FORMULE POUR UN MEURTRE (7 Hyden Park: la casa maledetta) réalisé par Alberto De Martino, disponible en Blu-ray depuis juin 2023 chez Le Chat qui fume.
Acteurs : Christina Nagy, David Warbeck, Carroll Blumenberg, Rossano Brazzi, Andrea Bosic, Loris Loddi, Adriana Giuffrè, Daniela De Carolis…
Scénario : Alberto De Martino & Vincenzo Mannino
Photographie : Gianlorenzo Battaglia
Musique : Francesco De Masi
Durée : 1h28
Date de sortie initiale : 1985
LE FILM
Boston, 1985 – Ayant chuté, enfant, voici vingt-cinq ans, dans un escalier pour échapper à l’agression d’un homme travesti en prêtre, trauma qu’elle a effacé de sa mémoire, Joanna se retrouve clouée dans un fauteuil. Ayant hérité de la fortune de ses parents, ses journées se partagent entre sa villa et le centre sportif pour handicapés qu’elle a contribué à monter. Son amie Ruth gère son quotidien, tandis que Craig fait d’elle une sportive handisport accomplie. Alors qu’approche la date de signature d’une forte dotation à sa paroisse, les prêtres chargés de cette tâche disparaissent. Craig, l’entraîneur de Joanna, la pousse à l’épouser. Elle finit par lui céder, pour le meilleur et pour le pire…
Clap de fin…ou presque pour Alberto De Martino (1929-2015), ici « Martin Herbert », qui avec Formule pour un meurtre – 7, Hyden Park : La Casa Maledetta ou bien encore A Formula for a murder et Formula per un delitto, tournait son avant-dernier film, avant de raccrocher les gants la même année dans un ultime baroud d’honneur avec Miami Golem (La Force invisible). Oublions ce dernier, dont il quittera d’ailleurs la post-production en raison de divergences avec la production, pour se focaliser sur Formule pour un meurtre, qui s’il n’est pas un chef d’oeuvre, n’en reste pas moins honnête dans sa mouture. Certes, ce thriller à tendance giallesque est bien tardif (nous sommes en 1985) et tous les effets sont éculés, mais l’ensemble est suffisamment bien fichu pour que le spectateur ne s’ennuie pas durant 90 minutes. Le cinéphile préférera se souvenir de Formule pour un meurtre plutôt que L’Incroyable homme puma comme film dit testament, dans lequel le réalisateur fait preuve comme souvent d’une solide direction d’acteurs, d’ingéniosité du cadre et du sens du rebondissement multiple. Un au revoir louable de la part d’un des plus grands artisans du cinéma Bis transalpin.
Joanna est une femme paraplégique, clouée dans un fauteuil roulant depuis sa jeunesse, lorsqu’elle est tombée dans les escaliers pour échapper à un faux prêtre qui l’a violée. Malgré tout, Joanna est pleine de vie : elle s’entraîne dans un centre sportif pour paraplégiques et a l’intention de participer à une compétition importante. De plus, son entraîneur Graig la demande en mariage et, malgré la méfiance de sa meilleure amie et assistante Ruth, elle accepte la proposition. Mais son médecin est inquiet car il craint que, dans une relation intime, Joanna ne revive l’expérience traumatisante du passé et que cela ne la conduise à la mort. En effet, après le mariage, elle commence à avoir des hallucinations et à rêver du faux prêtre et d’une poupée qui répète une comptine inquiétante. De plus, toutes ses tentatives pour faire don d’une importante somme d’argent à la paroisse s’avèrent vaines, car les prêtres auxquels elle s’adresse disparaissent mystérieusement. En réalité, ils ont été assassinés et même les hallucinations ne sont qu’un coup monté.
La « formule » du titre est justement tellement connue et attendue, que l’on devine immédiatement qui est derrière tous ces événements. D’ailleurs, Albert De Martino et son coscénariste Vincenzo Mannino (L’Éventreur de New York, La Maison au fond du parc, L’Antéchrist) ne sont pas dupes et savent que les spectateurs vont très vite comprendre ce qui est en train de se manigancer. Résultat, ils dévoilent l’assassin (ou les meurtriers) au bout de 35 minutes, avant de dérouler leur récit, qui demeure néanmoins sans surprise. Le casting est sympathique avec le trio formé par Christina Nagy (dans sa seule apparition au cinéma), impeccable dans le rôle de Joanna, David Warbeck (L’Au-delà, The Black Cat, Les Héros de l’apocalypse) et la sensuelle Carroll Blumenberg, également dans son unique long-métrage. Les plus physionomistes reconnaîtront Rossano Brazzi, vu chez Abel Ferrara (New York, 2 heures du matin), Peter Collinson (L’Or se barre), Vittorio De Sica (Sept fois femme), Douglas Sirk (Les Amants de Salzbourg), Joseph L. Mankiewicz (La Comtesse aux pieds nus), éternel second voire troisième rôle, mais toujours apprécié.
Formule pour un meurtre c’est un peu la fin du « Stop ou Encore », un dernier ride avant de tourner définitivement la page. Le cinéaste est conscient que celui ou celle qui regardera son film connaît tous les trucs par coeur, mais espère qu’on lui pardonnera volontiers ces grosses ficelles, car celui-ci peut se le permettre ayant déjà prouvé auparavant qu’il savait les utiliser et les tresser à sa façon. 7, Hyden Park : La Casa Maledetta demeure bien emballé, élégamment photographié par Gianlorenzo Battaglia (les deux opus de Démons et La Maison de la terreur de Lamberto Bava), avec une musique entêtante de Francesco De Masi (Tuez les tous… et revenez seul !) et un montage somme toute propre et lisible de Vincenzo Tomassi (Le Miel du diable, L’Au-delà, L’Enfer des zombies, Holocaust 2000). Du beau monde derrière la caméra, des professionnels, des cadors dans leurs domaines respectifs, qui unissent leurs forces pour mettre en valeur ceux qui sont devant l’objectif, qui font aussi du bon boulot.
Le classicisme a du bon et Formule pour un meurtre, qui fait parfois penser au mythique Seule dans la nuit –Wait Until Dark de Terence Young mâtiné de Hurler de peur – Taste of Fear de Seth Holt et bien sûr des Diaboliques d’Henri-Georges Clouzot et de Terreur aveugle de Richard Fleischer, reste un agréable spectacle avec des crimes à l’arme blanche particulièrement brutaux et sanglants.
LE BLU-RAY
Pour sa première édition Blu-ray française, Formule pour un meurtre est solidement pris en charge par Le Chat qui fume. Le disque repose dans un Digipack à trois volets, très joliment illustré, le tout glissé dans un superbe fourreau cartonné au visuel concocté par Mister Domont, qui est actuellement en train de faire son deuil de William Friedkin et on le comprend. N’empêche que notre DVD-Blu-raythèque n’aurait pas la même tronche sans son talent. Le menu principal est animé et musical. Édition limitée à 1000 exemplaires. Version intégrale.
Le premier supplément de cette édition est un entretien avec l’acteur Loris Loddi (14’30). Aperçu dernièrement dans House of Gucci de Ridley Scott et ayant commencé sa carrière au début des années 1960 chez Mario Bava dans La Ruée des Vikings, Loris Loddi avait déjà joué chez Alberto De Martino vingt ans auparavant dans Cent mille dollars pour Ringo – 100.000 dollari per Ringo. Parlant couramment l’anglais depuis sa plus tendre enfance, le comédien est appelé pour faire une petite bafouille dans Formule pour un meurtre, dans lequel il joue le padre Davis. L’occasion pour lui de raconter quelques anecdotes de tournage, de dresser le portrait du cinéaste (« un homme drôle, provocateur avec tout le monde, qui faisait hurler de rire toute l’équipe sur le plateau ») et de se remémorer les lieux des prises de vue.
L’autre bonus est une interview du chef opérateur Gianlorenzo Battaglia (20’). Le directeur de la photographie aborde son parcours et sa rencontre avec Alberto De Martino, avant d’en venir aux partis pris adoptés pour Formule pour un meurtre (« des nuits bleues et des lumières incandescentes […] une photo très réaliste réalisée avec très peu de moyens et une petite équipe »). Le travail avec l’équipe américaine (une partie du film ayant été tourné à New York), le tournage à la villa Recchi (connue pour avoir été le théâtre d’un terrible fait divers), l’évolution (dans le mauvais sens) de la photographie au cinéma, l’utilisation des reflets, le boulot des cascadeurs italiens et la pérennité de Formule pour un meurtre, sont aussi les sujets inscrits au programme de ce module.
L’Image et le son
Le Chat qui fume nous gratifie d’un master HD (1080p, AVC) impressionnant, présenté dans son format original 2.35 (16/9, compatible 4/3). La propreté de la copie est indéniable, la restauration ne fait aucun doute (même si quelques poils en bord de cadre subsistent), les contrastes sont beaux, l’ensemble fourmille de détails, le piqué demeure pointu. Le grain est très bien géré, sans bruit vidéo, les couleurs concoctées par Gianlorenzo Battaglia sont agréables pour les mirettes, souvent rutilantes. Le charme opère, on est bluffé par la fraîcheur de la copie, une vraie résurrection.
Propre et dynamique, le mixage italien DTS HD Master Audio ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues, laissant une belle place à la musique de Francesco De Masi. Elle demeure la plus dynamique du lot, mais également la plus virulente et la plus frontale dans ses dialogues par rapport à son homologue. La version française DTS HD Master Audio pousse un peu trop les dialogues au détriment des effets annexes.
Crédits images : © Le Chat qui fume / Surf Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr
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