Test Blu-ray / Le Conte du tsar Saltan, réalisé par Alexandre Ptouchko

LE CONTE DU TSAR SALTAN (Skazka o tsare Saltane – Сказка о царе Салтане) réalisé par Aleksandr Ptushko, disponible le 7 janvier 2020 en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre chez Artus Films

Acteurs : Vladimir Andreyev, Larisa Golubkina, Oleg Vidov, Kseniya Ryabinkina, Nikolai Barmin, Yakov Belenkiy, Nina Belyayeva, Boris Bityukov…

Scénario : Igor Gelein, Aleksandr Ptushko

Photographie : Igor Gelein, Valentin Zakharov

Musique : Gavriil Popov

Durée : 1h22

Année de sortie : 1967

LE FILM

Le tsar Saltan choisit son épouse parmi trois sœurs. Tandis que la cadette devient tsarine, les deux aînées, pleines de jalousie, font tout pour lui nuire. Alors que le tsar est parti guerroyer, la tsarine met au monde le prince Gvidon. Avec l’aide du traître conseiller, les deux sœurs parviennent à se débarrasser de la mère et du fils en les jetant à la mer dans un tonneau. Naufragé sur l’île de Bouïane, le prince grandit à une vitesse déconcertante. Un jour, il sauve un cygne des griffes d’un aigle. Le cygne est en fait une princesse victime d’un sort, et va l’aider à faire justice.

Quelle merveille ! Le Conte du tsar Saltan est l’adaptation du long conte écrit en vers, rythmés et rimés par Alexandre Pouchkine en 1931, réalisée par Alexandre Ptouchko (1900-1973) et sortie en 1967. Le cinéaste soviétique, également scénariste, producteur, dessinateur, sculpteur, marionnettiste, directeur artistique, peintre, créateur d’effets spéciaux et directeur de la photographie, ancien journaliste, décorateur de théâtre et acteur, signait ici son avant-dernier film. Le spécialiste russe de l’animation met tout son talent dans ce film d’aventures immensément poétique, remplit de magie, de couleurs, de féerie et de charme. Celui que l’on surnommait le Walt Disney soviétique, ce qui était aussi injuste que réducteur, lauréat du Lion d’Argent au Festival de Venise pour Le Tour du monde de Sadko (1953) créé une fois de plus un univers unique à l’écran.

Le tsar Saltan choisit sa femme parmi trois sœurs, nommant les deux autres cuisinière et tisserande à la cour. Celles-ci, jalouses, font en sorte que lorsqu’en l’absence de son mari la tsarine donne naissance à un fils, le futur prince Gvidone, elle soit jetée à la mer avec son fils dans un tonneau. La mer prend pitié des infortunés et les dépose sur le rivage d’une île lointaine. Le fils, qui a grandi à l’intérieur du tonneau, au point de devenir adulte, sauve des griffes d’un rapace un cygne, qui s’avère être une jeune fille ensorcelée. Le cygne fait surgir une ville dont Gvidone sera le prince, mais celui-ci se languit de son pays. Le cygne le transforme en moustique, ce qui lui permet d’arriver dans le royaume de son père (qui croit sa femme et son fils morts), royaume qu’il visitera ainsi à plusieurs reprises. Les marchands évoquent devant le tsar Saltan les merveilles de l’île Bouïane et lui transmettent l’invitation de Gvidone, mais les deux sœurs et leur mère parviennent à chaque fois à dissuader le tsar d’entreprendre le voyage en évoquant des prodiges encore plus grands, que le cygne fait ensuite apparaître effectivement sur Bouïane.

Le Conte du tsar Saltan, de son fils, glorieux et puissant preux le prince Gvidon Saltanovitch et de la très-belle princesse-cygne, titre original du conte d’Alexandre Pouchkine, était lui-même librement adapté d’un conte traditionnel. Alexandre Ptouchko transpose le texte original en y restant très fidèle, même s’il manque quelques éléments, à l’instar d’une métamorphose du prince Gvidon. Néanmoins, tous les dialogues déclamés par les personnages, sont tirés des vers de Pouchkine. Récit fantastique, Le Conte du tsar Saltan contient son lot d’effets visuels et spéciaux en tout point ébouriffants. Encore aujourd’hui, leur réussite technique laisse pantois. L’écureuil chantant, les décors multicolores, les transformations du prince, l’armée de colosses, ravissent les yeux et transportent les spectateurs de 7 à 77 ans. Comme pour son long métrage Le Nouveau Gulliver, immense succès de l’année 1935, adapté du célèbre conte de Jonathan Swift et pour lequel Alexandre Ptouchko avait créé plus de 1000 poupées et marionnettes, Le Conte du tsar Saltan permet au cinéaste d’innover une fois de plus ses méthodes cinématographiques, en utilisant les dernières technologies mises à sa disposition.

L’humour, bien présent, léger, moderne, s’adresse aussi bien aux adultes qu’aux enfants, qui seront tous émerveillés par le faste des décors, les figurants à foison, le cadre large fourmillant de personnages haut en couleur, tout cela dans le respect de la tradition du folklore russe. Les personnages sont excellemment campés par les comédiens parmi lesquels se distinguent la belle Larisa Golubkina, qui interprète la Tsarina, et Kseniya Ryabinkina, la princesse-cygne, danseuse de ballet, soliste et enseignante au Bolchoï. On pense alors aux fantaisies mythologiques qui fleurissaient dans les cinémas du monde entier et auxquelles le grand Ray Harryhausen prêtait son talent hors du commun comme Le Septième voyage de Sinbad (1958), Jason et les Argonautes (1963) et Un million d’années avant J.C. (1966), tout en annonçant quelque part Peau d’âne que Jacques Demy réalisera en 1970. Un chef d’oeuvre à réhabiliter.

LE MEDIABOOK

C’est l’une des plus belles sorties de cette fin d’année 2019 – début 2020. Le Conte du tsar Saltan bénéficie d’une sublime édition Livre+Blu-ray+DVD chez Artus Films. Les deux disques sont solidement maintenus dans ce Mediabook, qui contient un livret de 96 pages réalisé par Nicolas Bonnal, intitulé Alexandre Ptouchko & le tsar Saltan : la condition initiatique au cinéma. Magnifiquement illustré, cet ouvrage renferme divers segments consacrés à la carrière d’Alexandre Ptouchko, l’adaptation proprement dite du conte de Pouchkine, sans oublier une bibliographie, la filmographie d’Alexandre Ptouchko et surtout la traduction du conte de Pouchkine par Tetyana Popova-Bonnal !

Sur les galettes, nous ne trouvons que les bandes-annonces russe et française du film, ainsi qu’un diaporama.

L’Image et le son

Artus Films présente un master 2K restauré du Conte du tsar Saltan, présenté dans sa version intégrale non censurée. Voilà qui fait plaisir ! En effet, ce nouveau master restauré HD du Conte du tsar Saltan comblera tous les espoirs des admirateurs d’Alexandre Ptouchko. Le grain est là, la texture argentique se ressent à chaque plan. La propreté est irréprochable, c’est superbe sur les séquences diurnes avec une clarté insoupçonnée et un relief des textures et des matières jusqu’alors inédit. La définition sur les tous les plans à effets spéciaux est évidemment plus chancelante. Mais c’est un choix, afin de préserver la nature originale de l’image composite, en respectant les partis pris et donc les défauts que cela comporte avec de très légers fourmillements, une palette chromatique plus délavée, un piqué moins pointu, une perte des détails et des contours parfois approximatifs. Retoucher à ces séquences aurait entraîné la furie des puristes. Le Blu-ray du Conte du tsar Saltan ne déçoit pas, jamais, puisque nous n’avons jamais vu le film ainsi. D’autant que le reste du temps, les contrastes affichent une densité remarquable avec des noirs impeccables et les couleurs comme le bleu du ciel et de la mer sont souvent resplendissantes.

Les pistes russe et française (également en vers) du Conte du tsar Saltan sont assez percutantes, sans souffle parasite, et l’ensemble reste constamment dynamique. Du point de vue technique, la version originale l’emporte sur son homologue, car plus aérée et fluide. Dans les deux cas, la musique est excellemment délivrée et les effets nerveux.

Crédits images : © Artus Films / Mosfilm Cinema Concern / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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