Test Blu-ray / Les Bonnes Étoiles, réalisé par Hirokazu Kore-eda

LES BONNES ÉTOILES (Beurokeo – 브로커) réalisé par Hirokazu Kore-eda, disponible en DVD & Blu-ray le 7 avril 2023 chez HK Vidéo

Acteurs : Song Kang-ho, Gang Dong-won, Bae Doona, Lee Ji-eun, Lee Joo-young, Kang Gil-woo, Park Hae-joon, Im Seung-soo…

Scénario : Hirokazu Kore-eda

Photographie : Hong Kyung-pyo

Musique : Jung Jae-il

Durée : 2h10

Date de sortie initiale : 2022

LE FILM

Par une nuit pluvieuse, une jeune femme abandonne son bébé. Il est récupéré illégalement par deux hommes, bien décidés à lui trouver une nouvelle famille. Lors d’un périple insolite et inattendu à travers le pays, le destin de ceux qui rencontreront cet enfant sera profondément changé.

Le japonais Hirokazu Kore-eda est de retour ! Après son escapade parisienne pour La Vérité, qui réunissait Catherine Deneuve, Juliette Binoche et Ethan Hawke, le réalisateur ne revient pas dans son pays natal, mais bifurque pour la première fois en Corée du Sud. Les Bonnes Étoiles, n’atteint sans doute pas la réussite d’Une affaire de famille (Palme d’or à Cannes en 2018) ou de Tel père, tel fils (Prix du jury à Cannes en 2013), mais touche cette fois encore en plein coeur les spectateurs, grâce à un récit toujours délicat, une mise en scène élégante et surtout un casting exceptionnel, mené par l’immense Song Kang-ho, récompensé sur la Croisette par le Prix d’interprétation masculine. Également Prix du jury œcuménique, on ressort comblés, bouleversés et parcouru d’un sentiment de plénitude de cette comédie-dramatique, oui on rit aussi souvent, dont certaines images (splendides) et séquences reviennent en mémoire bien après la projection. Le maître nippon a encore frappé.

Dans la nuit, une jeune femme abandonne son bébé devant une boîte de dépôt prévue à cet effet. Deux courtiers récupèrent illégalement l’enfant pour tenter de le vendre à une famille sur le marché noir de l’adoption. Mais lorsque la mère revient après avoir réfléchi, elle les découvre et décide de partir avec eux en road-trip pour aller à la rencontre des potentiels nouveaux parents de son nourrisson. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que la police est aussi sur le pont pour démanteler ce trafic d’enfants.

La famille, de sang, mais pas seulement, recomposée aussi, essentiellement, est au coeur des Bonnes Étoiles, qui est donc une œuvre sud-coréenne, écrite, réalisée et montée par Hirokazu Kore-eda, dont le tournage s’est déroulé durant la période de Covid-19 et rétrospectivement la seconde du cinéaste à être filmée en dehors du Japon. La filiation irrigue les veines de Broker (titre international) et réunit des individus qui ont connu l’abandon et qui décident de lutter contre ce traumatisme toujours présent, en aidant de pauvres âmes égarées à trouver celles qui pourront les prendre sous leurs ailes. En Corée du Sud comme en Belgique, il existe les boîtes à bébés, dispositif qui permet aux mères en détresse d’abandonner leur enfant de manière sécurisée et anonyme. Il s’agit du point de départ des Bonnes Étoiles, sujet qui a donné envie à Hirokazu Kore-eda d’écrire le film, qui s’ouvre d’ailleurs sur cet acte désespéré commis par une jeune maman appelée So-young, magnifiquement incarnée par IU, de son vrai nom Lee Ji-eun, chanteuse de K-pop, auteur-compositrice, actrice, guitariste, danseuse et présentatrice de télévision sud-coréenne, qui crève l’écran dans son premier rôle au cinéma. Suite à cet abandon (l’accouchement sous X n’est pas autorisé en Corée du Sud), elle fera la rencontre de Sang-hyeon et de son complice Dong soo, spécialisés dans les rapts d’orphelins, qu’ils revendent à des couples qui n’arrivent pas à avoir d’enfants ou qui ont connu un drame ayant emporté le leur. Le premier est interprété par Song Kang-ho, sans aucun doute l’un des meilleurs comédiens du monde, vu dans Défense d’atterrir, The Age of Shadows, Thirst, Le Bon, la Brute, le Cinglé, The Host, Memories of Murder, Snowpiercer, le Transperceneige, Parasite, Sympathy for Mister Vengeance…et on pourrait continuer longtemps à énumérer ses plus grands films. L’acteur qui a collaboré avec Hong Sang-soo, Park Chan-wook, Bong Joon-ho et Kim Jee-woon aura donc été récompensé par le Graal ultime à Cannes, grâce à sa prestation virtuose, en parvenant à rendre sympathique un personnage pourtant criminel, plongé dans des affaires d’enlèvements et de ventes d’enfants abandonnés.

À ses côtés, Gang Dong-won, dernièrement dans Peninsula de Yeon Sang-ho, la suite du très remarqué Dernier train pour Busan, lui aussi magistral et très émouvant le rôle de Dong soo, qui à quarante ans vit avec le trauma d’avoir été abandonné par sa mère et qui s’est fixé comme objectif d’aider les plus jeunes qui se sont retrouvés dans la même situation. Cette famille comme qui dirait « arrangée » taille donc la route avec un petit bout de chou à bord et un petit garçon qui s’est littéralement incrusté à la partie, un road trip inattendu, suivie de près par l’inspectrice Soo-jin (la superbe Bae Doona, qui collabore avec Kore-eda près de quinze ans après Air Doll), qui souhaite les arrêter en flagrant-délit, quitte à provoquer elle-même cet événement avec sa consœur Lee (Lee Joo-young). Mais tous se rendront compte que rien n’est simple, et surtout pas la famille, qui ne saurait se définir uniquement par le sang.

Nouvel opus profondément humaniste, Les Bonnes étoiles confirme la finesse et l’intelligence de celui qui est souvent considéré comme le digne héritier de Yasujirō Ozu. S’il lui manque ce petit je-ne-sais-quoi pour le porter totalement aux nues, le quatorzième long-métrage de fiction de Kore-eda n’en reste pas moins puissant, entêtant, troublant, drôle et remuant.

LE BLU-RAY

Les Bonnes étoiles apparaît dans les bacs en Blu-ray chez HK Vidéo. Le visuel de la jaquette reprend celui d’une des affiches d’exploitation. Le menu principal est très légèrement animé et musical.

Le premier bonus est une interview du réalisateur, qui durant 15 minutes aborde la genèse des Bonnes Étoiles, à savoir la découverte des boîtes d’abandon, destinées à recueillir les nourrissons des mères en détresse, phénomène dix fois plus répandu en Corée du Sud qu’au Japon. La première ébauche du scénario remonte à 2016, à laquelle viennent se greffer le sujet de l’adoption, ainsi que la mutation du modèle familial (« le schéma des trois générations habitant sous le même toit n’existait plus… »). Le rapport au spectateur, la psychologie des personnages (« il ne fallait pas en faire de bons samaritains, ce sont des gens qui font quelque chose de mal et qui sont conscients de cela »), les films qui ont pu l’influencer même s’il n’aime pas trop ce terme (Un monde parfait de Clint Eastwood, Le Fils du désert de John Ford), la barrière de la langue (Hirokazu Kore-eda parlant peu coréen), la distribution, l’utilisation de l’espace, les lieux de tournage, les difficultés liées aux prises de vue durant l’épidémie de COVID-19, la récurrence de la mer (et des gens filmés de dos) sont aussi les points abordés au cours de cet entretien.

On retrouve après quatre featurettes (pour une durée totale de 12 minutes environ), axées sur la venue de l’équipe du film au Festival de Cannes en 2022 (première mondiale, photocall, conférence de presse, montée des marches, cérémonie de clôture), sur la présentation des personnages par les acteurs et le réalisateur, les conditions de tournage et les thèmes du film.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

On ne saurait faire mieux. Le cinéaste Kim Jee-woon collabore avec le chef opérateur Hong Kyung-pyo (Mother, The Strangers, Burning, Parasite). Les partis pris esthétiques originaux sont magnifiquement rendus à travers ce Blu-ray d’une folle élégance. Le piqué est affûté, les contrastes fabuleusement riches, les détails sont abondants aux quatre coins du cadre, le relief est omniprésent, les couleurs bigarrées, tandis que le codec AVC consolide l’ensemble avec fermeté.

Deux pistes au choix, coréenne et française, en DTS-HD Master Audio 5.1. La version originale s’avère tout d’abord dynamique, spatialisée avec une ardeur inattendue, mettant notamment en valeur les ambiances naturelles. Les latérales sont actives dès la première image, les frontales sont également percutantes et le spectateur est immédiatement plongé dans le récit. Les séquences en intérieur et donc plus intimistes sont évidemment plus feutrées, reposent plus sur les enceintes avant. En revanche, les dialogues sont percutants sur la centrale, que vous ayez opté pour la version française (facultative) ou la piste coréenne. L’immersion est concrète, entière, implacable.

Crédits images : © Metropolitan Video / Metropolitan FilmExport / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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