Test Blu-ray / Sarah Bernhardt, la Divine, réalisé par Guillaume Nicloux

SARAH BERNHARDT, LA DIVINE réalisé par Guillaume Nicloux, disponible en DVD et Blu-ray le 3 juin 2025 chez Memento Distribution.

Acteurs : Sandrine Kiberlain, Laurent Lafitte, Amira Casar, Pauline Etienne, Mathilde Ollivier, Laurent Stocker, Samuel Brafman-Moutier, Sylvain Creuzevault…

Scénario : Guillaume Nicloux & Nathalie Neuthreau

Photographie : Yves Cape

Musique : Reynaldo Hahn

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

1915. Atteinte d’une tuberculose osseuse au niveau du genou, la grande actrice Sarah Bernhardt se voit contrainte d’être amputée de la jambe droite. Au terme d’une opération délicate mais réussie, elle assiste aux visites successives de ses proches, notamment le jeune cinéaste Sacha Guitry qui cherche à percer le secret de la liaison entre Sarah et son père Lucien. C’est le début d’une longue confession sur ce qui, vingt ans plus tôt, aura fait basculer le destin de « la Divine ».

Si l’on devait comparer Guillaume Nicloux à un autre metteur en scène, ce serait sans nul doute Steven Soderbergh, avec lequel le cinéaste semble partager cette envie insatiable de filmer, de passer d’un genre à l’autre, d’aborder les différents formats, courts et longs-métrages, documentaires, téléfilms, séries télévisées. Son premier opus, Les Enfants volants, remonte à 1990, mais c’est à partir d’Une affaire privée (2002) qu’il accélérera le rythme avec à ce jour, dix-sept longs-métrages à son actif. Guillaume Nicloux a encore passé la vitesse supérieure depuis 2022 avec La Tour, drame horrifique, La Petite, qui offrait à Fabrice Luchini l’un de ses plus beaux rôles, Dans la peau de Blanche Houellebecq, sa troisième collaboration avec Michel Houellebecq dans son propre rôle, après L’Enlèvement de Michel Houellebecq et Thalasso, puis enfin, le film qui nous intéresse aujourd’hui, Sarah Bernhardt, la Divine. Comme son titre l’indique, ce dernier est un biopic consacré à l’actrice Sarah Bernhardt (1844-1923), également peintre et sculptrice, considérée comme une des plus importantes comédiennes françaises du XIXe et du début du XXe siècle, première star internationale, appelée par Victor Hugo « la Voix d’or », mais aussi par d’autres « la Divine » ou encore « l’Impératrice du théâtre », l’une des plus grandes tragédiennes de tous les temps, qui avait connu un triomphe sur les cinq continents. La légende raconte aussi que Jean Cocteau aurait créé pour elle l’expression « monstre sacré ». C’est Sandrine Kiberlain qui se glisse dans les magnifiques costumes créés par Anaïs Romand (Boléro, De Gaulle, Une vieille maîtresse), habituée des films historiques, et qui livre à cette occasion l’une des plus grandes prestations de toute sa carrière, déjà conséquente et impressionnante. Certains ont pu reprocher un certain académisme à l’ensemble, pourtant Sarah Bernhardt, la Divine demeure comme son sujet, furieusement moderne dans son approche, le récit étant branché directement sur l’ébouriffante énergie de son interprète principale, tandis que le réalisateur s’amuse avec la temporalité de cette existence, en revenant dans le passé, en imbriquant les flashbacks, en dévoilant une artiste qui était chaque seconde en représentation, oubliant souvent la différence entre la scène et la vie réelle. Une grande et belle expérience de cinéma et un rôle en or pour Sandrine Kiberlain, injustement oubliée des César en 2025.

Continuer la lecture de « Test Blu-ray / Sarah Bernhardt, la Divine, réalisé par Guillaume Nicloux »

Test Blu-ray / Anatomie de l’enfer, réalisé par Catherine Breillat

ANATOMIE DE L’ENFER réalisé par Catherine Breillat, disponible en Blu-ray chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Amira Casar, Rocco Siffredi, Alexandre Belin, Manuel Taglang, Jacques Monge, Claudio Carvalho, Carolina Lopes, Diego Rodrigues…

Scénario : Catherine Breillat, d’après son roman Pornocratie

Photographie : Giorgos Arvanitis & Guillaume Schiffman

Musique : D’Julz

Durée : 1h17

Date de sortie initiale : 2004

LE FILM

Au bord de l’ennui, une femme seule et déprimée paie un homosexuel pour qu’il se joigne à elle pour une exploration audacieuse de la sexualité qui durera quatre jours et au cours de laquelle tous deux rejetteront toutes les conventions et briseront toutes les frontières, enfermés à l’écart de la société dans un domaine isolé. Ce n’est qu’en affrontant les aspects les plus inavouables de leur sexualité que l’homme et la femme parviendront à une compréhension pure de la façon dont les sexes se perçoivent l’un l’autre.

Anatomie de l’enfer est le dixième long-métrage de Catherine Breillat et sa seconde collaboration avec Rocco Siffredi, cinq ans après Romance, avec lequel la star du porno faisait ses premiers dans le cinéma dit « traditionnel ». La réalisatrice profite du charisme indéniable de sa tête de bite d’affiche et lui offre un rôle étonnant, évidemment à mille lieues de ce qu’il exécute habitetuellement (décidément), avec lequel il prouve une fois de plus un vrai talent dramatique. Le pari était pourtant risqué, d’autant plus qu’il donne la (douloureuse) réplique à Amira Casar, comédienne éclectique, aussi à l’aise chez Thomas Gilou (les trois premiers volets de La Vérité si je mens!) que chez Anne Fontaine (Comment j’ai tué mon père). Celle-ci commençait à prendre un virage dans sa carrière, se tournant de plus en plus vers le cinéma d’auteur (Carlos Saura, Gaël Morel, les frères Larrieu), Anatomie de l’enfer marquant définitivement un carrefour, une rupture dans sa filmographie. On pourra cette fois encore reprocher à la cinéaste un côté hermétique de certains dialogues (« La fragilité des chairs féminines impose le dégoût et la brutalité »), partis-pris qui pourront faire rire de nombreux spectateurs peu habitués à l’univers de Catherine Breillat, mais aussi cette mauvaise habitude de montrer du doigt les hommes qui salissent tout ce qu’ils touchent, les femmes en particulier et même en premier lieu. Mais Anatomie de l’enfer, film à la durée ramassée (1h15 montre en main) parvient sans mal à créer un état d’hypnose, un engourdissement (pour ne pas une dire une léthargie pour certains), pour que l’on puisse aller au bout de cette « expérience » menée à la fois par la réalisatrice, mais aussi de ses personnages-marionnettes.

Continuer la lecture de « Test Blu-ray / Anatomie de l’enfer, réalisé par Catherine Breillat »

Test Blu-ray / Visions, réalisé par Yann Gozlan

VISIONS réalisé par Yann Gozlan, disponible en DVD & Blu-ray le 24 janvier 2024 chez M6 Vidéo.

Acteurs : Diane Kruger, Mathieu Kassovitz, Marta Nieto, Amira Casar, Grégory Fitoussi, Élodie Navarre, Romain Fleury, Yun Lai…

Scénario : Yann Gozlan, Michel Fessler, Aurélie Valat, Jean-Baptiste Delafon & Audrey Diwan

Photographie : Antoine Sanier

Musique : Philippe Rombi

Durée : 2h03

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Estelle Vasseur est commandante de bord long courrier, au professionnalisme hors pair, elle mène une existence parfaitement réglée aux côtés de Guillaume, son mari aimant et protecteur. Tout semble aller pour le mieux même si les vols et les jet lag à répétition commencent à perturber le rythme biologique de la jeune femme, et particulièrement son sommeil. Un jour, par hasard, dans un couloir de l’aéroport de Nice, elle recroise la route d’Ana, photographe avec qui elle a eu une aventure passionnée vingt ans plus tôt. Estelle est alors loin d’imaginer que ces retrouvailles vont l’entraîner dans une spirale cauchemardesque et faire basculer sa vie dans l’irrationnel.

Bien que présent depuis plus de dix ans dans le panorama du cinéma français, le réalisateur Yann Gozlan (né en 1977) aura dû attendre 2021 pour toucher le grand public avec le succès de Boîte noire (1,2 millions d’entrées), multi-récompensé et auréolé de cinq nominations aux César. Qu’ils soient réussis (Captifs, Burn Out, Boîte noire) ou pas (Un homme idéal), ses films ont toujours démontré un savoir-faire indéniable, un style qui n’a eu de cesse de s’aiguiser et une ambition finalement rare dans nos contrées. Difficile de passer après un triomphe et Yann Gozlan n’aura pas attendu longtemps, puisque Visions devait débarquer sur les écrans deux ans quasiment jour pour jour après la sortie de Boîte noire. Ce thriller érotico-fantastico-psychologique allait décontenancer le public. Avec un budget avoisinant les 9 millions d’euros, Visions ne parviendra même pas à franchir la barre des 200.000 spectateurs. Un échec important et pourtant le cinquième long-métrage du metteur en scène apparaît comme étant le plus recherché sur le plan visuel. Avec sa magnifique photographie stylisée signée Antoine Sanier (King, Hors normes, Leatherface, Santa & Cie), Visions est l’un des plus beaux films hexagonaux de l’année 2023. Sans doute trop gourmand et désireux de montrer cette fois encore qu’il en a sérieusement sous le capot, Yann Gozlan aurait toutefois mérité de tailler dans son scénario, d’assécher son intrigue qui s’étend sur plus de deux heures, ce qui peut paraître long pour le spectateur quand celui-ci est perdu dans un labyrinthe mental, d’autant plus que certains éléments demeureront mystérieux. Mais Visions est une véritable expérience sensorielle et immersive, composée de motifs récurrents dans l’oeuvre de son auteur, au point que certains font étonnamment écho à Boîte noire, comme si les deux opus dialoguaient parfois. Il s’agit bel et bien d’un film d’auteur, qui n’a de cesse d’explorer des thèmes obsessionnels et qui prouve une nouvelle fois toute la virtuosité d’un artiste arrivé à sa pleine maturité et qui possède enfin les moyens de s’exprimer. Si Visions ne fera jamais l’unanimité, heureusement d’ailleurs, on ne pourra pas nier cette folie furieuse de faire du vrai, du bon, du grand cinéma.

Continuer la lecture de « Test Blu-ray / Visions, réalisé par Yann Gozlan »