DE SI GENTILS PETITS…MONSTRES! (The Children) réalisé par Max Kalmanowicz, disponible en Blu-ray chez Pulse Vidéo.
Acteurs : Martin Shakar, Gil Rogers, Gale Garnett, Shannon Bolin, Tracy Griswold, Joy Glaccum, Jeptha Evans, Clara Evans, Sarah Albright, Nathanael Albright…
Scénario : Carlton J. Albright & Edward Terry
Photographie : Barry Adams
Musique : Harry Manfredini
Durée : 1h33
Année de sortie : 1980
LE FILM
En rentrant de l’école en bus, les enfants d’un petit village passent près d’une centrale. Entrant dans un nuage toxique, les adorables garnements vont être transformés en petits monstres, capables de faire frire leurs victimes en les enlaçant !
The Children, plus connu dans nos contrées sous le titre sympathique De si gentils petits…monstres ! est le premier des deux longs-métrages réalisés par un dénommé Max Kalmanowicz, également producteur et oeuvrant habituellement (encore aujourd’hui d’ailleurs) dans le domaine sonore. Nous sommes en 1980 et tout le monde essaye de se mettre à l’épouvante, genre qui coûte peu et qui surtout rapporte un maximum de billets verts. Ainsi, la même année que Shining, Fog, Cannibal Holocaust, Inferno, Harlequin, Vendredi 13, Maniac, Le Bal de l’horreur, Anthropophagous, Frayeurs, Le Monstre du train et L’Enfant du diable, sortait sur les écrans, essentiellement de drive-in, The Children, minuscule production tournée entre le Massachusetts et le Connecticut, avec une poignée de dollars, un casting de parfaits ou quasi-inconnus, des effets spéciaux rudimentaires (euphémisme) et des idées éparses rassemblées et enfilées comme des perles sur un collier. Rien d’inoubliable dans De si gentils petits…monstres !, mais un charme s’en dégage, sans doute celui du système D, les comédiens sont pas trop mal, certains effets fonctionnent étonnamment bien et de plus l’ensemble s’améliore du début à la fin, jusqu’au dernier acte aux événements violents. C’est ce qu’on appelle une curiosité.
Alors qu’il se rendait dans la ville de Ravensback, un car de transport scolaire traverse un étrange nuage jaune et toxique provenant d’une centrale nucléaire voisine. Pendant qu’il fait sa ronde, le shérif Billy Hart tombe sur le bus entièrement vide, le chauffeur et les cinq enfants ont disparu. Il part aussitôt alerter leurs parents mais son adjoint retrouve trois d’entre eux sur une route, en pleine nuit. Alors qu’il se dirige vers eux, il remarque leur regard étrange et leurs ongles noirs. Soudainement, il est brûlé vif. Accompagné par l’un des parents, Hart découvre son adjoint mort et se rend aussitôt chez les proches des disparus mais il retrouve leurs corps calcinés. Contaminés par le nuage radioactif, les cinq enfants sont devenus des tueurs qui ont le pouvoir de carboniser les gens par la simple apposition des mains. Pour survivre, les survivants vont devoir commettre l’irréparable pour combattre les jeunes monstres : leur couper celles-ci.
C’est simple, efficace, sans esbroufe, classique, mais malgré tout ça marche et ce n’est pas donné à tout le monde de parvenir à emballer un film d’horreur quand on n’a pas de moyens, surtout quand on veut faire genre qu’on les a. De si gentils petits…monstres ! est clairement un pur produit d’exploitation, dans le but unique de remplir le tiroir-caisse. Certains sont entrés dans la légende, d’autres ont réussi à tirer leur épingle du jeu en gonflant comme il le faut les poches de leurs producteurs, d’autres font partie du tout-venant et n’ont guère laissé de traces. The Children appartient à la seconde catégorie puisqu’il remboursera facilement ses frais et fera de jolis bénéfices.
Dans la distribution, se distingue Martin Shakar, né en 1940 et toujours en activité aujourd’hui. S’il n’a pas le premier rôle dans De si gentils petits…monstres !, le comédien vu précédemment dans La Fièvre du samedi soir et plus tard dans le mythique Invasion U.S.A., incarne ici John Freemont, père de famille touché par la disparition de sa fille, dont la femme est sur le point d’accoucher de leur troisième progéniture. L’acteur est impeccable et tient la dragée haute – toutes proportions gardées bien sûr – à son partenaire, Gil Rogers, qui campe quant à lui le shérif de la bourgade où se sont volatilisés une poignée de gamins, après que leur bus se soit engouffré dans un étrange nuage qui rappelle celui dans lequel était plongé Scott Carey dans L’Homme qui rétrécit de Jack Arnold.
Si les effets d’épouvante, notamment la combustion et les maquillages de corps calcinés ont pris de sérieuses rides, le fait d’utiliser des enfants comme meurtriers (malgré-eux, puisque la radioactivité les a transformés en espèce de mutants-zombies) fait encore ce petit truc qui donne des frissons dans le dos. À ce titre, le dernier acte y va à fond dans l’affrontement fatal avec les « gentils petits monstres », sur qui les héros n’hésitent pas à tirer (pour les ralentir, car les balles ne font rien), avant de s’emparer d’un sabre pour les amputer. Dans ce film, point de petit bout de chou tout mignon, les jeunes personnages ne sont nullement synonymes d’espoir (le dernier plan est d’ailleurs prévisible), de renouveau, de transmission. Nous sommes en plein vidéo-club qui tâche, avec ses affiches beaucoup plus spectaculaires que les films qu’ils vendaient.
The Children peut se voir comme un ersatz du Village des Damnés et de l’incroyable Les Révoltés de l’an 2000 de Narciso Ibáñez Serrador, tout en annonçant Les Tueurs de l’éclipse, sur le point de débouler dans les salles. Un spectacle honnête, divertissant, certainement kitsch, mais suffisamment généreux dans son genre. Enfin, bon point également pour la partition d’Harry Manfredini, même si ce dernier n’a pas hésité à recycler ce qu’il venait de créer pour Vendredi 13, aussi sorti en 1980, classique du genre dont le chef opérateur Barry Abrams est aussi le directeur de la photographie de The Children. Ceci n’est pas un hasard.
LE BLU-RAY
Édité en France en VHS chez Platinium Vidéo, De si gentils petits…monstres ! rejoint le catalogue de Pulse Vidéo dans la collection Vidéoclub de l’horreur, qui à cette occasion a mis le paquet pour nous offrir une superbe édition. Le Blu-ray, à la sérigraphie soignée, repose dans un boîtier classique transparent, glissé dans un surétui cartonné du plus bel effet, reprenant l’un des visuels d’exploitation d’origine. La jaquette, par ailleurs réversible, présente un recto créé pour cette édition HD et un verso illustré par une affiche d’époque. Le menu principal est animé et musical.
Le premier supplément est une interview de David Platt (directeur de production et acteur) et Carlton J. Abright (producteur et coscénariste), pas mécontents de revenir sur The Children (17’). Les deux compères évoquent la genèse du film (L’accident nucléaire de Three Mile Island survenu le 28 mars 1979 dans la centrale nucléaire de Three Mile Island située en Pennsylvanie, où le cœur d’un réacteur a en partie fondu, entraînant le relâchement dans l’environnement d’une faible quantité de radioactivité), avant d’en venir plus précisément sur les conditions de tournage (« on était fauché, mais on faisait semblant d’être pleins aux as »). Le travail sur la photo, la musique, le casting (on apprend que Kevin McCarthy devait initialement être de la partie), la sortie (dans les drive-in surtout) et le succès de De si gentils petits…monstres ! sont ainsi abordés. Bonus issu de l’édition Vinegar Syndrom de 2018.
Nous trouvons ensuite un retour sympathique sur les lieux de tournage, en compagnie de Michael Gingold (10’), journaliste, scénariste et ancien rédacteur en chef de la revue Fangoria. Un avant/après qui fait toujours son effet et où l’on se rend souvent compte que le temps s’est définitivement arrêté dans de nombreuses parties du monde. Un habitant, adolescent à l’époque du tournage, se souvient comme il avait été émoustillé par le décolleté de la starlette June Berry, qui incarne la serveuse Sally, sensible au charme du shérif joué par Gil Rogers.
Plus anecdotique, mais qui ne manque pas d’intérêt, lors de leur restauration du film, Vinegar Syndrom avait pu mettre la main sur des éléments sonores d’une séquence coupée au montage de The Children. Un panneau indique que les bobines étant introuvables, peuvent être considérées comme perdues et seule demeure la bande son (2’40).
L’interactivité se clôt sur le film en VHS-Vision (VF) et sur un fabuleux montage de bandes-annonces de vidéoclub, renvoyant aux belles heures des locations de VHS (31’), le tout concocté par l’excellent Otto Rivers. On peut y voir pêle-mêle, en version française ou parfois en VOSTF les trailers de Souffrez, les petits enfants, Le Petit ange, Le Fils diabolique, Cinq fois la mort – Devil Times Five, Les Yeux de la forêt (premier film d’horreur produit par les studios Disney, oui oui), Au-delà des ténèbres, Sorority Babes, Mon père c’est moi, Les Aventuriers de la 4e dimension, Carrie 2 : La Haine, Zombie Academy, Zombie Campus, Ghoul School, En plein cauchemar, avant de terminer sur le mythique Braindead.
L’Image et le son
Pulse reprend tout naturellement le même master 2K sorti outre-Atlantique chez Vinegar Syndrom. Visiblement rafistolée à partir de sources diverses et variées (à la fois via le négatif original et d’une copie 35mm), la copie présentée ici n’est pas sans défaut, contient encore son lot de poussières, de rayures verticales et de raccords de montage, tandis que les pièces rapportées se voient comme le nez au milieu de la figure avec une palette chromatique beaucoup plus fanée et un piqué moindre. Ce côté patchwork n’est cependant pas déplaisant et en rajoute dans le côté vintage de l’entreprise, en renvoyant ainsi à un aspect grindhouse typique de l’époque. La gestion des contrastes est par conséquent aléatoire, mais l’ensemble est stable. Bien sûr, les scènes restaurées provenant directement du négatif original sont les plus belles et bénéficient d’un bel apport HD. Enfin, la texture argentique est préservée, organique et équilibrée.
Evitez la piste française, la plus faible du lot et qui mise avant tout sur le report des voix. Mais le doublage est très chouette. La version originale est de plus mieux équilibrée, dynamique, sans aucun souffle, avec des dialogues clairs, une solide restitution de la musique. Les sous-titres français ne sont pas imposés.