Test Blu-ray / Paiement Cash, réalisé par John Frankenheimer

PAIEMENT CASH (52 Pick-Up) réalisé par John Frankenheimer, disponible en DVD et Combo Blu-ray + DVD le 16 octobre 2021 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Roy Scheider, Ann-Margret, Vanity, John Glover, Robert Trebor, Lonny Chapman, Kelly Preston, Doug McClure…

Scénario : John Steppling, d’après le roman d’Elmore Leonard

Photographie : Jost Vacano

Musique : Gary Chang

Durée : 1h50

Date de sortie initiale: 1986

LE FILM

Un industriel américain, Harry Mitchell, mène une vie très active entre son entreprise florissante et sa femme Barbara qui « manage » un homme politique. Mais Harry s’est entiché d’une jeune mannequin et le jour où il décide de rompre, un maître-chanteur et deux complices lui projettent une cassette contenant des preuves irréfutables de cette aventure. Harry décide, après une explication très franche avec Barbara, de ne pas céder…

Paiement Cash 52 Pick-Up, ou quand John Frankenheimer (1930-2002), le réalisateur du Prisonnier d’Alcatraz (1962), Un crime dans la tête (1962), Le Train (1964) et Grand prix (1966), French Connection 2 (1975) se mettait au service de la légendaire Cannon Films ! Contrairement à À armes égalesThe Challenge (1982), film de ninja et d’action de seconde zone dans lequel il était difficile de reconnaître la griffe du metteur en scène, Paiement Cash est comme qui dirait un pot-pourri de tout le bagage technique de John Frankenheimer, qui se fait plaisir avec ce thriller de série B (de luxe), adapté du roman Fifty-Two Pickup de l’immense Elmore Leonard, publié en 1974, qu’il transpose pour ainsi dire page par page, parfois à la réplique près, juste en délocalisant le lieu de l’action de Detroit à Los Angeles. S’il n’a connu aucun succès dans les salles, 52 Pick-Up est rapidement devenu culte et demeure par ailleurs un des derniers bons films où Roy Scheider tenait le haut de l’affiche. Le comédien retrouvera John Frankenheimer quatre ans plus tard pour La Quatrième Guerre The Fourth War. En l’état, Paiement Cash reste un savoureux divertissement, solidement réalisé et dont l’univers malsain dans lequel se déroule l’intrigue annonce 8 Millimètres de Joel Schumacher.

Harry Mitchell, industriel de Los Angeles, a une vie bien réussie (une belle voiture, une grande maison et une femme aimante). Sa femme Barbara nourrit également des ambitions politiques, notamment celle d’intégrer le conseil municipal de la ville. Mais tout chavire quand trois hommes viennent le trouver avec une vidéocassette de lui en plein ébat avec sa jeune maîtresse, Cini. Ils exigent de lui une rançon de 100.000 dollars par an. Pour protéger les ambitions politiques de sa femme, Harry ne va pas trouver la police mais veut régler l’affaire lui-même. De plus, décidé à ne pas céder au chantage, il essaie de monter les trois maîtres-chanteurs les uns contre les autres. Mais le chef de ce petit groupe, légèrement sociopathe, répond avec une grande violence à cette tentative.

Yoram Globus et Menahem Golan sont malins. Détenteurs des droits d’adaptation au cinéma du roman Fifty-Two Pickup d’Elmore Leonard, ils produisent en 1984 L’Ambassadeur : Chantage en Israël The Ambassador, réalisé par Jack Lee Thompson. Si le casting constitué de Robert Mitchum, Ellen Burstyn, Rock Hudson, Fabio Testi et Donald Pleasence est on ne peut plus attractif, le film s’éloignait totalement du livre. Pour cette nouvelle mouture, le scénariste John Steppling (Animal Factory de Steve Buscemi) revient à la trame du roman original, à tel point qu’Elmore Leonard est également crédité au scénario, sans avoir participé au film. Les fans de l’écrivain seront aux anges, car bien avant Barry Sonnenfeld (Get Shorty), Quentin Tarantino (Jackie Brown), Paul Shrader (Touch), Steven Soderbergh (Hors d’atteinte), F. Gary Gray (Be Cool) et John Madden (Killshot), John Frankenheimer s’emparait de cette matière, en restituant tout ce qui en fait le charme, la spécificité et l’âme de ses personnages.

52 Pick-Up n’est pas une œuvre « aimable », dans le sens où le protagoniste, Harry Mitchell, génialement interprété par Roy Scheider, n’a rien d’attachant et demeure un être froid, distant, suffisant. Trompant son épouse (la belle Ann-Margret) avec une jeune femme de 22 ans (Kelly Preston, superbe et par ailleurs dévêtue) et pris par ses fonctions de chef-entrepreneur, Mitchell voit son quotidien bouleversé quand il devient la cible d’un trio de salopards, qui se mettent à le faire chanter. Ils lui promettent de ne rien divulguer à sa femme – qui se lance en politique – s’il accepte de leur verser plus de cent mille dollars par an. Ne prenant pas au sérieux ces menaces, car bien décidé à ne pas se laisser faire, il se retrouve à nouveau entre leurs mains et découvre alors une machination diabolique, montée de toutes pièces par ses ravisseurs. Ceux-ci ont en effet assassiné Cini, la maîtresse de Mitchell, en se faisant passer pour lui, en utilisant son arme, tout en filmant le meurtre. Une séquence très difficile, magistralement filmée et à laquelle on repense encore bien après le film.

Si le reste du long-métrage est somme toute plus classique, Paiement Cash retrouve un peu cette sève qui faisait la réputation de la Cannon Films, puisque Mitchell, dans un désir de vengeance, va réussir à mener son enquête de son côté. Il plonge dans l’univers des tueurs, lié à l’industrie du cinéma pornographique (ce qui nous vaut un défilé de stars du genre, comme Ron Jeremy), et monte ses maîtres-chanteurs les uns contre les autres, sans prendre la pétoire – étant un ancien de la guerre de Corée, on aurait pu s’y attendre – comme l’aurait fait un certain Charles Bronson. Parmi ces derniers, se distingue John Glover, explosif dans le rôle d’Alain Raimy (Annie Hall de Woody Allen, plus connu pour son rôle de Daniel Clamp dans Gremlins 2, la nouvelle génération de Joe Dante), frappadingue à souhait et dangereux, qui vole presque la vedette à Roy Scheider à chaque apparition. Le reste du casting est à l’avenant, et l’on se souviendra aussi de la sublime Vanity, actrice et chanteuse canadienne, que l’on avait déjà vu dans Le Monstre du train de Roger Spottiswoode et qui tiendra plus tard le rôle féminin principal dans Action Jackson de Craig R. Baxley. La scène où Clarence Williams s’en prend à elle et la torture à l’aide d’un oreiller pour la faire parler marque les esprits. Le réalisateur parvient à maintenir une tension palpable du début à la fin, sans aucun temps mort, avec même quelques touches d’humour.

Avec son scénario solidement charpenté, la beauté de la photographie de Jost Vacano (Le Choix du destin Soldaat van Oranje, Robocop et Spetters de Paul Verhoeven, Das Boot de Wolfgang Petersen), sa violence étonnante et sèche, l’investissement de ses comédiens et une mise en scène au cordeau, Paiement Cash est une valeur sûre du polar hard-boiled, sombre et poisseux, des années 1980.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Il fut un temps, en octobre 2004 plus précisément, où Paiement Cash était disponible en DVD chez MGM. Depuis, ce titre a sombré en fond de catalogue, au point d’être oublié par tous. Jusqu’au jour où Sidonis Calysta a décidé d’exhumer 52 Pick-Up pour lui redonner une chance à travers une nouvelle édition DVD et même un combo Blu-ray + DVD. Visuel clinquant, menu principal animé et musical.

Il apparaît de plus en plus évident qu’Olivier Père ait remplacé feu Bertrand Tavernier depuis quelques titres édités par Sidonis Calysta. Cela n’est évidemment pas pour nous déplaire, car nous adorons le bonhomme depuis toujours. Comme d’habitude, le directeur d’Arte Cinéma France livre une remarquable présentation du film qui nous intéresse aujourd’hui, Paiement Cash (43’). Attention aux spoilers indique un carton en introduction, car de nombreux éléments, dont le dénouement sont dévoilés ici. Olivier Père évoque pêle-mêle l’adaptation du roman d’Elmore Leonard (« l’une des plus fidèles au style, au déroulement de l’histoire, à la caractérisation des personnages et aux dialogues de l’écrivain »), la carrière de ce dernier et ses rapports étroits avec le cinéma, la mise en route du film, les conditions de tournage, les œuvres précédentes de John Frankenheimer (« le cinéaste le plus doué de sa génération » dit Olivier Père), le casting, tout en mettant en relief la qualité de la mise en scène sur Paiement Cash, où « le réalisateur était en pleines possessions de ses moyens ». Puis, le critique et journaliste indique pourquoi 52 Pick-Up s’inscrit logiquement dans la filmographie de John Frankenheimer, par ses thèmes abordés, ainsi que par ses partis-pris.

L’éditeur propose ensuite un long documentaire rétrospectif de près d’une heure, consacré à la carrière de John Frankenheimer. Tiré de la série The Directors et réalisé en 1997, le cinéaste y revenait sur quelques-unes de ses œuvres les plus célèbres, tout en voyant sa vie retracée par l’intermédiaire d’archives diverses et variées, ainsi que des extraits de ses longs-métrages. The Films of John Frankenheimer compile ainsi les témoignages de proches, amis et comédiens qu’il a fait tourner, d’où la présence au générique de grands noms comme Kirk Douglas, Frederic Forrest, Samuel L. Jackson, Angela Lansbury, Ann-Margret, Roy Scheider, Frank Sinatra et Rod Steiger dont le nom est écorché (Stieger…). Sa carrière envisagée de joueur de tennis ou même de pilote automobile, ses rapports avec les acteurs, son travail pour la télévision et bien d’autres éléments sont abordés au cours de ce module qui devrait ravir les fans et donner envie aux autres de creuser la filmographie de John Frankenheimer.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

La première bobine, celle du générique, fait peur avec son piqué complètement émoussé et surtout ses couleurs éteintes. Puis, cela s’arrange heureusement après les credits, même si les visages demeureront étrangement rosés jusqu’à la fin. Le master HD n’est sûrement pas de première jeunesse et il s’agit probablement de la même copie sortie en 2015 chez Kino Lorber. C’est globalement propre, la gestion des contrastes est correcte, bien qu’aléatoire, la texture argentique préservée, mais les détails manquent à l’appel. L’ensemble est stable et le Blu-ray – au format 1080p -dans la moyenne +.

La version française (au doublage excellent mené par Jacques Thébault, Perrette Pradier, Maïk Darah, Dominique Collignon-Maurin…que des pointures) est plutôt sourde et manque singulièrement d’ardeur. En revanche, la piste anglaise DTS-HD Master Audio 2.0 s’en tire bien avec une clarté des dialogues, des effets solides et une belle restitution de la musique. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Sidonis Calysta / MGM / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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