CINQ TULIPES ROUGES réalisé par Jean Stelli, disponible en Combo Blu-ray + DVD Edition limitée le 16 octobre 2024 chez Pathé.
Acteurs : Jean Brochard, René Dary, Suzanne Dehelly, Raymond Bussières, Pierre-Louis, Robert Berri, Robert Le Fort, Luc Andrieux…
Scénario : Marcel Rivet & Charles Exbrayat
Photographie : Marcel Grignon
Musique : René Sylviano
Durée : 1h34
Date de sortie initiale : 1949
LE FILM
Lors du Tour de France 1948, cinq coureurs sont retrouvés morts avec une tulipe rouge près de leur corps. Une journaliste et un inspecteur de police mènent l’enquête pour retrouver le meurtrier…
Bien avant La Grande Boucle (2013), Le Vélo de Ghislain Lambert (2001), Les Triplettes de Belleville (2003), Les Cracks (1968), The Program (2015), pour ne citer que ceux-là, la course cycliste inspirait le cinéma en 1949 avec Cinq tulipes rouges. Étrange mélange des genres que cette enquête policière menée durant le Tour de France de 1948, sur lequel le film de Jean Stelli (1894-1975) a réellement été tourné, en collaboration avec Peugeot, L’Équipe, France Soir et Le Parisien Libéré, organisateurs de cette épreuve sportive réputée dans le monde entier. Jean Stelli, le réalisateur prolifique, éclectique et néanmoins méconnu de La Valse Blanche (1943), Le Voile Bleu (1942), Les Amoureux de Marianne (1953), ancien acteur puis assistant de Julien Duvivier (L’Ouragan sur la montagne, Les Roquevillard, Golgotha), avait déjà pris le Tour de France comme toile de fond pour sa comédie romantique sortie en 1939, Pour le maillot jaune, avec Albert Préjean. Cette fois, une série de meurtres se déroule au fil des étapes du Tour 1948, les prétendants au maillot jaune étant mystérieusement assassinés les uns à la suite des autres, une tulipe rouge étant systématiquement retrouvée près du corps de la victime. Cinq tulipes rouges vaut assurément le coup d’oeil, d’une part pour sa dimension documentaire (Jean Stelli avait un passé de journaliste et connaissait le terrain), avec ses coureurs qui mangent copieusement le tout arrosé de gros rouge, ses entraîneurs survoltés, ses mécanos amateurs de jolies donzelles, d’autre part pour le duo formidable formé par la géniale Suzanne Dehelly (La Nuit est mon royaume, Premier rendez-vous), impayable dans la peau de La Colonelle, la journaliste qui mène l’enquête à la façon d’un Myron Bolitar (les connaisseurs d’Harlan Coben comprendront), et Jean Brochard (Pot-Bouille, Les Diaboliques, Cécile est morte!) tout aussi impérial dans celle de l’inspecteur-chef Honoré Ricoul. Très rythmé, souvent drôle, bien mené et excellemment interprété, Cinq tulipes rouges mérite d’être redécouvert, surtout par les amateurs de la Petite Reine.
Tandis que se déroule le Tour de France, cinq mystérieux assassinats sont commis parmi les coureurs favoris. Chaque meurtre est signé par une fleur, une tulipe rouge, déposée près de la victime. La célèbre journaliste sportive Colonelle et l’inspecteur Ricoul, conjuguent leurs efforts pour démasquer l’assassin avant l’arrivée au Parc des Princes.
En parallèle de la Grande Boucle, c’est donc une autre course contre la montre qui se joue. Ceci dit, on devine assez rapidement qui est le meurtrier. Cela est bien dommage certes, mais Cinq tulipes rouges est suffisamment curieux pour qu’on s’y attarde. Le casting, essentiellement composé de comédiens peu connus ou oubliés sont tous impeccables. Outre Jean Brochard (avec son faux-air de Dupond/t) et Suzanne Dehelly (personnage étonnamment moderne que celui de La Colonelle, ouvertement lesbienne et qui déclare même à Ricoul « Vous ne savez pas ce que vous ratez » en devinant qu’il n’y a aucune femme dans sa vie), on retiendra la prestation de René Dary (L’Horizon de Jacques Rouffio, Les Risques du métier d’André Cayatte, Belphégor ou le Fantôme du Louvre de Claude Barma), celle du légendaire Raymond Bussières (Casque d’Or, Les Sous-Doués passent le bac, La Carapate, Porte des Lilas) et de sa compagne Annette Poivre (Quoi de neuf, Pussycat ?, Copie conforme, Quai des Orfèvres), de Pierre-Louis (La Vache et le prisonnier), de Robert Berri (Plein les poches pour pas un rond, La Mandarine, Le Désordre et la nuit), de Robert Le Fort (Le Ciel est à vous, Seul dans la nuit) et de Luc Andrieux (Les Évadés).
Cinq tulipes rouges est une vraie plongée dans le Tour de France, que l’on suit étape par étape, jusqu’au sprint final où tout sera révélé. Solidement photographié par Marcel Grignon (Atout coeur à Tokyo pour O.S.S. 117, Horace 62, Le Capitan), soutenu par un montage énergique et la griffe de Charles Exbrayat au scénario (la série Imogène, La Symphonie fantastique), ainsi que celle de Marcel Rivet (Les Amants du Tage, Au Grand Balcon), Cinq tulipes rouges fonctionne aussi bien sur le registre sportif que dramatique. S’il possède forcément un cachet désuet, beaucoup d’éléments demeurent étonnamment modernes. Voilà ce qu’on peut appeler un film sympathique, charmant et original.
LE COMBO BLU-RAY + DVD
Pathé n’en finira jamais de faire le bonheur des cinéphiles. Au mois d’octobre, la collection Pathé Présente s’est étoffée de deux nouveaux titres, Cinq tulipes rouges de Jean Stelli et Au P’tit Zouave de Gilles Grangier. Le Combo Blu-ray + DVD du premier se présente sous la forme d’un Digipack à deux volets, glissé dans un fourreau cartonné du plus bel effet. Le menu principal est animé et musical.
Le gros module de cette interactivité compile les interventions de Benoît Heimermann (journaliste sportif, écrivain et éditeur), Matthieu Letourneux (maître de conférences, enseignant, chercheur et auteur de l’ouvrage « Aux origines de la pop culture ») et Didier Griselain (auteur, spécialiste du cinéma français des années 1930 et 40). C’est ici que vous en saurez plus sur les liens entre le cinéma et le cyclisme (ils existent), mais aussi et surtout sur les conditions de production de Cinq tulipes rouges. La carrière du réalisateur Jean Stelli est aussi passée au peigne fin, tout comme le casting, les scénaristes et les thèmes du film (45’30).
Qui dit Pathé dit aussi les Actualités d’époque ! L’éditeur nous propose un montage de quatre reportages consacrés au Tour de France 1948 (8’30). Des images fantastiques, qui nous replongent instantanément dans l’ambiance d’alors. On y croise aussi Bourvil, venu encourager les coureurs, dont Gino Bartali, qui remportera le Tour de France cette année-là pour la seconde fois de sa carrière.
L’Image et le son
Cinq tulipes rouges a été intégralement restauré en 4K, à partir du négatif image original, par L’Image Retrouvée. À l’exception d’une poignée de plans flous (essentiellement des vues larges sur le public) et des moirages, ce master HD en met plein la vue une fois de plus. Format respecté 1.37 et compression AVC. Voilà un lifting inattendu et bienvenu pour le film de Jean Stelli. La définition laisse pantois. La restauration numérique se révèle étincelante, les contrastes sont d’une densité impressionnante, les noirs profonds, les blancs lumineux et le grain original heureusement préservé. Le piqué est tranchant, la stabilité de mise et les détails étonnent par leur précision.
La piste mono bénéficie d’un encodage en DTS HD-Master Audio. L’écoute se révèle fluide, équilibrée, limpide. Aucun craquement intempestif ne vient perturber l’oreille des spectateurs, les ambiances sont précises, les dialogues clairs, dynamiques, sans souffle. Les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles, ainsi qu’une piste Audiovision.
Crédits images : © Pathé / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr