Test Blu-ray / Moon 44, réalisé par Roland Emmerich

MOON 44 réalisé par Roland Emmerich, disponible en Blu-ray le 10 octobre 2022 chez Extralucid Films.

Acteurs : Michael Paré, Lisa Eichhorn, Dean Devlin, Brian Thompson, Malcolm McDowell, Stephen Geoffreys, Leon Rippy, Jochen Nickel…

Scénario : Dean Heyde & Oliver Eberle, d’après une histoire originale de Roland Emmerich, Oliver Eberle, Dean Heyde & P.J. Mitchell

Photographie : Karl Walter Linderlaub

Musique : Joel Goldsmith

Durée : 1h39

Année de sortie : 1990

LE FILM

En 2038, les ressources naturelles de la Terre sont quasiment épuisées. La lutte est âpre pour s’approprier les dernières portions minérales disponibles sur les autres planètes. Des corporations se créent. Lorsque l’une d’elles voit disparaître ses robots, elle fait appel à des prisonniers pour la défendre. Au sein de l’équipe, la tension monte.

Moon 44 est le film de transition, la passerelle qui mènera Roland Emmerich de son Allemagne natale à Hollywood, où il deviendra le roi du box-office et le spécialiste de la destruction massive avec des titres aussi populaires qu’Independence Day, Godzilla, Le Jour d’après et 2012, sans doute ses quatre plus gros hits. Juste avant Stargate, la porte des étoiles et même Universal Soldier, le réalisateur tournait Moon 44 dans un hangar dans la banlieue de Stuttgart, avec un budget d’environ 4,5 millons d’euros, une somme « dérisoire » pour un film de science-fiction supposé se dérouler dans l’espace, mais c’était sans compter le système D de l’équipe technique entourant Roland Emmerich et l’imagination déjà débordante de ce dernier, qui contre toute attente livre un formidable divertissement. Fait avec les moyens du bord, mais aussi et surtout avec une folle envie de cinéma, une passion contagieuse et beaucoup de coeur, Moon 44 demeure un très bon spectacle et extrêmement généreux en action.

Dans les années 2030, les terriens sont à la recherche de nouvelles sources d’énergies après avoir asséché celles de la planète. Des multinationales ont pris le contrôle de la galaxie et se battent les unes contre les autres pour accéder aux planètes minières. Une bataille majeure concerne la planète Moon 44, une base d’opération dans la zone extérieure. C’est la seule installation encore contrôlée par la Galactic Mining Corporation. Les Moon 46, 47 et 51 ont récemment été dépassées par les robots de combat de la Pyrite Defence Company. Galactic Mining possède son propre système de défense avec des hélicoptères capables d’opérer dans les atmosphères violentes des lunes, mais il a été annulé car trop de pilotes sont morts durant l’entraînement. La compagnie envoie de nouveaux navigateurs sur Moon 44 pour assister les pilotes. Cependant, il y a toujours une pénurie de pilotes. La compagnie est alors obligée d’utiliser des prisonniers.

Le moins que l’on puisse dire en voyant Moon 44, c’est que Herr Emmerich était déjà très ambitieux à l’âge de 35 ans et voyait à travers ce projet une opportunité de se faire remarquer de l’autre côté de l’Atlantique. Ayant trois longs métrages à son actif, Le Principe de l’arche de Noé Das Arche Noah Prinzip (1984), en l’occurrence son film de fin d’étude à la Hochschule für Fernsehen und Film München et à l’époque le film d’étude allemand le plus cher jamais produit, Joey (1985), très influencé par E.T. l’extra-terrestre, Poltergeist et Star Wars, et Hollywood-Monster (ou Ghost Chase), sorti en 1987, centré sur une demeure hantée, Roland Emmerich en a sous le capot et rêve de conquérir la capitale mondiale du cinéma. Avec Moon 44, il passe la vitesse supérieure, à tel point que ce long-métrage deviendra pour ainsi dire une pierre angulaire de sa filmographie, dans lequel on peut retrouver tout ce qui composera son cinéma à venir. Beaucoup de scènes font d’ailleurs curieusement écho avec certains passages d’Independence Day notamment, à l’instar de la plongée dans un canyon et la poursuite à bord d’un engin volant qui s’ensuit, l’héroïsme exacerbé, des dialogues pesants, la notion de sacrifice, le tout accompagné de gros plans emphatiques, une musique grandiloquente et diverses relations entre mecs soulignées par une homosexualité latente.

Moon 44 est un film qui a de la gueule, avec une photographie léchée signée Karl Walter Lindenlaub, futur chef opérateur de Jan de Bont (Hantise), Paul Verhoeven (Black Book) et Michael Caton-Jones (Le Chacal), que Roland Emmerich emmènera en Californie pour ses trois premiers opus américains. L’autre belle réussite de Moon 44 provient des décors d’Oliver Scholl (Edge of Tomorrow, Suicide Squad, Venom, Spider-Man : Homecoming) très inspirés par ceux de Blade Runner et d’Alien, comme c’est le cas pour les effets spéciaux (des maquettes principalement), qui fonctionnent encore pas mal du tout et que l’on doit à Volker Engel, qui lui aussi accompagnera Roland Emmerich sur ID4, Godzilla, 2012 et White House Down. Enfin, la musique de Joel Goldsmith (et non pas de son père Jerry), compositeur de L’Homme aux deux cerveauxThe Man with Two Brains de Carl Reiner et Kull le Conquérant Kull the Conqueror de John Nicolella s’amuse à plagier quelques classiques du genre. De son côté, Roland Emmerich remplit son cadre large de machines en tous genres, exploite sous tous les angles le décor mis à sa disposition et prend soin de mettre son casting en valeur, de Michael Paré (Les Rues de feu Streets of Fire de Walter Hill, Philadelphia Experiment de Stewart Raffill) à Lisa Eichhorn (La BlessureCutter’s Way d’Ivan Passer), sans oublier le mythique Malcolm McDowell et la mâchoire carrée de Brian Thompson (Terminator, Cobra, Full Contact, Futur immédiat, Los Angeles 1991). Mais tous se font voler la vedette par Dean Devlin, Tyler dans le film, impeccable et même émouvant, avant que le comédien devienne le grand associé de Roland Emmerich, puisqu’il cosignera avec lui tous ses scénarios d’Universal Soldier à Godzilla.

Étrangement, Moon 44 semble avoir mieux vieilli que certains blockbusters du cinéaste, probablement en raison de son côté plus intimiste (on pense sans arrêt à Outland de Peter Hyams, aussi bien sur le fond que sur la forme) et de l’émotion présente, du temps ou Roland Emmerich n’était pas préoccupé à caresser le bon américain dans le sens du poil, en chantant The Star-Spangled Banner, une main sur le coeur et la larme à l’oeil, en faisant du soldat US le sauveur de l’humanité. En tout cas, Moon 44 reste un digne représentant de l’entertainment des années 80, qui conserve un charme fou doublé d’un solide capital de sympathie.

LE BLU-RAY

En France, Moon 44 avait déjà voyagé d’un éditeur à l’autre, chez Edito et Antartic, qui proposaient le film de Roland Emmerich en DVD, uniquement en version française. Qu’à cela ne tienne, les grands manitous d’Extralucid Films ont tout simplement décidé de présenter Moon 44 en Haute-Définition, leur 12è titre de la collection ExtraCulte ! Le disque repose dans un slim Digipack – du plus bel acabit – à deux volets, glissé dans un fourreau cartonné au visuel aussi élégant que superbe. Le menu principal est animé et musical.

Pour cette sortie française de Moon 44, Roland Emmerich a accepté de répondre aux questions d’Extralucid Films à travers une interview (11’) réalisée en visioconférence. Toujours prolixe et généreux quand il défend ses films, le cinéaste revient (en anglais) sur la genèse de Moon 44, ses intentions (« faire un vrai film de science-fiction »), partage ses souvenirs liés au tournage, évoque la création des effets spéciaux (directs) et le système D auquel l’équipe devait avoir recours en raison d’un budget limité, ainsi que le casting et sa passion pour l’espace (et ce qu’il y a au-delà). Dans la dernière partie, Roland Emmerich parle de ses premiers pas dans le cinéma hollywoodien, qu’il allait rejoindre grâce à Moon 44, et se dit très heureux de la sortie de ce dernier en Blu-ray en France.

Place ensuite à l’excellent Fabien Mauro, auteur/essayiste (L’Écran Fantastique), qui nous présente Moon 44 et plus largement des débuts de Roland Emmerich au cinéma, tout en replaçant le film qui nous intéresse aujourd’hui dans la globalité de la carrière du réalisateur (25’30). Une intervention on ne peut plus sympathique et enrichissante, extrêmement bien menée et passionnante, solidement travaillée, qui donne moult informations sur la période allemande de Roland Emmerich, ses références (essentiellement américaines, surtout le cinéma de Steven Spielberg et de George Lucas), sur le casting de Moon 44, la création des décors et des effets visuels, ainsi que sur la sortie du film.

Retour à l’équipe de Moon 44, puisque se succèdent deux entretiens, le premier avec Volken Engel (23’), superviseur des effets spéciaux, le second avec Oliver Scholl (18’), chef décorateur. Les interviewés répondent peu ou prou aux mêmes questions, à savoir comment s’est passée leur rencontre avec Roland Emmerich (qu’ils suivront aux Etats-Unis), quel a été leur rôle sur Moon 44 (l’occasion pour eux de parler de leur parcours respectif), comment s’est déroulé le tournage, comment leur travail a-t-il évolué avec l’arrivée du numérique, quelles sont leurs influences. Diverses photos de plateau viennent illustrer ces deux modules blindés d’éclaircissement sur le pourquoi du comment de Moon 44.

Enfin, l’éditeur a pu recueillir les propos de Michael Paré, qui à l’aide de son smartphone a pu s’enregistrer directement lui-même afin de partager ses souvenirs liés au tournage de Moon 44 (6’). Le comédien en profite aussi pour saluer le public français dans une vidéo à part (1’20), dans laquelle il déclare qu’il adorerait travailler chez nous.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos de plateau.

L’Image et le son

Extralucid Films soigne le Blu-ray de Moon 44 et opère un sérieux lifting numérique. Si la photo du chef opérateur Karl Walter Lindenlaub fait la part belle aux ambiances bleutées et métallisées difficiles à restituer, l’encodage est de haute tenue et rétablie les partis-pris originaux en bénéficiant d’une promotion HD indéniable. Les détails sont très appréciables, on y voit par exemple les visages ruisselants de sueur des comédiens, le piqué et la clarté sont aléatoires mais dans l’ensemble nets, la colorimétrie retrouve une nouvelle jeunesse, le grain argentique est préservé (quelques plans plus lisses ceci dit) et les contrastes affichent une densité inattendue. L’ensemble est d’une propreté absolue, stable, les quelques rares scories aperçues demeurent subliminales, et le grain est respecté.

Les pistes DTS-HD Master Audio 2.0 anglaise et française ne sont pas du même acabit, la seconde surpassant étonnamment la première. Néanmoins, la version originale jouit d’une fluidité rarement prise en défaut, les dialogues demeurent solides, les ambiances précises et la musique est très habilement restituée. Le doublage français (Michel Vigné, Luq Hamet, Daniel Gall, Daniel Beretta) est très réussi, les voix ont du coffre, l’ensemble ne manque sûrement pas de peps, les effets annexes sont nombreux et riches et les scènes d’action sont plus percutantes qu’en VO.

Crédits images : © Extralucid Films / Centropolis Film Productions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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