante Marinette.

La mémoire est étonnante. Dans mes souvenirs, L’Arbre de Noël n’y allait pas de main-morte sur la maladie qui frappe le petit garçon, par ailleurs très bien interprété par Brook Fuller, qui n’a pas du tout fait carrière par la suite, mais qui était déjà apparu au cinéma dans Le Guépard – Il Gattopardo de Luchino Visconti, six ans auparavant. Alors certes il faut accepter un postulat de départ quelque peu abracadabrant, en l’occurrence l’apparition de cette bombe atomique qui sera responsable de la maladie de Pascal. D’autres scènes pourront paraître peu crédibles, comme celle où Laurent et Verdun se rendent au zoo pour y capturer deux loups (car ils tombent sur des inséparables), afin de réaliser un des souhaits de Pascal. Cependant, L’Arbre de Noël est beaucoup plus fin, sobre et mieux écrit que je le pensais. En fait, William Holden, qui interprète un père aimant, ne sait pourtant pas vraiment comment exprimer son amour à son fils. Les événements précipiteront évidemment certaines choses, mais Laurent, son personnage, profitera essentiellement de sa fortune, pour offrir à Pascal ce qu’il désire, comme un tracteur, pas un jouet, un vrai véhicule.

William Holden (la même année que La Horde sauvage The Wild Bunch de Sam Peckinpah) est magistral, sublime en homme qui restera digne, humble et courageux jusqu’au bout, prêt à tout pour que son fils « qui ne sera jamais une mauviette, qui ne sera jamais rien » soit heureux et choyé jusqu’à son dernier souffle. Prenant sur lui dans un premier temps, Laurent pourra ensuite compter sur le soutien de Verdun (Bourvil donc), grand enfant lui-même, qui passe beaucoup de temps aux côtés de Pascal. Quand Verdun apprend un peu accidentellement la maladie de Pascal, Bourvil est déchirant de vérité, d’humanité, de colère aussi, prouvant cette fois encore, si cela était nécessaire, qu’il était et restera probablement l’un de nos plus grands comédiens dramatiques.

Si la mise en scène est somme toute lambda, paresseuse diront certains, elle s’accorde bien au temps qui passe soit lentement quand le père et le fils profitent enfin du temps passé ensemble, soit rapidement quand la maladie grignote de plus en plus l’âme et le corps de Pascal. Les dialogues sont très beaux, le rythme soutenu, la photo d’Henri Alekan chaude et feutrée. Déconseillé absolument durant les fêtes de Noël si vous ne voulez pas plomber l’ambiance ou remplacer les chocolats par des antidépresseurs, mais si le coeur (qui saigne) vous en dit, revoir L’Arbre de Noël ne fait pas de mal, à part exploser votre budget Kleenex.

LE DVD

Longtemps attendu en DVD, L’Arbre de Noël apparaissait pour la première fois dans les bacs en 2012 chez Studiocanal. Cette édition comprenait la version française, mais aussi la langue anglaise, les deux montages étant très légèrement différents. Après une réédition chez le même éditeur en 2016, L’Arbre de Noël est depuis réapparu dans les bacs dès l’année suivante, sous les couleurs de LCJ Editions à Productions, juste en version française. Le menu principal est fixe et musical.

Seule la bande-annonce, présentée par Bourvil, est disponible en guise de supplément.

L’Image et le son

Il y a vraiment peu de choses à reprocher à ce joli DVD. S’il fallait chipoter, nous dirons que les nombreuses séquences en intérieur sont toutes légèrement ouatées et que le piqué s’en trouve par conséquent amoindri. La définition n’est sans doute pas optimale, mais force est de constater que la propreté est jouissive (divers points blancs subsistent, mais rien de méchant), la colorimétrie élégante, la stabilité de mise, les contrastes soignés, le grain bien géré et les partis-pris esthétiques signés Henri Alekan (Deux hommes en fuite de Joseph Losey, Le Cas du docteur Laurent de Jean-Paul Le Chanois, Juliette ou la clé des songes de Marcel Carné) sont excellemment restitués. Le relief sur les séquences en extérieur est inédit, bref, une jolie redécouverte.

Le mixage français Mono instaure un confort acoustique suffisant. A part un rendu un peu plat sur certaines scènes, les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle.

Crédits images : © LCJ Editions & Productions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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