DÉLUGE (Deluge) réalisépar Felix E. Feist,disponible en DVD chez lobster Films le 27 novembre 2017
Avec : Peggy Shannon, Lois Wilson, Sidney Blackmer, Matt Moore, Fred Kohler, Ralf Harolde, Edward Van Sloan, Samuel S. Hinds…
Scénario : Warren Duff, John F. Goodrich
Photographie : Norbert Brodine
Musique : Val Burton
Durée : 1h03
Date de sortie initiale : 1933
LE FILM
Une série de catastrophes naturelles frappe le monde. Les éléments se déchaînent, les grandes métropoles comme New York se retrouvent détruites sous le coup d’énormes séismes, ou englouties sous les raz-de-marée. Au lendemain du désastre, une poignée de survivants tente tant bien que mal de survivre. Martin, séparé de sa famille qu’il croit disparue, tombe éperdument amoureux de Claire, une jeune femme en proie à une bande de malfrats qui tente de la kidnapper…
Déluge ou bien Deluge sans accent en version originale, est rétrospectivement l’un des premiers films catastrophe de l’histoire du cinéma. D’ailleurs, il est amusant de voir que tout ce qui fera 60 ans plus tard le triomphe des films de Roland Emmerich est déjà présent. Réalisé par Felix E. Feist, metteur en scène de La Vallée des géants avec Kirk Douglas et producteur de la série Peyton Place, ce petit film de science-fiction ramassé sur une durée de 63 minutes, va droit à l’essentiel en montrant tout d’abord des scientifiques alarmés par l’annonce de tempêtes violentes. Les bateaux, avions et dirigeables sont tous rappelés et doivent faire demi-tour, tandis qu’une éclipse non prévue a lieu, que les baromètres s’affolent, que des séismes ont détruit l’Europe. La fin du monde est proche disent certains, les journaux deviennent fous, la cote Ouest des Etats-Unis est immergée, la Nouvelle-Orléans a disparu sous les flots également.
Sur un montage alerte et souvent percutant, Felix E. Feist enchaine les séquences d’exposition, en allant droit à l’essentiel jusqu’à la destruction de la ville de New York. Evidemment, les effets spéciaux peuvent paraître aujourd’hui complètement désuets, mais à l’époque, Déluge proposait des images inédites. Les modèles réduits se voient certes comme le nez au milieu de la figure, pourtant la scène du raz-de-marée conserve son charme poétique. Plus qu’Independence Day, c’est surtout au Jour d’après auquel on pense avec cette grande vague déferlant sur New York et qui noie progressivement la Statue de la Liberté. Si les scènes de destructions massives ont souvent été la spécialité des films de Rolans Emmerich, ce dernier a souvent eu du mal à broder autour et à aborder le thème du survival après la catastrophe. Dans Déluge, le film démarre par la grosse séquence d’effets visuels, avant de se focaliser sur ceux qui ont réussi à s’en sortir.
C’est là où le film de Felix E. Feist devient encore plus intéressant, puisqu’il montre la société obligée de repartir de zéro, mais c’était sans compter quelques individus désireux de conserver leur standing et les privilèges dont ils bénéficiaient grâce à leur bonne situation. Certains voleurs et même quelques violeurs profitent immédiatement de la situation, puisqu’il n’existe plus d’autorités et encore moins de limites. La Terre devient un champ de bataille. Pendant ce temps, Martin (Sidney Blackmer), un homme qui croit sa femme et ses deux filles décédées dans la catastrophe, sauve Claire (Peggy Shannon), une jeune femme poursuivie par des individus mal intentionnés. Il en tombe amoureux. Felix E. Feist joue sur le suspense d’un triangle amoureux puisque Martin ne sait pas que sa famille est en fait bien vivante. Alors que va-t-il se passer quand la famille se retrouvera ? Martin va-t-il retourner auprès des siens ? Va-t-il laisser Claire ? Ou prendre les deux pour compagnes qui sait ?
Cette petite production RKO reste bien divertissante avec son aspect suranné et la scène du tsunami est très sympathique avec ses buildings creux qui s’écroulent comme des châteaux de cartes. Considéré comme perdu, une copie de Déluge a finalement été retrouvée en Italie au début des années 1980. Depuis, un négatif nitrate (en anglais) qui commençait à se décomposer a été retrouver au CNC. Le film a alors bénéficié d’une restauration image et son dans les laboratoires de Lobster Films, avant de ressortir à travers le monde, y compris à la Cinémathèque française et à l’Etrange Festival.
LE DVD
C’est sous la bannière de Lobster Films, également responsable de la restauration du film, que Déluge fait son apparition dans les bacs en France. Visuel très élégant montrant la tête de la Statue de la Liberté émerger des eaux. Le menu principal est animé sur une séquence du film.
Le premier supplément de cette édition s’intitule Survival Town (3’). Il s’agit d’un reportage hallucinant montrant des essais nucléaires américains dans le désert du Nevada en 1955. La bombe est alors lâchée dans un village reconstitué avec des mannequins en guise d’habitants. Aux images très impressionnantes s’ajoutent les commentaires sérieux indiquant que la population peut être rassurée sur le fait que l’on peut survivre en cas d’attaque nucléaire, comme le montrent les murs en béton armé à peine fendus. « Un tournant d’espoir » indique le journaliste.
Le second bonus est tout aussi incroyable, puisqu’il s’agit d’un court-métrage documentaire constitué d’images filmées après le terrible séisme et les incendies qui avaient quasiment rasé San Francisco de la carte en 1906 (25’). Comment le ravitaillement et les secours se sont organisés ? Comment recommencer à vivre après cette catastrophe ? Des cartons indiquent où les images ont été filmées et dressent un listing de toutes les pertes, humaines et matérielles. Il aura fallu plus de 200 millions de dollars pour reconstruire la ville.
L’interactivité se clôt sur un extrait des Derniers Jours de Pompéi d’Ernest B. Schoesack (1935 – 10’).
L’Image et le son
Déluge est un film rescapé. Malgré le travail acharné et de titan des Laboratoires Lobster Films, cette édition restaurée contient encore forcément un lot de points, griffures, poussières, raccords de montage, fils en bord de cadre et rayures, surtout durant la séquence du tsunami. Signalons que ces défauts tendent à s’amenuiser au fil du visionnage. Si le N&B retrouve une certaine fermeté, une clarté plaisante et une densité indéniable, le piqué et la gestion du grain restent évidemment aléatoires. Des fondus enchaînés décrochent, un bruit vidéo est notable mais aidé par un encodage solide, un effet de clignotement se fait ressentir, tandis que diverses séquences sortent du lot et se révèlent plus belles et détaillées.
La bande-son a également été restaurée car peu de craquements sont à déplorer. La musique est propre, certaines séquences sont peut-être plus étouffées que d’autres, un petit souffle est parfois audible, mais le confort acoustique est très appréciable. La version française apparaît plus étriquée.
ZARDOZ réalisépar John Boorman,disponible en DVD et Blu-ray chez Movinside le 13 novembre 2017
Avec : Sean Connery, Charlotte Rampling, John Alderton, Sara Kestelman, Sally Anne Newton, Niall Buggy, Bosco Hogan, Jessica Swift…
Scénario : John Boorman
Photographie : Geoffrey Unsworth
Musique : David Munrow
Durée : 1h45
Date de sortie initiale : 1974
LE FILM
2293. La Terre a été totalement dévastée et la société est divisée en plusieurs castes : les Brutes, les Exterminateurs et les Barbares qui vouent un culte sans limites au dieu Zardoz. Tous oeuvrent pour les Éternels, un groupe d’humains immortels. Ce nouvel équilibre social va être bouleversé lorsque Zed, un Exterminateur, décide de pénétrer chez les Éternels, défiant ainsi le dieu Zardoz…
Pour la plupart, Zardoz se résume à l’accoutrement de Sean Connery dans le film. En effet, difficile d’échapper aux photogrammes du comédien avec sa grosse moustache à la Burt Reynolds (à qui le rôle avait d’abord été proposé), son catogan, sa cartouchière placée sur son torse velu, son cache-sexe rouge bombé et ses cuissardes en vinyle. D’ailleurs, nombreux sont ceux à avoir classé Zardoz – sans l’avoir vu – dans la catégorie nanar, ce qu’il n’est absolument pas. Malgré tout, le sixième long métrage de John Boorman, réalisé deux ans après Délivrance, demeure une vraie curiosité, souvent hermétique, qui vaut essentiellement pour ses recherches plastiques. Mais quand si l’on creuse un peu, on se rend compte que Zardoz va bien plus loin.
D’entrée de jeu, nous voilà plongés en 2293. Ce que nous pouvons comprendre : 300 ans après l’effondrement de la civilisation industrielle, dans un futur post-apocalyptique, la population humaine est divisée entre les Éternels, des humains ayant atteint l’immortalité grâce à la technologie, et les Brutes. Ces derniers vivent sur une terre ravagée et fournissent de la nourriture aux Éternels, peuplés de savants et d’intellectuels, qui vivent dans des régions isolées du reste du monde par un mur invisible et appelées « Vortex » et passent une existence luxueuse mais apathique. Arthur Frayn (Niall Buggy), l’Éternel chargé de gérer les « terres extérieures », se fait passer auprès des Brutes pour un dieu nommé Zardoz, qui se manifeste sous la forme d’un énorme masque de pierre volant. Ayant sélectionné des brutes, il a constitué un groupe d’exterminateurs, chargé de réduire en esclavage les autres humains, et auxquels il fournit des armes en échange de la nourriture qu’ils collectent. Zed (Sean Connery) est un de ces exterminateurs. Il se cache à bord du masque de pierre lors d’un voyage. Arrivé au Vortex, Zed est étudié en tant que spécimen : les Éternels n’ayant pas eu de contact depuis des siècles avec l’extérieur, ils essaient de comprendre comment les Brutes ont évolué. Il se retrouve au cœur d’une dissension entre deux Éternelles, Consuella (Charlotte Rampling) et May (Sara Kestelman), et doit effectuer des tâches pour Friend (John Alderton).
Zed découvre au fur et à mesure que cette société en apparence lissée et idéale est en fait violente et désespérée. Les Éternels sont dirigés et protégés de la mort par une intelligence artificielle appelée « le Tabernacle », un gros cristal qui est relié à l’esprit de tous les Éternels et qui conserve leur mémoire dans ses réflexions lumineuses. Du fait de leur immortalité, les Éternels ont arrêté de procréer et les hommes sont devenus impuissants. Certains sont victimes d’une maladie, qui les plonge en catatonie. Les dissidents, ceux qui refusent le système ou bien introduisent la discorde, sont vieillis, voire sont exclus et sont délibérément rendus séniles.
Voilà, bienvenue dans Zardoz, dont le nom provient du livre L. Frank Baum, The WiZARD of OZ, que le personnage de Sean Connery découvre dans une bibliothèque en ruine à l’extérieur du Vortex. Cette révélation le met alors face aux réalités, tout n’est que supercherie, d’autant plus que Zed, contrairement à ce que pensent les Eternels, n’est pas non plus un être primitif. Analyser ainsi Zardoz permet de réévaluer le film de John Boorman. Des manipulations politiques destinées à voiler la réalité, afin d’engranger des ressources naturelles. Plus près de nous, cela rappelle furieusement l’invasion de l’Irak en 2003 sous l’administration W. Bush. Mais Zardoz est une œuvre tellement étrange, difficile d’accès et marquée par une esthétique kitsch, que chacun est en fait libre d’y voir et de ressentir ce qu’il a envie. Les personnages et divinités ne sont pas ce qu’ils paraissent être, tout n’est que faux-semblants et superstitions, ce qui permet à la société de demeurer au lieu de penser et de réfléchir.
Zed apparaît comme le grain de sable qui va faire enrayer une machine jusqu’alors trop bien huilée. Son apparition dans le Vortex va ainsi rendre leur mortalité aux Éternels. Du point de vue formel, John Boorman joue avec les moyens mis à sa disposition et des effets spéciaux certes désuets, mais qui n’en restent pas moins bourrés de charme. On s’amusera des scènes dans le Tabernacle ou des trips psychédéliques qui rappellent parfois le Barbarella de Roger Vadim. Magnifiquement photographié par l’immense chef opérateur Geoffrey Unsworth, Zardoz, écrit, produit et mis en scène par John Boorman, est une fable philosophique qui ne laisse pas indifférent avec ses images éthérées sur fond de 7e symphonie de Beethoven et Sean Connery qui court torse-poil au ralenti avec sa queue-de-cheval qui se balance sur ses épaules. Pas un chef d’oeuvre de la science-fiction certes, en aucun cas un navet et encore moins un nanar, mais un film culte assurément.
LE BLU-RAY
Le Blu-ray de Zardoz, disponible chez Movinside, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. Visuel très beau et attractif. Le menu principal est un peu plus cheap, animé et muet…
Spécialiste du cinéma américain et notamment du Nouvel Hollywood, Jean-Baptiste Thoret replace le sixième long métrage de John Boorman dans son contexte cinématographique, en croisant habilement le fond et la forme. Toujours aussi didactique, spontané et captivant, notre interlocuteur explique que John Boorman a ouvert sa propre boîte de Pandore avec Zardoz. Jean-Baptiste Thoret trouve le film passionnant, dissèque les thèmes explorés par le cinéaste, détaille les conditions de production et l’implication de Sean Connery – dont le costume a longtemps été moqué et l’est d’ailleurs encore aujourd’hui – qui souhaitait s’éloigner encore et toujours du personnage de James Bond. Une formidable présentation (26’).
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Bon…en tant que puristes, nous ne pouvons pas laisser passer ça. Le bulldozer DNR est passé par là une fois de plus chez l’éditeur et la texture argentique de la merveilleuse photographie de l’immense Geoffrey Unsworth (Superman, Cabaret) a été lissée quasiment intégralement. C’est bien beau de proposer des films rares en Haute-Définition, mais pourquoi dénaturer les partis pris esthétiques et volontés artistiques ? Pour satisfaire certains consommateurs qui ne jurent que par une image sans aspérité ? Comme si le film avait été tourné en numérique ! Si la propreté de la copie est indéniable, on ne peut que tiquer tout du long face à l’aspect cireux des visages et sa définition chancelante. Certes, les photographies souvent éthérées du chef opérateur britannique ont toujours donné du fil à retordre aux éditeurs, mais là on frôle le blasphème. Les détails manquent à l’appel, la gestion des contrastes est aléatoire, tout comme le piqué. Un conseil pour Movinside, STOPPEZ le réducteur de bruit ! Le Blu-ray est néanmoins au format 1080p.
Les mixages anglais et français LPCM 2.0 distillent parfaitement la musique de David Munrow, ainsi que la 7e symphonie de Ludwig van Beethoven. Néanmoins, la piste française se focalise sans doute trop sur le report des voix (Jean-Claude Michel double Sean Connery), au détriment des ambiances annexes. La piste originale est très propre, sans souffle, dynamique et suffisamment riche pour instaurer un très bon confort acoustique.
TERMINATOR 2 : LE JUGEMENT DERNIER (Terminator 2: Judgment Day) réalisépar James Cameron,disponible en DVD, Blu-ray et 4K Ultra HD chez Studiocanal le 5 décembre 2017
Avec : Arnold Schwarzenegger, Linda Hamilton, Edward Furlong, Robert Patrick, Joe Morton, Earl Boen, Jenette Goldstein, Xander Berkeley…
La guerre du jugement dernier a fait 3 milliards de morts. Mais bientôt une autre guerre lui succède. Les rares survivants humains doivent désormais affronter des machines. Skynet, l’ordinateur qui contrôle ces robots, a envoyé un T-1000 remonter le temps. Sa mission : éliminer le futur chef de la Résistance Humaine, l’adolescent John Connor. C’est compter sans le Terminator envoyé par la Résistance pour le protéger…
Jalon essentiel de l’histoire du cinéma, film culte, indémodable, inégalable, Terminator 2 : Le Jugement dernier est le film de tous les superlatifs et n’a pas bougé d’un pouce depuis sa sortie triomphale en 1991. Sept ans après le premier volet, James Cameron, Arnold Schwarzenegger et Linda Hamilton reviennent pour un deuxième épisode qui a marqué plusieurs générations de spectateurs. Premier blockbuster au budget dépassant les cent millions de dollars (dont 6 millions pour le réalisateur, 14 millions pour Arnold Schwarzenegger et seulement un million pour Linda Hamilton), Terminator 2 : Le Jugement dernier a fait son retour dans les salles de cinéma en 2017 dans une version restaurée 4K et convertie en 3D. A croire que le meilleur film de l’année dernière était bel et bien un film sorti en 1991, d’autant plus que la conversion 3D était également très réussie. Aujourd’hui, le chef d’oeuvre de James Cameron est découvert par de plus jeunes spectateurs et cinéphiles, souvent abasourdis par sa virtuosité, sa fluidité narrative, sa puissance visuelle et son casting phénoménal.
Au lendemain de l’holocauste nucléaire du 29 août 1997, les survivants humains entrent en résistance contre la dictature des machines, ce qui les mène à la victoire en 2029. L’ordinateur qui contrôle les machines, Skynet, avait déjà envoyé un Terminator, un cyborg tueur recouvert de tissus et de peau humains en 1984, afin d’éliminer une jeune femme nommée Sarah Connor, avant qu’elle n’ait mis au monde son fils, John Connor, appelé dans le futur à devenir le chef de la résistance humaine contre les machines. Ce plan ayant échoué, Skynet décide de programmer un nouveau Terminator, le T-1000, pour retourner dans le passé et éliminer John Connor. Ce dernier programme un autre cyborg, le T-800, et l’envoie également en 1995 pour le protéger. Une seule question déterminera le sort de l’humanité : laquelle des deux machines trouvera John la première ?
Si la surprise a finalement été de courte durée, quelques spectateurs avaient été pris au dépourvu en voyant Arnold Schwarzenneger devenir le protecteur de John Connor dans cette suite. L’acteur le premier était alors convaincu que cela ne fonctionnerait pas et avait même fait part de ses doutes (euphémisme) à James Cameron. Mais entre le premier film (1984) et le tournage du second, six ans s’étaient écoulés et Arnold Schwarzenegger était devenu une star internationale grâce aux succès de Commando, Predator, Running Man, Total Recall et venait de jouer dans deux comédies familiales, Jumeaux et Un flic à la maternelle. Le Chêne Autrichien est donc passé de gamins en culottes courtes, à l’affrontement avec le sensationnel Robert Patrick, mythique T-1000, adversaire du T-800 dans Terminator 2 : Le Jugement dernier. De son côté, Linda Hamilton livre une prestation hors-normes, très investie dans son personnage de Sarah Connor, métamorphosée (musculation + entraînement intensif au tir), devenue une véritable machine à tuer qui a « malgré elle » sombré dans la folie en raison des événements survenus sept ans auparavant. James Cameron s’amuse d’ailleurs à inverser les rôles et Sarah Connor apparaît comme étant la véritable Terminator de cet épisode, tandis que le T-800 s’humanise aux côtés de John Connor. Ce dernier est interprété par le jeune Edward Furlong, repéré au cours d’un casting sauvage, sous-alimenté, en train de zoner, vivant de petits larcins. Son charisme et son naturel éclatent au grand jour. Chaque enfant d’une dizaine d’années, dont l’auteur de ces mots à la sortie du film, a forcément rêvé d’être à sa place aux côtés du Terminator, montagne de chair et d’acier d’1m88.
Au fil des années, Terminator 2 : Le Jugement dernier se voit et se redécouvre selon l’expérience de chacun, de ses connaissances en matière de cinéphilie et de technique. Récit fiévreux, ambitieux et même avant-gardiste qui n’omet pas l’émotion du début à la fin, film d’action aux effets spéciaux numériques révolutionnaires qui n’ont pas pris une ride en un quart de siècle et surtout qui servent l’histoire, récit(s) initiatique(s), c’est également une fable pessimiste sur le désir de contrôle de l’être humain et sa propension à se prendre pour Dieu. Cela n’empêche pas James Cameron, d’ailleurs cela lui sera toujours reproché, de croire encore et toujours en l’humanité qui triomphera finalement de ce qu’elle a de plus mauvais en elle. Certains trouveront cela naïf, les autres se rangeront à l’avis du cinéaste et c’est tant mieux.
Terminator 2 : Le Jugement dernier, c’est 2h15 de scènes cultes et anthologiques (l’entrée du T-800 dans le bar à bikers, la poursuite dans le canal de Los Angeles, l’explosion nucléaire, toutes les scènes avec le T-1000, l’évasion de l’institut psychiatrique, la fonderie), de répliques entrées dans le langage courant (« Hasta la vista Baby », « Easy Money ! », « I’ll be back », « No fate but what we make »…), l’oeuvre d’un des plus grands conteurs et magiciens du septième art que l’on regarde toujours avec le même sourire jusqu’aux oreilles dès que retentit le thème musical de Brad Fiedel.
Terminator 2 : Le Jugement dernier devient le plus gros succès au cinéma en 1991. Toutefois, s’il attire plus de six millions de spectateurs en France, le film doit se contenter de la seconde place du box office cette année-là, derrière Danse avec les loups de Kevin Costner. Après ce triomphe international, Terminator 2 : Le Jugement dernier remporte quatre Oscars : Meilleurs maquillage, mixage sonore, son et effets spéciaux. En 1993, pour une nouvelle exploitation du film en VHS et laserdisc, James Cameron intègre 16 minutes de scènes coupées au montage cinéma, dont l’apparition de Michael Biehn dans un délire de Sarah à l’asile, ainsi qu’une séquence où Sarah et John ouvrent la boîte crânienne du T-800 pour accéder à la puce principale qui le contrôle, afin de le réinitialiser. Quant à la fameuse séquence du sourire, elle refera son apparition dans le décrié Terminator Genisys sorti en 2015. Mais ça, c’est une autre histoire. En attendant une prochaine trilogie Terminator annoncée par James Cameron lui-même.
LE DISQUE 4K Ultra HD
Le test de l’édition 4K Ultra HD de Terminator 2 : Le Jugement dernier, disponible chez Studiocanal, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur le cultissime thème de Brad Fiedel. La version cinéma (2h17), le Director’s Cut (2h33) et la Version Longue (2h36) sont disponibles uniquement sur le Blu-ray 1080p, tandis que le disque 4K ne propose que la version cinéma. Terminator 2 : Le Jugement dernier inaugure le catalogue 4K Ultra HD de Studiocanal.
Tous les suppléments sont disponibles sur le Blu-ray du film. Le disque comprenant l’édition 4K Ultra HD est vierge de tout supplément.
Cette édition reprend les deux commentaires audio (vostf) déjà disponibles sur les diverses éditions du chef d’oeuvre de James Cameron. Possibilité d’écoute sur les trois montages du film, même s’ils ont été réalisés sur la version Director’s cut. Si vous avez sélectionné la version longue, un commentaire audio de Robert Patrick s’incruste pour la scène en plus du T-1000 qui fouille la chambre de John Connor, tandis qu’un montage audio mixant les propos de Stan Winston, Linda Hamilton et James Cameron illustre l’épilogue alternatif. A noter que les commentaires de ces deux séquences supplémentaires sont disponibles à part dans la section des suppléments.
Le premier commentaire, enregistré en 1993 (un quart de siècle déjà) convie 26 intervenants dispersés au fil des 2h33 de la Director’s Cut. Directeur artistique et producteur, Van Ling présente ce commentaire et introduit chaque témoignage, tout en donnant lui-même quelques souvenirs ou éléments liés à la production de Terminator 2 : Le Jugement dernier. Interviennent pêle-mêle : James Cameron, Gary Rydstrom (ingénieur du son), Brad Fiedel (compositeur), Mali Finn (directrice du casting), Robert Patrick, Linda Hamilton, Michael Biehn, Joe Morton, Edward Furlong, Dennis Muren (superviseur des effets spéciaux), Arnold Schwarzenegger, et bien d’autres, venus notamment des départements artistiques. Evidemment, tout cela peut paraître désordonné, mais revoir le film en compagnie de celles et de ceux qui ont apporté leur contribution à l’un des plus grands films de l’histoire du cinéma n’est finalement pas désagréable. A écouter comme une masterclass où toute l’équipe du film aurait été réunie.
Le commentaire suivant, également à écouter sur le montage Director’s cut, est réalisé par James Cameron, accompagné de son co-scénariste William Wisher. Enregistré dix ans après le commentaire précédent, celui-ci se focalise plus sur la genèse du film, les conditions de tournage, le travail avec les comédiens, l’évolution des effets visuels, les thèmes. Les fans y découvriront également le clin d’oeil du réalisateur à Abyss et même à Outland de Peter Hyams, ami de James Cameron. Pas ou peu de redondance avec le premier commentaire, l’écoute demeure agréable, rythmée, drôle et blindée en anecdotes. Les fans seront ravis, mais sans doute l’ont-ils écouté depuis belle lurette.
Après ces cinq heures de commentaires audio, passons aux documentaires.
Le module intitulé Terminator 2 : Reprogramming the Terminator (2017-54’) est comme qui dirait l’illustration en images du premier commentaire puisqu’on y retrouve une très grande partie des intervenants. Document rétrospectif composé d’images de tournage, d’interviews, des coulisses, ce supplément revient une fois de plus sur la genèse du film, la réalisation des effets spéciaux, l’entraînement de Linda Hamilton durant trois mois auprès d’un ancien commando des forces armées israéliennes, le casting (avec le screen-test d’Edward Furlong et de Robert Patrick), les partis pris, les intentions du réalisateur. Chaque séquence est analysée et disséquée dans l’ordre chronologique du film et cette fois encore, si certains éléments font inévitablement redondance avec ce qui a déjà pu être entendu précédemment, la plupart des arguments avancés ici complètent finalement l’ensemble.
Place ensuite au making of d’époque (31’). S’il a évidemment vieilli dans sa forme, ce documentaire assez complet revient sur l’ensemble des aspects du tournage et dévoilent de nouvelles, rares ou inédites images des coulisses. Mention spéciale à Arnold Schwarzenegger qui n’arrête pas de faire le pitre avec l’équipe, y compris lors des interminables séances de maquillage.
Comme nous le disions en début de chronique, les deux séquences ajoutées au montage Director’s Cut pour le montage dit « Version longue » (qui n’est en aucun cas un montage approuvé par le réalisateur), la recherche du T-1000 (1’30) et la Séquence du futur (1’50), sont disponibles à part, avec le commentaire audio de Robert Patrick et James Cameron pour la première scène, et avec Stan Winson, James Cameron et Linda Hamilton pour la seconde.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce de la ressortie 3D-4K du film en 2017, les deux bandes-annonces de 1991 et le premier teaser diffusé six mois avant la sortie du film, destiné à expliquer aux spectateurs comment Arnold Schwarzenegger pouvait revenir dans la suite de Terminator, alors qu’il « mourrait » dans le premier volet.
L’Image et le son
Si le résultat sur grand écran était assez dingue, le bilan de cette édition 4K Ultra HD (2160p, HEVC) de Terminator 2 : Le Jugement dernier est plus mitigé. Tout d’abord, rien à redire sur la propreté de la copie. Aucune poussière, aucune griffure, aucune scorie, tout est nickel. L’impression de relief est omniprésente, les séquences diurnes sont éblouissantes, les couleurs sont riches (avec des teintes bleues-vertes), les détails abondent aux quatre coins du cadre large, les contrastes sont denses et le piqué est chirurgical. Maintenant, ce qui est plus regrettable, c’est l’utilisation massive du réducteur de bruit (DNR). En effet, le sublime grain original 35mm a été totalement lissé et a complètement disparu des radars ! Du coup, le teint des comédiens apparaît cireux, comme s’ils avaient abusé du fond de teint. Les plans sur le visage écorché du T-800 apparaissent bien artificiels, pour ne pas dire laids. Cette restauration 4K, effectuée image par image à partir des négatifs originaux, pourtant approuvée par mister James Cameron en personne s’est faite au détriment d’une composante fondamentale de l’extraordinaire photo originale du chef opérateur polonais Adam Greenberg (Ghost, Sister Act, L’Effaceur), sa texture argentique. Ajoutons à cela un nouvel étalonnage qui accentue fondamentalement certains éclairages bleus, à tel point que l’on pense parfois à l’utilisation de filtres ! Cela gâche un peu la fête et les puristes réfléchiront à deux fois avant d’acquérir cette édition. Signalons que le cinéaste en a profité pour réaliser quelques retouches numériques, en remplaçant notamment le visage de la doublure d’Arnold Schwarzenegger par celui de l’acteur lors du saut à moto du T-800 dans le canal.
En ce qui concerne le Blu-ray également présent dans cette édition, le grand changement est situé au niveau de l’encodage. Adios le médiocre codec VC-1, place au codec AVC qui donne un sérieux boost à l’ensemble, même si le master proposé provient également de la version restaurée 4K et que les scènes de jour sont moins rutilantes. C’est là qu’on se rend compte que personne ne sera satisfait. Seul le montage cinéma a bénéficié d’une restauration 4K. Ne vous étonnez donc pas de la qualité plus aléatoire sur les séquences ajoutées sur la Special Edition et celles de la version longue !
Voici deux mixages qui ne font pas dans la demi-mesure, surtout en ce qui concerne la piste anglaise DTS-HD Master Audio 5.1 (pas de Dolby Atmos, désolé) qui se révèle fracassante. L’ouverture donne le la avec les scènes de guerre qui opposent les humains et les machines, jusqu’à l’apparition des credits sur le thème principal de Brad Fiedel. Le caisson de basses est pour ainsi dire sollicité constamment. Les dialogues sont ardents sur la centrale, tandis que les frontales et les latérales n’ont de cesse de s’affronter lors des séquences d’action, de poursuites et de fusillades, sans oublier les explosions. A ce titre, le spectateur est littéralement absorbé et en ressort complètement étourdi. C’est riche (le moteur qui gronde de la Harley, le T-1000 qui tombe en morceaux après le Hasta la vista Baby), ça décoiffe, on en redemande. L’excellent doublage français bénéficie également d’un mixage qui ravira les inconditionnels, même si l’acoustique pousse un peu trop les dialogues à l’avant et a même tendance à en faire trop, surtout sur les graves. Les scènes ajoutées sur la Special Edition et la version longue sont uniquement disponibles en version originale sous-titrée.Les sous-titres français ne sont pas imposés.
SEVEN SISTERS (What Happened to Monday) réalisépar Tommy Wirkola,disponible en DVD, Blu-ray et 4K Ultra HD chez M6 Vidéo le 30 décembre 2017
Avec : Noomi Rapace, Glenn Close, Willem Dafoe, Marwan Kenzari, Christian Rubeck, Pål Sverre Hagen…
Scénario : Max Botkin, Kerry Williamson
Photographie : José David Montero
Musique : Christian Wibe
Durée : 2h07
Date de sortie initiale : 2017
LE FILM
2073. La Terre est surpeuplée. Le gouvernement décide d’instaurer une politique d’enfant unique, appliquée de main de fer par le Bureau d’Allocation des Naissances, sous l’égide de Nicolette Cayman. Confronté à la naissance de septuplées, Terrence Settman décide de garder secrète l’existence de ses sept petites-filles. Confinées dans leur appartement, prénommées d’un jour de la semaine, elles devront chacune leur tour partager une identité unique à l’extérieur, simulant l’existence d’une seule personne : Karen Settman. Si le secret demeure intact des années durant, tout s’effondre le jour où Lundi disparaît mystérieusement…
C’est le grand succès surprise de l’année 2017 en France, le film que personne n’attendait et qui grâce à un excellent bouche-à-oreille a finalement attiré près de 2 millions de spectateurs. Seven Sisters, titre « français » de What Happened to Monday, est le sixième long métrage de Tommy Wirkola, né en 1979, réalisateur, scénariste et producteur norvégien, remarqué en 2009 avec Dead Snow (et sa suite en 2014), qui a connu un grand succès avec son premier film américain, le sympathique Hansel et Gretel : Witch Hunters (2013), avec Jeremy Renner et Gemma Arterton. Cette co-production américano-européenne était à l’origine destinée à être distribuée en ligne sur Netflix. Si cela a été le cas aux Etats-Unis ainsi qu’en Grande-Bretagne, le distributeur SND, croyant au potentiel du film, a décidé de sortir Seven Sisters dans les salles françaises. Bien lui en a pris, puisque cette dystopie est devenue le sleeper de l’été 2017 avec des entrées stables de semaine en semaine. Après Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes (2009) et Prometheus (2012), c’est donc un nouveau succès personnel pour l’incroyable Noomi Rapace, qui se démultiplie ici pour notre plus grand plaisir.
Face à la surpopulation de la Terre en raison de naissances incontrôlées et d’effets secondaires – explosion de naissances multiples – liées aux nouvelles technologies mises en place pour accroître les rendements agricoles, les autorités ont décidé d’appliquer la politique de l’enfant unique. Cette mesure est imposée sévèrement par le Bureau d’Allocation des Naissances (Child Allocation Bureau), dirigé par Nicolette Cayman, qui récupère les enfants surnuméraires pour les cryogéniser dans l’attente d’être réveillés lorsque les ressources de la planète seront jugées suffisantes. Quelques années plus tard, Karen, la fille de Terrence Settman, donne naissance à des septuplées. Alors que la mère ne survit pas à l’accouchement, Terrence décide de garder secrète l’existence de ses sept petites-filles malgré la loi. Toutes prénommées d’un jour de la semaine, elles devront rester cachées dans leur appartement. Elles partagent alors une identité unique lorsqu’elles sortent à l’extérieur : celle de leur mère Karen Settman. Cet incroyable secret demeure préservé pendant des années. 30 ans plus tard, en 2073, Lundi ne rentre pas à la maison.
Le scénario de Seven Sisters traînait depuis 2010 dans les tiroirs et apparaissait sur ce qu’on appelle la Blacklist, qui regroupe les scénarios les plus prometteurs en attente de financements. Sept ans plus tard, le résultat à l’écran est une bonne série B de science-fiction dont l’attraction principale est évidemment Noomi Rapace qui s’éclate, dans tous les sens du terme. Elle interprète Lundi, qui a adopté le style de vie de Karen Settman, Mardi, la hippie, qui fume de la beuh, Mercredi, la fan de sport, un peu brute et garçon manqué, Jeudi, la rebelle, qui souhaite avoir sa propre vie, Vendredi, l’as de l’informatique, la moins sociable, Samedi, qui doit assurer la vie de Karen en dehors du travail, et Dimanche, comme qui dirait la mère, qui s’occupe de toute la clique en faisant à manger et en prenant soin de ses sœurs. Si certaines incarnations demeurent quelque peu attendues, en particulier la geek à lunettes, Noomi Rapace est en très grande forme, et réalise elle-même de très nombreuses scènes d’action et cascades. Véritablement investie, la comédienne prouve qu’elle est une des plus grandes action-woman de ces dernières années, capable d’élever par sa présence n’importe quel film lambda, comme dernièrement dans Dead Man Down et Conspiracy. N’oublions pas Willem Dafoe, toujours incroyable et même ici sublime dans le rôle du grand-père qui a pris ses sept petites-filles sous son aile, afin de leur offrir le droit de vivre. Quant à la garce du film, Glenn Close parvient sans mal à aller au-delà des clichés liés à son personnage de politicienne véreuse et arriviste.
Malgré un budget qu’on imagine modeste en comparaison des blockbusters hollywoodiens, certaines invraisemblances et un dénouement prévisible, Tommy Wirkola apporte un vrai souffle à son récit somme toute classique, pour ne pas dire déjà vu, grâce à une mise en scène dynamique et au montage lisible, une succession de rebondissements spectaculaires, un vrai sens du cadre, des décors et des effets visuels soignés et une solide direction d’acteurs. Certes, ce sont évidemment les performances de Noomi Rapace qui restent en tête après le film, mais Seven Sisters parvient à laisser passer quelques messages pas bêtes sur la démographie, l’écologie et les systèmes politiques, qui peuvent entraîner le débat.
LE BLU-RAY
Le test de l’édition HD de Seven Sisters, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le film est disponible en DVD, Blu-ray (dont une édition Steelbook) et Blu-ray 4K Ultra HD. Le menu principal est sobre, animé et musical.
Vu le succès du film en France, on pouvait s’attendre à plus de suppléments. Le premier module est un making of classique, mais complet (13’), composé d’images de tournage, de plateau et d’interviews des comédiens, du réalisateur Tommy Wirkola, du chef opérateur José David Montero, du chef décorateur, du superviseur des effets spéciaux et des producteurs. La genèse et les thèmes du film sont passés en revue, mais l’ensemble se focalise surtout sur les conditions des prises de vues et la façon dont Noomi Rapace a été multipliée à l’écran. Entre fonds verts, doublures, split-screen, les secrets de tournage sont dévoilés pour les amateurs.
A l’occasion de la sortie française de Seven Sisters, Noomi Rapace revient sur l’histoire du film, le challenge d’interpréter sept personnages à l’écran, la façon dont elle a créé chaque sœur (look, personnalité), les effets spéciaux, son implication dans l’écriture du scénario, son entrainement physique avant le tournage et sur ses partenaires (6′).
L’interactivité se clôt sur un petit montage avant/après l’incrustation des effets visuels en post-production (4’).
L’Image et le son
L’éditeur soigne son master HD, quasi-exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, à part peut-être durant les séquences sombres où l’image paraît plus douce et moins affûtée, mais cela demeure franchement anecdotique. La clarté demeure frappante, les noirs sont profonds, le piqué affûté, les gros plans détaillés, les contrastes denses et la colorimétrie marquée par les décors métalliques reste vive et froide. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les partis pris esthétiques caractéristiques de ce monde futuriste. Ce Blu-ray offre d’excellentes conditions pour revoir le film de Tommy Wirkola et profiter de la photographie signée José David Montero. L’apport HD sur ce titre est évidemment indispensable. Probablement un des plus beaux masters Haute-Définition disponible chez M6 Vidéo.
Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre pas moins de quatre mixages, deux français et deux anglais DTS-HD Master Audio 5.1 et 2.0 ! Ces options s’avèrent percutantes, surtout dans les scènes d’action. Les séquences d’affrontements peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales, avec des effets en tous genres qui environnent le spectateur. Les effets annexes sont présents et dynamiques. Seuls les dialogues auraient mérité d’être un peu plus relevés sur la centrale, comme bien souvent chez l’éditeur. De son côté, le caisson de basses souligne efficacement chacune des scènes agitées. Les pistes Stéréo sont également solides et très riches. L’éditeur joint également une piste française en Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.
MIRACLE MILE réalisépar Steve De Jarnatt,disponible en DVD et Blu-ray le 13 novembre 2017 chez Blaq Out
Acteurs : Anthony Edwards, Mare Winningham, Mykelti Williamson, Denise Crosby, O-Lan Jones, John Agar, Lou Hancock, Kelly Jo Minter, Kurt Fuller…
Scénario : Steve De Jarnatt
Photographie : Theo van de Sande
Musique : Tangerine Dream
Durée : 1h28
Date de sortie initiale : 1988
LE FILM
Los Angeles, 4h05 du matin. Après un rendez-vous raté avec la femme de sa vie, Harry décroche le téléphone d’une cabine qui ne cesse de sonner. Une voix lui apprend que des missiles nucléaires vont s’abattre sur Los Angeles dans 1 heure et 10 minutes. Une folle course contre la montre va s’enclencher…
C’est l’histoire d’un petit film sorti dans un quasi-anonymat en 1988, qui a depuis conquis de très nombreux cinéphiles dans le monde entier, au point de devenir culte. Appel d’urgence, Miracle Mile en version originale, est le second et dernier long métrage à ce jour réalisé par Steve De Jarnatt. Si son premier film Cherry 2000 (1987), comédie de science-fiction, reste très prisé des amateurs de Cinéma Bis, Appel d’urgence s’est bâti une solide réputation, au point d’être redécouvert avec tout autant de sérieux que de plaisir par la critique et les spectateurs.
Harry Washello rencontre Julie dans un musée d’Histoire naturelle. Ils passent l’après-midi ensemble et, le soir venu, se donnent rendez-vous à une heure du matin à la sortie du diner où Julie travaille. Mais l’hôtel dans lequel Henry est parti se reposer subit une panne de courant et il ne se réveille qu’à trois heures. Pour Harry, Julie est la femme de sa vie. Il se précipite à Miracle Mile où se trouve le diner mais Julie n’est plus là. Il lui laisse un message depuis la cabine téléphonique qui fait le coin de la rue et attend, désespéré, qu’elle le rappelle. Lorsque le téléphone sonne, il se précipite mais c’est à un étrange interlocuteur auquel il a affaire : un homme effrayé, en pleurs qui, pensant s’adresser à son père, lui confie que dans une heure dix des missiles nucléaires vont s’abattre sur les Etats-Unis. Henry pense à un canular mais la conviction de son correspondant le fait douter. Il s’en émeut auprès des rares clients du diner qui font peu de cas de son inquiétude. Mais parmi eux se trouve une femme d’affaires qui appelle quelques contacts au Sénat. Lorsqu’elle s’aperçoit que tous ses correspondants ont pris la tangente, l’assemblée commence à prendre au sérieux la terrible annonce. Pour Harry, il est impensable de s’enfuir de Los Angeles sans Julie.
Sur ce postulat de départ aussi inattendu que prometteur, Steve De Jarnatt va embarquer son audience dans un récit quasi-inclassable, une comédie-romantique sur fond d’apocalypse. Alors que son scénario écrit à l’origine pour la Warner Bros traînait depuis presque dix ans dans les tiroirs, Steve De Jarnatt, à qui le studio ne souhaitai pas confier la mise en scène, parvient à racheter son propre script pour la somme de 25.000 dollars. S’ensuit une phase de réécriture complète, jusqu’à ce que la Warner revienne à la charge en lui proposant cette fois de lui racheter son scénario pour 400.000 dollars ! Steve De Jarnatt refuse, sans doute par peur que son travail ne soit à nouveau mis aux oubliettes. Il prend alors son courage à deux mains et propose son scénario à plusieurs studios concurrents, mais ceux-ci demeurent frileux et dubitatifs devant ce mélange des genres peu conventionnel qu’ils imaginent déjà difficile à vendre, d’autant plus que Steve De Jarnatt tient à conserver son dénouement pessimiste. Jusqu’à l’entrée en scène de la Hemdale Film Corporation, compagnie de production et de distribution, qui avaient enchaîné les succès avec Les Guerriers du Bronx d’Enzo G. Castellari, mais aussi et surtout Terminator de James Cameron, ainsi que Salvador et Platoon d’Oliver Stone !
Steve De Jarnatt obtient alors 3,7 millions de dollars et les dates du tournage sont fixées du 13 avril au 4 juin 1987, entièrement en décors naturels à Los Angeles, dans le quartier de Miracle Mile qui donne son titre au film. Le casting est composé de comédiens pas ou alors peu connus du grand public. Avant de devenir une star du petit écran grâce à la série Urgences, dans lequel il interprète le Dr Mark Greene, Anthony Edwards promenait sa longue silhouette dégingandée au cinéma (Ça chauffe au lycée Ridgemont, Garçon choc pour nana chic) et à la télévision (It Takes Two), avant de connaître une première consécration avec Top Gun, dans lequel il incarne Goose, le pote à moustache de Tom Cruise. Même chose pour sa partenaire à l’écran Mare Winningham, qu’il connaissait depuis les cours de théâtre au lycée. Bien qu’aucune star ne soit à l’affiche, les spectateurs s’amuseront à reconnaître toute une ribambelle de formidables comédiens (à tronches) habituellement cantonnés aux seconds rôles. Mykelti Williamson (Bubba de Forrest Gump, Les Ailes de l’enfer, Heat), Denise Crosby (Simetierre, Deep Impact, 48 heures), Robert DoQui (RoboCop), John Agar (vu chez John Ford), Earl Boen (le docteur Silberman des trois premiers Terminator), Brian Thompson (un des punks de Terminator) et Jenette Goldstein (la mythique Vasquez d’Aliens – le retour et la mère adoptive de John Connor dans Terminator 2 – Le jugement dernier).
Redécouvrir Appel d’urgence aujourd’hui est comme tomber sur une pépite oubliée. Ou comment assister à une histoire d’amour dingue et romantique, une rencontre entre deux âmes sœurs le jour où une pluie de missiles nucléaires va s’abattre sur les Etats-Unis. Thriller paranoïaque, cauchemar éveillé, film catastrophe, comédie dans la veine d’After Hours, récit de science-fiction, drame mélancolique et existentiel, Miracle Mile a beau avoir l’air de partir dans toutes les directions, il n’en demeure pas moins que Steve De Jarnatt maintient le cap de son histoire du début à la fin, en instaurant progressivement un chaos très étonnant, déroutant et particulièrement prenant. On suit ainsi Harry, prêt à tout pour retrouver Julie et la sauver de la menace nucléaire – la guerre froide connaissait ses dernières heures – mise à exécution.
Le réalisateur parvient à retrouver l’essence des séries B de science-fiction des années 50, en y incorporant les couleurs fluorescentes des années 80, des néons bariolés du Johnie’s Coffee Shop Restaurant, en passant par les costumes des personnages. Ou comment la menace de mort qui pèse sur les protagonistes contraste avec les décors et textures luminescentes. Steve De Jarnatt soigne sa mise en scène avec de formidables travellings et plans-séquences, en déjouant les attentes des spectateurs avec quelques scènes impressionnantes et oppressantes à l’instar de celle dite de la station-service, ou bien encore les émeutes dans les rues à quelques minutes de l’explosion finale. La sublime composition de Tangerine Dream ne cesse d’envoûter, jusqu’au dénouement aussi inéluctable que déchirant, poétique et magnifique, qui montre que Steve De Jarnatt n’a pas peur du romanesque, ni des ruptures de tons.
Animé par une foi dans le cinéma, une énergie contagieuse et un désir d’offrir aux spectateurs un rollercoaster d’émotions, Appel d’urgence – Miracle Mile, intègre la liste des « grands petits films » qui font le bonheur des cinéphiles, que l’on se refile, que l’on conseille, qui se placent dans le top des films « injustement méconnus ». Le bouche-à-oreille fait foi et même si Appel d’urgence est sorti il y a maintenant trente ans, il n’est sûrement pas trop tard pour le considérer à sa juste valeur, surtout à l’heure où Donald Trump et Kim Jong-un caressent le bouton rouge chacun de leur côté.
LE BLU-RAY
Le Blu-ray de Miracle Mile, disponible chez Blaq Out, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe sur la composition de Tangerine Dream.
On commence les suppléments par le court-métrage Tarzana (33’), réalisé par Steve De Jarnatt en 1972. Ce formidable film d’étudiant est une véritable lettre d’amour du metteur en scène au film noir des années 1940. Tourné dans un magnifique N&B, en reprenant les partis pris, les costumes et les décors du genre, Tarzana suit l’enquête d’un détective privé, Eye Milt Lassitor, interprété par Michael C. Gwynne. Durant son investigation, ce dernier croise le comédien Eddie Constantine dans l’imperméable de Lemmy Caution ! Un sublime exercice de style. En introduction, l’éditeur indique que Tarzana est un film rarissime, qui était bloqué pour des raisons de droits musicaux. La situation s’étant légèrement décoincée à la dernière minute, Blaq Out n’a pas pu faire sous-titrer ce court-métrage, mais a tout de même décidé de l’inclure à cette édition. Très remarqué, ce film a permis à Steve De Jarnatt de se faire immédiatement un nom à Hollywood.
Trois ans plus tard, Steve De Jarnatt coréalise Eat the Sun avec Jim Cox (24’). Un faux documentaire expérimental, qui montre comment les membres d’une secte parviennent à réaliser leur publicité et à attirer de nouveaux adeptes. Plutôt difficile d’accès, ce film avec quelques faux sosies de Donald Pleasence et Régis Laspalès habillés avec du papier d’aluminium, se regarde surtout comme une curiosité. Même chose que pour Tarzana, Blaq Out indique que Steve De Jarnatt ne souhaitait présenter ce film que si l’autre court-métrage était disponible. De ce fait, Eat the Sun n’est pas sous-titré non plus.
Nous passons maintenant à l’entretien de Steve De Jarnatt (11’). Enregistré en juin 2017, le réalisateur revient sur la longue gestation de Miracle Mile, ainsi que les problèmes liés à la mise en route de son second long métrage. Sans langue de bois, Steve De Jarnatt explique en détail comment la Warner Bros. avait voulu faire beaucoup de changements dans son scénario, notamment en ce qui concerne le dénouement. La Warner souhaitait entre autres intégrer cette histoire à La Quatrième dimension, avant que Steven Spielberg ne rejoigne le projet. Mais le cinéaste n’a pas plié et après avoir racheté son propre scénario au studio, Steve De Jarnatt est allé voir ailleurs, pour trouver preneur auprès des producteurs de la Hemdale huit ans après ! Durant cette interview, le cinéaste enchaîne les anecdotes de tournage (tout était storyboardé), revient sur les thèmes du film (inspirés de son enfance passée dans la peur d’une Troisième Guerre mondiale), les partis pris (une image claire et cristalline, le choix de Tangerine Dream pour la B.O.) et ses intentions, tout en se rappelant la sortie de Miracle Mile au cinéma et au passage donner son avis sur la prolifération des films de super-héros à Hollywood.
Place aux deux comédiens principaux de Miracle Mile, Anthony Edwards et Mare Winningham, de partager leurs souvenirs liés au tournage du film de Steve De Jarnatt (12’). Visiblement complices, ils se connaissent d’ailleurs depuis le lycée, les deux acteurs se penchent sur les personnages, sur l’histoire, le travail avec Steve De Jarnatt, le contexte politique dans lequel le film a été réalisé, la sortie au cinéma et surtout la résurrection de Miracle Mile trente ans après. Anthony Edwards admet que le film a mal vieilli, mais qu’il possède un côté désuet magnifique et représente admirablement ce que pouvait être un film américain d’art et d’essai dans les années 1980.
Dommage qu’Anthony Edwards et Mare Winningham ne soient pas présents dans le module suivant qui propose les retrouvailles du casting dans le célèbre Johnie’s Coffee Shop Restaurant, l’un des décors importants de Miracle Mile, fermé depuis 2000, mais conservé en état et vu dans d’autres films (Volcano, The Big Lebowski, 60 secondes chrono). Filmé par le chef opérateur Theo van de Sande, ce segment de 25 minutes offre de savoureux et émouvants moments avec les acteurs et Steve De Jarnatt, qui évoquent leurs souvenirs avec autant de nostalgie que de bonheur puisqu’ils sont fiers que Miracle Mile soit redécouvert près de trente ans après la sortie du film au cinéma, où il avait dû affronter Road House avec Patrick Swayze pendant quinze jours, avant de déclarer forfait devant le mastodonte de Steven Spielberg, Indiana Jones et la dernière Croisade.
Place au compositeur autrichien Paul Haslinger, de se pencher sur sa contribution à la grande réussite de Miracle Mile (17’). Alors qu’il venait de rejoindre le groupe Tangerine Dream en 1986 suite au départ de Johannes Schmoelling, Paul Haslinger et les autres membres du groupe acceptent de composer la B.O. du film de Steve De Jarnatt, qui écoutait en boucle la musique de Sorcerer de William Friedkin pendant qu’il écrivait son scénario. Le musicien se souvient des conditions d’enregistrement de la musique du film, tout en se penchant sur quelques-uns des thèmes principaux de Miracle Mile.
Derrière les « Scènes coupées et alternatives » (11’) se présente un montage constitué de morceaux de séquences abandonnées, ratées, ou filmées sous un angle différent par rapport à celles finalement gardées.
L’interactivité se clôt sur une présentation du storyboard de la séquence au diner (2’), de la bande-annonce originale, d’une fin alternative (1’) où Harry et Julie « devenaient » deux diamants qui s’animaient et tourbillonnaient à l’écran. Ceux qui ont vu le film comprendront. N’oublions pas la sublime piste musicale isolée !
Dommage que Blaq Out n’ait pas pu reprendre le commentaire audio de Steve De Jarnatt et du directeur de la photographie Theo Van de Sande, disponible sur l’édition Kino.
L’Image et le son
Effectivement, c’est un miracle que Miracle Mile apparaisse en France, surtout en Haute-Définition ! C’est donc à Blaq out que nous devons cette sortie aussi ambitieuse que très attendue par beaucoup de cinéphiles. Seulement le résultat en Haute-Définition est très relatif. Le point fort de cette édition demeure les couleurs typiques des années 1980, autrement dit bariolées, renforcées ici par l’omniprésence des néons qui éclairent les rues désertes de Los Angeles à 4h du matin, avec une très belle lumière diffuse. Ajoutez à cela une stabilité rarement prise en défaut, un piqué agréable et des contrastes plutôt concis. En revanche, l’apport de la HD appuie le côté « petit budget » de Miracle Mile. La gestion du grain est aléatoire, les poussières et points blancs apparaissent sporadiquement (la restauration est correcte, pas non plus incroyable), mais se multiplient dans l’acte final, sur les plans à effets spéciaux et les partis pris rouge-orangé, avec également l’apparition de fourmillements. La belle photographie du chef opérateur néerlandais Theo Van de Sande (Blade) s’en tire avec les honneurs et profite de cette promotion. C’est déjà ça de pris.
Le mixage anglais Stéréo est propre et distille parfaitement la bande originale. La piste anglaise est la plus équilibrée du lot avec une homogénéité entre les dialogues et les bruitages souvent impressionnants. Au jeu des différences, la version française s’avère plus couverte, avec certaines ambiances et d’autres effets annexes qui peinent à se faire entendre quand on compare avec la piste anglaise. L’éditeur prévient d’ailleurs de l’état de la version française, par un carton en avant-programme. La piste originale est dynamique et le niveau des dialogues plus plaisant. Les sous-titres français sont imposés en anglais.
LA NUIT DE LA GRANDE CHALEUR (Night of the Big Heat) réalisépar Terence Fisher,disponible en DVD et Blu-ray le 26 septembre 2017 chez Movinside
Acteurs : Christopher Lee, Peter Cushing, Patrick Allen, Percy Herbert, Jane Merrow, Sarah Lawson, William Lucas, Kenneth Cope…
Scénario : Ronald Liles d’après le roman de John Lymington
Photographie : Reginald H. Wyer
Musique : Malcolm Lockyer
Durée : 1h34
Date de sortie initiale : 1967
LE FILM
Une invraisemblable vague de chaleur touche en plein hiver l’île britannique de Fara. À l’auberge du « Cygne Blanc », la tension monte en même temps que la température. Le mystérieux client Hanson finira par dévoiler la cause de cet étrange microclimat : des extraterrestres se préparent à envahir la Terre et la chaleur intense leur est indispensable pour survivre…
La Nuit de la grande chaleur, Night of the Big Heat en version originale et même Island of the Burning Damned pour son exploitation aux Etats-Unis, est l’un des derniers longs métrages du célèbre réalisateur Britannique Terence Fisher (1904-1980), grande figure de la Hammer Film Productions et metteur en scène de Frankenstein s’est échappé (1957), Le Cauchemar de Dracula (1958), La Revanche de Frankenstein (1958) et Le Chien des Baskerville (1959). Après avoir remis au goût du jour (et en couleur) les monstres qui avaient fait les belles heures des Studios Universal dans les années 1930-40, ainsi que Sherlock Holmes dans l’une des plus grandes adaptations de Sir Arthur Conan Doyle, le cinéaste s’engage pour deux films auprès de la Planet Film. Ce sera L’Île de la terreur – Island of Terror en 1966 et La Nuit de la grande chaleur (1967), d’après un roman de John Lymington. Disposant d’un budget restreint (euphémisme), Terence Fisher peut néanmoins compter sur la participation de deux monstres du genre, deux comédiens qu’il a très souvent fait tourner, Christopher Lee et surtout Peter Cushing qui collaborera près d’une quinzaine de fois avec le réalisateur. Malgré ce casting plus qu’attractif, La Nuit de la grande chaleur déçoit, ennuie souvent et le talent du cinéaste ne parvient pas à donner un souffle à son histoire limitée qui s’apparente souvent à du théâtre filmé.
Au mois de novembre, l’île de Fara située au large de l’Ecosse, est habituellement battue par les vents et la température y est hivernale. Cette année-là, il n’en est rien : une vague de chaleur inaccoutumée sévit sur la zone, perturbant animaux, végétaux et les habitants. Jeff Callum, un écrivain, propriétaire d’un hôtel, s’interroge sur les causes de ce bouleversement climatique. Il est également intrigué par le comportement d’un de ses clients, Godfrey Hanson. En forçant sa porte, il découvre dans sa chambre un véritable laboratoire. Hanson lui explique que des extraterrestres sont la cause directe de l’insupportable canicule. Malgré un excellent postulat de départ, une installation prenante et des effets paranormaux inquiétants, La Nuit de la grande chaleur ne tient pas longtemps la route. Si les comédiens sont évidemment excellents et font tout ce dont ils sont capables pour paraître inquiets et angoissés, le dispositif réduit le film à un quasi-huis clos, en réunissant les personnages principaux dans une auberge.
Terence Fisher distille une atmosphère moite très réussie. Le cinéaste y ajoute une touche sexy par la présence de la sensuelle Jane Merrow, dont le corps souvent exposé, caressé avec des glaçons ou tout simplement moulé dans un bikini du plus bel effet, fait tourner à la fois la tête du personnage interprété par Patrick Allen, mais aussi des spectateurs. Cette troisième tentative de science-fiction de Terence Fisher, après The Earth Dies Screaming (1965) et L’Île de la Terreur est plutôt banale et très bavarde. Le film emprunte beaucoup aux séries B de science-fiction qui envahissaient les cinémas américains dans les années 1950 et seules quelques scènes parviennent à vraiment à éveiller l’intérêt après la formidable exposition qui n’est pas sans rappeler l’album de Tintin, L’Étoile mystérieuse publié en 1942.
Terence Fisher parvient à restreindre les effets visuels en privilégiant le hors champ et les effets sonores à base d’acouphènes (très réussis par ailleurs), mais doit se résoudre à dévoiler les envahisseurs dans un final raté, involontairement drôle (quoique) et désuet. Profitant du titre « hot », le distributeur Empire Distribution, peu confiant sur la qualité du film, décide d’intégrer des scènes érotiques et de remanier le montage original, en misant uniquement sur le nom des deux actrices principales. Une arnaque qui a quand même attiré un demi-million de spectateurs dans les salles françaises en 1975 !
Revoir La Nuit de la grande chaleur dans son vrai montage n’apporte pas grand-chose, si ce n’est d’admirer le talent de deux grands comédiens, qui donnaient le meilleur d’eux-mêmes même dans les productions les plus fauchées. Pas désagréable, mais dispensable.
LE BLU-RAY
Le Blu-ray de La Nuit de la grande chaleur, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique et élégant de couleur noire. La jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de fantastique, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.
Cette nouvelle vague Trésors du fantastique pèche par les présentations de Marc Toullec. S’il répond à l’appel, son introduction (7’) s’avère d’une pauvreté plutôt déconcertante. De biais, lisant un texte (sur un PC ?), bafouillant, se reprenant plusieurs fois, Marc Toullec se contente quasiment de faire une dictée, sans donner la moindre intonation à son texte, en se contentant d’énumérer des anecdotes de tournage, la sortie du film (dont la version agrémentée de scènes érotiques) et le casting de façon robotique. De plus, il semble que pour faire des économies en postproduction, Marc Toullec ait tout simplement mis une musique horripilante en fond pendant qu’il déclame son texte. A ce train-là, l’ancien co-rédacteur en chef de Mad Movies sera de dos lors de ses prochaines apparitions !
L’Image et le son
Le Blu-ray est au format 1080i. A cette bizarrerie s’ajoute un master défraîchi, aux couleurs complètement fanées à tendance jaunâtre. Le générique effraie quelque peu puisque l’image est constellée de points, de tâches et d’autres scories en tous genres. Si cela s’améliore après, la propreté n’est certainement pas le point fort de cette édition. D’ailleurs, l’ensemble demeure médiocre avec un piqué émoussé, un grain aléatoire et des contrastes du même acabit. La copie est néanmoins stable et diverses séquences tirent néanmoins leur épingle du jeu, même si la promotion HD n’est guère palpable sur ce titre.
Les versions originale et française bénéficient d’un mixage PCM 2.0. Pas de HD ici donc. Cependant, le confort acoustique est malgré tout assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle probant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste française. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.
OSIRIS, LA 9ÈME PLANÈTE (The Osiris Child – Science Fiction Volume One) réalisépar Shane Abbess,disponible en DVD et Blu-ray le 29 août 2017 chez Wild Side Video
Acteurs : Kellan Lutz, Daniel MacPherson, Luke Ford, Isabel Lucas, Temuera Morrison, Rachel Griffiths, Teagan Croft…
Scénario : Shane Abbess, Brian Cachia
Photographie : Carl Robertson
Musique : Brian Cachia
Durée : 1h38
Date de sortie initiale : 2016
LE FILM
Dans un futur lointain, l’humanité est lancée dans une course à la colonisation interplanétaire. Kane, lieutenant pour l’entreprise Exor, a pour mission d’organiser la vie dans ces nouveaux mondes. Mais un jour, il découvre que des prisonniers se sont emparés d’un virus mortel qu’ils menacent de diffuser sur Osiris, planète où vit la fille de Kane. Il se lance alors dans une course contre la montre à travers l’univers pour sauver sa fille sans se douter que dans l’ombre, une terrible machination est déjà à l’oeuvre…
Bon…on aurait bien voulu l’aimer ce film, Osiris, la 9ème planète – Science Fiction Volume One: The Osiris Child, sorti directement dans les bacs français avec un visuel clinquant. Malheureusement et bien que le réalisateur australien Shane Abbess soit précédé d’une assez bonne réputation, ce film fantastique s’avère un redoutable navet. C’est d’autant plus dommage que l’on sent réellement le potentiel du metteur en scène, remarqué en 2007 avec son premier long métrage Gabriel, mélange d’action, d’épouvante et de fantasy, dans lequel l’Ange Gabriel est conduit à mener l’ultime bataille contre les forces des ténèbres qui ont décidé de dominer le monde. Son deuxième film Infini est un thriller de science-fiction réalisé en 2015 coécrit avec Brian Cachia, également compositeur. Pour son long métrage suivant, Osiris, la 9ème planète, Shane Abbess n’aura pas eu à attendre presque dix ans puisque le film est sorti en 2016.
Cela part plutôt bien avec une belle mise en image, une photo et un cadre soignés. Le spectateur sent qu’on le caresse dans le sens du poil et que tout ne peut que bien se dérouler. Malheureusement, on déchante rapidement. Très vite, le montage complètement haché gâche tout et surtout l’indigence de l’interprétation emporte ce film de science-fiction sur les rives du navet intergalactique. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas vu autant de comédiens aussi mauvais et dépourvus de charisme. La palme revient une fois de plus à l’inénarrable Kellan Lutz, l’un des pires acteurs de tous les temps, une endive comme on en fait rarement aujourd’hui. Vu dans la saga Twilight, Expendables 3 et La Légende d’Hercule de Renny Harlin où même la 3D ne lui donnait aucun relief, il intègre le top 10 des comédiens les plus improbables. Avec son regard inexpressif et sa barbe qui semble avoir été peinte au pochoir, il déambule dans le film comme s’il était paumé avec sa pétoire. Il n’est guère aidé par Daniel MacPherson, dont pas une réplique ne tombe juste et qui semble constamment en hyperventilation, tandis que l’actrice Isabel Lucas, vue dans Transformers – La revanche et le navrant remake de L’Aube rouge, ajoute un nouveau navet à son potager déjà bien garni.
L’intrigue est divisée en plusieurs chapitres. Celui consacré à l’incarcération d’un des personnages principaux dans une prison high-tech ferait passer Fortress 2 pour du Béla Tarr. On rit, mais pas comme on pourrait le faire devant un nanar. Osiris, la 9ème planète est une œuvre qui se prend bien trop au sérieux alors que le manque de budget l’empêche constamment d’être crédible. Certains plans détonnent pourtant par leur beauté plastique à l’instar de la séquence de combat aérien qui ne dure malheureusement que cinq petites minutes. Durant ce laps de temps, on regrette sincèrement que tout le film ne soit pas aussi élégant que cette scène qui se déroule dans les nuages. Le reste n’est qu’ennui, simpliste, copie de toute une tripotée de films que l’on s’amuse à reconnaître et à énumérer. Un mix entre Starship Troopers, District 9 (le seul bon film de Neil Blomkamp à ce jour), Mad Max et…Max et les Maximonstres. Mad Max et les Maximonstres en quelque sorte.
Les fans de série B de science-fiction et de fantastique risquent de trouver le temps long puisqu’il ne se passe quasiment rien. L’action demeure incompréhensible, l’intrigue faussement décousue n’a aucun intérêt, bref, on s’ennuie royalement. Le « Volume deux » semble avorté.
LE BLU-RAY
Le test de l’édition HD d’Osiris, la 9ème planète a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical. L’édition Steelbook contient le DVD et le Blu-ray.
L’éditeur a réussi à mettre la main sur un making of entièrement promotionnel (24’), constitué d’interviews de toute l’équipe et de très rares images de tournage. Le réalisateur, le coscénariste (et compositeur), les comédiens et les producteurs s’en donnent à coeur joie dans les superlatifs, un tel est magnifique, un autre est extraordinaire, tout le monde il est beau. On en apprend tout juste sur la genèse du film, l’évolution du scénario (rires) et les intentions de Shane Abbess.
C’est beau
L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.
L’Image et le son
Le Blu-ray est au format 1080p. Wild Side Video prend soin de ce titre qui sort directement dans les bacs chez nous. Ce master HD français (les credits sont dans la langue de Molière) est soigné et le transfert solide. Respectueuse des volontés artistiques originales la copie d’Osiris, la 9ème planète se révèle propre, lumineux et tire agréablement partie de la HD avec des teintes chaudes, une palette chromatique spécifique, le tout soutenu par un solide encodage. Le piqué, tout comme les contrastes, sont souvent tranchants, les arrière-plans sont détaillés, le relief plaisant, les noirs denses et les détails foisonnants. Hormis quelques légers fléchissements de la définition sur les scènes sombres et une incrustation des effets visuels parfois visibles, cette édition Blu-ray permet de découvrir Osiris, la 9ème planète dans de très bonnes conditions techniques. Un bel écrin pour un film en toc.
En anglais comme en français, les pistes DTS-HD Master Audio 5.1 assurent le spectacle acoustique avec brio. La version française jouit d’un dynamique report des voix et même si elle s’avère moins riche que la version originale, elle n’en demeure pas moins immersive. Dans les deux cas, la balance frontale en met plein les oreilles lors des séquences d’affrontements. Seul bémol, les voix manquent parfois de punch au milieu de tout ce fracas. Quelques scènes sortent du lot avec un usage probant des ambiances latérales et du caisson de basses. La musique profite également d’une belle délivrance, mettant toutes les enceintes à contribution, même à volume peu élevé. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.
LE CERVEAU D’ACIER(Colossus : The Forbin Project)réalisépar Joseph Sargent, disponible en DVD et Blu-rayle 9 mai 2017chez Movinside
Acteurs : Eric Braeden, Susan Clark, Gordon Pinsent, William Schallert, Leonid Rostoff, Georg Stanford Brown, Willard Sage…
Scénario : James Bridges d’après le roman de D.F. Jones
Photographie : Gene Polito
Musique : Michel Colombier
Durée : 1h40
Date de sortie initiale: 1970
LE FILM
Scientifique de renom,Charles A. Forbin met au point un super-ordinateur baptisé Colossus, chargé de contrôler l’arsenal nucléaire des États-Unis ainsi que celui de ses alliés, afin d’éviter toute erreur humaine. Alimenté par son propre réacteur nucléaire et installé au coeur d’une montagne, Colossus, une fois activé, détecte un autre super-ordinateur. On apprend bientôt qu’il s’agit de l’homologue soviétique de Colossus, baptisé Guardian. C’est là que les ennuis commencent…
Attention, chef d’oeuvre ! Méconnu, pourtant sublime et précurseur, Le Cerveau d’acier – Colossus : The Forbin Project s’apparente au chaînon manquant entre Point Limite de Sidney Lumet (1965) et 2001 : L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick (1968), rien de moins ! Ce film de science-fiction apocalyptique est réalisé par Joseph Sargent, de son vrai nom Giuseppe Danielle Sorgente (1925-2014), cinéaste éclectique à qui l’on doit L’Espion au chapeau vert (1966), deux épisodes en version longue mis bout à bout de la série Des agents très spéciaux, Les Pirates du métro (1974) ou bien encore l’inénarrable Dents de la mer 4 : La Revanche (1987). Le Cerveau d’acier est assurément son plus grand film et n’en finit pas d’impressionner par sa virtuosité, sa sécheresse de ton, son cadre, son intelligence et son interprétation, sans oublier la discrète et pourtant subtile composition de Michel Colombier.
Le docteur Charles Forbin a mis au point un super ordinateur qui va prendre en charge la gestion des défenses militaires américaines. Mais, seulement quelques minutes après sa mise en service dans des conditions réelles, la machine envoie un énigmatique message : «Il y a un autre système !». On apprend que Colossus fait allusion à un projet soviétique similaire : un superordinateur baptisé « Guardian » contrôlant l’armement nucléaire soviétique. Les deux ordinateurs demandent à être relié l’un à l’autre afin de pouvoir communiquer. Une connexion est établie et les ordinateurs commencent à échanger des messages utilisant un langage mathématique simple, chaque camp supervisant les communications à l’aide de moniteurs. Le contenu des messages finit par devenir de plus en plus complexe, jusqu’à présenter des principes mathématiques jusque là inconnus. Les deux ordinateurs finissent par adopter un langage binaire impossible à interpréter par les scientifiques. Alarmés, les chefs d’État américain et soviétique décident d’un commun accord d’interrompre la connexion. Colossus et Guardian exigent que la connexion soit rétablie, sinon « des mesures seront prises ». Leur demande étant ignorée, Colossus et Guardian décident l’un comme l’autre de lancer un missile nucléaire. Les deux pays rétablissent la connexion et Colossus intercepte à temps le missile soviétique. Toutefois, la connexion a été rétablie trop tard côté soviétique : le missile américain anéantit un complexe pétrolifère et une ville voisine. Impuissants, les scientifiques et responsables des deux camps assistent à un échange d’informations effréné entre les deux superordinateurs, lesquels annoncent ensuite avoir fusionné en une seule et unique entité infiniment plus performante, ayant choisi le nom de Colossus.
Sorti en 1970, Le Cerveau d’acier est adapté du roman de Dennis Feltham Jones écrit et publié en 1966. Film d’anticipation, Colossus : The Forbin Project se penche sur le sujet de l’intelligence artificielle si celle-ci devait échapper à l’homme qui l’a conçue. En prenant conscience de lui-même, l’ordinateur décide d’agir pour le bien de l’humanité, en ne tenant plus compte des avis de celui qui l’a créé, parfois en détruisant des milliers de vies pour en sauver des millions. Le Cerveau d’acier fait froid dans le dos avec ses décors grandioses et son caractère pessimiste.
Aujourd’hui mondialement connu pour sa participation aux Feux de l’amour depuis 1980, Victor Newman, Eric Braeden pardon, a certes peu tourné pour le cinéma, mais ses films demeurent marquants. Outre le Titanic de James Cameron, le comédien apparaît également dans Les 100 fusils de Tom Gries, Les Évadés de la planète des singes de Don Taylor, le sympathique La Coccinelle à Monte-Carlo de Vincent McEveety, ou bien encore L’Ambulance de Larry Cohen. Il est parfait et élégant dans Le Cerveau d’acier. Son charisme renvoie parfois à l’idée que l’on pouvait se faire d’un James Bond à la fin des années 1960. Ses confrontations (formidables et percutants dialogues) avec Colossus sont tendues du début à la fin, au départ protocolaires, puis de plus en plus intrigantes à mesure que l’ordinateur développe une personnalité, jusqu’à la fin quand Colossus ordonne d’installer des caméras (ses yeux) partout, y compris au sein même de l’habitat de Forbin. L’épilogue reste particulièrement sombre et désespéré, tandis que les merveilleux décors subjuguent dès la première séquence, celle où le spectateur fait connaissance avec Colossus et son complexe. Bien que froid en apparence, on s’attache également très vite au Dr Charles A. Forbin, ce concepteur d’un projet gouvernemental secret, très vite dépassé par les événements et qui doit se rendre à l’évidence : il a bel et bien créé un monstre qui lui a échappé, qui prend conscience de lui-même et qui s’est proclamé maître du monde. L’ordinateur est désormais prêt à tous les sacrifices, afin d’abolir la guerre et éradiquer la famine, la maladie et la surpopulation.
Cette relecture glaçante du mythe de Prométhée se nourrit des peurs engendrées par la Guerre Froide et la possibilité d’une Troisième Guerre mondiale et n’a souvent rien à envier aux grands films susmentionnés. D’autant plus que le film a sûrement inspiré James Cameron pour le Skynet de Terminator. Il est donc temps de réhabiliter ce Colossus : The Forbin Project, qui n’a absolument pas vieilli, à part peut-être dans les décors bien sûr, mais dont le sujet ambitieux et maîtrisé n’a jamais autant incité à la réflexion.
LE BLU-RAY
Le Blu-ray du Cerveau d’acier, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique classe de couleur noire. L’élégante jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de SF, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.
A l’instar des autres titres de cette merveilleuse collection, Le Cerveau d’acier, cette édition HD ne contient qu’un seul supplément, une présentation du film par le journaliste Marc Toullec (13’). L’ancien co-rédacteur en chef de Mad Movies ne manque pas d’inspiration et d’arguments pour défendre ce bijou qu’il situe dans son contexte. Toullec évoque le sujet, le roman original de Dennis Feltham Jones, les similitudes avec les deux premiers Terminator de James Cameron, tout en donnant quelques indications sur les carrières du réalisateur Joseph Sargent, du scénariste James Bridges et des comédiens, en se focalisant bien sûr sur Eric Braeden. Le tout accompagné d’anecdotes sur la production du film et les tentatives avortées d’un remake envisagé par Ron Howard avec Will Smith dans le rôle principal.
L’Image et le son
Grâce à un codec AVC de haute tenue, le Blu-ray du Cerveau d’acier proposé au format 1080p, permet aux spectateurs de redécouvrir totalement les incroyables décors du film. Si l’on excepte quelques séquences plus douces que d’autres ou au grain plus appuyé nous nous trouvons devant une image qui ne cesse de flatter les rétines. Issue d’une restauration solide, cette copie HD, d’une stabilité à toutes épreuves, est absolument indispensable et superbe. La propreté est indéniable, les couleurs retrouvent une vraie vivacité, le piqué est joliment acéré et les détails sont probants sur le cadre large. Le découpage est net et sans bavure, l’ensemble est homogène et d’une indéniable élégance, comme les contrastes. Revoir Le Cerveau d’acier, oeuvre rare et malheureusement souvent oubliée, dans ces conditions était pour ainsi dire inespéré.
Les versions originale et française bénéficient d’un mixage Dolby Digital 2.0 Mono. Pas de HD ici donc. Cependant, le confort acoustique est malgré tout assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle probant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste française. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.
L’INVASION DES PROFANATEURS(Invasion of the body snatchers)réalisépar Philip Kaufman, disponible en DVD et Blu-rayle 25 avril 2017chez Rimini Editions
Acteurs : Donald Sutherland, Brooke Adams, Leonard Nimoy, Jeff Goldblum, Veronica Cartwright, Art Hindle, Kevin McCarthy, Don Siegel, Tom Luddy…
Scénario : W.D. Richter d’après le roman de Jack Finney
Photographie : Michael Chapman
Musique : Denny Zeitlin
Durée : 1h55
Date de sortie initiale: 1978
LE FILM
Elizabeth s’aperçoit un jour du comportement étrange de son ami. Puis, peu à peu, d’autres personnes se transforment ainsi bizarrement. Pendant leur sommeil, une plante fabrique leur double parfait, tandis que l’original disparaît.
L’Invasion des profanateurs – Invasion of the Body Snatchersde Philip Kaufman est bien plus qu’un simple remake du film culte réalisé par Don Siegel en 1956. C’est une fabuleuse relecture du livre original de Jack Finney paru en 1955 (mais publié en 1977 en France sous le titre Graines d’épouvante) qui s’inscrit dans le cinéma hollywoodien des années 1970 placé sous le signe de la paranoïa. De mystérieuses particules venues de l’espace arrivent sur la Terre. A San Francisco, Elizabeth Driscoll (Brooke Adams) cueille une fleur étrange sur un arbre de son quartier et tente de l’identifier, en vain. Intriguée, elle s’en ouvre à son compagnon, sans réussir à éveiller son intérêt. De plus en plus inquiète, Elizabeth se confie à Matthew Bennell (Donald Sutherland), son collègue de bureau au ministère de la Santé. Plus tard, lors d’une réception, Jack (Jeff Goldblum), un ami de Matthew, décide de rentrer chez lui se reposer. Quelques heures après, son épouse constate avec un légitime effroi qu’il s’est transformé en une énorme «cosse», semblable à un embryon.
Près de 40 ans après sa sortie, L’Invasion des profanateurs demeure une référence de la science-fiction. Anxiogène, sombre, le film malmène son audience du début à la fin. Le dénouement aura traumatisé plus d’un spectateur et fait toujours son effet, y compris sur celles et ceux qui connaissent pourtant l’épilogue du film. En transposant ce récit à San Francisco, le réalisateur Philip Kaufman, qui avait auparavant signé en 1972 La Légende de Jesse James avec Cliff Robertson et Robert Duvall (qui fait ici un étrange caméo au début du film dans le rôle du prêtre sur la balançoire), ainsi que le scénario de Josey Wales hors-la-loi de Clint Eastwood en 1976, étend la folie et le danger de son invasion éponyme. Paradoxalement, cela renforce l’enfermement des personnages qui tentent de s’échapper. Cette ville extraordinaire et l’une des plus belles filmées au cinéma, s’apparente alors à un terrain de jeu dangereux, où les derniers êtres humains doivent fuir dans des rues souvent désertées. La tension est maintenue tout du long, l’attachement envers les personnages est trouble puisque chacun peut avoir été « répliqué » à un moment ou à un autre.
Le scénario de W.D. Richter, futur réalisateur des Aventures de Buckaroo Banzaïà travers la 8e dimension (1984) et scénariste des Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin de John Carpenter (1986) est un bijou et réserve son lot de surprises. Du point de vue technique, outre la virtuosité de Philip Kaufman et la grande réussite des effets visuels, la photographie de Michael Chapman, l’un des plus grands chefs opérateurs de l’histoire du cinéma (Taxi Driver, Raging Bull, Le Fugitif), renforce cette impression de claustration qui se resserre à mesure que les personnages se voient obliger de courir sans cesse pour échapper aux griffes des envahisseurs. N’oublions pas la partition de Denny Zeitlin, la seule incursion au cinéma du compositeur, qui donne des frissons et envoûte toujours les spectateurs. Evidemment, nous retenons aussi et surtout la performance de comédiens immenses, dominés par un Donald Sutherland en état de grâce et qui passait de grands films en grands rôles, de M*A*S*H de Robert Altman, en passant par Klute d’Alan J. Pakula, Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg, 1900 de Bernardo Bertolucci ou bien encore Le Casanova de Fellini de Federico Fellini. Cependant, sa prestation n’éclipse jamais celle de ses partenaires, notamment une Brooke Adams intrigante et débarquant des Moissons du ciel de Terrence Malick, un Jeff Goldblum âgé de 25 ans et déjà pince-sans-rire, une Veronica Cartwright affrontait déjà des aliens avant celui de Ridley Scott, et surtout un Leonard Nimoy froid comme la glace, qui impressionne à chaque regard ou réplique. Deux apparitions de premier choix sont également au programme, celle de Don Siegel en personne, dans le rôle d’un chauffeur de taxi ambigu, et celle de Kevin McCarthy, premier rôle du film original, qui fait ici le lien avec L’Invasion des profanateurs de sépultures.
A la fois thriller, film d’horreur et de science-fiction, L’Invasion des profanateurs est aussi un film politique angoissant et redoutablement pessimiste, parfait reflet d’une Amérique post-Watergate, en manque de repère et livrée à elle-même, alors que le Siegel reflétait plutôt la peur héritée du maccarthysme. Les derniers êtres humains sont ici les derniers représentants de l’individualité et du libre-arbitre, qui doivent lutter pour préserver ce qu’il leur reste de plus cher, pour ne pas être dupliqué et remplacé par un être programmé, sans haine et sans amour, né dans une cosse, métaphore de la standardisation. Après cette fabuleuse adaptation, Abel Ferrara y reviendra en 1993 avec Body Snatchers, ainsi qu’Oliver Hirschbiegel en 2007 avec Daniel Craig et Nicole Kidman dans Invasion. Les profanateurs feront sûrement leur retour un jour ou l’autre…
LE BLU-RAY
Le Blu-ray de L’Invasion des profanateurs, disponible chez Rimini Editions, repose dans boîtier classique de couleur noire. Le visuel de la jaquette est très élégant, jouant sur la duplicité du personnage joué par Donald Sutherland. Le menu principal est animé et musical. L’éditeur joint également un livret de 12 pages rédigé par Pascal Montéville et intitulé Invasion(s), que nous retrouvons au cours d’un des suppléments détaillés ci-dessous.
Nous commençons cette large interactivité par l’entretien avec Brooke Adams (9’-2016). Chaleureuse, drôle et visiblement ravie de partager ses souvenirs liés au tournage de L’Invasion des profanateurs, la comédienne entame cette interview en indiquant qu’elle ne connaissait pas le film de Don Siegel. La rencontre et le travail avec Philip Kaufman, la scène de nu, la psychologie des personnages, la collaboration avec ses partenaires de jeu, la photographie de Michael Chapman, Brooke Adams aborde tous ces sujets, sans oublier de nous refaire son « truc avec les yeux » qui a marqué tant de spectateurs.
Dans un module réalisé en 2007, le scénariste W.D. Richter, le réalisateur Philip Kaufman, le directeur de la photographie Michael Chapman, les comédiens Donald Sutherland et Veronica Cartwright reviennent à leur tour sur leur adaptation du livre de Jack Finney (15’). Ces intervenants mentionnent les thèmes du film, les partis pris, les différences avec le film de Don Siegel, le tournage à San Francisco et la surprise de la scène finale.
Ne manquez pas le segment intitulé Une invasion signée Jack Finney (28’), qui donne la parole à Pascal Montéville, enseignant en Sciences Politiques à School Year Abroad de Rennes et qui propose un formidable comparatif entre les films de Don Siegel et Philip Kaufman, mais également des films avec le roman original de Jack Finney, tout en évoquant rapidement les deux adaptations suivantes. Notre interlocuteur passe en revue les thèmes du livre et la façon dont les réalisateurs ont su chacun refléter le climat politique et social de leur époque. Vous en saurez beaucoup plus sur la publication de ce roman qui a su marquer l’histoire de la science-fiction des années 1950. Enfin, Pascal Montéville donne également son point de vue sur le film qui nous intéresse.
Les suppléments suivants sont uniquement disponibles sur l’édition Blu-ray :
On passe à l’interview du comédien canadien Art Hindle, l’interprète du Dr. Geoffrey Howell dans L’Invasion des profanateurs (25’). Aujourd’hui paumé dans les séries B et Z au cinéma et à la télévision, Art Hindle ne cache pas son enthousiasme à évoquer sa participation au film de Philip Kaufman, tout en rappelant qu’il avait également participé au classique Black Christmas (1974) de Bob Clark puis juste après dans Chromosome 3 de David Cronenberg (1979). Très attachant l’acteur parle de son amour pour la science-fiction depuis son enfance et se souvient également que sa mère cinéphile l’avait emmené voir la version de Don Siegel au cinéma. A son tour, Art Hindle aborde le travail avec Philip Kaufman, sa découverte du scénario, les partis pris, le travail du chef opérateur, son personnage, ses partenaires (avec un « Leonard Nimoy merveilleux », une « Brooke Adams formidable» et un « Donald Sutherland froid, distant et un peu dédaigneux »), tout en avouant que L’Invasion des profanateurs est le film sur lequel il a préféré travailler.
C’est ensuite au tour du scénariste W.D. Richter de se pencher sur son travail (16’). Comment transposer le roman original, sans copier le travail déjà effectué par Don Siegel dans sa version du livre de Jack Finney ? Comment le tournage s’est-il déroulé ? W.D. Richter répond à ces questions, tout en avouant que le script était modifié en permanence. Les thèmes, mais aussi les effets visuels, le choix des comédiens, l’apparition de Don Siegel et de Kevin McCarthy, ainsi que la fin tenue secrète jusqu’au dernier moment, y compris pour les acteurs, sont également passés au peigne fin.
Dernier bonus tout aussi indispensable de cette édition HD, celui de la rencontre avec le compositeur Denny Zeitlin (15’). Chose rare dans l’histoire du cinéma, notre interlocuteur, enseignant en psychanalyse n’a composé qu’une seule partition, celle de L’Invasion des profanateurs de Philip Kaufman ! L’intéressé explique comment il est arrivé sur ce projet et comment il a relevé le défi d’écrire la musique du film qui nous intéresse. S’il se dit toujours très fier d’avoir participé à L’Invasion des profanateurs, Denny Zeitlin revient sur la difficulté de cette tâche à laquelle il consacrait entre 18 à 22 heures par jour pendant 10 semaines. Ce documentaire se clôt sur une petite démo au piano, tandis que Denny Zeitlin indique avoir reçu de nombreuses propositions à la sortie du film, mais qu’il a poliment décliné pour se consacrer à sa véritable vie professionnelle.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce. Un très grand merci à Rimini Editions !
L’Image et le son
L’éditeur nous permet de redécouvrir L’Invasion des profanateurs dans de belles conditions techniques, même si les partis pris esthétiques du chef opérateur Michael Chapman, donnent constamment du fil à retordre au codec AVC. Quelques séquences nocturnes demeurent altérées avec des noirs poreux virant au bleu, une baisse de la définition avec des plans flous, un grain plus hasardeux et une gestion des contrastes déséquilibrée. En dépit de diverses scènes à la définition aléatoire et de sensibles fourmillements, la propreté est indéniable et le dépoussiérage conséquent, la copie demeure très appréciable, et l’apport HD (1080p) est loin d’être négligeable. Les séquences diurnes lumineuses sont bien restituées avec parfois un halo de lumière vaporeux fort plaisant. On découvre aussi un lot de détails inédits qui flatte la rétine, d’autant que le cadre est stable et superbement exploité.
Malgré ce qui est mentionné sur la jaquette, point de piste anglaise en 5.1 ! La version originale bénéficie d’un mixage Stéréo qui instaure un confort acoustique convaincant. Cette option séduisante permet à la composition enivrante de Denny Zeitlin de s’étendre convenablement afin de mieux plonger le spectateur dans l’atmosphère du film. Les effets annexes ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés, bien qu’ils auraient pu être un poil plus relevés. Même chose pour la balance frontale, qui assure correctement le spectacle, même si l’on pouvait cependant espérer un ensemble plus riche et dynamique. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono qui fait ce qu’elle peut pour imposer ses ambiances, les dialogues et la musique. Dommage que les sous-titres français soient imposés sur la version originale. Le changement de langue est impossible à la volée et nécessite le retour au menu contextuel. Dans les deux cas, aucun souffle constaté.
NEMESISréalisépar Albert Pyun, disponible en DVD et Blu-ray le 21 avril 2017 chez Metropolitan Vidéo
Acteurs : Olivier Gruner, Tim Thomerson, Cary-Hiroyuki Tagawa, Merle Kennedy, Yuji Okumoto, Marjorie Monaghan, Nicholas Guest, Vincent Klyn, Thom Mathews…
Scénario : Rebecca Charles
Photographie : George Mooradian
Musique : Michel Rubini
Durée : 1h35
Date de sortie initiale: 1992
LE FILM
Los Angeles, 2026. Les USA et le Japon ne font plus qu’un. Une technologie avancée en cybernétique a développé la possibilité de remplacer n’importe quel morceau de corps. Alex Rain est un flic cyborg qui traque des terroristes. A moitié détruit et rafistolé après une attaque, il s’enferme dans sa solitude et quitte la police. Mais son supérieur Farnsworth le retrouve et le force à accepter une ultime mission dangereuse. En lui plaçant une bombe à retardement au coeur de son système.
Pour beaucoup d’amateurs de cinéma Bis, Albert Pyun (né en 1954), est le réalisateur de Cyborg (1989) avec Jean-Claude Van Damme. Depuis son premier long métrage, le film d’heroic-fantasy L’Epée sauvage (1982), le metteur en scène américain né à Hawaii est devenu un spécialiste du cinéma d’action tourné avec des moyens souvent dérisoires, mais une imagination débordante. On compte aujourd’hui à son palmarès plus de 50 séries B d’action et de science-fiction, parmi lesquelles Nemesis (1992) et ses suites, Kickboxeur 2 : Le Successeur (1991), un Captain America (1990) considéré comme un des pires films de tous les temps (merci la Cannon), Explosion imminente (2001) avec Steven Seagal, Tom Sizemore et Dennis Hopper ou bien encore Adrénaline (1996) et Mean Guns (1997) avec Christophe(r) Lambert.
Nemesis est assurément l’un des sommets de la carrière d’Albert Pyun. Un succès qui a engendré trois suites : Nemesis 2 : Nebula (1995), Nemesis 3 : Time Lapse (1996) et Nemesis 4 : Death Angel (1996), réalisés par Albert Pyun lui-même. Dans ce film fantastique (le genre hein), le réalisateur ne se gêne pas pour piller Terminator 2 : Le Jugement dernier de James Cameron – jusqu’à la réplique I’ll be back et même les bruitages de l’exosquelette – avec une pincée de RoboCop de Paul Verhoeven et de Blade Runner de Ridley Scott. Evidemment avec un budget largement moins conséquent, la virtuosité en moins, une gratuité effarante, mais avec une intarissable générosité afin d’offrir aux spectateurs le meilleur divertissement possible, Albert Pyun réussit son pari, à savoir livrer un spectacle bourrin et hautement réjouissant.
Drôle, souvent involontairement c’est vrai, Nemesis enchaîne les fusillades bien grasses, mais jubilatoires, les punchlines provenant d’une cour de maternelle (« T’es qu’un salopard de flic ! » « Et toi une salope de terroriste ! »), avec quelques nanas topless (sculpturale Deborah Shelton, vue dans Body Double), des courses-poursuites à la pelle, des effets spéciaux (animation en stop-motion) et des maquillages qui fleurent bon le système D, la peinture à l’eau et le plastique fondu. A tout cela s’ajoute le charisme improbable du comédien français Olivier Gruner (peu aidé par la coupe mulet dans une scène mémorable), qui pour citer Peur sur la ville joue un personnage « Rien dans la tête, tout dans les muscles ». Tout en abdos et dépourvu d’expressions faciales, l’ancien militaire avait le parfait profil pour jouer un organisme cybernétique recouvert de peau humaine qui a donc le corps d’un chippendale et la tête d’un Guerrier du Bronx. Heureusement, il est aidé par des comédiens plus solides comme Cary-Hiroyuki Tagawa (le Shang Tsung de Mortal Kombat) et Tim Thomerson (Trancers).
« En 2026 après Jésus-Christ », Cité des Anges. Le Japon et les USA ont fusionné politiquement et économiquement. Alex (Olivier Grunner donc) est un policier assassin mi-homme mi-machine, dont les membres totalement carbonisés (ça doit faire mal) ont été remplacés par des organes robotisés. Il agit pour le compte d’une version futuriste du LAPD pour exécuter plusieurs résistants dont une meneuse, Rosaria. Il tente de quitter le LAPD et devient un délinquant sans envergure effectuant des petits boulots pour la pègre. Le robot a le blues. Cependant, ses responsables refusent de le laisser libre et, dès lors qu’ils ont besoin de lui, vont le traquer. Alex est sommé d’exécuter une dernière mission consistant en l’assassinat des chefs de la résistance. Il découvre alors que les résistants ne se battent pas contre le contrôle du gouvernement sur la vie de la population, mais pour l’avenir de l’humanité. C’est beau, c’est con, mais qu’est-ce que c’est bon !
Les amateurs de science-fiction et de films à androïdes ne devront pas bouder Nemesis s’ils ne l’ont jamais vu, car Albert Pyun a beau bénéficier d’un budget très limité, le metteur en scène ne recule devant rien pour amuser son audience, quitte à tout faire péter au détriment de la sécurité de ses comédiens environnés de produits toxiques. L’histoire tourne rapidement en rond, mais nous ne sommes pas là pour ça. Avec sa photographie rouge orangée, Albert Pyun installe une atmosphère « futuriste » en allant tourner dans un terrain vague et une usine abandonnée, en plaçant des explosifs partout et en envoyant ses acteurs courir, y compris des nanas en minijupe, talons hauts et grosse pétoire à la main, où bon leur semble et tant pis s’ils se font brûler en passant le long des décors en feu, cela rajoute un réalisme bienvenu.
Nemesis, c’est entre la série B et la série Z, une série BZ décomplexée cyberpunk qui explose du début à la fin, qui bouge dans tous les sens, qui ose des choses sur le plan technique y compris des plans-séquences, qui se sert sur les succès du moment, qui digère ses références et qui les restitue dégoulinant de suc gastrique. C’est acide, pas très bon pour la santé, comme un McDo, mais on l’avale quand même, ça fait du bien sur le moment et on en demande pas plus.
LE BLU-RAY
Nemesis est enfin disponible chez Metropolitan Vidéo. L’éditeur n’a pas fait les choses à moitié pour les amateurs du cinéma d’Albert Pyun – il y en a et c’est tant mieux – puisque Nemesis est accompagné de Mean Guns pour une séance double-programme ! A la manière de ses récentes sorties consacrées à Jean-Claude Van Damme avec les Blu-ray qui réunissaient Black Eagle – L’Arme absolue + Full Contact d’un côté et The Order + Le Grand tournoi de l’autre, deux films d’Albert Pyun se trouvent donc réunis sur la même galette. Le test de Mean Guns est d’ores et déjà disponible sur notre site. Une fois le disque inséré, un menu animé et musical nous propose de sélectionner directement le film, la langue et le supplément désiré.
Pour cette sortie de Nemesis en Blu-ray, l’éditeur joint un petit making of d’époque (7’), constitué de nombreuses images de tournage, du plateau, de la préparation des cascades et des explosions, mais aussi d’interviews de l’équipe (sauf Albert Pyun). Promotionnel mais rigolo, ce documentaire renvoie à l’époque avant l’avènement des images de synthèse et montre tout le travail des artisans et animateurs.
L’Image et le son
Qui dit Metropolitan dit qualité au rendez-vous. L’éditeur soigne le master HD (1080p) de Nemesis, qui était jusqu’alors inédit en DVD en France. Un lifting numérique a été effectué, avec un résultat probant. L’encodage AVC est de haute tenue et la promotion HD indéniable. Les détails sont appréciables sur le cadre large, le piqué et la clarté sont aléatoires mais plus nets sur les séquences diurnes, la colorimétrie spécifique du chef opérateur George Mooradian, fidèle collaborateur du réalisateur, retrouve une nouvelle jeunesse et les contrastes affichent une petite densité inattendue. L’ensemble est propre, stable en dehors du générique aux inévitables fourmillements, les quelques rares scories aperçues demeurent subliminales, et le grain est respecté.
Deux versions au programme en ce qui concerne l’acoustique, deux pistes DTS HD Master Audio 2.0. Au jeu des comparaisons, la version française est beaucoup moins dynamique que son homologue, tant au niveau des dialogues que des fusillades. Privilégiez évidemment la version originale, même si les dialogues français valent leur pesant dans les punchlines. La piste anglaise est donc beaucoup plus dynamique et restitue mieux le fracas des affrontements. Notons qu’en version française, une voix féminine assure la narration en parlant d’Alex à la troisième personne, alors que ce dernier est bien le narrateur en anglais.