TRALALA réalisé par Arnaud et Jean-Marie Larrieu, disponible en DVD et Blu-ray le 1er février 2022 chez Pyramide Vidéo.
Acteurs : Mathieu Amalric, Josiane Balasko, Mélanie Thierry, Maïwenn Le Besco, Bertrand Belin, Denis Lavant, Galatea Bellugi, Jalil Lespert…
Scénario : Arnaud et Jean-Marie Larrieu
Photographie : Jonathan Ricquebourg
Musique : Philippe Katerine, Bertrand Belin, Dominique A, Jeanne Cherhal, Etienne Daho & Sein
Durée : 2h01
Date de sortie initiale : 2021
LE FILM
Un chanteur-compositeur en voie de clochardisation voit apparaître une « fille en bleu » sur le parvis de la gare Montparnasse. Frappé par ce qu’il prend pour une apparition mariale, il décide de partir à sa recherche et se rend à Lourdes en quête de la Sainte Vierge. Il y fait la rencontre d’une sexagénaire qui le prend pour son fils, disparu vingt ans auparavant aux États-Unis.
Tiens, revoilà les frères Larrieu ! Cela faisait six ans que nous n’avions plus de nouvelles d’Arnaud et Jean-Marie, depuis le succès honnête de 21 nuits avec Pattie en novembre 2015, sans nul doute l’une de leurs plus grandes réussites. Bien loin des ronflants, interminables et prétentieux Peindre ou faire l’amour (2005) et Les Derniers Jours du monde (2009), les deux frangins avaient déjà retrouvé une véritable énergie avec L’Amour est un crime parfait en 2014, et se souvenaient surtout d’un élément-clé au cinéma, les spectateurs. Pas étonnant que ce dernier ait été leur deuxième plus gros hit au box-office, comme l’a d’ailleurs été 21 nuits avec Pattie, porté par la tornade Karin Viard. C’est malheureusement une autre paire de manche avec Tralala, leur dernier opus en date, pour lequel ils retombent dans leurs travers qui plaisent tant à Télérama, aux Cahiers du Cinéma et aux Inrockuptibles. Du cinéma pour bobos, nombriliste, clinquant comme les néons d’un concept store dans le Marais, incarné par Mathieu Amalric (qui remplace Philippe Katerine, pour qui le rôle avait été écrit et qui a composé les chansons du personnage principal), pour la cinquième fois devant la caméra des Larrieu après le moyen-métrage La Brèche de Roland (2000), Un homme, un vrai (2003), Les Derniers Jours du monde et L’Amour est un crime parfait. Celui-ci écarquille les yeux à outrance derrière son masque anti-Covid (le tournage a eu lieu l’été 2020) et arbore une barbe pouilleuse, en pensant que cela fera rire Jean-Marc Lalanne qui a déjà fait sa critique dithyrambique du film, avant même de l’avoir vu. Mais non, rien n’y fait, Tralala est juste d’une neurasthénie confondante, une succession de séquences où le vide est rempli par des chansons qui feraient taire Eddy de Pretto (c’est pas bête si on y pense) de jalousie en voyant ces acteurs s’égosiller encore plus mal que lui. Bon, vous l’aurez compris, on a détesté. En voulant rendre hommage à Jacques Demy, les Larrieu ne livrent au final qu’une demi-éjac.
Tralala, un artiste quadragénaire, aperçoit une jeune femme (Galatéa Bellugi, la révélation de Keeper de Guillaume Senez) à la Gare Montparnasse qui lui adresse un seul message avant de disparaître : « Surtout ne soyez pas vous-même ». Tralala a t-il rêvé ? Prenant cela comme un message divin, il décide de se rendre à Lourdes (la ville natale des Larrieu) à sa recherche, et finit par la retrouver, mais celle-ci paraît ne plus se souvenir de lui. Déçu par cette révélation qui n’en était pas une, Tralala ne tarde toutefois pas à se trouver une nouvelle vocation. Sur place, une dame, Lili (Josiane Balasko en apoplexie), se convainc que son fils Pat, mystérieusement volatilisé il y a plus de deux décennies est revenu dans la peau de Tralala. Ce dernier joue le jeu et s’intègre dans sa nouvelle famille…
Jean-Marie et Arnaud Larrieu sont des cinéastes à part dans le cinéma français et leur huitième long-métrage ne viendra pas contester cette position. Les réalisateurs sont de retour, mais aussi leurs mauvais penchants, autrement dit en s’adressant à une minorité, loin de la fantaisie psycho-sexuelle singulière et jouissive que représentait 21 nuits avec Pattie. Tralala pâtit (elle était facile j’avoue) d’un casting beaucoup moins attractif, où même la magnifique Mélanie Thierry semble voir son charisme éteint du début à la fin. Le petit numéro de Matthieu Amalric tourne vite en rond, dès la première séquence en fait, dès que Tralala, personnage ô combien irritant, met le nez dehors et que son portrait se dessine au gré de rencontres atypiques.
On préfère les Larrieu délicatement pervers et vénéneux, volontiers paillards, comme ils l’avaient démontré à travers les trois rôles interprétés par Karin Viard, avec laquelle ils avaient trouvé sans doute une muse. Il n’y a rien de drôle ou d’empathique dans Tralala, où les acteurs paraissent aussi inexpressifs que des poupées de chiffon, manipulées dans un petit théâtre sans âme, éclairé par des spots de couleurs fluorescentes, tandis qu’une musique, forcément électro (Bertrand Belin, sur le point de cra(ck)er avec son balai bien placé), finit par faire saigner les tympans. La looooongue séquence de fiesta est un supplice et emprunte d’ailleurs beaucoup aux Côtelettes de Bertrand Blier, le côté anar en moins, l’ennui en plus.
Certes, on ne pourra pas reprocher aux Larrieu d’échapper aux cases traditionnelles en jouant sur de multiples registres et en se frottant toujours aux limites de l’inclassable, mais les cinéastes laissent les trois-quarts de leur audience sur le bas-côté. Les plus résistants ne seront même pas récompensés au bout du compte, puisque Tralala se termine comme ça, comme il avait démarré, sur rien. Voici donc le prototype du film déjà retiré des salles, alors que les affiches sont toujours présentes dans les couloirs du métro parisien. La seule chose qui nous a finalement épatés, c’est que nous avons découvert que nous pouvions réellement visionner un (mauvais) film en dormant littéralement les yeux ouverts. Et ça franchement, chapeau !
LE BLU-RAY
Les films des frères Larrieu sont sortis chez des éditeurs divers et variés, de Pathé à Gaumont, en passant par Wild Side, Diaphana, Arte et TF1 Studio. Tralala fait son apparition dans les bacs en DVD et Blu-ray chez Pyramide Vidéo. Le visuel reprend le visuel de l’affiche du film. Le menu principal est élégant, animé et musical.
Tralala s’accompagne d’une rapide présentation des frères Larrieu (4’), enregistrée à Lourdes (devant le décor de la grotte reconstituée pour le film Bernadette de Jean Delannoy en 1988), où ils reviennent sur leur enfance, sur leurs influences (Jacques Demy bien évidemment), sur la genèse du film, sur leurs intentions et leurs partis-pris.
Puis, Arnaud et Jean-Marie Larrieu reviennent pendant un peu plus de cinq minutes, pour présenter le court-métrage Madonna à Lourdes, qu’ils ont réalisé en 2001, des suites d’une commande de la FRAC Nouvelle-Aquitaine. Les Larrieu expliquent que la comédienne Hélène Fillières, leur avait fait part de son désir de travailler avec eux et qu’ils ont donc pensé immédiatement à elle pour leur film semi-documentaire.
Madonna à Lourdes (24’) : Elle mesure 1m70, pèse 10 kilos, s’appelle Madonna et elle est en plâtre : c’est une réplique exacte de Notre-Dame de Lourdes, sauf qu’elle est toute jaune et que c’est l’œuvre de l’artiste allemande Katharina Fritsch. Hélène accompagne Madonna à Lourdes et doit décider de l’endroit où elle apparaîtra aux regards. Un film évidemment curieux, qui n’a pas grand intérêt, mais qui a au moins le mérite de passer très rapidement.
L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.
L’Image et le son
Pour Tralala, les frères Larrieu ont fait appel au chef opérateur Jonathan Ricquebourg, directeur de la photographie de Mange tes morts de Jean-Charles Hue, L’Angle mort de Patrick-Mario Bernard et Shéhérazade de Jean-Bernard Marlin. Des partis-pris chatoyants, solidement pris en charge et restitués à travers ce magnifique Blu-ray avec des couleurs estivales, une luminosité de tous les instants, un piqué pointu, des contrastes denses, des détails foisonnants sur le cadre large, un relief évident du début à la fin. Le Blu-ray est au format 1080p.
L’éditeur livre une piste DTS-HD Master Audio 5.1 souvent saisissante. L’ampleur musicale est immersive, toutes les enceintes sont mises à contribution et le caisson de basses y participe activement. La pureté acoustique de cet écrin acoustique est indéniable, les dialogues sont délivrés avec force sur la centrale tandis que les frontales exsudent leurs effets avec ardeur. Evidemment, ce sont les séquences musicales qui sont les mieux loties. Une piste Stéréo dynamique, une autre au format Audiodescription, sans oublier les sous-titres anglais et français destinés aux spectateurs sourds et malentendants, sont aussi inscrits au programme.