À BOUT PORTANT (The Killers) réalisé par Don Siegel, disponible en DVD et Blu-ray le 24 mars 2021 chez BQHL Editions.
Acteurs : Lee Marvin, Angie Dickinson, John Cassavetes, Clu Gulager, Claude Akins, Norman Fell, Ronald Reagan…
Scénario : Gene L. Coon, d’après la nouvelle d’Ernest Hemingway
Photographie : Richard L. Rawlings
Musique : John Williams
Durée : 1h33
Date de sortie initiale : 1964
LE FILM
Tueurs à gages, Charlie Strom et son partenaire exécutent froidement Johnny North dans une institution pour aveugles. Intrigué par le comportement de sa cible qui, plutôt que de tenter de fuir, se laisse abattre, Charlie Strom reconstitue son parcours. Il découvre que sa victime est un ancien pilote automobile qu’une blessure de course et l’influence d’une séduisante jeune femme poussent à servir de chauffeur à un gang à l’occasion de l’attaque d’un fourgon postal. Butin : un million de dollars. De quoi faire tourner bien des têtes, de quoi expliquer certains comportements et la volonté d’un commanditaire de jouer la discrétion…
La nouvelle de dix pages d’Ernest Hemingway, Les Tueurs, avait déjà été portée à l’écran par Richard Siodmak en 1946 avec Ava Gardner et Burt Lancaster. Près de vingt ans plus tard, Don Siegel en réalise une nouvelle adaptation, À bout portant – The Killers, avec Angie Dickinson et John Cassavetes qui reprennent les personnages de leurs aînés. La situation de départ est identique. Lee Marvin, qui sortait de La Taverne de l’Irlandais – Donovan’s Reef de John Ford, est également de la partie et campe l’un des tueurs les plus emblématiques du cinéma américain des années 1960, à la fois monolithique et merveilleusement cynique. Ronald Reagan tourne ici son dernier long métrage et endosse pour la première fois le costume du salaud de service, un rôle qu’il déclarera avoir toujours détesté interpréter. Il se lancera dans la politique peu de temps après, jusqu’à parvenir à la fonction suprême. Il deviendra ainsi le quarantième président des Etats-Unis de 1981 à 1989. Malgré ses critiques, Ronald Reagan est pourtant excellent et n’a pas besoin de se forcer pour s’imposer, notamment face à l’impressionnant Lee Marvin. Citons aussi Clu Gulager (Virages de James Goldstone, Le Retour des morts-vivants de Dan O’Bannon), parfait disciple, jeune chien fou à mi-chemin entre l’enfance et le monde adulte. Don Siegel appuie d’ailleurs la relation trouble entre les deux tueurs, une homosexualité latente, en montrant le personnage de Lee, qui ne cesse de soigner son apparence, dans le but de mieux se faire accepter par son mentor, Charlie, vieillissant, sage et pensant à raccrocher après un dernier coup. À bout portant est donc plus un remake des Tueurs qu’une nouvelle adaptation de la nouvelle d’Hemingway et le cinéaste livre une œuvre totalement originale. À l’origine produit et conçu pour la chaîne de télévision NBC, le film se retrouve sur le circuit cinématographique traditionnel car jugé trop violent par les censeurs. En guise d’exemple, on retiendra notamment l’arrivée des tueurs dans l’institution pour aveugles (première séquence du film) mettant les spectateurs dans l’atmosphère voulue par le réalisateur. Ici, la violence n’est pas suggérée, elle est directe, franche et froide. La scène demeure un modèle du genre et les partis pris inédits. Le film est rapide, 90 minutes, pas une de plus, pas une de moins, sec, épuré et d’une redoutable efficacité. Une économie de moyens certes due à son origine télévisuelle, mais un budget restreint idéalement employé par Siegel. Dans À bout portant, le destin est déjà inscrit dans le marbre, la mort rôde autour des personnages explicitement et implicitement.
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