Test Blu-ray / Ça, réalisé par Andy Muschietti

ÇA (It) réalisé par Andy Muschietti, disponible en DVD, Blu-ray et 4K Ultra HD chez Warner Bros. le 24 janvier 2018

Avec :  Bill Skarsgård, Jaeden Lieberher, Finn Wolfhard, Jack Dylan Grazer, Sophia Lillis, Jeremy Ray Taylor, Wyatt Oleff, Chosen Jacobs…

Scénario : Chase Palmer, Cary Fukunaga, Gary Dauberman d’après le roman Ça de Stephen King

Photographie : Chung Chung-hoon

Musique : Benjamin Wallfisch

Durée : 2h14

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

À Derry, dans le Maine, sept gamins ayant du mal à s’intégrer se sont regroupés au sein du « Club des Ratés ». Rejetés par leurs camarades, ils sont les cibles favorites des gros durs de l’école. Ils ont aussi en commun d’avoir éprouvé leur plus grande terreur face à un terrible prédateur métamorphe qu’ils appellent « Ça »…
Car depuis toujours, Derry est en proie à une créature qui émerge des égouts tous les 27 ans pour se nourrir des terreurs de ses victimes de choix : les enfants. Bien décidés à rester soudés, les Ratés tentent de surmonter leurs peurs pour enrayer un nouveau cycle meurtrier. Un cycle qui a commencé un jour de pluie lorsqu’un petit garçon poursuivant son bateau en papier s’est retrouvé face-à-face avec le Clown Grippe-Sous … 

Tout d’abord, revenons en arrière. C’est une madeleine pour beaucoup de (télé)spectateurs, une mini-série culte qui compte des millions de fans à travers le monde et qui en gagne sans cesse de nouveaux, notamment en France où elle est très régulièrement diffusée sur la TNT après avoir été programmée pendant des années sur M6, sa première diffusion à la télé française remontant à octobre 1993 : Ça, plus connu en France sous le titre « Il » est revenu. Périodiquement, la ville de Derry dans le Maine est hantée par une terrible créature, un clown pervers capable de changer à loisir d’apparence afin de personnifier les peurs les plus intimes de ses victimes. Dans les années 1950, des événements tragiques se produisent à nouveau. S’attaquant uniquement aux enfants, qui disparaissent ou qui sont retrouvés morts dépecés, «Ça» est un jour vaincu par un groupe de sept jeunes amis de onze ans, six garçons et une fille, ayant fait la promesse de toujours poursuivre l’odieuse entité, qui a disparu dans les égouts abandonnés. Trente ans plus tard, alors que chacun mène une vie paisible aux quatre coins du pays, «Ça» réapparaît à nouveau à Derry. Conformément à leur promesse, le groupe des sept devra se reformer à l’âge de 40 ans pour affronter ses peurs d’enfants.

En 1990, cette adaptation est un événement. Certes, les plus passionnés du chef d’oeuvre absolu de Stephen King publié en 1986 trouveront toujours à redire sur sa transposition, le ton édulcoré pour toucher une plus large audience, les changements inévitables apportés pour le passage du livre à l’écran, mais Ça demeure une véritable référence et finalement le livre et la mini-série en deux parties se complètent parfaitement. D’ailleurs, ceux qui auront vu la mini-série avant de lire le roman, projetteront inévitablement le visage des comédiens au fil de mots du maître de l’horreur.

Le casting est remarquable, que ce soit les enfants ou les adultes, tous extrêmement attachants et solidement dirigés par Tommy Lee Wallace (Halloween 3 : Le Sang du sorcier, Vampire, vous avez dit vampire ? 2), qui par ailleurs soigne sa mise en scène et regorge d’inventions pour faire peur et divertir. L’alchimie entre les deux groupes est indéniable et participe à l’immersion du spectateur dans cette histoire fantastique, qui en a traumatisé plus d’un, au point d’en devenir coulrophobiques, autrement dit phobique des clowns. Il faut dire que Tim Curry est particulièrement angoissant dans le rôle-titre et signe une de ses plus grandes performances après The Rocky Horror Picture Show de Jim Sharman et Legend de Ridley Scott. Si ses apparitions sont finalement limitées sur plus de trois heures, chacune demeure marquante et donne de nombreuses sueurs froides, tant aux personnages qu’aux spectateurs.

Si la télévision ne bénéficiait pas des mêmes budgets et de la même liberté créatrice qu’aujourd’hui, Ça« Il » est revenu fait partie de ces rares productions devenues des classiques dès leur première diffusion. Avec son aspect film-noir, notamment avec le personnage de Mike Hanlon qui mène son enquête et dont les mémoires sont dites en voix-off, combiné à une histoire fantastique, d’horreur, d’épouvante, dramatique, d’amour et d’amitié (les retrouvailles du Club des paumés 30 ans après sont très émouvantes), Ça traverse les décennies sans prendre de rides – à part au niveau des effets spéciaux, mais est-ce bien là le plus important ? – et reste précieux dans le coeur des spectateurs.

En juillet 2015, alors qu’il travaille sur une nouvelle transposition du roman de Stephen King, le réalisateur Cary Fukunaga (la première saison de True Detective) quitte finalement le projet suite à des divergences avec la production, qui trouve alors ses idées trop sombres, d’autant plus que le studio souhaitait faire un seul et unique long métrage et non deux comme le désirait le réalisateur. Dommage, d’autant plus le comédien Will Poulter (glaçant dans Detroit de Kathryn Bigelow), qui devait interpréter Pennywise, quitte également le navire. Néanmoins, la Warner Bros. fait finalement appel au cinéaste argentin Andrés Muschietti, révélé par Mamá, pour reprendre le flambeau. Moins torturée, moins sanglante et sexuelle que l’approche de son prédécesseur, Andrés Muschietti livre néanmoins une version très prenante du roman de Stephen King. A titre de comparaison, cette nouvelle mouture 2017 fait moins peur que le téléfilm original et effraie beaucoup moins que le livre. Néanmoins, marqué par des références aux productions Amblin (la première partie a d’ailleurs été déplacée dans les années 1980), Ça version 2017 peut compter sur un casting admirable, avec tout d’abord la nouvelle incarnation du Clown par Bill Skarsgård.

Fils de l’acteur Stellan Skarsgård et frère d’Alexander (True Blood, Melancholia, Tarzan), le jeune comédien de 27 ans s’avère remarquable et sa prestation ne cherche jamais à rivaliser ou à égaler celle inoubliable de Tim Curry. Il s’agit d’un autre Pennywise, plus monstrueux, et bien que ses apparitions restent dispersées sur 2h15, Bill Skarsgård crève l’écran. Cette première partie se focalise uniquement sur l’enfance des personnages, contrairement au téléfilm qui croisait les deux époques. Le chapitre 2 prévu dans les salles en septembre 2019, se concentrera sur la partie adulte, avec quelques flashbacks sur les personnages enfants. Le nouveau club des ratés se compose d’exceptionnels comédiens, bourrés de talent et au charisme magnétique : Jaeden Lieberher – Bill Denbrough (Midnight Special), Finn Wolfhard – Richie Tozier (Mike Wheeler dans la série Stranger Things), Sophia Lillis – Beverly Marsh (immense révélation), Jack Dylan Grazer – Eddie Kaspbrak, Wyatt Oleff – Stan Uris, Jeremy Ray Taylor – Ben Hanscom et Chosen Jacobs – Mike Hanlon. Un casting haut de gamme et tous très prometteurs.

Pour celles et ceux qui attendaient une adaptation fidèle au roman, sachez que ce n’est pas le cas ici. Si la première séquence, celle qui oppose le petit Georgie au Clown dans le caniveau se révèle être plus sanglante, Ça 2017 surfe plutôt sur la nostalgie des divertissements des années 1980, dans ses partis pris et dans son atmosphère. Certes, cela peut paraître déconcertant, mais le film d’Andy Muschietti est un fabuleux et très attachant divertissement, excellemment mis en scène, photographié et interprété, drôle, poétique, mélancolique et qui contient son lot de séquences morbides à défaut d’être réellement effrayantes.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Ça, disponible chez Warner Bros., est disposé dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un fourreau cartonné. Le menu principal est fixe et musical.

Contrairement au Blu-ray d’Il est revenu sorti en 2016, l’éditeur ne vient pas les mains vides et propose une heure de suppléments.

Le premier module se focalise sur la transformation et la performance de Bill Skarsgård en Pennywise (16’), à travers quelques images de tournage et les propos des comédiens, de la productrice Barbara Muschietti (sœur du cinéaste) et du réalisateur Andy Muschietti. Pas un mot sur l’ancienne version et le travail de Tim Curry, mais Bill Skarsgård indique point par point comment il a su s’approprier ce rôle emblématique. Chose amusante, l’acteur a su faire des économies à la production en se passant d’effets visuels pour la lèvre inférieure pendante du personnage, ainsi que son strabisme et même pour l’ensemble des cascades. Pour l’anecdote, Bill Skarsgård n’est arrivé sur le plateau que deux mois après le début des prises de vue et n’est apparu devant ses jeunes partenaires qu’au dernier moment afin de préserver la surprise.

Le documentaire suivant donne cette fois la parole à l’ensemble du club des losers (16’). Les merveilleux jeunes acteurs interviennent à tour de rôle pour parler de leurs personnages, mais aussi et surtout de la véritable alchimie et l’amitié nées sur le plateau. De nombreuses images de tournage viennent également illustrer l’ensemble.

Place au maître Stephen King en personne (14’), qui propose un retour sur les origines et ses inspirations de son roman Ça. Nous sommes étonnés d’apprendre que de nombreux faits divers survenus à Bangor (dans le Maine) ont grandement inspiré l’histoire, tout comme la topologie de la ville.

Les scènes coupées ou rallongées (15’) n’apportent pas grand-chose, si ce n’est un prologue tourné comme un gag raté (en gros Georgie récupère son bateau et Pennywise pousse un juron devant son échec) et la Bar Mitsvah dans son intégralité de Stan durant laquelle le jeune homme fustige l’aveuglement des adultes sur les mystérieuses d’enfants à Derry depuis toujours.

L’Image et le son

Sublime. Warner Bros. soigne son master HD qui se révèle exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, y compris sur séquences sombres, avec une image sans cesse affûtée. La clarté demeure frappante, le piqué est acéré, les gros plans riches, les contrastes denses et la colorimétrie reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les volontés artistiques du chef opérateur Chung-hoon Chung (Mademoiselle, Stoker, Old Boy). Ce Blu-ray offre de fabuleuses conditions pour revoir le film d’Andy Muschietti et profiter de la superbe photographie. L’apport HD sur ce titre est évidemment indispensable.

Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1 (ou Dolby Atmos si votre installation vous le permet) est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances fusent de tous les côtés, la musique de Benjamin Wallfisch (Blade Runner 2049, A Cure for Life) bénéficie d’un traitement de faveur avec une large ouverture, plongeant instantanément le spectateur dans l’ambiance. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale tandis que les effets ne cessent d’être balancés de gauche à droite, et des enceintes avant vers les arrières. N’oublions pas le caisson de basses, qui se mêle ardemment à ce spectacle acoustique aux effets fracassants.

Crédits images : © WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Liaisons à New York, réalisé par Marc Webb

LIAISONS À NEW YORK (The Only Living Boy in New York) réalisé par Marc Webb, disponible en DVD chez Metropolitan Vidéo le 21 février 2018

Avec :  Callum Turner, Kate Beckinsale, Jeff Bridges, Pierce Brosnan, Cynthia Nixon, Kiersey Clemons, Debi Mazar, Tate Donovan, Wallace Shawn…

Scénario : Allan Loeb

Photographie : Stuart Dryburgh

Musique : Rob Simonsen

Durée : 1h25

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Thomas Webb, vient de décrocher son diplôme universitaire et tente désormais de trouver sa place dans le monde. Le jeune homme se lie d’amitié avec son voisin, un écrivain excentrique, qui devient pour lui une sorte de mentor. Thomas fait un jour la connaissance de la maîtresse de son père, très vite une relation charnelle s’installe entre eux, bouleversant sa vie et ses convictions.

Révélé en 2009 par le désormais culte (500) jours ensemble, avec Joseph Gordon-Levitt et Zooey Deschanel, le réalisateur Marc Webb, venu du clip-vidéo, a immédiatement été convoité par les studios hollywoodiens. Pour son second long métrage, il fait son entrée par la très grande porte en se voyant confier un budget de 230 millions de dollars pour rebooter la franchise Spider-Man. The Amazing Spider-Man sort sur les écrans en 2012 et engrange plus de 750 millions de dollars de recette. La suite est évidemment lancée, mais le résultat sera beaucoup plus mitigé artistiquement parlant. Si le tiroir-caisse est rempli une fois de plus, le succès est moindre, la critique désastreuse et le bouche-à-oreille très négatif. Osons le dire, The Amazing Spider-Man 2 est l’un des pires films de super-héros et s’apparente le plus souvent à jeu vidéo destiné aux enfants et aux adolescents. Bye bye Marc Webb qui finalement ne pourra pas réaliser de trilogie consacrée à l’Homme-Araignée, d’autant plus que les pourparlers étaient déjà en cours entre Sony et Marvel pour rapatrier le héros à la maison mère. Après un détour par la série télévisée (Limitless, Crazy Ex-Girlfriend), Marc Webb signe son retour au cinéma avec deux très beaux films à petit budget, deux réussites. Le premier, Mary (Gifted), bénéficie d’une sortie dans les salles françaises et offre à Chris Evans l’occasion de montrer qu’il n’est pas que Captain America. Mais celui qui nous intéresse ici est plus confidentiel et débarque directement dans les bacs en France. Il s’agit de Liaisons à New YorkThe Only Living Boy in New York.

Thomas Webb, un étudiant fraichement diplômé issu d’une riche famille d’éditeurs New Yorkais, rêve en secret de devenir écrivain. Velléitaires et souvent maladroit avec les filles, c’est encore un adolescent dans sa tête… jusqu’au jour où il surprend son père en plein rendez-vous romantique avec une très belle femme. Voulant protéger sa mère de nature fragile, il décide de ne rien lui dire. Obsédée par cette vision, il décide de découvrir l’identité de cette liaison extra-conjugale et parvient très vite à faire la connaissance de Johanna. Contre toute attente, elle décide de faire de Thomas son autre amant. Tiraillé entre morale et passion, Thomas va vivre de façon tumultueuse son entrée dans l’âge adulte.

Le titre renvoie à la chanson éponyme des mythiques Simon & Garfunkel. Rien d’étonnant puisque le scénariste éclectique Allan Loeb (Las Vegas 21, Wall Street: l’argent ne dort jamais, Beauté cachée) n’a jamais caché son admiration pour le cinéma de Mike Nichols, en particulier pour Le Lauréat, dont Liaisons à New York est comme qui dirait une relecture. Le spectre du Graduate plane donc sur ce récit initiatique où l’on suit le parcours de Thomas Webb, interprété par le sympathique Callum Turner (Assassin’s Creed), qui rappelle furieusement Richard Gere dans ses jeunes années. Partagé entre son amour pour la jeune et jolie Mimi (Kiersey Clemons) et sa découverte de la sexualité avec la maîtresse de son père, incarnée par la divine Kate Beckinsale, Thomas se retrouve au premier carrefour de sa vie puisqu’il doit également choisir sa profession. Rêvant de devenir écrivain, mais refroidi par les propos de son père éditeur (Pierce Brosnan), Thomas ne peut même pas compter sur sa mère (Cynthia Nixon), femme dépressive. Alors quand Thomas surprend son paternel avec une autre femme, ses piliers déjà fragiles s’écroulent véritablement. Le seul soutien qu’il trouve est en la personne de son nouveau voisin (Jeff Bridges), qui va très vite devenir son confident et tenter de lui montrer qu’il peut et doit être le seul à décider de sa propre vie. Pour cela, il doit tout d’abord apprendre, comprendre et savoir ce qu’il souhaite réellement faire de sa propre existence, plutôt que de se préoccuper de celles et de ceux qui l’entourent.

Comme pour (500) jours ensemble et Mary, Liaisons à New York témoigne de l’immense sensibilité de Marc Webb, qui livre une comédie dramatique finement écrite, intimiste, délicate, très bien réalisée et interprétée. Malgré un twist qui arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, il serait dommage de passer à côté de cette histoire très attachante.

LE DVD

Le test du DVD de Liaisons à New -York, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et musical. Jaquette élégante.

Peu de choses à se mettre sous la dent dans la section des bonus. Trois featurettes promotionnelles (11’ au total), donnent brièvement la parole au scénariste, au réalisateur, au chef-opérateur, aux producteurs et aux comédiens. Chacun revient sur le dilemme des personnages et le tournage à New York. On apprend que le scénario avait été écrit en 2004, que Le Lauréat est évidemment une source d’inspiration pour Allan Loeb et que la production a imposé un tournage écolo-responsable.

L’Image et le son

Pas d’édition HD pour Liaisons à New York. Ce master offre des conditions de visionnage banales et sans esbroufe. La colorimétrie est plutôt bien agencée, mais la définition demeure passable, même sur les quelques plans rapprochés. La clarté est de mise, les contrastes corrects, cependant le piqué manque de précision et certaines séquences apparaissent plus ternes que d’autres. Néanmoins, ce DTV chez un autre éditeur n’aurait pas connu le même traitement technique ou même une sortie dans les bacs.

Liaisons à New York n’est pas à proprement parler d’un film à effets, mais les pistes anglaise et française Dolby Digital 5.1 parviennent à distiller ici et là quelques ambiances. La plupart des séquences reposent sur les dialogues et les mixages se concentrent souvent sur les enceintes avant. Il ne faut pas vous attendre à des effets explosifs, la spatialisation est essentiellement musicale, les effets latéraux sont rares (à part la cacophonie new-yorkaise) et le caisson de basses reste au point mort. Les voix des comédiens sont ardentes en version originale, tout comme en français, même si cette piste les met un peu trop à l’avant. Le confort acoustique est assuré tout du long.

Crédits images : © AMAZON CONTENT SERVICES LLC. / Metropolitan Filmexport /  Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

 

Test Blu-ray / Zardoz, réalisé par John Boorman

ZARDOZ réalisé par John Boorman, disponible en DVD et Blu-ray chez Movinside le 13 novembre 2017

Avec :  Sean Connery, Charlotte Rampling, John Alderton, Sara Kestelman, Sally Anne Newton, Niall Buggy, Bosco Hogan, Jessica Swift…

Scénario : John Boorman

Photographie : Geoffrey Unsworth

Musique : David Munrow

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

2293. La Terre a été totalement dévastée et la société est divisée en plusieurs castes : les Brutes, les Exterminateurs et les Barbares qui vouent un culte sans limites au dieu Zardoz. Tous oeuvrent pour les Éternels, un groupe d’humains immortels. Ce nouvel équilibre social va être bouleversé lorsque Zed, un Exterminateur, décide de pénétrer chez les Éternels, défiant ainsi le dieu Zardoz…

Pour la plupart, Zardoz se résume à l’accoutrement de Sean Connery dans le film. En effet, difficile d’échapper aux photogrammes du comédien avec sa grosse moustache à la Burt Reynolds (à qui le rôle avait d’abord été proposé), son catogan, sa cartouchière placée sur son torse velu, son cache-sexe rouge bombé et ses cuissardes en vinyle. D’ailleurs, nombreux sont ceux à avoir classé Zardoz – sans l’avoir vu – dans la catégorie nanar, ce qu’il n’est absolument pas. Malgré tout, le sixième long métrage de John Boorman, réalisé deux ans après Délivrance, demeure une vraie curiosité, souvent hermétique, qui vaut essentiellement pour ses recherches plastiques. Mais quand si l’on creuse un peu, on se rend compte que Zardoz va bien plus loin.

D’entrée de jeu, nous voilà plongés en 2293. Ce que nous pouvons comprendre : 300 ans après l’effondrement de la civilisation industrielle, dans un futur post-apocalyptique, la population humaine est divisée entre les Éternels, des humains ayant atteint l’immortalité grâce à la technologie, et les Brutes. Ces derniers vivent sur une terre ravagée et fournissent de la nourriture aux Éternels, peuplés de savants et d’intellectuels, qui vivent dans des régions isolées du reste du monde par un mur invisible et appelées « Vortex » et passent une existence luxueuse mais apathique. Arthur Frayn (Niall Buggy), l’Éternel chargé de gérer les « terres extérieures », se fait passer auprès des Brutes pour un dieu nommé Zardoz, qui se manifeste sous la forme d’un énorme masque de pierre volant. Ayant sélectionné des brutes, il a constitué un groupe d’exterminateurs, chargé de réduire en esclavage les autres humains, et auxquels il fournit des armes en échange de la nourriture qu’ils collectent. Zed (Sean Connery) est un de ces exterminateurs. Il se cache à bord du masque de pierre lors d’un voyage. Arrivé au Vortex, Zed est étudié en tant que spécimen : les Éternels n’ayant pas eu de contact depuis des siècles avec l’extérieur, ils essaient de comprendre comment les Brutes ont évolué. Il se retrouve au cœur d’une dissension entre deux Éternelles, Consuella (Charlotte Rampling) et May (Sara Kestelman), et doit effectuer des tâches pour Friend (John Alderton).

Zed découvre au fur et à mesure que cette société en apparence lissée et idéale est en fait violente et désespérée. Les Éternels sont dirigés et protégés de la mort par une intelligence artificielle appelée « le Tabernacle », un gros cristal qui est relié à l’esprit de tous les Éternels et qui conserve leur mémoire dans ses réflexions lumineuses. Du fait de leur immortalité, les Éternels ont arrêté de procréer et les hommes sont devenus impuissants. Certains sont victimes d’une maladie, qui les plonge en catatonie. Les dissidents, ceux qui refusent le système ou bien introduisent la discorde, sont vieillis, voire sont exclus et sont délibérément rendus séniles.

Voilà, bienvenue dans Zardoz, dont le nom provient du livre L. Frank Baum, The WiZARD of OZ, que le personnage de Sean Connery découvre dans une bibliothèque en ruine à l’extérieur du Vortex. Cette révélation le met alors face aux réalités, tout n’est que supercherie, d’autant plus que Zed, contrairement à ce que pensent les Eternels, n’est pas non plus un être primitif. Analyser ainsi Zardoz permet de réévaluer le film de John Boorman. Des manipulations politiques destinées à voiler la réalité, afin d’engranger des ressources naturelles. Plus près de nous, cela rappelle furieusement l’invasion de l’Irak en 2003 sous l’administration W. Bush. Mais Zardoz est une œuvre tellement étrange, difficile d’accès et marquée par une esthétique kitsch, que chacun est en fait libre d’y voir et de ressentir ce qu’il a envie. Les personnages et divinités ne sont pas ce qu’ils paraissent être, tout n’est que faux-semblants et superstitions, ce qui permet à la société de demeurer au lieu de penser et de réfléchir.

Zed apparaît comme le grain de sable qui va faire enrayer une machine jusqu’alors trop bien huilée. Son apparition dans le Vortex va ainsi rendre leur mortalité aux Éternels. Du point de vue formel, John Boorman joue avec les moyens mis à sa disposition et des effets spéciaux certes désuets, mais qui n’en restent pas moins bourrés de charme. On s’amusera des scènes dans le Tabernacle ou des trips psychédéliques qui rappellent parfois le Barbarella de Roger Vadim. Magnifiquement photographié par l’immense chef opérateur Geoffrey Unsworth, Zardoz, écrit, produit et mis en scène par John Boorman, est une fable philosophique qui ne laisse pas indifférent avec ses images éthérées sur fond de 7e symphonie de Beethoven et Sean Connery qui court torse-poil au ralenti avec sa queue-de-cheval qui se balance sur ses épaules. Pas un chef d’oeuvre de la science-fiction certes, en aucun cas un navet et encore moins un nanar, mais un film culte assurément.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Zardoz, disponible chez Movinside, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. Visuel très beau et attractif. Le menu principal est un peu plus cheap, animé et muet…

Spécialiste du cinéma américain et notamment du Nouvel Hollywood, Jean-Baptiste Thoret replace le sixième long métrage de John Boorman dans son contexte cinématographique, en croisant habilement le fond et la forme. Toujours aussi didactique, spontané et captivant, notre interlocuteur explique que John Boorman a ouvert sa propre boîte de Pandore avec Zardoz. Jean-Baptiste Thoret trouve le film passionnant, dissèque les thèmes explorés par le cinéaste, détaille les conditions de production et l’implication de Sean Connery – dont le costume a longtemps été moqué et l’est d’ailleurs encore aujourd’hui – qui souhaitait s’éloigner encore et toujours du personnage de James Bond. Une formidable présentation (26’).

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Bon…en tant que puristes, nous ne pouvons pas laisser passer ça. Le bulldozer DNR est passé par là une fois de plus chez l’éditeur et la texture argentique de la merveilleuse photographie de l’immense Geoffrey Unsworth (Superman, Cabaret) a été lissée quasiment intégralement. C’est bien beau de proposer des films rares en Haute-Définition, mais pourquoi dénaturer les partis pris esthétiques et volontés artistiques ? Pour satisfaire certains consommateurs qui ne jurent que par une image sans aspérité ? Comme si le film avait été tourné en numérique ! Si la propreté de la copie est indéniable, on ne peut que tiquer tout du long face à l’aspect cireux des visages et sa définition chancelante. Certes, les photographies souvent éthérées du chef opérateur britannique ont toujours donné du fil à retordre aux éditeurs, mais là on frôle le blasphème. Les détails manquent à l’appel, la gestion des contrastes est aléatoire, tout comme le piqué. Un conseil pour Movinside, STOPPEZ le réducteur de bruit ! Le Blu-ray est néanmoins au format 1080p.

Les mixages anglais et français LPCM 2.0 distillent parfaitement la musique de David Munrow, ainsi que la 7e symphonie de Ludwig van Beethoven. Néanmoins, la piste française se focalise sans doute trop sur le report des voix (Jean-Claude Michel double Sean Connery), au détriment des ambiances annexes. La piste originale est très propre, sans souffle, dynamique et suffisamment riche pour instaurer un très bon confort acoustique.

Crédits images : © Twentieth Centyru Fox Home Entertainment / Movinside Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Flagellations, réalisé par Pete Walker

FLAGELLATIONS (House of Whipcord) réalisé par Pete Walker, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Artus Films le 6 mars 2018

Avec :  Barbara Markham, Patrick Barr, Ray Brooks, Ann Michelle, Sheila Keith, Dorothy Gordon…

Scénario : Pete Walker, David McGillivray

Photographie : Peter Jessop

Musique : Stanley Myers

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Jeune mannequin français vivant à Londres, Anne-Marie se laisse séduire par Mark, qui l’emmène chez ses parents, dans une vieille et grande maison de campagne. Elle comprend bien vite qu’elle n’est qu’une proie de plus, donnée en pâture à Mme Wakehurst, une ancienne directrice de prison pour femmes, et son mari, le juge Bailey. Sous prétexte de rédemption et de lutte contre la dépravation, ces deux pervers assouvissent en fait leur sadisme et leur perversité.

Etrange long métrage que Flagellations, aka House of Whipcord en version originale, écrit par David McGillivray et réalisé par Pete Walker en 1974, cinéaste britannique qui a fait les grandes heures de la sexploitation et de l’épouvante, de la fin des années 1960 au début des années 1980. Né en 1939, Pete Walker débute par des courts-métrages dénudés (Soho Striptease, The Girl That Boys Dream About, Please Do Not Touch) qu’il produit lui-même et revend sous le manteau, avant de passer au long-métrage en 1968 avec The Big Switch. Suivront alors des œuvres aux titres explicites L’Ecole du sexe, Der Porno-Graf von Schweden, Four Dimensions of Greta en relief !. Puis, il change de registre en abordant l’épouvante avec Meurs en hurlant, Marianne et Le Rideau de la mort. Pour les aficionados, les cinéphiles et les amateurs de films de genre, Flagellations reste et demeure son meilleur film. Si l’on est tout d’abord attiré par la sublime affiche qui vend une belle créature en prise avec des matrones mal intentionnées et armées d’un fouet qui donne son titre au film en anglais, Flagellations ne se contente pas de ces quelques ingrédients qui servent finalement à appâter les spectateurs. C’est aussi et surtout un thriller tendu et violent, emblématique de la situation politique britannique alors extrêmement rigoriste et rétrograde.

Anne-Marie DeVarnet (la belle Penny Irving), est une top-modèle venue de France pour tenter sa chance en Angleterre. Remarquée pour avoir fait quelques clichés dénudés, elle se voit inviter lors d’une soirée par un inconnu, un certain Mark E. Desade (Robert Tayman, vu dans Le Cirque des vampires de Robert Young), qui lui propose de l’emmener chez ses parents. Julia accepte et se retrouve dans une gigantesque demeure qui semble inhabitée. Elle va bientôt découvrir le secret de cet endroit insolite et de sa présence ici : elle vient en réalité de se faire kidnapper et se retrouve devant une directrice (Barbara Markham, glaçante), son mari aveugle (Patrick Barr) et deux gardiennes sadiques (Sheila Keith et Dorothy Gordon) qui vont lui inculquer le savoir-vivre, sous peine de lui faire subir quelques tortures dont la punition du fouet. La demeure entourée de hauts murs impénétrables et plantée au milieu de nulle part dans la campagne anglaise est une ancienne prison abandonnée devenue un lieu de séquestration pour jeunes filles, dirigée par des individus prônant le retour de l’ordre moral et de la civilité.

Non seulement Pete Walker parvient à flatter son public de base, souvent plus intéressé par les formes exposées des jolies actrices que par l’histoire qui leur est racontée, mais le réalisateur parvient également à dresser un constat aussi réaliste que pessimiste sur l’Angleterre au début des années 1970. Les institutions et autorités en prennent pour leurs grades, Pete Walker n’hésitant pas à fustiger des juges (également bourreaux) qui décident de rendre une autre justice, en punissant des jeunes femmes qui enfreignent selon eux les codes moraux. Décidées à les faire revenir dans le droit chemin, des gardiennes revêches, vieilles filles, à la sexualité refoulée et dépourvue de sentiments, ont alors recours à des méthodes brutales en traitant ces jeunes « délurées » comme des animaux parqués dans d’anciennes cellules glauques et suintantes.

Si l’une des pensionnaires vient à fauter, celle-ci est mise en isolement. En cas de récidive, elle est déshabillée et fouettée. Si jamais la pécheresse venait à commettre une troisième faute, elle est condamnée à être pendue. Le processus de déshumanisation est en cours. Même s’il a toujours nié faire passer un message politique dans ses films qu’il revendiquait comme étant uniquement commerciaux, Flagellations – titre français évidemment racoleur et pas du tout représentatif de l’histoire – incite à la réflexion. Ceci dès le carton introductif « Ce film est dédié à ceux que le relâchement des codes moraux actuels inquiète et qui attendent impatiemment le retour du châtiment corporel et de la peine de mort » jusqu’à la fin redoutablement sombre avec ses costumes ternes et la photographie pluvieuse de Peter Jessop.

Alors que la Hammer est morte en emportant avec elle ses créatures démoniaques et ses couleurs baroques, des monstres apparaissent en déambulant dans la société d’aujourd’hui sous un ciel grisâtre. Joyaux de la British Horror, Flagellations, classé X à sa sortie, s’apparente plus à un thriller psychologique et pervers dont le statut culte n’est pas usurpé.

LE BLU-RAY

Avec Flagellations, l’éditeur Artus Films signe ses premiers pas dans le domaine de la Haute-Définition. Le film de Pete Walker est chouchouté puisque disponible dans un beau combo Blu-ray-DVD. Le visuel est attractif et la jaquette glissée dans un boîtier classique de couleur bleue. Le menu principal est fixe et muet.

Qui de mieux que l’incontournable et érudit David Didelot pouvait nous présenter Flagellations ? Pendant une heure (1h01 pour être précis), le co-fondateur du fanzine Vidéotopsie revient armé jusqu’aux dents de VHS, d’ouvrages et de DVD pour illustrer ses propos toujours aussi passionnants et qui donnent furieusement envie de se jeter sur tous les titres Bis évoqués. Pas un seul moment de répit pour David Didelot qui dans la première demi-heure dresse un fabuleux portrait du réalisateur Pete Walker. Ses débuts au cinéma, ses films, ses partis pris, ses intentions, mais également son ambiguïté sont passés au crible. Ne tarissant pas d’éloges sur ce réalisateur indépendant qu’il affectionne tout particulièrement, David Didelot déclare que Pete Walker mériterait d’être reconsidéré à sa juste valeur. Au bout de 27 minutes, Flagellations est analysé – dans le fond comme dans la forme – par notre spécialiste du Bis, évoquant également le casting, l’accueil critique, la sortie du film et les divers titres d’exploitation tels que La Pension du plaisir ou Mutilator !

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Une belle entrée en fanfare dans la HD pour l’éditeur ! Le transfert est irréprochable, le master immaculé, stable et dépourvu de déchets résiduels. Les noirs sont concis, la colorimétrie est volontairement atténuée et tire vers les gris-bruns. Les décors dépouillés sont omniprésents et les personnages n’ont aucun mal à ressortir devant un fond uni, froidement éclairé, avec de très beaux gros plans qui foisonnent de détails. La gestion des contrastes est également très solide. Malgré un très léger voile apparent sur les séquences nocturnes et tamisées, ainsi que de menus changements chromatiques au cours d’une même séquence ou sur un champ-contrechamp, ce master HD présenté dans son format d’origine 1.66. est exemplaire. Le Blu-ray est au format 1080p.

Le film de Pete Walker bénéficie d’un doublage français, le film étant sorti en 1984 dans nos contrées. Au jeu des comparaisons avec la version originale, la piste française au doublage réussi s’accompagne de quelques chuintements. Véritable gruyère suite à de nombreuses coupes, cette version passe directement en version originale sous-titrée en français lors des séquences jamais doublées. La piste anglaise est plus dynamique, propre et intelligible, homogène dans son rendu, notamment au niveau des effets sonores. Les sous-titres français ne sont pas imposés.


Crédits images : © Artus Films Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Happy End, réalisé par Michael Haneke

HAPPY END réalisé par Michael Haneke, disponible en DVD et Blu-ray chez TF1 Studio le 6 février 2018

Avec :  Isabelle Huppert, Jean-Louis Trintignant, Mathieu Kassovitz, Fantine Harduin, Franz Rogowski, Laura Verlinden, Aurélia Petit, Toby Jones…

Scénario : Michael Haneke

Photographie : Christian Berger

Durée : 1h47

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

« Tout autour le Monde et nous au milieu, aveugles. » Instantané d’une famille bourgeoise européenne.

Pour Happy End, son douzième long métrage, Michael Haneke a voulu s’amuser, se faire plaisir. Bien entendu, ne vous attendez pas une gaudriole devant laquelle on se tape sur les cuisses. Non, ce que le réalisateur a voulu faire, c’est jouer avec la réputation de ses précédentes œuvres controversées et abstraites, en insufflant un humour très sombre et grinçant dans un drame psychologique. Le cinéaste autrichien détourne certains codes du genre, comme s’il était devenu l’un des tueurs sadiques Funny Games, sachant que le spectateur, désormais « complice », venu voir son nouvel opus sera normalement au fait de ses intentions et thèmes récurrents. Dans Happy End (titre aussi ironique que Funny Games), le mal n’est plus montré explicitement à l’écran, pas vraiment du moins, mis à part durant certaines séquences liées aux réseaux sociaux, notamment l’ouverture du film.

L’action se situe à Calais, dans une famille de bourgeois, les Laurent. Industriels concentrés sur leurs affaires, ils « refusent » de voir la crise des migrants. Cette famille est perturbée par l’arrivée d’Eve (glaçante et troublante Fantine Harduin, vue dans Le Voyage de Fanny de Lola Doillon), treize ans, la jeune fille de Thomas (impeccable Mathieu Kassovitz), docteur et fils de George Laurent (Jean-Louis Trintignant, impérial), un vieil homme aigri et suicidaire. Chacun des membres de la famille cache un secret inavouable : Eve a des pulsions meurtrières et a tué sa mère dépressive en l’empoisonnant avec ses antidépresseurs ; son père Thomas trompe sa nouvelle femme frigide avec une violoncelliste, partageant avec lui ses fantasmes sadomasochistes sur Facebook ; Anne (Isabelle Huppert, étrangement effacée dans sa quatrième collaboration avec le cinéaste), la sœur de Thomas, est la mère de Pierre (fragile Franz Rogowski), un homme dépressif qui refuse de diriger leur société, marquée entre-temps d’un accident mortel sur un chantier, ce qui la pousse à se marier avec un homme d’affaires (l’excellent Toby Jones) ; le grand-père George, échouant à se donner la mort à de nombreuses reprises, avoue à sa petite-fille Eve qu’il a lui aussi des envies de mourir et qu’il a étouffé sa femme gravement malade. Ce qui crée évidemment un lien avec Amour, où l’acteur interprétait déjà le père d’Isabelle Huppert. Alors que de nombreux migrants se trouvent à Calais, les Laurent, malgré leurs névroses refoulées, tentent d’ignorer leur arrivée pour vivre comme si de rien n’était.

Voilà en gros ce qui se déroule dans Happy End. C’est peut-être beaucoup, mais en réalité, le film ne démarre quasiment jamais et peine à trouver son rythme. L’ensemble s’apparente à une succession de saynètes et le ton tragi-comique qui a fait le sel d’autres longs métrages de Michael Haneke, ne prend pas cette fois. On attend toujours LA scène qui remuera un peu l’ensemble, sans que celle-ci n’intervienne. Evidemment, certaines séquences remuent, notamment tout ce qui concerne les personnages incarnés par Jean-Louis Trintignant et Fantine Harduin, qui représentent ici les deux extrêmes de la vie et qui se révèlent être aussi las et fatigués de l’existence. Jeunes et vieux sont donc logés à la même enseigne chez Haneke, tandis que les générations intermédiaires se contentent de faux-semblants, de jouer le rôle que le destin leur a distribué, en faisant fi des réalités sociales autour de leur royaume. Déjà qu’ils ne sont pas capables de s’intéresser et de s’occuper des événements dramatiques qui se jouent dans leur propre famille, ce n’est pas pour se préoccuper des migrants !

Toutes ces choses sont intéressantes quand on en parle, elles le sont beaucoup moins quand elles sont représentées à l’écran. Si la forme sèche et minimaliste rappelle Caché, Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 2005, Happy End n’installe pas grand-chose et les personnages n’ont rien d’empathiques. Du coup, aucune accroche ne se fait, on assiste à ce défilé d’excellents comédiens plongés dans des décors froids. Alors qu’habituellement on ressort les nerfs à vif, agacés, bouleversés, d’un film de Michael Haneke, on est ici perplexe, avec la sensation d’avoir gagné un tour de manège supplémentaire, mais qui n’apporte finalement rien par rapport aux précédents, une fois les sensations connues et anticipées. Pour résumer, Happy End apparaît comme un film-somme qui se regarde avec un ennui poli.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Happy End, disponible chez TF1 Studio, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Un making of de vingt minutes accompagne cette édition. C’est ici l’occasion de voir Michael Haneke à l’oeuvre avec ses comédiens, conseiller Franz Rogowski pour la scène de danse, parler avec l’équipe des effets spéciaux pour quelques plans repris en postproduction, mettre en place ses plans avec une folle énergie. Les acteurs interviennent chacun leur tour afin d’évoquer leur collaboration avec le cinéaste. Ce dernier intervient également sur les thèmes explorés dans Happy End, ainsi que sur ses intentions. Quelques images de tournage viennent illustrer l’ensemble. En revanche, visionnez ce documentaire après avoir vu le film puisque toute l’histoire y est racontée du début à la fin.

L’Image et le son

Les volontés artistiques du réalisateur et du chef opérateur Christian Berger (Le Ruban blanc, Caché) sont heureusement préservées à travers cet élégant master HD. La photographie est habilement retranscrite grâce à un encodage costaud. Le cadre subjugue dès les premiers plans, les couleurs froides et même glacées flattent la rétine, le piqué s’en sort avec les honneurs. Les contrastes sont assurés, les détails ne manquent pas, les blancs sont éblouissants et la profondeur de champ demeure soignée.

Un seul mixage au programme, une piste DTS-HD Master Audio 5.1. Le confort acoustique est percutant, une spatialisation convaincante et des effets latéraux probants. Les ambiances naturelles sont présentes sur les scènes en extérieur, la balance frontale est toujours dynamique et équilibrée, et le report des voix solide. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Les Films du Losange / TF1 Studio /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Fellini Roma, réalisé par Federico Fellini

FELLINI ROMA (Roma) réalisé par Federico Fellini, disponible en DVD, Blu-ray et Édition Collector Blu-ray + DVD chez Rimini Editions le 23 janvier 2018

Avec :  Federico Fellini, Anna Magnani, Gore Vidal, Alvaro Vitali, Eleonora Giorgi…

Scénario : Federico Fellini, Bernardino Zapponi

Photographie : Giuseppe Rotunno

Musique : Nino Rota

Durée : 1h55

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Rome durant la première moitié du XXe siècle… A travers ses souvenirs d’enfance ou d’adolescence, Federico Fellini livre la plus belle des déclarations d’amour à sa ville d’adoption. De la nostalgie à la satire, de la truculence au lyrisme, une fresque inoubliable, aux innombrables séquences d’anthologie.

Sans tenir compte des Feux du music-hall, coréalisé avec Alberto Lattuada en 1950, ni du documentaire TV Bloc-notes d’un cinéaste (1969), Fellini Roma apparaît au beau milieu de l’immense filmographie du maître italien. Véritable œuvre centrale de la carrière de Federico Fellini, ce douzième long métrage est à la fois une œuvre bilan, mais également annonciateur de ce que le maestro comptait alors aborder dans ses prochains rêves éveillés, centrés sur ses souvenirs personnels. Chef d’oeuvre absolu que l’on a de cesse de redécouvrir à chaque visionnage, Fellini Roma n’a pas fini de livrer ses secrets.

Rome d’hier et Rome d’aujourd’hui. Fellini, pressé par ses étudiants de signer un cinéma engagé, se penche sur Rome, sa ville d’adoption. Sur la cité antique des souvenirs scolaires, d’abord, celle de la Louve et de Néron, des gladiateurs de cinéma qui côtoyaient, dans les salles obscures, les fascistes des actualités. Sur la Rome de son adolescence, ensuite, qu’il éprouva dès son arrivée dans la capitale, au sein d’une pittoresque pension de famille dominée par l’imposante et impotente «mamma». Peuplée des truculents clients des trattorias, des spectacles minables du music-hall Jovinelli, cette Rome-là fut aussi, pour le jeune provincial de Rimini, le site des premiers désirs amoureux, apaisés dans des maisons plus ou moins accueillantes, sous les grondements des alertes aériennes et des échos de la guerre…

Si Satyricon donnait le ton sur l’orientation formelle et sensorielle de son auteur, Fellini Roma, réalisé après la parenthèse des Clowns, téléfilm finalement exploité dans les salles, transcende les partis pris de sa précédente fresque. Mais là où Satyricon pouvait parfois être pesant, surtout sur le fond particulièrement hermétique, Fellini Roma est un film qui inspire l’empathie. Pourtant, comme l’indique une voix-off en version française qui imite l’accent italien du cinéaste, Fellini Roma ne ressemble à aucun autre film et en complète rupture avec les structures classiques de la dramaturgie. Collage, patchwork, kaléidoscope, maelström, puzzle onirique, instantanés, mirages, hallucinations, fantasmes, Fellini Roma utilise la forme d’un faux reportage pour entrelacer réalité et rêveries, propres au réalisateur italien. Les saynètes et récits n’ont de point commun que la ville de Rome, qui se transforme au fil de la narration, observée par Fellini qui entrecroise les grandes évolutions de la capitale italienne depuis 1900 et ses propres souvenirs liés à son arrivée à la gare de Rome-Termini.

Dans les années 1930, on suit ainsi l’arrivée d’un jeune provincial dans un monde qu’il ne connaît pas, puis l’on passe dans la Rome moderne avec son autoroute périphérique (reconstituée en studio) où des prostituées aguichent les conducteurs. Puis, retour dans les années 1940 où un spectacle populaire se joue dans un music-hall de bas étage, alors que les bombardements aériens sifflent au-dessus de la tête des spectateurs. S’ensuit alors la découverte de sites antiques au moment de la construction du métro, puis retour à l’époque du fascisme avec ses bordels blindés. Enfin, place à un défilé de mise ecclésiastique avec ses toges en néons, avant de laisser la voie libre aux hippies et aux bikers qui déferlent dans les rues de Rome avec la fleur au bout du fusil, Peace & Love autour du cou et leurs motos aux moteurs pétaradants à qui la ville appartient désormais. Tout cela entremêlé, sans ordre chronologique, en prenant le spectateur par surprise, en le perdant pour mieux le déstabiliser.

Furieusement poétique, Fellini Roma est une succession de tableaux vivants peints par le maître, où la beauté de l’architecture côtoie celle des visages (dont celui d’Anna Magnani, dans une apparition subliminale dans son propre rôle) et corps atypiques, avec ses hommes aux faciès émaciés et ses femmes aux seins lourds et aux fesses larges, composantes de la magnificence de la ville. Caricaturiste, Federico Fellini use de la pellicule comme d’une toile et passe d’un modèle à l’autre, en mélangeant les encres pour en faire ressortir les âmes, les senteurs (celles d’un plat de spaghetti, des joues fardées d’une prostituée, de la pollution sur le périphérique) et la cacophonie de Rome. Un fascinant chef d’oeuvre qui n’a de cesse de stimuler l’imagination encore après, justement récompensé par le Grand Prix Technique au Festival de Cannes en 1972.

LE BLU-RAY

Le test de l’édition collector Blu-ray+DVD de Fellini Roma, disponible chez Rimini Editions, a été réalisé à partir d’un check-disc. Cette édition comprend donc le Blu-ray et le DVD du film, ainsi que deux DVD de suppléments comprenant chacun deux modules issus de la série documentaire intitulée Zoom sur Fellini. Les menus principaux sont animés et musicaux. Fellini Roma est également disponible en DVD et Blu-ray standard.

Le Blu-ray contient tout d’abord un entretien avec le réalisateur et scénariste Italo Moscato (22’), qui dans un premier temps, replace Fellini Roma dans la carrière du cinéaste. Il compare l’oeuvre qui nous intéresse à d’autres films de Fellini, puis analyse plus en profondeur les thèmes, les partis pris et les intentions de Federico Fellini. Parallèlement, Italo Moscato évoque l’évolution de Rome à travers les décennies.

Ce disque contient également les célèbres scènes coupées et plans éliminés de Fellini Roma (17’). En introduction, un carton indique que toutes les bobines ont connu des coupes pour des questions de rythme. Les rejets les plus célèbres concernent les séquences à la fête de Noantri dans le Trastevere avec Marcello Mastroianni et Alberto Sordi, qui ont disparu du montage définitif. Les images ont été restaurées par L’Immagine Ritrovata en 2010. Des différences de colorimétrie indiquent quels sont les plans laissés sur le banc de montage.

L’interactivité du Blu-ray se clôt sur deux bandes-annonces.

Jetez-vous immédiatement sur les deux DVD inclus à l’édition collector.

Le premier disque contient les deux premières parties de Zoom sur Fellini (1983 – Gianfranco Angelucci), consacrées aux comédiens qui ont tourné avec le maestro (47’ et 50’). Interviennent pêle-mêle Marcello Mastroianni, Alberto Sordi, Franco Fabrizi, Leopoldo Trieste, Franco Interlenghi, Terence Stamp, Magali NoëlDonald Sutherland, Donatella Damiani, Freddie Jones, Caterina Boratto, Sandra Milo, Armando Brancia, Giulietta Masina, Ciccio Ingrassia, Alain Cuny, Anouk Aimée, Anita Ekberg et François Périer. Ouf ! Ces artistes exceptionnels ont bien voulu se raconter et parler de leur collaboration avec Federico Fellini, qui apparaît également à travers différentes images de tournage. Les anecdotes se multiplient et s’entrecroisent.

Le second disque Bonus démarre avec la partie 3, Fellini au panier (45’). Comme son titre l’indique, ce supplément se focalise sur des séquences entières coupées des films de Federico Fellini. Ce dernier, accompagné de l’écrivain, journaliste et traducteur Oreste del Buono, présentent et commentent des scènes laissées sur le banc de montage d’Amarcord, des Nuits de Cabiria et même du Casanova de Fellini. Les amateurs (ou mateurs c’est selon) de films Bis auront la surprise de découvrir une séquence où Donald Sutherland poursuit l’impressionnante Chesty Morgan, star du « classique » Supernichons contre mafia de Doris Wishman (1974), alléché par ses formes ultra-généreuses. Dommage que les propos soient parfois parasités par des petites interventions supposées être drôles de la starlette Nicoletta Della Corte, mais cela reste anecdotique.

La quatrième et dernière partie intitulée Les Visages de Fellini (49’30) se déroule au beau milieu des studios de Cinecittà, où Federico Fellini est en train de tourner Et vogue le navire. Alors que le réalisateur (et assistant de Fellini sur ce tournage) Andrea De Carlo déambule entre les restes de précédents tournages (La Cité des femmes notamment) laissés à l’abandon, les figurants interviennent face caméra pour raconter comment et pourquoi Federico Fellini les a engagés sur son film. La caméra s’immisce dans les coulisses, certains dorment dans un recoin du décor, Fellini fait un petit tour pour donner quelques indications sur le maquillage de ses acteurs. Un peu plus tard, Marcello Mastroianni est interviewé (en costume) sur le plateau d’Henri IV, le Roi fou de Marco Bellocchio.

L’Image et le son

Premier bon point : Exit le master 4/3 jusqu’alors disponible en DVD chez MGM et bienvenue à ce cher 16/9 qui nous avait tant manqué sur ce titre ! Fellini Roma débarque dans un master Haute-Définition. Bon, en revanche, quelques couacs à signaler. Le Blu-ray est au format 1080i, d’où sa durée d’1h54 puisque le film de 2 heures défile plus rapidement. Ensuite, l’image demeure parfois marquée par des tâches et points disparates, surtout durant la première partie. Toutefois, pour sa première édition en HD dans nos contrées, Fellini Roma s’avère plus que plaisant et même à redécouvrir dans ces conditions. Le confort de visionnage est présent, la colorimétrie est également à l’avenant avec de beaux contrastes, une texture argentique exemplaire, un piqué souvent confondant sur les séquences diurnes et même quelques noirs compacts. Le transfert est élégant et stable.

Il n’y a rien de bien méchant à signaler concernant la piste italienne DTS-HD Master Audio Mono 1.0 qui demeure de fort bon acabit et propre, si ce n’est quelques dialogues étrangement plus sourds que d’autres au cours d’une même séquence, ou bien diverses résonances et saturations émaillées par-ci, par-là. La version française DTS-HD Master Audio Mono manque quant à elle de naturel et se focalise trop sur le rendu des voix.

Crédits images : © Rimini Editions Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test 4K Ultra HD / Terminator 2 : Le Jugement dernier, réalisé par James Cameron

TERMINATOR 2 : LE JUGEMENT DERNIER (Terminator 2: Judgment Day) réalisé par James Cameron, disponible en DVD, Blu-ray et 4K Ultra HD chez Studiocanal le 5 décembre 2017

Avec :  Arnold Schwarzenegger, Linda Hamilton, Edward Furlong, Robert Patrick, Joe Morton, Earl Boen, Jenette Goldstein, Xander Berkeley…

Scénario : James Cameron, William Wisher

Photographie : Adam Greenberg

Musique : Brad Fiedel

Durée : 2h17 (version cinéma), 2h34 (version director’s cut), 2h36 (version longue)

Date de sortie initiale : 1991

LE FILM

La guerre du jugement dernier a fait 3 milliards de morts. Mais bientôt une autre guerre lui succède. Les rares survivants humains doivent désormais affronter des machines. Skynet, l’ordinateur qui contrôle ces robots, a envoyé un T-1000 remonter le temps. Sa mission : éliminer le futur chef de la Résistance Humaine, l’adolescent John Connor. C’est compter sans le Terminator envoyé par la Résistance pour le protéger…

Jalon essentiel de l’histoire du cinéma, film culte, indémodable, inégalable, Terminator 2 : Le Jugement dernier est le film de tous les superlatifs et n’a pas bougé d’un pouce depuis sa sortie triomphale en 1991. Sept ans après le premier volet, James Cameron, Arnold Schwarzenegger et Linda Hamilton reviennent pour un deuxième épisode qui a marqué plusieurs générations de spectateurs. Premier blockbuster au budget dépassant les cent millions de dollars (dont 6 millions pour le réalisateur, 14 millions pour Arnold Schwarzenegger et seulement un million pour Linda Hamilton), Terminator 2 : Le Jugement dernier a fait son retour dans les salles de cinéma en 2017 dans une version restaurée 4K et convertie en 3D. A croire que le meilleur film de l’année dernière était bel et bien un film sorti en 1991, d’autant plus que la conversion 3D était également très réussie. Aujourd’hui, le chef d’oeuvre de James Cameron est découvert par de plus jeunes spectateurs et cinéphiles, souvent abasourdis par sa virtuosité, sa fluidité narrative, sa puissance visuelle et son casting phénoménal.

Au lendemain de l’holocauste nucléaire du 29 août 1997, les survivants humains entrent en résistance contre la dictature des machines, ce qui les mène à la victoire en 2029. L’ordinateur qui contrôle les machines, Skynet, avait déjà envoyé un Terminator, un cyborg tueur recouvert de tissus et de peau humains en 1984, afin d’éliminer une jeune femme nommée Sarah Connor, avant qu’elle n’ait mis au monde son fils, John Connor, appelé dans le futur à devenir le chef de la résistance humaine contre les machines. Ce plan ayant échoué, Skynet décide de programmer un nouveau Terminator, le T-1000, pour retourner dans le passé et éliminer John Connor. Ce dernier programme un autre cyborg, le T-800, et l’envoie également en 1995 pour le protéger. Une seule question déterminera le sort de l’humanité : laquelle des deux machines trouvera John la première ?

Si la surprise a finalement été de courte durée, quelques spectateurs avaient été pris au dépourvu en voyant Arnold Schwarzenneger devenir le protecteur de John Connor dans cette suite. L’acteur le premier était alors convaincu que cela ne fonctionnerait pas et avait même fait part de ses doutes (euphémisme) à James Cameron. Mais entre le premier film (1984) et le tournage du second, six ans s’étaient écoulés et Arnold Schwarzenegger était devenu une star internationale grâce aux succès de Commando, Predator, Running Man, Total Recall et venait de jouer dans deux comédies familiales, Jumeaux et Un flic à la maternelle. Le Chêne Autrichien est donc passé de gamins en culottes courtes, à l’affrontement avec le sensationnel Robert Patrick, mythique T-1000, adversaire du T-800 dans Terminator 2 : Le Jugement dernier. De son côté, Linda Hamilton livre une prestation hors-normes, très investie dans son personnage de Sarah Connor, métamorphosée (musculation + entraînement intensif au tir), devenue une véritable machine à tuer qui a « malgré elle » sombré dans la folie en raison des événements survenus sept ans auparavant. James Cameron s’amuse d’ailleurs à inverser les rôles et Sarah Connor apparaît comme étant la véritable Terminator de cet épisode, tandis que le T-800 s’humanise aux côtés de John Connor. Ce dernier est interprété par le jeune Edward Furlong, repéré au cours d’un casting sauvage, sous-alimenté, en train de zoner, vivant de petits larcins. Son charisme et son naturel éclatent au grand jour. Chaque enfant d’une dizaine d’années, dont l’auteur de ces mots à la sortie du film, a forcément rêvé d’être à sa place aux côtés du Terminator, montagne de chair et d’acier d’1m88.

Au fil des années, Terminator 2 : Le Jugement dernier se voit et se redécouvre selon l’expérience de chacun, de ses connaissances en matière de cinéphilie et de technique. Récit fiévreux, ambitieux et même avant-gardiste qui n’omet pas l’émotion du début à la fin, film d’action aux effets spéciaux numériques révolutionnaires qui n’ont pas pris une ride en un quart de siècle et surtout qui servent l’histoire, récit(s) initiatique(s), c’est également une fable pessimiste sur le désir de contrôle de l’être humain et sa propension à se prendre pour Dieu. Cela n’empêche pas James Cameron, d’ailleurs cela lui sera toujours reproché, de croire encore et toujours en l’humanité qui triomphera finalement de ce qu’elle a de plus mauvais en elle. Certains trouveront cela naïf, les autres se rangeront à l’avis du cinéaste et c’est tant mieux.

Terminator 2 : Le Jugement dernier, c’est 2h15 de scènes cultes et anthologiques (l’entrée du T-800 dans le bar à bikers, la poursuite dans le canal de Los Angeles, l’explosion nucléaire, toutes les scènes avec le T-1000, l’évasion de l’institut psychiatrique, la fonderie), de répliques entrées dans le langage courant (« Hasta la vista Baby », « Easy Money ! », « I’ll be back », « No fate but what we make »…), l’oeuvre d’un des plus grands conteurs et magiciens du septième art que l’on regarde toujours avec le même sourire jusqu’aux oreilles dès que retentit le thème musical de Brad Fiedel.

Terminator 2 : Le Jugement dernier devient le plus gros succès au cinéma en 1991. Toutefois, s’il attire plus de six millions de spectateurs en France, le film doit se contenter de la seconde place du box office cette année-là, derrière Danse avec les loups de Kevin Costner. Après ce triomphe international, Terminator 2 : Le Jugement dernier remporte quatre Oscars : Meilleurs maquillage, mixage sonore, son et effets spéciaux. En 1993, pour une nouvelle exploitation du film en VHS et laserdisc, James Cameron intègre 16 minutes de scènes coupées au montage cinéma, dont l’apparition de Michael Biehn dans un délire de Sarah à l’asile, ainsi qu’une séquence où Sarah et John ouvrent la boîte crânienne du T-800 pour accéder à la puce principale qui le contrôle, afin de le réinitialiser. Quant à la fameuse séquence du sourire, elle refera son apparition dans le décrié Terminator Genisys sorti en 2015. Mais ça, c’est une autre histoire. En attendant une prochaine trilogie Terminator annoncée par James Cameron lui-même.

LE DISQUE 4K Ultra HD

Le test de l’édition 4K Ultra HD de Terminator 2 : Le Jugement dernier, disponible chez Studiocanal, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur le cultissime thème de Brad Fiedel. La version cinéma (2h17), le Director’s Cut (2h33) et la Version Longue (2h36) sont disponibles uniquement sur le Blu-ray 1080p, tandis que le disque 4K ne propose que la version cinéma. Terminator 2 : Le Jugement dernier inaugure le catalogue 4K Ultra HD de Studiocanal. 

Tous les suppléments sont disponibles sur le Blu-ray du film. Le disque comprenant l’édition 4K Ultra HD est vierge de tout supplément.

Cette édition reprend les deux commentaires audio (vostf) déjà disponibles sur les diverses éditions du chef d’oeuvre de James Cameron. Possibilité d’écoute sur les trois montages du film, même s’ils ont été réalisés sur la version Director’s cut. Si vous avez sélectionné la version longue, un commentaire audio de Robert Patrick s’incruste pour la scène en plus du T-1000 qui fouille la chambre de John Connor, tandis qu’un montage audio mixant les propos de Stan Winston, Linda Hamilton et James Cameron illustre l’épilogue alternatif. A noter que les commentaires de ces deux séquences supplémentaires sont disponibles à part dans la section des suppléments.

Le premier commentaire, enregistré en 1993 (un quart de siècle déjà) convie 26 intervenants dispersés au fil des 2h33 de la Director’s Cut. Directeur artistique et producteur, Van Ling présente ce commentaire et introduit chaque témoignage, tout en donnant lui-même quelques souvenirs ou éléments liés à la production de Terminator 2 : Le Jugement dernier. Interviennent pêle-mêle : James Cameron, Gary Rydstrom (ingénieur du son), Brad Fiedel (compositeur), Mali Finn (directrice du casting), Robert Patrick, Linda Hamilton, Michael Biehn, Joe Morton, Edward Furlong, Dennis Muren (superviseur des effets spéciaux), Arnold Schwarzenegger, et bien d’autres, venus notamment des départements artistiques. Evidemment, tout cela peut paraître désordonné, mais revoir le film en compagnie de celles et de ceux qui ont apporté leur contribution à l’un des plus grands films de l’histoire du cinéma n’est finalement pas désagréable. A écouter comme une masterclass où toute l’équipe du film aurait été réunie.

Le commentaire suivant, également à écouter sur le montage Director’s cut, est réalisé par James Cameron, accompagné de son co-scénariste William Wisher. Enregistré dix ans après le commentaire précédent, celui-ci se focalise plus sur la genèse du film, les conditions de tournage, le travail avec les comédiens, l’évolution des effets visuels, les thèmes. Les fans y découvriront également le clin d’oeil du réalisateur à Abyss et même à Outland de Peter Hyams, ami de James Cameron. Pas ou peu de redondance avec le premier commentaire, l’écoute demeure agréable, rythmée, drôle et blindée en anecdotes. Les fans seront ravis, mais sans doute l’ont-ils écouté depuis belle lurette.

Après ces cinq heures de commentaires audio, passons aux documentaires.

Le module intitulé Terminator 2 : Reprogramming the Terminator (2017-54’) est comme qui dirait l’illustration en images du premier commentaire puisqu’on y retrouve une très grande partie des intervenants. Document rétrospectif composé d’images de tournage, d’interviews, des coulisses, ce supplément revient une fois de plus sur la genèse du film, la réalisation des effets spéciaux, l’entraînement de Linda Hamilton durant trois mois auprès d’un ancien commando des forces armées israéliennes, le casting (avec le screen-test d’Edward Furlong et de Robert Patrick), les partis pris, les intentions du réalisateur. Chaque séquence est analysée et disséquée dans l’ordre chronologique du film et cette fois encore, si certains éléments font inévitablement redondance avec ce qui a déjà pu être entendu précédemment, la plupart des arguments avancés ici complètent finalement l’ensemble.

Place ensuite au making of d’époque (31’). S’il a évidemment vieilli dans sa forme, ce documentaire assez complet revient sur l’ensemble des aspects du tournage et dévoilent de nouvelles, rares ou inédites images des coulisses. Mention spéciale à Arnold Schwarzenegger qui n’arrête pas de faire le pitre avec l’équipe, y compris lors des interminables séances de maquillage.

Comme nous le disions en début de chronique, les deux séquences ajoutées au montage Director’s Cut pour le montage dit « Version longue » (qui n’est en aucun cas un montage approuvé par le réalisateur), la recherche du T-1000 (1’30) et la Séquence du futur (1’50), sont disponibles à part, avec le commentaire audio de Robert Patrick et James Cameron pour la première scène, et avec Stan Winson, James Cameron et Linda Hamilton pour la seconde.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce de la ressortie 3D-4K du film en 2017, les deux bandes-annonces de 1991 et le premier teaser diffusé six mois avant la sortie du film, destiné à expliquer aux spectateurs comment Arnold Schwarzenegger pouvait revenir dans la suite de Terminator, alors qu’il « mourrait » dans le premier volet.

L’Image et le son

Si le résultat sur grand écran était assez dingue, le bilan de cette édition 4K Ultra HD (2160p, HEVC) de Terminator 2 : Le Jugement dernier est plus mitigé. Tout d’abord, rien à redire sur la propreté de la copie. Aucune poussière, aucune griffure, aucune scorie, tout est nickel. L’impression de relief est omniprésente, les séquences diurnes sont éblouissantes, les couleurs sont riches (avec des teintes bleues-vertes), les détails abondent aux quatre coins du cadre large, les contrastes sont denses et le piqué est chirurgical. Maintenant, ce qui est plus regrettable, c’est l’utilisation massive du réducteur de bruit (DNR). En effet, le sublime grain original 35mm a été totalement lissé et a complètement disparu des radars ! Du coup, le teint des comédiens apparaît cireux, comme s’ils avaient abusé du fond de teint. Les plans sur le visage écorché du T-800 apparaissent bien artificiels, pour ne pas dire laids. Cette restauration 4K, effectuée image par image à partir des négatifs originaux, pourtant approuvée par mister James Cameron en personne s’est faite au détriment d’une composante fondamentale de l’extraordinaire photo originale du chef opérateur polonais Adam Greenberg (Ghost, Sister Act, L’Effaceur), sa texture argentique. Ajoutons à cela un nouvel étalonnage qui accentue fondamentalement certains éclairages bleus, à tel point que l’on pense parfois à l’utilisation de filtres ! Cela gâche un peu la fête et les puristes réfléchiront à deux fois avant d’acquérir cette édition. Signalons que le cinéaste en a profité pour réaliser quelques retouches numériques, en remplaçant notamment le visage de la doublure d’Arnold Schwarzenegger par celui de l’acteur lors du saut à moto du T-800 dans le canal.

En ce qui concerne le Blu-ray également présent dans cette édition, le grand changement est situé au niveau de l’encodage. Adios le médiocre codec VC-1, place au codec AVC qui donne un sérieux boost à l’ensemble, même si le master proposé provient également de la version restaurée 4K et que les scènes de jour sont moins rutilantes. C’est là qu’on se rend compte que personne ne sera satisfait.  Seul le montage cinéma a bénéficié d’une restauration 4K. Ne vous étonnez donc pas de la qualité plus aléatoire sur les séquences ajoutées sur la Special Edition et celles de la version longue !

Voici deux mixages qui ne font pas dans la demi-mesure, surtout en ce qui concerne la piste anglaise DTS-HD Master Audio 5.1 (pas de Dolby Atmos, désolé) qui se révèle fracassante. L’ouverture donne le la avec les scènes de guerre qui opposent les humains et les machines, jusqu’à l’apparition des credits sur le thème principal de Brad Fiedel. Le caisson de basses est pour ainsi dire sollicité constamment. Les dialogues sont ardents sur la centrale, tandis que les frontales et les latérales n’ont de cesse de s’affronter lors des séquences d’action, de poursuites et de fusillades, sans oublier les explosions. A ce titre, le spectateur est littéralement absorbé et en ressort complètement étourdi. C’est riche (le moteur qui gronde de la Harley, le T-1000 qui tombe en morceaux après le Hasta la vista Baby), ça décoiffe, on en redemande. L’excellent doublage français bénéficie également d’un mixage qui ravira les inconditionnels, même si l’acoustique pousse un peu trop les dialogues à l’avant et a même tendance à en faire trop, surtout sur les graves. Les scènes ajoutées sur la Special Edition et la version longue sont uniquement disponibles en version originale sous-titrée.Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Studiocanal Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Mon garçon, réalisé par Christian Carion

MON GARÇON réalisé par Christian Carion, disponible en DVD et Blu-ray chez Diaphana le 23 janvier 2018

Avec :  Guillaume Canet, Mélanie Laurent, Olivier de Benoist, Antoine Hamel, Mohamed Brikat, Lino Papa…

Scénario : Christian Carion, Laure Irrmann

Photographie : Eric Dumont

Musique : Laurent Perez Del Mar

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Passionné par son métier, Julien voyage énormément à l’étranger. Ce manque de présence fait exploser son couple quelques années auparavant. Lors d’une escale en France, il découvre sur son répondeur un message de son ex-femme en larmes : leur petit garçon de sept ans a disparu lors d’un bivouac en montagne avec sa classe. Julien se précipite à sa recherche et rien ne pourra l’arrêter.

Etrange film que Mon garçon, réalisé par Christian Carion, découvert en 2001 avec Une hirondelle a fait le printemps, grand succès avec Michel Serrault et Mathilde Seigner, suivi de Joyeux Noël (2005), fresque historique sur fond de Première Guerre mondiale qui réunissait un casting franco-allemand composé notamment de Diane Kruger, Daniel Brühl et de Guillaume Canet. Ce triomphe dans les salles avait permis à ce dernier et au cinéaste de se retrouver pour un thriller d’espionnage inspiré de faits réels, L’Affaire Farewell, dans lequel le comédien donnait la réplique à Emir Kusturica. Cette fois, le public n’avait pas suivi, pas plus pour le film suivant de Christian Carion, En mai, fais ce qu’il te plaît, échec commercial grave. Une fois n’est pas coutume, le réalisateur se lance alors dans une production au budget modeste, avec des prises de vues prévues sur une seule semaine, un thriller pour lequel l’acteur principal, Guillaume Canet une fois de plus, ne serait pas mis au courant du scénario, mais de quelques bribes de l’histoire juste au moment de tourner. Mais l’improvisation et le sentiment d’urgence peuvent-elles réellement créer une vérité à l’écran ? Rien n’est moins sûr et c’est ce qui fait la grande faiblesse de Mon garçon.

Comme dans un nouveau volet de l’émission Rendez-vous en terre inconnue, le cinéaste est venu un matin chez Guillaume Canet afin de lui dire quels vêtements emporter pour le tournage. Quand dans la première scène le personnage principal débarque Gare de Lyon avec sa valise, il s’agit réellement du comédien avec son propre bagage, prêt à embarquer pour rejoindre une équipe réduite dans le Vercors, sans réellement connaître l’histoire qu’il s’apprêtait à tourner. Il en sera de même durant six jours, avec un tournage réalisé quasiment en temps réel et dans l’ordre chronologique de l’intrigue. En amont, ses partenaires, Mélanie Laurent, Olivier de Benoist et les seconds rôles s’étaient préparés pendant deux semaines avec Christian Carion grâce à un acteur doublure représentant Guillaume Canet. Le but était d’anticiper les réactions et de conduire ce dernier à se mettre réellement dans la peau d’un père de famille dont le petit garçon avait été enlevé en haute montagne et qui d’indice en indice parvient à retrouver la piste des ravisseurs, en agissant seul. Guillaume Canet n’avait donc pas de dialogues, ne savait pas où se diriger et devait se laisser guider par la mise en scène, en arpentant chaque recoin du décor et en découvrant le récit à travers les répliques et le jeu de ses partenaires. Chaque scène ayant été tournée en une prise, afin de préserver l’authenticité.

En toute honnêteté, ces partis pris sont bien plus intéressants que le résultat final qui fait penser au surestimé Prisoners de Denis Villeneuve, car il faut bien admettre que Mon garçon est un mauvais film qui pâtit justement des intentions du réalisateur. Guillaume Canet fait partie de ces acteurs qui partent facilement en roue libre quand ils ne sont pas ou mal dirigés. C’est le cas ici. S’il n’est pas l’acteur le plus fin de sa génération, Canet a déjà su se montrer très convaincant chez André Téchiné, Jacques Maillot, Nicolas Saada et Cédric Kahn. Dans Mon garçon, il se montre bien peu inspiré en ayant recours à ses tics récurrents, trogne renfrognée, moue boudeuse, hyperventilation, tandis que ses répliques – improvisées donc – témoignent d’un évident manque d’imagination. C’est notamment le cas lors d’une séquence de torture, vulgaire et gratuite, où son personnage utilise un chalumeau pour faire parler un des sbires qui ont enlevé son rejeton. Ses « Tu vas parler putain de ta race ! » à répétition, font malheureusement plus rire que triturer les tripes et les situations ne vont guère en s’arrangeant. Du coup, l’acteur paraît gêné, tout comme Mélanie Laurent, toujours aussi mauvaise, et Olivier de Benoist, dans une apparition ridicule et grotesque.

Platement filmé, Mon garçon aurait pu aboutir à un thriller tendu, organique et réaliste, mais le résultat est diamétralement opposé puisque ni l’équipe technique ni les comédiens ne semblent guère en mesure de transcender leur dispositif et de maîtriser l’art de l’improvisation.

LE DVD

Le test du DVD de Mon garçon, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Cette édition contient un making of (46’) bien plus intéressant que le film. Quelques semaines après sa sortie sur les écrans, Christian Carion revient sur les lieux du tournage de Mon garçon et explique comment les prises de vues se sont déroulées sur six journées. Quelques images de tournage dévoilent l’envers du décor avec un Guillaume Canet évidemment paumé, qui tente de créer son personnage avec les indices donnés par le réalisateur et ses partenaires. Ces derniers, ainsi que le producteur Christophe Rossignon et le chef opérateur Eric Dumont, apparaissent également au cours de ce documentaire, pour parler des répétitions destinées à leur donner des clés pour guider Guillaume Canet là où le cinéaste voulait l’emmener. Christian Carion développe donc longuement et posément ses intentions et partis pris, à savoir plonger son comédien principal dans l’inconnu le plus total, sans scénario, afin de voir si les réactions de Guillaume Canet allaient correspondre à celles du personnage principal. Tout cela pour que l’acteur ne mente pas, ne compose pas, ne triche pas face à la caméra.

L’Image et le son

Cette édition DVD est plutôt soignée et claire. La propreté de la copie est assurée, les couleurs désaturées et glaciales sont superbes et bien restituées. Le piqué est aléatoire, mais s’en tire honorablement, surtout que les partis pris esthétiques auraient pu avoir du mal à passer le cap du petit écran. La gestion des contrastes est solide, même si nous pouvions attendre plus de détails. Heureusement, l’encodage consolide l’ensemble avec brio et toutes les séquences tournées en extérieur sont très belles.

Le mixage Dolby Digital 5.1 impose une spatialisation qui happe le spectateur dans un flot d’ambiances naturelles qui ne se calment que durant les scènes en intérieur, axées sur les dialogues. Le cinéaste fait la part belle aux éléments environnants et la scène arrière ne manque pas l’occasion de briller. L’éditeur joint également une piste Stéréo de fort bon acabit, sans oublier les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Nord-Ouest Films  / Diaphana Distribution /  Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Petit Spirou, réalisé par Nicolas Bary

LE PETIT SPIROU réalisé par Nicolas Bary, disponible en DVD et Blu-ray chez TF1 Studio le 30 janvier 2018

Avec :  Sacha Pinault, Pierre Richard, François Damiens, Natacha Régnier, Gwendolyn Gourvenec, Philippe Katerine…

Scénario : Laurent Turner, Nicolas Bary d’après la bande-dessinée Le Petit Spirou de Tome & Janry

Photographie : Vincent Gallot

Musique : Rolfe Kent

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Petit Spirou, comme toute sa famille avant lui, a un destin professionnel tout tracé. Quand sa mère lui annonce qu’il intégrera dès la rentrée prochaine l’école des grooms, Petit Spirou, avec l’aide de ses copains, va profiter de ses derniers jours de classe pour déclarer sa flamme à Suzette. Et pas n’importe comment. Ils décident de vivre une aventure extraordinaire.

Il fallait s’y attendre. Après Boule & Bill (un succès) et sa suite (un four monumental), L’Elève Ducobu (un succès) et sa suite (un succès relatif), Benoît Brisefer : les taxis rouges (un accident industriel), Le Petit Nicolas (un triomphe) et sa suite (un échec commercial), l’exécrable Lucky Luke de James Huth, la baudruche Valérian et la Cité des mille planètes de Luc Besson, sans compter les Astérix, Sur la piste du Marsupilami, les Largo Winch et en attendant Bécassine de Bruno Podalydès, le Gaston Lagaffe de Pierre-François Martin-Laval (qui avait déjà commis les deux Profs) et un possible Astérix en Chine, la bande-dessinée inspire encore et toujours le cinéma français et Le Petit Spirou devait y passer également. L’oeuvre de Tome (le scénariste) et Janry (le dessinateur) créée en 1990, 17 tomes et un hors-série à ce jour, déboule à son tour sur le grand écran en version live, sous la direction de Nicolas Bary.

Révélé en 2008 avec Les Enfants de Timpelbach, adaptation du roman homonyme d’Henry Winterfeld, puis réalisateur d’Au bonheur des ogres (2013), transposition du best-seller de Daniel Pennac, Nicolas Bary retrouve un univers qu’il connaît bien et qui lui sied à merveille, celui des enfants. Fan de Steven Spielberg, George Lucas, Terry Gilliam et Tim Burton, le jeune cinéaste passionné par les contes livre un film un peu patchwork, coloré, extrêmement soigné dans sa forme avec de très beaux décors à la fois rétro et modernes, ainsi qu’une photographie bigarrée. Le rythme est soutenu du début à la fin, les sous-intrigues s’imbriquent comme les cases d’une planche de BD, les dialogues sont bien écrits, surtout lorsque Spirou s’interroge sur le libre-arbitre, puisque le petit garçon n’est pas certain de vouloir reprendre le flambeau, à savoir devenir groom comme ses parents et leurs parents avant eux, depuis plusieurs générations.

Alors qu’on l’inscrit de force dans une école destinée à lui apprendre son futur métier, Spirou va peu à peu découvrir ce pour quoi il est né, l’aventure. Mais en attendant, il décide d’emmener Suzette, sa camarade de classe dont il est amoureux, faire un tour du monde que devrait apprécier le réalisateur Michel Gondry. Le Petit Spirou est un film très attachant, loin des produits sans âmes comme les deux hideux Boule & Bill, les hystériques Ducobu ou l’imbuvable Benoît Brisefer. D’une part parce que l’ensemble témoigne d’un grand savoir-faire technique, plutôt rare dans le cinéma hexagonal, d’autre part parce que les comédiens sont tous excellemment castés et semblent prendre beaucoup de plaisir dans cette aventure drôle, tendre et poétique.

Dans le rôle-titre, le jeune Sacha Pinault se montre très naturel, espiègle et charismatique devant la caméra. Avec leurs grands yeux bleus pétillants, Pierre Richard et Natacha Régnier étaient les choix les plus judicieux pour incarner le grand-père et la maman du Petit Spirou. Peu habituée des grosses productions, la comédienne rayonne et son immense sensibilité crève une fois de plus l’écran. Pierre Richard, bientôt 84 ans, est en pleine forme et incarne avec énergie ce grand-père lunaire et porté sur les jolies femmes. A leurs côtés, François Damiens est parfait dans le rôle du prof de gym Désiré Mégot, Armelle campe une voyante décalée entourée de ses chats, Philippe Katerine est un génial abbé Langélusse, passionné par le métal, qui cite allègrement AC/DC et Iron Maiden. Quant à la fameuse Mademoiselle Chiffre, professeur de mathématiques qui fait chavirer le coeur des tous petits, le dessin de Janry prend littéralement vie sous les traits (et les courbes affriolantes) de Gwendolyn Gourvenec, révélation du film que l’on espère revoir très bientôt au cinéma. Tout ce beau petit monde est réuni avec les amis du Petit Spirou (Suzette, Vertignasse, Cassius, Ponchelot) dans un récit fait de quiproquos et d’émotions fait pour divertir les spectateurs, petits et grands.

Si le film est loin d’avoir eu le succès espéré avec 465.000 entrées pour un budget de 8,5 millions d’euros, la fin reste néanmoins ouverte pour une suite. Mais avant cela Spirou fera son retour – adulte cette fois – le 21 février 2018 dans Les Aventures de Spirou et Fantasio, réalisé par Alexandre Coffre, avec Thomas Solivéres et Alex Lutz.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Petit Spirou, disponible chez TF1 Studio, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est coloré, animé et musical.

L’interactivité est centrée sur un making of traditionnel de 25 minutes. Présenté par la vedette du film Sacha Pinault, ce documentaire compile les propos des comédiens avec d’un côté les « grands », Natacha Régnier, François Damiens, Pierre Richard et Gwendolyn Gourvenec, et les petits de l’autre. Nicolas Bary intervient également, tout comme les auteurs de la BD, Tome et Janry, le compositeur Rolfe Kent, pour évoquer le tournage, la transposition de l’oeuvre originale en prises de vues réelles, le travail sur les décors, les costumes et la photographie. Le casting est évidemment passé au peigne fin, les images de tournage abondent, bref ce making of remplit parfaitement le cahier des charges.

Du coup, les featurettes intitulées La Famille Spirou (5’), Les Enfants (3’), Les Profs (3’30) et Spirou au cinéma (2’) ne font que reprendre des extraits du module précédent et n’ont aucun intérêt.

Cette section se clôt sur le clip musical de Vianney, « Si on chantait » (3’). On serait tenté de lui dire « Si tu te taisais », mais ce serait méchant.

L’Image et le son

Ce transfert HD s’avère soigné, l’univers de la BD est bien retranscrit avec une prédominance de couleurs vives et pétillantes, avec des ambiances cuivrées caractéristiques de l’univers des grooms et des tons plus froids pour le monde de l’école. Les contrastes sont au beau fixe et le piqué agréable. La définition est au top et ce master demeure un bel objet avec un relief omniprésent et des séquences diurnes aussi magnifiques qu’étincelantes.

Dès la première séquence, la piste DTS-HD Master Audio 5.1 sollicite l’ensemble des enceintes et offre une solide spatialisation. Ce mixage fait la part belle à la musique enfantine et légère de Rolfe Kent, présente pendant tout le film. Les dialogues se détachent sans mal sur la centrale, le caisson de basses délivre quelques effets frappants tandis que les ambiances naturelles en extérieur demeurent constantes. Le spectacle acoustique est assuré. L’éditeur joint également les sous-titres destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © La Belle Company / Apollo Films / TF1 Studio /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Petit paysan, réalisé par Hubert Charuel

PETIT PAYSAN réalisé par Hubert Charuel, disponible en DVD et Blu-ray chez Pyramide Vidéo le 9 janvier 2018

Avec :  Swann Arlaud, Sara Giraudeau, Isabelle Candelier, Bouli Lanners, Valentin Lespinasse, Clément Bresson…

Scénario : Claude Le Pape, Hubert Charuel

Photographie : Sébastien Goepfert

Musique : Myd

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Pierre, la trentaine, est éleveur de vaches laitières. Sa vie s’organise autour de sa ferme, sa sœur vétérinaire et ses parents dont il a repris l’exploitation. Alors que les premiers cas d’une épidémie se déclarent en France, Pierre découvre que l’une de ses bêtes est infectée. Il ne peut se résoudre à perdre ses vaches. Il n’a rien d’autre et ira jusqu’au bout pour les sauver.

On ne l’avait pas vu arriver, et pourtant Petit paysan est l’un des meilleurs films de 2017. Venu tout droit de la Haute-Marne, le réalisateur Hubert Charuel, né en 1985, est fils d’agriculteurs. Il grandit entouré d’animaux et travaille dans le secteur de l’élevage laitier, avant de s’orienter vers des études de cinéma. Ses excellents courts-métrages, Diagonale du vide (2011), son film de fin d’études et K-nada (2015), primé au Festival Premiers Plans d’Angers, montrent son attachement pour sa région et traite des rêves des jeunes de sa génération, tandis que son troisième court-métrage Fox-Terrier (2016), dévoile plutôt son amour pour le cinéma de genre puisqu’il s’agit d’un vrai petit thriller rural se déroulant dans le milieu de la chasse. Pour son premier long métrage Petit paysan, Hubert Charuel condense tous ces éléments pour livrer un intense et grand drame teinté de polar, magnifiquement interprété.

A 35 ans, Pierre, paysan, gère seul un troupeau de vaches laitières dans l’ancienne ferme de ses parents. Un jour, il sollicite sa sœur, vétérinaire, pour obtenir son avis sur une vache dont le comportement lui semble anormal. Est-ce le début inquiétant d’une série ? Ou bien, comme lui dit sans hésitation sa sœur, la vache n’a-t-elle absolument rien d’anormal ? A l’heure où des troupeaux entiers sont abattus en raison de la maladie belge, la FHD (fièvre hémorragique dorsale), il se rend compte que la vache auscultée commence à suer du sang. Malgré son attachement et même son amour pour la bête, Pierre, voulant sauver le reste du troupeau, décide de la tuer durant la nuit, puis l’enterre en y mettant le feu. Mais quelques jours après une autre vache présente les mêmes symptômes. Pierre entre alors dans une spirale infernale.

Diplômé de la Fémis, Hubert Charuel signe un véritable coup de maître avec Petit paysan. Depuis plus de dix ans, le comédien Swann Arlaud, né en 1981 a su se faire remarquer dans des œuvres aussi variées sur Les Ames grises d’Yves Angelo (2005), Le Temps des porte-plumes (2006), Le Bel Age de Laurent Perreau (2009), Les Emotifs anonymes de Jean-Pierre Améris (2010), Michael Kohlhaas d’Arnaud des Pallières (2013) ou bien encore dernièrement dans Une vie de Stéphane Brizé (2016). Il obtient enfin pour la première fois le premier rôle dans Petit paysan et foudroie le spectateur par son talent, son charisme magnétique et sa force digne d’un Patrick Dewaere. A fleur de peau, le personnage se retrouve piégé par ses propres stratagèmes pour maintenir son cheptel d’une trentaine de vaches qui répondent aux doux noms de Cactus, Griotte, Verdure… Comme il le dit lui-même à sa sœur, Pierre, solitaire, ne « sait faire que ça » et sa vie n’aurait plus de sens si son troupeau devait être abattu.

Tourné dans la véritable ferme familiale à Droyes, situé entre Reims et Nancy, Petit paysan est autant un thriller paranoïaque qu’un drame psychologique. Swann Arlaud s’est minutieusement préparé pour assimiler les gestes du quotidien et les séquences où son personnage s’occupe de ses animaux sont empreints d’une dimension documentaire. A l’heure où nous ne connaissons pas encore les nominations pour la prochaine cérémonie des César, espérons que l’académie saura récompenser le comédien en le nommant dans la catégorie Meilleur acteur, pour laquelle il mérite d’ailleurs d’obtenir le Saint Graal. N’oublions pas ses partenaires, Isabelle Candelier, India Hair, Marc Barbé, Bouli Lanners et surtout Sara Giraudeau. Hubert Charuel rend hommage à sa famille, d’ailleurs ses parents et son grand-père apparaissent dans le film, à ce métier qui aurait pu être le sien, à l’investissement de ceux qui lui ont donné la vie, à leur courage et à l’investissement personnel que cela leur a coûté chaque jour.

Inspiré par la crise de la vache folle dans les années 1990, Petit paysan rend compte du lien unique entre l’exploitant agricole et son bétail, à travers un récit anxiogène bourré de tension du début à la fin, d’émotions (le vêlage filmé en temps réel !) et d’humour noir. Une des grandes révélations de 2017.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Petit paysan, disponible chez Pyramide Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Un petit making of de 12 minutes, donne la parole au réalisateur Hubert Charuel, aux comédiens Swann Arlaud et Sara Giraudeau, ainsi qu’aux parents et au grand-père du metteur en scène, le tout illustré par des images de tournage. Hubert Charuel revient sur la genèse de son premier long métrage, ses intentions, l’écriture du scénario, les partis pris, tandis que les acteurs abordent leur préparation et la complexité des prises de vue avec les animaux, notamment la scène du vêlage qui a nécessité trois nuits blanches consécutives. La famille du réalisateur évoque le choix d’Hubert Charuel d’avoir voulu embrasser une carrière cinématographique, plutôt que d’avoir repris l’exploitation agricole.

Ne manquez pas les trois courts-métrages d’Hubert Charuel également disponibles en bonus, qui démontrent un vrai talent pour la direction d’acteur, le goût d’ancrer les histoires à la campagne, de peindre le portrait d’une jeune génération paumée au milieu de nulle part, entre rire (pour le premier film) et mélancolie (le second), sans oublier une affection pour le genre comme le montre le troisième film :

Diagonale du vide (24’ – 2011) : Laurent et Gavroche, tous deux âgés de dix-sept ans, ont deux jours pour trouver du shit pour une grosse fête. Problème, il y a eu une grosse saisie et c’est la pénurie.

K-nada (22’ – 2015) : Deux frères que tout oppose, sont paumés sur la route de leurs rêves un peu absurdes. Dans deux jours, ils doivent se rendre à Amsterdam. Greg pour un concours de DJing, Valentin pour en ramener des kilos de marijuana. Film récompensé par le Prix CCAS au Festival Premiers Plans d’Angers.

Fox-Terrier (14’ – 2016) : Daniel et Cajou, son fox-terrier à trois pattes, retrouvent Hervé à la chasse. Cajou, il a trois pattes à cause de Francis, le fils de Gilles.

L’Image et le son

Nous ne nous attendions pas un master aussi beau. Le film d’Hubert Charuel, composé essentiellement de plans larges et de gros plans sur les visages des comédiens, est magnifiquement restitué grâce à un transfert de haute volée. Le piqué est minutieux, les détails fourmillent, le cadre large est magnifique et la colorimétrie intense avec un mixe de teintes chatoyantes et de gammes froides. Les contrastes sont denses et tranchants, la clarté éloquente. Ce master de Petit paysan tient toutes ses promesses et offre des conditions optimales au spectateur pour se replonger dans l’ambiance du film.

Certes ce n’est pas avec Petit paysan que vous réaliserez une démonstration acoustique, mais tout de même ! On ne s’attendait pas à un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 aussi percutant dans son rendu des dialogues et de la musique de Myd dont certains pics donnent beaucoup de frissons. A ce moment-là, la spatialisation est ardente, le caisson de basses souligne la partition tandis que divers effets naturels savent plonger délicatement mais sûrement le spectateur dans l’atmosphère du film grâce à un usage intelligent des enceintes latérales. Même chose pour le mixage Stéréo, frontal par définition, les plages de silence sont particulièrement limpides et la balance gauche-droite savamment équilibrée. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Pyramide Distribution Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr