LES DALEKS ENVAHISSENT LA TERRE (Dalek’s Ivasion Earth: 2150 A.D.) réalisé par Gordon Flemyng, disponible en 4K Ultra HD + Blu-ray – Édition boîtier SteelBook le 20 juillet 2022 chez Studiocanal.
Acteurs : Peter Cushing, Bernard Cribbins, Ray Brooks, Jill Curzon, Roberta Tovey, Andrew Keir, Roger Avon, Geoffrey Cheshire…
Scénario : Milton Subotsky & David Whitaker, d’après une histoire de Terry Nation
Photographie : John Wilcox
Musique : Bill McGuffie & Barry Gray
Durée : 1h24
Date de sortie initiale : 1966
LE FILM
À Londres de nos jours. Alors qu’il cherche à donner l’alerte à la suite du cambriolage d’une bijouterie, le policier Tom Campbell pensant se diriger vers une cabine police secours se retrouve en fait dans la machine à voyager dans le temps du Docteur Noors. Ce savant loufoque est accompagné de sa nièce et de sa fille. Tous se retrouvent dans la capitale britannique en l’an 2150.
Adulée au Royaume-Unis, mais plus discrète en France, Docteur Who est la plus longue série de science-fiction de tous les temps. Comptant près de 900 épisodes (!) depuis sa création en 1963, elle a eu le droit également à deux films tournés en 1964 et 1965. Remake de certains épisodes, ces deux longs-métrages, Dr Who et les Daleks et Les Daleks envahissent la Terre, ne sont pas considérés, par les fans, comme ayant une quelconque continuité avec la série originelle. Dans ces œuvres, le fameux Peter Cushing interprète le personnage principal, le comédien de la série de l’époque, William Hartnell, étant accaparé par celle-ci et se trouvant dans l’incapacité de tourner autre chose. Il voyage avec ses deux petites-filles dans une machine à voyager, le TARDIS, sorte de gigantesque cabine téléphonique bien identifiable.
Dans Les Daleks envahissent la Terre, les héros sont accompagnés d’un policier et se retrouvent dans le Londres de 2150. La capitale anglaise est quasiment détruite et les humains robotisés afin de servir les Daleks. Le docteur Who va alors rejoindre la résistance afin de contrecarrer les plans de ses plus redoutables ennemis.
Si on est tout à fait honnête, Les Daleks envahissent la Terre est une série B relativement modeste qui ne révolutionne pas le genre mais dont le visionnage dans une copie soignée s’avère le témoignage d’une époque et procure un bon petit plaisir de spectateur.
Si cette œuvre n’a pas la même renommée que la plupart des films de SF des années 60, elle le doit dans un premier temps à son scénario simpliste. Un scénario qui ressemble beaucoup à celui du premier film et qui peut se décliner comme suit :
– On embarque dans le TARDIS un quatrième personnage, ici un policier commotionné.
– On se retrouve dans le futur où l’on se divise en groupe de deux, les hommes d’un côté les femmes de l’autre (!)
– On se perd mais, pour se retrouver, on se sépare de nouveau pour vivre quatre aventures simultanées.
– On se retrouve à quelques kilomètres de là après avoir détruit, pour un temps, la menace Daleks et on rentre à la maison en 1960 !
Grosso-modo, on remplace une peuplade extraterrestre (les Thal) par des terriens soumis à la robotisation des Daleks et on retrouve avec la même trame que le premier film. En dépit de ce scénario basique, la réalisation très classique et sans risque de Gordon Fleyming permet néanmoins de passer un bon moment. Doté d’un budget modeste malgré l’apport d’une société qui exigea le premier placement de produit de l’histoire, cette production ne se distingue pas par ses effets spéciaux mais plutôt par son ambiance générale, plus proche d’une comédie que d’un drame. D’ailleurs la musique enjouée démystifie totalement l’ensemble et contribue (volontairement ?) à l’aspect comique de certaines situations censées être épiques.
De la même façon, le design des Daleks, des êtres présentés comme les plus effroyables envahisseurs que la Terre ait connu, apporte une touche de dérision. Croisement illégitime entre Robby le robot de Planète interdite et un abat-jour géant dessiné par Jean-Paul Gautier, ces supposés monstres inspirent davantage la moquerie que la haine.
Toutefois, malgré ses défauts, Les Daleks envahissent la Terre reste une œuvre intéressante par son discours politique diffusé en toile de fond. Son style très pop et kitsch, typique des années 60, laisse à penser que ce film s’inscrit dans la lignée des productions américaines , britanniques voire japonaises de l’époque. Mais là où les nippons transmettaient une crainte du péril nucléaire à travers leurs films de monstres, les européens inculquaient à leurs métrages la crainte du péril communiste. La robotisation des humains de 2150 ne reflète ainsi que la peur de la lobotomie des esprits présente, selon les occidents, à cette époque dans l’Europe de l’Est. Et les armées d’humains conditionnés par les Daleks qui marchent au pas, à la façon des armées fascistes du passé et des armées communistes du présent, en sont le parfait exemple.
Bref, s’il n’a rien de transcendant d’un point de la narration, Les Daleks envahissent la Terre n’en reste pas moins un spectacle plaisant et une œuvre parfaitement inscrite dans son époque. Et au final, le plaisir de spectateur s’impose et les quelques défauts importe peu à tel point qu’on s’en Daleks de l’histoire !
LE COMBO BLU-RAY + 4K UHD
À l’instar de Dr Who et les Daleks, Les Daleks envahissent la Terre bénéficie d’une prestigieuse sortie chez Studiocanal, dans un magnifique boîtier SteelBook, véritable objet de collection qui devrait ravir les fans de la première heure. Le menu principal est très légèrement animé et muet.
Tout d’abord, l’éditeur reprend deux suppléments identiques à l’édition de Dr Who et les Daleks :
Le gros bonus entièrement centré sur la Dalekmania est celui qui est d’ailleurs intitulé ainsi et qui dure environ une heure, datant de 1995. Un documentaire axé sur l’histoire de la production de Dr. Who et les Daleks (mais aussi de sa suite), comprenant moult entretiens avec Marcus Hearn, ancien rédacteur en chef de Bizarre & Hammer Horror, Gary Gillatt, rédacteur en chef de Doctor Who Magazine, Terry Nation, scénariste et créateur des Daleks, les acteurs Roberta Tovey (Susan), Barrie Ingham (Alydon) et Yvonne Antrobus (Dyoni). Jill Curzon (Louise) et le cascadeur Eddie Powell, qui parlent de leurs contributions au second opus Les Daleks envahissent la Terre. Ce documentaire « définitif » sur le sujet (même les produits dérivés sont abordés), produit par Lumiere Pictures, est dédié aux à Peter Cushing et Roy Castle.
En plus de la bande-annonce originale, vous trouverez aussi le segment consacré à la restauration de Dr Who et les Daleks et de sa suite (11’), en compagnie de l’historien du cinéma et de la télévision Marcus Hearn, et de ceux qui se sont occupés de cet impressionnant lifting, Jo Botting, Steve Bearman, Tom Barrett et Ian Pickford Le processus et les différentes étapes techniques y sont longuement analysés, de façon pointue, sans doute hermétique pour les non-initiés.
D’autres bonus sont sans grand intérêt : deux interviews très rapides dont l’une, plus intéressante, fait parler Bernard Cribbins (4’), l’acteur jouant le rôle du policier dans le film. Un commentaire audio (VOSTF) – du critique Kim Newman, du scénariste Robert Shearman et de l’acteur Mark Gatiss – est également présent dans les bonus mais semble vraiment réservé au fan de la série et de l’univers du Docteur Who.
On apprend aussi dans le supplément intitulé L’Héritage des Daleks (16’), que l’idée de départ était de faire une série de films sur les Daleks mais que le second long-métrage ayant rapporté très peu d’argent, la production décida d’arrêter cette franchise au cinéma. Ce qui, à la vue de la qualité décroissantes des deux œuvres, s’avéra au final une bonne idée.
L’Image et le son
Même chose à l’identique que pour Dr Who et les Daleks : Une totale résurrection. Cette restauration 4K a été réalisée à partir du négatif original 35mm double perforation, scanné en 16bit par Silver Salt Restoration – UK. Le scan 4K a été effectué par immersion afin de retirer les nombreuses rayures présentes sur l’élément original. L’étalonnage et la restauration ont été finalisés par Silver Salt Restoration – UK. La correction image par image des diverses détériorations physiques et poussières a nécessité 200 heures de travail. Le film est présenté dans son format original 2.35:1. On reste souvent halluciné par la clarté et la fluidité de la copie présentée, la texture argentique est palpable, vivante, organique, formidablement gérée. Le piqué est acéré et les détails inédits, surtout sur les Daleks, qui peuvent être désormais analysés sous tous les angles. Leur métal, les diodes, leur brillance n’ont jamais resplendi ainsi. Le gros point fort de cette copie UHD (d’une stabilité exemplaire) demeure bien sur la palette chromatique avec primaires bien saturées, lumineuses, pop et acidulées, le tout relevé par la présence de l’HDR. Les gros plans, les décors et les décors sont exceptionnels de netteté.
Le film de Gordon Flemyng bénéficie d’un doublage français. Mais la version anglaise LPCM Mono 2.0 est plus dynamique, propre et intelligible, homogène dans son rendu, notamment au niveau des effets sonores et sans aucun souffle.