Test Blu-ray / Grave, réalisé par Julia Ducournau

GRAVE réalisé par Julia Ducournau, disponible en DVD et Blu-ray le 26 juillet 2017 chez Wild Side Video

Acteurs : Garance Marillier, Ella Rumpf, Rabah Naït Oufella, Joana Preiss, Laurent Lucas, Bouli Lanners…

ScénarioJulia Ducournau

Photographie : Ruben Impens

Musique : Jim Williams

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Dans la famille de Justine tout le monde est vétérinaire et végétarien. À 16 ans, elle est une adolescente surdouée sur le point d’intégrer l’école véto où sa sœur ainée est également élève. Mais, à peine installés, le bizutage commence pour les premières années. On force Justine à manger de la viande crue. C’est la première fois de sa vie. Les conséquences ne se font pas attendre. Justine découvre sa vraie nature et comprend très vite qu’elle ne peut plus s’en passer. Surtout saignante. Et un campus ne manque pas de chair fraîche !

Avant Grave, son premier long métrage pour le cinéma, Julia Ducournau, ancienne élève de la Fémis, est la réalisatrice d’un court-métrage, Junior (2011) puis d’un téléfilm pour Canal+ mis en scène avec Virgile Bramly, Mange (2012), interdit aux moins de 16 ans. Pour ses débuts au cinéma, Julia Ducournau retrouve Garance Marillier, qu’elle avait dirigée dans Junior. C’est une double révélation et pour une fois le mot n’est pas usurpé. De par son sujet aussi singulier que dérangeant, et par son impressionnante maîtrise formelle, ce premier film multi-récompensé – par le Grand Prix à Gérardmer et le Prix de la critique internationale à la Semaine de la critique à Cannes – est un choc dans le cinéma français et a su créer l’événement dans les festivals du monde entier où certains spectateurs se seraient même évanouis devant les scènes de cannibalisme.

Justine, comme le reste de sa famille, est végétarienne. A 16 ans, la jeune femme, précoce, est reçue dans l’école vétérinaire où sa soeur aînée, Alexia, est déjà élève. Mais l’intégration est brutale : le bizutage commence en effet tout de suite pour Justine, qui ne peut pas compter sur le soutien de sa soeur et se retrouve forcée d’ingérer un morceau de viande crue, un rein de lapin. Cette expérience douloureuse n’est pas sans conséquences sur l’étudiante qui commence à développer un étrange comportement. Le point commun des trois mises en scène de Julia Ducournau, alors grande admiratrice du cinéaste canadien David Cronenberg, est le sujet de la métamorphose physique. On retrouve dans Grave ce rapport au corps et cette approche clinique qui a fait la marque de fabrique et le succès de l’auteur de La Mouche. Outre quelques références notables, à l’instar de Carrie de Brian de Palma, la réalisatrice a su digérer ses modèles et influences pour planter son film dans un réalisme morbide.

Si l’on craint tout d’abord de manquer d’empathie pour le personnage principal, l’incroyable Garance Marillier emporte tous les suffrages. Avec son visage doux et à la fois inquiétant qui rappelle étonnamment Dominique Blanc, elle signe une véritable, charismatique et ébouriffante prestation. Un sacré défi qu’un César devrait normalement récompenser en 2018, puisque la caméra ne la quitte quasiment pas du début à la fin, s’attachant à capter les moindres nuances de la transformation du personnage (qui change littéralement de peau), comme la mutation « reptilienne » d’une ado tomboy en jeune fille dans Junior. Certes, on retrouve le côté punk-sexe de Mange, mais Grave s’inscrit dans la continuité du court-métrage, d’autant plus que l’héroïne s’appelle Justine – en référence au livre du Marquis de Sade, Justine ou les malheurs de la vertu – dans les deux films et qu’il s’agit de la même comédienne.

Drame et récit d’émancipation, le spectateur suit cette jeune étudiante, qui apparaît d’abord sûre d’elle-même en arrivant à l’école vétérinaire, avant de se rendre compte très vite de la violence et de la brutalité de l’entrée dans le monde adulte. Après quelques mises à l’épreuve, Justine va se révéler à elle-même et laisser sa véritable nature prendre le dessus, en se laissant aller à ses pulsions, ses envies (sexuelles et gustatives), après une longue opposition entre l’esprit qui voudrait rester rationnel et les désirs physiques avec un corps voulant jouir et s’épanouir, pour enfin s’affirmer et accepter sa différence.

Frontal, graphique, organique et clinique (superbe photo teintée de giallo du chef opérateur Ruben Impens), mais pourtant sensuel et jamais glauque, Grave est un film burné qui n’a pas peur de foncer dans le tas, de déplaire et de provoquer le malaise – la musique de Jim Williams et la b.o hystérique participent également à l’ambiance – auprès d’une audience qui a oublié ce que voulait dire être secoué dans les salles. C’est cette franchise qui rappelle le formidable Dans ma peau de Marina de Van, cette envie de cinéma, cette audace de sortir des sentiers battus qui font de Grave, malgré un dénouement largement prévisible en raison de la présence de Laurent Lucas au générique, une grande et radicale réussite.

LE BLU-RAY

Le test de l’édition HD de Grave, disponible chez Wild Side Video, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le Blu-ray est proposé avec le DVD en combo. Le menu principal est coloré, animé et musical.

Point de making of à l’horizon, c’est la grande déception de cette édition. En revanche, l’éditeur charge la section des suppléments avec deux très (trop ?) longues interviews de la réalisatrice Julia Ducournau (47’) et de la comédienne Garance Marillier (48’), toutes deux animées par Fausto Fasulo, rédacteur en chef du magazine Mad Movies.

Durant le premier entretien, Julia Ducournau revient sur son parcours, sur Junior et Mange, l’écriture et l’évolution du scénario de Grave, la psychologie du personnage de Justine, l’importance du son, les partis pris, la structure du film, les scènes coupées au montage, ses influences, le casting et bien d’autres éléments. Dommage que cet échange soit foutraque, parfois hésitant et maladroit. L’éditeur aurait gagné à tailler dans le gras afin d’insuffler un rythme qui fait cruellement défaut à cette interview qu’on aurait aimée plus dense et intéressante.

En revanche, la rencontre avec Garance Marillier s’avère plus sympathique, même si cette fois encore l’interview n’a aucune structure et passe du coq à l’âne. La jeunesse et la spontanéité de la jeune actrice font le charme de ce rendez-vous durant lequel elle évoque son intérêt pour le jeu, sa formation (musicale), sa rencontre, son travail et son amitié fusionnelle avec Julia Ducournau, sa passion pour David Lynch et Wong Kar-wai, son premier choc cinématographique (Vertigo d’Alfred Hitchcock), sa préparation pour le rôle, le défi des scènes physiques, ses impressions de tournage, la réception du film et son avis sur les critiques négatives.

L’éditeur a pu mettre la main sur deux scènes coupées (alors qu’il y en avait bien plus), Oracle (2’) et Gravité (3’). Complètement anecdotiques mais sympas, ces séquences non montées valent le coup d’oeil et prolongent entre autres un cours réalisé par un professeur singulier avec comme sujet l’utérus d’une vache.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et les credits du disque.

L’Image et le son

Saturation des couleurs primaires, luminosité aveuglante, piqué chirurgical, détails au scalpel aux quatre coins du cadre large, contrastes fabuleux, c’est sublime ! La profondeur de champ est sidérante et chaque parti pris inspiré de la photo du chef opérateur Ruben Impens (Alabama Monroe, Les Herbes folles, La Merditude des choses), est magnifiquement restitué à travers cette édition HD absolument indispensable. Le Blu-ray démo du mois de juillet 2017.

La piste unique DTS-HD Master Audio 5.1 instaure un confort acoustique total avec une redoutable homogénéité des voix et des effets annexes. Le pouvoir immersif du mixage est fort plaisant dès la première scène. Toutes les enceintes sont intelligemment mises à contribution, les effets souvent percutants. La balance frontale et latérale est constante et riche, le caisson de basses souligne efficacement les séquences du film les plus agitées (ça vibre même de partout durant les fiestas et le bizutage) et l’imposante bande-son, tandis que les dialogues et commentaires restent fluides et solides. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Wild Bunch Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Clown, réalisé par Jon Watts

CLOWN réalisé par Jon Watts, disponible en DVD et Blu-ray le 28 juin 2017 chez Wild Side Vidéo

Acteurs : Andy Powers, Laura Allen, Peter Stormare, Eli Roth, Christian Distefano, Elizabeth Whitmere, Graham Reznick, Chuck Shamata

Scénario : Jon Watts, Christopher Ford

Photographie : Matthew Santo

Musique : Matt Veligdan

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2014

LE FILM

Lorsque le clown engagé pour animer l’anniversaire de son fils leur fait faux bond, un père de famille doit prendre la relève et lui-même revêtir un déguisement de clown pour assurer le spectacle. Mais très vite, il réalise que le costume est devenu une seconde peau dont il ne pourra se débarrasser. A moins d’accomplir une mission macabre…

Halloween en 2010. Quelques internautes découvrent la bande-annonce d’un film d’horreur intitulé Clown. Tourné en un week-end par Jon Watts et son ami Christopher Ford, ce qui n’est au départ qu’une plaisanterie entre étudiants en cinéma se transforme en véritable phénomène sur internet. Le trailer est échangé partout dans le monde, d’autant plus que le film est annoncé comme étant « le nouveau film d’Eli Roth, le maître de l’horreur » ! Watts et Ford sont dépassés par les événements. Désarçonné quand on le félicite sur la bande-annonce de son prochain film, Eli Roth visionne la vidéo en question. Mais plutôt que d’intenter un procès au duo, ils les félicitent pour leur audace et leur proposent de transformer cette idée en véritable long métrage. Il s’engage même à produire réellement leur film s’ils y parviennent. Clown le film est né.

Sorti en 2014, ce film d’horreur américano-canadien reprend donc le même pitch annoncé dans la fausse bande-annonce. Pour l’anniversaire de son fils, Kent engage un clown devant animer la fête. Quand il lui fait faux bond, Kent est contraint de se déguiser lui-même. Il découvre avec horreur qu’il ne peut pas retirer le costume et cherche à comprendre l’origine de cette malédiction. Il y a de bonnes choses dans Clown, mais il y en a aussi de très mauvaises. Dans l’ensemble, le film est un bon divertissement, qui possède suffisamment de bons points pour emmener le spectateur jusqu’à la fin. Le postulat de départ est excellent, même s’il faut accepter une coïncidence « hénaaaurme ». En effet, alors que son fils et sa femme attendent l’arrivée d’un clown pour la fête d’anniversaire du fiston, Kent McCoy, agent immobilier, apprend que la société d’animation est obligée d’annuler. Kent est désolé pour son fils…mais attendez, le hasard est bien fait ! Alors qu’il se trouve dans une des maisons qu’il cherche à vendre, il trouve un costume de clown dans une vieille malle abandonnée au sous-sol ! « Alors ça par exemple, cela tombe bien » ! Kent débarque alors chez lui, perruque colorée, teint blanc, nez rouge, costume vintage et tralala, le môme aura une fête digne de ce nom ! Il y avait une chance sur combien de trouver un costume de clown, pile-poil au bon moment ? Voilà. Sur ce coup de bol incroyable, Clown démarre et le calvaire de son personnage principal aussi. C’est d’ailleurs ce qu’il y a de plus réussi dans le film.

Entre Le Loup-Garou de Londres de John Landis et La Mouche de David Cronenberg, saupoudré du Pennywise de Stephen King, Clown montre la lente transformation physique de Kent (Andy Powers, attachant), qui doit se rendre à l’évidence, le costume prend possession de lui, corps et âme. Il ne peut tout d’abord pas retirer sa perruque, qui semble être devenue sa nouvelle implantation capillaire, tout comme son nez rouge qui reste collé à son visage. Sa femme Meg (Laura Allen, peu convaincante) parvient à lui retirer le nez à l’aide de pinces, mais lui arrache au passage le bout de sa vraie truffe, que leur chien s’empresse de becter.

Franchement, si Clown avait su demeurer aussi fun (avec un humour noir plaisant), efficace et prometteur que cette première partie, le film aurait été une belle réussite. C’est après que les choses se gâtent, comme si Jon Watts et Christopher Ford, quelque peu décontenancés par cette opportunité, n’avaient pas su quoi raconter à partir de leur faux trailer original. Sans toutefois ennuyer l’audience et en devenant un nouvel ennemi des coulrophobes (prenez un dictionnaire), le film entre après dans les rangs du genre, celui de la possession d’un être humain par un démon, histoire évidemment narrée par un ermite (ce cabotin de Peter Stormare) qui connaît tout sur la malédiction et qui attendait patiemment qu’un pauvre couillon mette le costume de clown.

Kent disparaît à mesure que son costume devient organique (maquillage très réussi d’ailleurs) et qu’un pseudo-diable affamé (son ventre gargouille tout le temps) – interprété par Eli Roth lui-même en fin de mutation – prenne définitivement le contrôle de son corps pour aller dévorer quelques enfants. Ces séquences parfois sanglantes et toujours graphiques mettant en scène de très jeunes victimes, pourront d’ailleurs choquer les spectateurs les plus sensibles. Le gros bémol de Clown, ce ne sont pas ses rebondissements improbables, mais l’amateurisme de la mise en scène, le rythme peu maîtrisé (tout est trop lent ou au contraire les événements vont trop vite en besogne) et la paresse du scénario, très mal écrit, jusque dans le dernier acte, mauvais, vite expédié et qui part dans tous les sens.

Clown se regarde avec amusement, quelques scènes d’épouvante fonctionnent à l’instar du démon qui dévore les gamins dans une salle de jeux, comme si Ronald McDonald préparait ses propres Big-Mac. Dommage que la réalisation ne suive pas et avor souvent les effets de surprise ou destinés à faire peur aux spectateurs. Encore une fois, Clown, présenté en compétition au Festival international du Film Fantastique de Gérardmer en 2017, n’est pas déplaisant et se regarde volontiers, mais ne laissera pas un grand souvenir. Le film se situe en entre la série B et la série Z, à regarder avachi dans un BZ quoi. Toujours est-il que cela n’augure rien de bon pour Spider-Man : Homecoming dont la mise en scène a été confiée par Marvel à Jon Watts, suite à son film suivant Cop Car, avec Kevin Bacon, directement sorti en France en DVD. Mais bon, on ne s’attend pas non plus à un miracle pour l’énième retour de l’homme-araignée, mais c’est toujours bien d’y croire quand même. En attendant un autre comeback très attendu, celui de Pennywise en septembre 2017, sous la direction de l’excellent Andrés Muschietti.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Clown, DTV disponible chez Wild Side Video, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Sortie technique, Clown s’accompagne d’un petit making of promotionnel de 6 minutes, constitué d’interviews d’Eli Roth, de la décoratrice Lisa Soper, des comédiens Laura Allen et Peter Stormare, du directeur de la photographie Matthew Santo et du responsable des maquillages David Santo. Très peu d’images de tournage à se mettre sous la dent dans ce module, qui revient essentiellement sur la genèse singulière de Clown.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Un DTV de plus dans l’escarcelle de Wild Side Vidéo ! Ce Blu-ray au format 1080p est encore une fois une grande réussite technique. La Haute-Définition sied à merveille aux films de genre et Clown ne déroge pas à la règle. La patine est délicate et léchée durant 1h40, les partis pris merveilleusement rendus. C’est un quasi-sans-faute technique : luminosité, relief, colorimétrie, piqué (acéré), contrastes (impressionnants), densité des noirs, on en prend plein les yeux, y compris sur les scènes moins éclairées. Les teintes froides s’allient avec les gammes chatoyantes, et chaque détail aux quatre coins du cadre large est saisissant. Ce transfert immaculé soutenu par une compression AVC solide comme un roc, offre les meilleures conditions pour découvrir le film de Jon Watts en France.

Les versions anglaise et française sont disponibles en DTS-HD Master Audio 5.1. Ces mixages en feront sursauter plus d’un grâce à ses effets latéraux et frontaux particulièrement puissants et immersifs. Le caisson de basses a fort à faire avec des effets bien sentis, les dialogues sont exsudés avec force sur la centrale et les ambiances naturelles et dérangeantes ne manquent pas, surtout durant les vrombissements. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version anglaise.

Crédits images : © Wild Bunch Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm 2, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM 2 réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et combo DVD/Blu-ray le 27 juin 2017 chez Sidonis Calysta et ESC Editions

Acteurs : James Le Gros, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Paula Irvine, Samantha Phillips, Kenneth Tigar, Ruth C. Engel

Scénario : Don Coscarelli

Photographie : Daryn Okada

Musique : Fred Myrow, Christopher L. Stone

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 1988

LE FILM

Six ans après les événements qui ont transformé son adolescence en cauchemar, Mike Pearson sort de l’hôpital psychiatrique où il a été soigné pendant tout ce temps. Du passé, il en est toujours imprégné, prêt à reprendre le combat contre le sinistre croque-mort à l’origine du trafic des cadavres du cimetière de Morningside vers une autre dimension. Bientôt rejoint par son ami Reggie, Mike s’engage sur les routes de l’Oregon. D’une ville fantôme à l’autre, les deux hommes découvrent que leur vieil ennemi a considérablement étendu son terrain de chasse…

Puisque Phantasm 2 reprend là où le premier s’arrêtait, nous ferons de même avec cette critique en reprenant le dernier paragraphe de notre chronique du premier opus. Alors si vous voulez en savoir plus sur Phantasm, vous savez ce qui vous reste à faire. A sa sortie, Phantasm est un succès critique et commercial. Le film rapporte près de 12 millions de dollars au box-office nord-américain et attire plus de 500.000 spectateurs en France où il obtient également le prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d’Avoriaz. Le budget de 300.000 dollars est donc largement rentabilisé. Toutefois, Don Coscarelli ne reviendra à Phantasm qu’en 1988, réalisant entre-temps un film d’heroic fantasy, Dar l’invincibleThe Beastmaster. Ce dernier porté par Marc Singer dans le rôle-titre et l’inénarrable et bustée Tanya Roberts (Dangereusement vôtre, Sheena, reine de la jungle) ne rencontre pas le succès escompté. Don Coscarelli planche alors sur la suite de Phantasm, à partir des éléments mis en place dans le premier volet.

Phantasm 2 sort presque dix ans après le premier volet et cela se ressent, car le cinéma américain a changé entre les deux opus. De nouveaux boogeymen ont fait leur apparition dans le genre épouvante, notamment un certain Freddy Kruger, tandis que la mode est au buddy-movie et aux films d’action stéroïdés du style Commando ou Rambo 2 : la mission. Si Don Coscarelli souhaite prolonger la légende du Tall Man, toujours incarné par l’incroyable Angus Scrimm, Phantasm 2 s’inscrit à la frontière des genres et s’avère un étonnant mélange de western, de film d’horreur bien sûr, de road-movie, saupoudré d’ingrédients de ce qui a fait la recette de L’Arme fatale ou de 48 heures. Evidemment, l’ambiance n’est pas à la rigolade, mais Phantasm 2 ne manque pas d’humour car plus ancré dans son époque. Ce qui pèche en revanche dans ce deuxième chapitre, c’est son manque d’originalité.

Phantasm 2 apparaît presque comme un spectre du premier. L’impression de déjà-vu se fait du début à la fin, toutes les séquences faisant quasiment écho à celles du premier film. Sauf qu’ici le réalisateur bénéficie d’un budget largement supérieur, 3 millions de dollars, soit dix fois plus que pour Phantasm. Du coup, Don Coscarelli se fait plaisir en faisant péter pas mal de choses, notamment deux maisons qui explosent dans les dix premières minutes du film. Dans Phantasm 2, Mike interné depuis les événements, quitte enfin l’hôpital psychiatrique. Quelques années auparavant, son ami et désormais tuteur Reggie le marchand de glaces (Reggie Bannister, présent dans toute la saga), l’avait tiré des mains d’un étrange personnage, le Tall Man, une espèce d’homme-cadavre accompagné de nains monstrueux qui s’emparait des humains pour les transformer et les envoyer, semble-t-il, dans un univers parallèle. Personne n’avait accordé de crédit à son récit et Mike avait été enfermé dans un asile d’aliénés. Dès sa sortie, le maléfique personnage se manifeste à nouveau en tuant toute la famille de Reggie. Cette fois, Mike et Reggie décident de prendre les armes et taillent la route, à la recherche du Tall Man.

Le plus gros problème de Phantasm 2 et ce qui a été reproché à Don Coscarelli (même s’il s’agissait d’une décision des producteurs), est de ne pas avoir repris le jeune A. Michael Baldwin pour le rôle de Mike, lui préférant le jeune et peu charismatique James Le Gros. Souvent irritant, jamais attachant ni convaincant, l’empathie pour le personnage en prend un coup. Outre deux personnages féminins complètement sacrifiés, l’autre point faible de Phantasm 2 est également d’avoir privilégié le côté guérilla – avec la séquence où les héros se fabriquent eux-mêmes leurs armes comme dans un épisode de L’Agence tous risques – au détriment de l’émotion et de la noirceur du premier épisode. Du coup, la première heure, malgré quelques fulgurances, ennuie et manque singulièrement de rythme. La déconvenue est de taille, surtout après l’immense réussite de Phantasm. Don Coscarelli s’amuse avec les millions de dollars mis à sa disposition, comme s’il pouvait enfin réaliser le film dont il rêvait vraiment en 1979. Alors certes le Tall Man évolue, on en apprend un peu plus sur sa nature, même si cela est suggéré, le cadre est inspiré, les sphères volantes et foreuses de crânes, ainsi que les nains cruels sont également multipliés, mais pourtant Phantasm 2 ne possède ni l’aura, ni la virtuosité, ni le fond, ni la force, ni le mystère de son modèle.

Aujourd’hui, cette séquelle demeure un bon divertissement, mais vaut essentiellement pour son dernier acte, où Don Coscarelli compile les morceaux de bravoure (un combat entre deux tronçonneuses, un lance-flammes à la Exterminator, un fusil à quadruple canons sciés), les moments gore et de vraie comédie à la Evil Dead 2 – d’ailleurs le nom de Sam Raimi apparaît à l’écran sur un sachet comprenant des cendres funéraires – avec un montage plus syncopé et des personnages agonisants dans d’impressionnantes convulsions. Mais les aficionados, même si indulgents, ne manqueront pas de pointer les points faibles de cette suite tardive nettement plus commerciale et conventionnelle que le film original.

LE BLU-RAY

A l’instar du Blu-ray du premier film, ESC Editions et Sidonis Calysta s’associent pour nous offrir Phantasm 2 en Haute-Définition. Le film est disponible en DVD, mais aussi en combo Blu-ray/DVD (édition limitée), disposés dans un boîtier métal. Le menu principal est élégant, animé sur des images du film et son célèbre thème principal.

Si le produit possède les mêmes caractéristiques que pour le premier volet, c’est également le cas pour son interactivité. Le premier supplément disponible sur cette édition est une interview croisée (27’) de Guy Astic (Directeur des éditions Rouge Profond, corédacteur en chef de la revue de cinéma Simulacres, parue de novembre 1999 à mai 2003) et de Julien Maury (scénariste et réalisateur, A l’intérieur). Forcément moins passionnante que la présentation de Phantasm, celle de cette séquelle vaut encore une fois essentiellement pour l’intervention de Guy Astic, qui convoque à la fois le fond et la forme du film de Don Coscarelli, tandis que Julien Maury, qui introduit et clôt ce module, partage surtout ses (bons) souvenirs liés à la découverte de Phantasm 2. Guy Astic revient sur l’imagination de Don Coscarelli et l’univers du réalisateur qui le fascinent véritablement. Les partis pris, les intentions du metteur en scène, les différences entre les deux films (moins sombre, plus drôle et débridé), les thèmes, l’évolution du Tall Man sont abordés. Si les propos de Julien Maury s’avèrent donc plutôt anecdotiques et même redondants, ceux de Guy Astic méritent quand même l’attention des cinéphiles et des passionnés du genre.

Le bonus suivant est un entretien de Gregory Nicotero, maquilleur et responsable des effets spéciaux ayant oeuvré sur Phantasm 2. Réalisé en 1995, ce bonus donne la parole à cet expert, devenu une référence à Hollywood (L’Antre de la folie, Une nuit en enfer, Scream, The Mist) qui a fait ses classes sur Le Jour des morts-vivants de George A. Romero (1985) et Evil Dead 2 de Sam Raimi (1987). Composée de nombreuses et précieuses images filmées dans les ateliers des effets visuels et sur le plateau de Phantasm 2, cette interview revient sur la création des scènes d’horreur du film de Don Coscarelli. L’occasion de voir Angus Scrimm se prêter au jeu lors du tournage de la séquence où le Tall Man fond sous l’effet de l’acide.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale et une galerie de photos.

Egalement au programme mais non reçu pour ce test, vous trouverez un livret de Marc Toullec intitulé « Au coeur du Phantasm », réalisé à l’occasion de cette édition.

L’Image et le son

Le travail est impressionnant et l’image de ce Blu-ray au format 1080p est très propre, débarrassée de la majeure partie des poussières, griffures et autres résidus qui ont dû être minutieusement enlevés image par image. Les images endommagées ont été réparées et les problèmes de densité et de stabilité ont été considérablement améliorés. Tout au long du processus de restauration, un soin particulier a été apporté afin que la texture originale du film, les détails, la structure du grain ne soient pas affectés par le traitement numérique. Ce nouveau transfert Haute Définition permet de redécouvrir Phantasm 2 sous toutes ses coutures avec une très belle patine argentique. Cette élévation HD offre à la colorimétrie un nouveau lifting et retrouve pour l’occasion une nouvelle vivacité. Si la gestion du grain et des contrastes demeure aléatoire et plus altérée sur les séquences sombres, et si la copie demeure moins impressionnante que celle du Blu-ray de Phantasm, au moins pas de réduction de bruit à l’horizon, les détails et le piqué sont plus qu’honorables. N’oublions pas la stabilité de la copie soutenue par un codec AVC exigeant.

En anglais comme en français, les deux mixages DTS-HD Master Audio 2.0 contenteront les puristes. Au jeu des comparaisons, la piste anglaise – pas de remixage 5.1 ici – s’avère nettement plus dynamique et limpide, bref largement supérieure à son homologue, avec une belle restitution des dialogues et de la musique. Les effets sont solides bien que certains paraissent plus étouffés, mais le confort est assuré. Pas de souffle constaté. Le doublage français réalisé entre autres par les illustres Patrick Préjean, Céline Monsarrat et Thierry Bourdon est très réussi et titille la fibre nostalgique. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © ESC Editions / Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / The Bye Bye Man, réalisé par Stacy Title

THE BYE BYE MAN réalisé par Stacy Title, disponible en DVD et en Blu-ray (version non censurée) le 22 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Douglas Smith, Lucien Laviscount, Cressida Bonas, Carrie-Anne Moss, Faye Dunaway, Doug Jones, Jenna Kanell, Michael Trucco

Scénario : Jonathan Penner d’après la nouvelle The Bridge to Body Island de Robert Damon Schneck

Photographie : James Kniest

Musique : The Newton Brothers

Durée : 1h36 (version cinéma) 1h39 (version non censurée)

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Lorsque trois étudiants s’installent dans une vieille maison aux abords de leur campus, ils libèrent inconsciemment le Bye Bye Man, une entité surnaturelle qui ne hante que ceux qui découvrent son nom. Les amis comprennent alors qu’il n’y a qu’un moyen d’échapper à sa malédiction et d’éviter qu’elle ne se propage : ne pas le dire, ne pas y croire. Quand le Bye Bye Man arrive à s’immiscer dans vos pensées, il prend le contrôle et vous fait commettre l’irréparable…

The Bye Bye Man marque le retour au cinéma de la réalisatrice Stacy Title, révélée en 1995 avec L’Ultime souper. Attirée par l’épouvante, la cinéaste a également signé Let the Devil Wear Black en 1999 et Hood of Horror en 2006. A part une participation à un show collectif réalisé pour la télévision, The Greatest Show Ever, nous étions sans nouvelles de Stacy Title. The Bye Bye Man est l’adaptation d’une nouvelle de Robert Damon Schneck intitulée The Bridge to Body Island. Le film aurait dû être distribué dans les salles françaises l’été 2016, sortie finalement annulée en raison du report de l’exploitation américaine (dans une version finalement tronquée) et surtout des critiques très négatives. Pourtant cela partait bien.

On est tout d’abord happé par un prologue filmé en plan-séquence, d’une incroyable brutalité sèche. En octobre 1969, un homme débarque dans une petite bourgade du Wisconsin. Armé d’un fusil, il demande à l’une de ses connaissances si « elle connaît son nom ou l’a dit à quelqu’un ? » avant de lui tirer à bout portant. D’autres meurtres suivent rapidement après, un homme handicapé qui rampe sur le sol, les voisins alertés par les détonations, tandis que l’homme au fusil n’arrête pas de répeter « N’y pense pas. Ne dis pas son nom ». Quoi ? Encore Voldemort ? Passée cette formidable introduction, l’action se déroule de nos jours où nous suivons un jeune couple d’étudiants et leur ami, qui viennent de louer une maison – quelque peu délabrée – en dehors du campus afin d’y être plus tranquilles. C’est alors que The Bye Bye Man adopte un rythme de croisière tout aussi peinard et s’enlise rapidement dans tous les clichés du genre.

Les étudiants restent dans cette baraque qui s’avère évidemment très vite hantée ou tout du moins le lieu de phénomènes paranormaux. Les visions cauchemardesques se multiplient, notamment celle du fameux Bye Bye Man interprété par l’incroyable Doug Jones, qui prête une fois de plus sa longue silhouette filiforme à un personnage fantastique après avoir marqué les cinéphiles dans Le Labyrinthe de Pan, les deux Hellboy et même Gainsbourg (Vie héroïque). Mais à côté de ça, les jeunes comédiens, la mannequin Cressida Bonas (l’ex du prince Harry pour les plus people), Douglas Smith (la série Vinyl, Miss Sloane) et Lucien Laviscount font ce qu’ils peuvent pour rendre leurs personnages bébêtes un peu attachants. S’ils y arrivent au départ, la direction d’acteurs va à vau-l’eau dès que le fantastique s’immisce. Constamment au bord de l’apoplexie, les yeux écarquillés, les comédiens en font trop, des tonnes même et il faut attendre l’apparition inattendue de l’excellente Carrie-Anne Moss pour redonner un peu d’intérêt à l’ensemble. Trop rare, l’actrice canadienne vole les deux scènes où elle apparaît. Un peu plus tard dans le film, on est encore plus surpris de voir, ou plutôt de reconnaître non sans difficulté, Faye Dunaway, dont le visage ravagé par la chirurgie esthétique fait vraiment peine à voir.

The Bye Bye Man se contente de plagier ouvertement Candyman, Wishmaster, Sinister et autres films convoquant un boogeyman, de mélanger tout cela dans un shaker et de déverser ce cocktail dans le bec des spectateurs en essayant d’adopter la forme du merveilleux It Follows de David Robert Mitchell, en espérant que ceux-ci ne voient pas trop l’entourloupe. Non seulement le film cumule les poncifs comme des perles sur un collier (l’amie médium qui organise une séance de spiritisme), mais en plus la réalisatrice ne parvient jamais à instaurer de suspense, les jumpscares ne fonctionnent jamais car trop attendus, le croquemitaine et son clebs en (mauvaises) images de synthèse ne possèdent aucune aura et les quelques scènes « choc » semblent tirées d’un ersatz de Destination Finale. Déception donc.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de The Bye Bye Man, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobrement animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces et du montage non censuré (3 minutes en plus) uniquement disponible sur l’édition Blu-ray.

L’Image et le son

The Bye Bye Man, DTV dans nos contrées, est proposé en HD dans un format 1080p. Si l’on est d’abord séduit par le rendu de la colorimétrie et de la luminosité durant le prologue, force est de constater que la définition chancelle à plusieurs reprises, avec un piqué trop doux à notre goût et un manque de détails, notamment au niveau des visages des comédiens. Le codec tente de consolider certains plans avec difficulté, surtout sur les nombreuses séquences sombres. De plus, la profondeur de champ est décevante, quelques légers fourmillements s’invitent à la partie, la gestion des contrastes étant au final aléatoire. Toutefois, certains plans sortent aisément du lot avec un relief indéniable.

Vous pouvez compter sur les mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français pour vous plonger dans l’ambiance du film, bien que l’action demeure souvent réduite. La bande originale est la mieux lotie. Toutes les enceintes sont exploitées, les voix sont très imposantes sur la centrale et se lient à merveille avec la balance frontale, riche et dense, ainsi que les enceintes latérales qui distillent gentiment les jumpscares. Le caisson de basses se mêle également à la partie. Notons que la version originale l’emporte sur la piste française (au très mauvais doublage), se révèle plus naturelle et homogène, y compris du point de vue de la spatialisation musicale. La version non censurée est uniquement disponible en version anglaise avec les sous-titres français imposés.

Crédits images : © STX Productions, LLC. All rights reserved / Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Ssssnake le cobra, réalisé par Bernard L. Kowalski

SSSSNAKE LE COBRA (Sssssss) réalisé par Bernard L. Kowalski, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O’Connor, Jack Ging, Kathleen King, Reb Brown

Scénario : Hal Dresner d’après une idée originale de Daniel C. Striepeke

Photographie : Gerald Perry Finnerman

Musique : Patrick Williams

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

David, un jeune étudiant, est engagé comme assistant de laboratoire par le docteur Stoner, un herpétologiste spécialisé dans les serpents. Il ne tarde pas à tomber amoureux de la fille du docteur, tandis que ce dernier décide d’utiliser sur lui un sérum secret, destiné à créer un hybride homme-serpent.

Connu en France sous le titre SSSSnake le cobra ou tout simplement SSSSnake, Sssssss (titre original) est réalisé par Bernard L. Kowalski (1929-2007) en 1973. Oeuvrant habituellement pour la télévision sur des séries aussi diverses que variées que M Squad, Perry Mason, Les Incorruptibles, Rawhide, le metteur en scène signe avec ce petit film d’horreur une de ses rares incursions au cinéma. Après Night of the Blood Beast (1958) et Attack of the Giant Leeches (1959) – ou L’Attaque des sangsues géantes – qui lui avaient déjà donné l’occasion de toucher à l’horreur, Bernard L. Kowalski livre une formidable série B qui risque de donner quelques sueurs froides à ophiophobes, aux spectateurs qui ont peur des serpents.

Le docteur Stoner, herpétologiste réputé, conduit des recherches dont l’audace amène ses confrères et commanditaires à s’éloigner de lui. C’est ainsi qu’il a mis au point un sérum, dérivé de venin de cobra, qui peut transformer un homme en serpent. Tout cela dans le but de créer l’espèce parfaite et ultime. Mais sa première victime, Tim, n’est pas devenu tout-à-fait un serpent, et on le montre désormais comme attraction dans les foires. Après avoir refusé d’appuyer ses demandes de subventions, le docteur Daniels, qui ne se doute pas des véritables recherches de Stoner, lui recommande de prendre comme nouvel assistant un de ses étudiants, David Blake. Dans son laboratoire rempli de serpents, Stoner débute sa nouvelle expérience en lui injectant un sérum de son invention, supposé l’immuniser contre le venin. David commence alors à changer.

Produit par la jeune société Zanuck / Brown Productions (qui se préparait à financer un petit film intitulé Les Dents de la mer) pour Universal avec un budget d’un million de dollars, SSSSnake adopte un rythme lent, mais maîtrisé et repose sur un excellent casting, véritablement investi puisque plus de 150 véritables serpents – certains encore venimeux – ont été utilisés et manipulés par les comédiens pour les besoins du film. Bernard L. Kowalski fait preuve de rigueur dans sa mise en scène et sa direction d’acteurs, tout en distillant une tension maintenue pendant plus d’1h30. Le scénario d’Hal Dresner (Luke la main froide et Folies d’avril de Stuart Rosenberg, The Extraordinary Seaman de John Frankenheimer) joue avec les codes du genre en vigueur à l’époque et parvient à rendre réaliste une histoire extraordinaire.

Connu comme étant l’un des éternels seconds couteaux, le comédien Strother Martin, vu chez John Huston, Robert Aldrich, Delmer Daves, John Ford, Sam Peckinpah et George Roy Hill, accède ici au premier rôle. Peu habitué à cet événement, il porte néanmoins le film en créant un décalage intéressant et en rendant son personnage de savant fou inquiétant, qui tombe de plus en plus dans la démence au fil du récit. A ses côtés, les nostalgiques de la série L’Agence tous risques reconnaîtront Dirk Benedict qui interprétait Futé pendant les six saisons. Dans SSSSnake, c’est lui qui incarne le cobaye malgré-lui et qui va voir son corps se transformer, jusqu’à devenir un véritable cobra aux yeux bleus de plus de deux mètres.

Entre Frankenstein et L’Ile du Docteur Moreau, avec une petite touche de Freaks, la monstrueuse parade, SSSSnake s’avère une excellente surprise, récompensée par le Saturn Award du meilleur film de science-fiction en 1975 et sélectionnée en compétition au Festival international du film fantastique d’Avoriaz en 1974. Il n’est pas anodin de penser que SSSSnake ait ensuite largement influencé la série éphémère mais culte Manimal (1983), dans laquelle Simon MacCorkindale possédait la faculté de se transformer en panthère noire, en faucon et même en serpent. Si la mutation est définitive dans SSSSnake, celles dans Manimal font sérieusement penser à la séquence finale du film de Bernard L. Kowalski, par ailleurs la seule à utiliser les effets spéciaux. Le maquillage de Dirk Benedict est par ailleurs très réussi.

Au final, malgré une conclusion quelque peu décevante car trop expédiée, SSSSnake demeure une excellente récréation, relativement ambitieuse et continue de faire le bonheur des adeptes d’histoires horrifiques bien troussées.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de SSSSnake, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique classe de couleur noire. L’élégante jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de fantastique, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.

Dans sa présentation du film (13’30), Marc Toullec rapproche judicieusement SSSSnake de Willard de Daniel Mann, réalisé deux ans plus tôt, et revient sur la genèse du long métrage de Bernard L. Kowalski. Notre spécialiste en films fantastiques évoque ensuite le casting, le producteur Richard D. Zanuck, les effets spéciaux, les maquillages, l’utilisation de véritables serpents sur le plateau, les thèmes et les conditions de tournage. Une introduction simple, concise, bourrée d’anecdotes, enjouée et très sympathique.

L’Image et le son

Fort d’un master au format respecté 1.85 et d’une compression AVC qui consolide l’ensemble avec brio, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir SSSSnake dans de très bonnes conditions techniques. Malgré de légères scories, la restauration est souvent impressionnante, les contrastes bien équilibrés, la copie est propre, stable et lumineuse. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans, détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front de Dirk Benedict au fil du traitement), les couleurs retrouvent un éclat inespéré à l’instar des credits verts. En revanche, certains risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain argentique original, du manque de relief et du piqué trop doux à notre goût.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage Dolby Digital 2.0 Mono. Pas de HD ici donc. Cependant, le confort acoustique est malgré tout assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle probant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste française. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Movinside / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test DVD / Doomwatch, réalisé par Peter Sasdy

DOOMWATCH réalisé par Peter Sasdy, disponible en DVD le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Ian Bannen, Judy Geeson, John Paul, Simon Oates, Jean Trend, Joby Blanshard, George Sanders

Scénario : Clive Exton d’après la série « Doomwatch »

Photographie : Kenneth Talbot

Musique : John Scott

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Doomwatch, un laboratoire scientifique anglais repère des anomalies biologiques sur la côte ouest du pays. le laboratoire décide alors d’envoyer Del Shaw sur l’île de Balfe, afin que celui-ci enquête. Le scientifique récolte des algues qu’il envoie à Doomwatch. Après les avoir analysées le laboratoire conclue qu’il s’agit d’une contamination chimique. Mais bientôt Del découvre le corps d’un enfant mort enterré dans la forêt.

D’origine hongroise, Peter Sasdy (né en 1935) est un des réalisateurs emblématiques de la célèbre Hammer Film Productions. On lui doit notamment Une messe pour Dracula (1970), Comtesse Dracula (1971), trois épisodes cultes de la série La Maison de tous les cauchemars (1980) et La Fille de Jack l’Eventreur (1971). Spécialisé dans le film d’horreur, il signe Doomwatch en 1972, qui s’inspire de la série télévisée éponyme de la BBC, 38 épisodes tournés entre 1970 et 1972. Dans cette adaptation cinématographique, trois des comédiens de la série font une apparition, John Paul, Simon Oates et Joby Blanshard. Les médecins interprétés par les deux premiers et la spécialiste en informatique incarnée par la troisième laissent la place à un acteur plus chevronné, l’écossais Ian Bannen, vu dans La colline des hommes perdus et The Offence de Sidney Lumet, Le Vol du Phénix et Trop tard pour les héros de Robert Aldrich. Doomwatch s’inscrit dans le genre science-fiction et d’horreur, mais « réaliste ».

Ian Bannen est le docteur Del Shaw est chargé par l’organisation Doomwatch d’analyser les effets d’une marée noire survenue un an auparavant sur la côte de la petite île de Balfe dans les Cornouailles. Alors qu’il commence ses relevés océanographes, il y découvre une population isolée et hostile, qui voit d’un mauvais œil l’arrivée de ce nouveau venu et semble dissimuler un secret. Étonné par leurs comportements, puis par une macabre révélation, Shaw commence à enquêter sur les autochtones, assisté par la jeune institutrice du village, Victoria Brown (Juddy Geeson). Il semble que les villageois soient frappés les uns après les autres d’une maladie mystérieuse, qui déforme leur apparence physique, tout en les rendant extrêmement agressifs. Shaw réalise que les déchets chimiques rejetés dans la mer par un laboratoire travaillant sur de dangereuses expériences, seraient à l’origine de cette étrange malédiction. Mais il se heurte à l’obstination de la population, qui refuse de quitter ses terres, et à l’hypocrisie du laboratoire en question.

Doomwatch démontre l’habileté du réalisateur à rendre inquiétant l’ordinaire, grâce à son sens du cadre et en créant une atmosphère trouble avec des décors en apparence banale. Peter Sasdy bénéficie du travail du chef opérateur Kenneth Talbot, un de ses fidèles collaborateurs, également connu pour avoir éclairé Charley-le-borgne et Solo pour une blonde. Le spectateur plonge dans le brouillard aux côtés du Dr Del Shaw, dans une enquête anxiogène durant laquelle les menaces se multiplient autour du personnage principal. Si Peter Sasdy repousse la révélation jusqu’au dernier acte, le suspense est maintenu, les protagonistes inquiétants et les rebondissements bien menés. Seul faux pas de ce scénario, rendre finalement peu inquiétant, pour ne pas dire inoffensif, le fait que l’armée déverse dans la mer des dizaines de fûts de produits chimiques, puisque les autres, ceux contenant les fameuses hormones de croissance sont les seuls responsables de la mutation de la faune et des habitants !

Doomwatch s’ouvre comme un film de la Hammer, le corps d’une petite fille est transporté dans les bois pour y être enterré en cachette, et se clôt comme une enquête d’Hercule Poirot, pour laquelle Agatha Christie aurait conviée Stephen King à sa table. Autant dire que cette petite série B britannique originale vaut bien d’être découverte en France où elle n’a jamais connu d’exploitation.

LE DVD

Le DVD de Doomwatch, disponible chez Movinside, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. La jaquette est très élégante et attractive. Cette collection « Trésors du fantastique », est dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

Si vous êtes fidèles au rendez-vous, vous savez que chaque titre de cette collection est présenté par l’excellent Marc Toullec. C’est évidemment encore le cas pour Doomwatch (13’). Durant cette intervention dynamique et riche en anecdotes de production, Marc Toullec évoque la série originale, inédite en France et passe en revue le casting, les thèmes du film et le célèbre producteur Tony Tenser, jusqu’alors spécialisé dans le cinéma coquin, qui avait décidé d’ajouter une corde à son arc au milieu des années 1960 en finançant des films d’horreur à petit budget. Parmi ceux-ci, Repulsion réalisé par un certain Roman Polanski…

L’Image et le son

Nous ne sommes pas déçus ! C’est avec un plaisir immense que nous découvrons ce film de Peter Sasby dans de pareilles conditions ! D’emblée, la colorimétrie s’impose, le relief est très appréciable et le piqué est souvent tranchant. Le chef-opérateur Kenneth Talbot voit sa photo ouatée merveilleusement restituée et offre un lot de détails conséquents. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise, les contrastes probants, la copie stable, le grain bien géré et les noirs denses. N’oublions pas non plus la vertueuse restauration et la propreté de la copie, débarrassée de toutes les scories possibles et imaginables.

Comme Doomwatch n’a pas connu de sortie dans les salles françaises, le film est uniquement disponible en version originale aux sous-titres français non imposés. Le mixage anglais Dolby Digital 2.0 Mono instaure un confort acoustique total. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches, sans aucun souffle.

Crédits images : © Tigon British Film Productions. All Rights Reserved / Movinside / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et combo DVD/Blu-ray le 6 juin 2017 chez ESC Editions & Sidonis Calysta

Acteurs : A. Michael Baldwin, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Kathy Lester, Terrie Kalbus, Kenneth V. Jones, Susan Harper, Lynn Eastman-Rossi

Scénario : Don Coscarelli

Photographie : Don Coscarelli

Musique : Fred Myrow, Malcolm Seagrave

Durée : 1h29

LE FILM

Le jeune Mike, treize ans, assiste en cachette à l’enterrement d’un ami. Après la cérémonie, il voit un colosse s’emparer du cercueil, qu’il soulève comme une plume. Le soir venu, Mike s’introduit dans le grand bâtiment au centre du cimetière et y découvre des activités déconcertantes. Il fait part de ses soupçons à son grand frère Jody, qui retourne avec lui au mausolée. Les deux frères acquièrent la conviction que des forces inconnues s’emparent des défunts dans un but innommable.

Phantasm est l’oeuvre de toute une vie, celle du scénariste et réalisateur américain Don Coscarelli. Né en 1954 à Tripoli, le cinéaste signe d’abord deux longs métrages en 1976, Jim the World’s Greatest, sur lequel il rencontre le comédien Angus Scrimm, puis Kenny & Company. Passionné par le cinéma d’horreur, Don Coscarelli se lance dans l’écriture d’un film de genre en s’isolant au milieu de nulle part, une situation qui lui permet de coucher ses peurs et ses névroses sur le papier. La suite appartient à la légende. Phantasm est un chef d’oeuvre du film fantastique et d’épouvante de la fin des années 1970, un succès qui engendrera quatre suites (1988, 1994, 1998, 2015), dont trois mises en scène par Don Coscarelli lui-même. S’il est également célèbre pour avoir réalisé Bubba Ho-tep en 2002 avec Bruce Campbell dans le rôle d’Elvis qui combat les momies, le cinéaste – qui compte aujourd’hui dix longs métrages à son actif – demeure avant tout le créateur de cette saga mythique.

Egalement producteur, monteur et directeur de la photographie, Don Coscarelli crée un monde foisonnant et virtuose, peuplé de nains dissimulés sous des capuches, un boogeyman gigantesque au teint blafard et à la force herculéenne, un monde parallèle au ciel embrasé, du sang jaune, des doigts coupés qui s’agitent seuls, des mouches géantes, une sphère métallique volante qui se plante dans la tête de la victime et qui la perce à l’aide d’un foret pour y pomper le cerveau. Tout cela pourrait facilement tomber dans l’absurde, mais Don Coscarelli embrasse son sujet avec autant de sérieux que d’humour et parvient à rendre son histoire réaliste et donc emphatique. Plusieurs choses viennent immédiatement en mémoire quand on évoque ce grand classique qu’est Phantasm, mais parmi ce kaléidoscope d’images inoubliables, c’est bel et bien la figure du Tall Man qui vient à l’esprit. Incarné par Lawrence Rory Guy, plus connu sous le nom d’Angus Scrimm (1926-2016), ce croquemitaine ou ce croque-mort plutôt, s’inscrit parmi les personnages les plus emblématiques et énigmatiques du genre aux côtés de Michael Myers, Freddy Krueger, Leatherface et Pinhead. Sa démarche, ses regards, son costume et sa voix (« Booooooy ? ») ont fait de lui une icône de l’épouvante.

Parallèlement à ce boogeyman, Phantasm s’avère un vrai film dramatique qui parle du deuil impossible d’un jeune adolescent pour ses parents et pour son frère aîné. Près de 40 ans après le film nous pouvons nous permettre de dévoiler que le film se révèle être une plongée dans l’imaginaire (quoique…) de Mike. A l’instar du merveilleux film de J.A. Bayona sorti début 2017, Quelques minutes après minuit, Phantasm s’attache à un jeune homme plongé malgré lui dans un monde cauchemardesque pour pouvoir, sans doute, affronter la réalité. Comme dans le Bayona dans lequel un jeune garçon avait recours malgré lui au pouvoir de l’imaginaire pour pouvoir admettre la mort prochaine de sa mère et à préparer son deuil, celui de Phantasm erre dans un cauchemar dans lequel il affronte un croquemitaine aux côtés de son frère aîné Mike. L’épilogue joue alors la carte de la frontière fragile entre le rêve et la réalité, quand les deux mondes rentrent en collision au point de se fondre l’un dans l’autre. La fin reste ouverte et de nombreuses questions en suspens. Si Don Coscarelli n’avait peut-être pas l’intention d’y répondre, du moins immédiatement puisque le second opus ne sera réalisé que dix ans après, on plonge à fond dans cet univers riche et singulier, unique, qui n’a de cesse de surprendre, animé par une passion contagieuse pour le genre, qui enchaîne les scènes anthologiques comme des perles sur un collier en se permettant même quelques soupapes d’humour noir, sans omettre l’émotion.

On ne peut s’empêcher de penser à certaines œuvres de Stephen King, à tel point que si Phantasm avait été une adaptation d’un livre de l’auteur de Carrie, le film se classerait parmi les meilleures transpositions d’une de ses œuvres au cinéma. En s’inscrivant pleinement dans le surréalisme et parfois le macabre diurne (ce qui est assez rare), Phantasm n’est pas sans rappeler Un chien andalou de Luis Buñuel, non seulement en raison de son atmosphère onirique, mais également par son montage de scènes étranges qui fait penser à un puzzle pour lequel chacune des pièces serait caractérisée par un mauvais rêve. Un jeu éclaté et pourtant conduit de main de maître du début à la fin, tandis que l’envoûtante musique de Fred Myrow et Malcolm Seagrave berce les spectateurs comme une comptine entêtante.

A sa sortie, Phantasm est un succès critique et commercial. Le film rapporte près de 12 millions de dollars au box-office nord-américain et attire plus de 500.000 spectateurs en France où il obtient également le prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d’Avoriaz. Le budget de 300.000 dollars est donc largement rentabilisé. Toutefois, Don Coscarelli ne reviendra à Phantasm qu’en 1988, réalisant entre-temps un film d’heroic fantasy, Dar l’invincibleThe Beastmaster.

LE BLU-RAY

C’est un grand jour pour les cinéphiles ! ESC Editions et Sidonis Calysta s’associent pour nous offrir le tant attendu Phantasm en Haute-Définition ! Le film est disponible en DVD, mais aussi en combo Blu-ray/DVD (édition limitée), disposés dans un boîtier métal avec effet arrondi en 3D. Le menu principal est élégant, animé sur des images du film et son célèbre thème principal.

Le premier supplément disponible sur cette édition est une interview croisée (21’) de Guy Astic (Directeur des éditions Rouge Profond, corédacteur en chef de la revue de cinéma Simulacres, parue de novembre 1999 à mai 2003) et de Julien Maury (scénariste et réalisateur, A l’intérieur). Cette présentation souvent passionnante de Phantasm vaut essentiellement pour l’intervention de Guy Astic, qui convoque à la fois le fond et la forme du film de Don Coscarelli, tandis que Julien Maury, qui introduit et clôt ce module, partage surtout ses souvenirs liés à la découverte de ce grand classique quand il était adolescent. Guy Astic revient sur les débuts de Don Coscarelli, sur les partis pris, les intentions du réalisateur, sa façon d’aborder le fantastique, les thèmes (Astic rapproche également Phantasm de Quelques minutes après minuit de J.A. Bayona), la figure du Tall Man, les effets visuels, la séquence de la sphère métallique. Si les propos de Julien Maury s’avèrent donc plutôt anecdotiques bien que passionnés, ceux de Guy Astic méritent l’attention des cinéphiles et des passionnés du genre.

Le supplément suivant est un document d’archives, avec son image vidéo typique de l’époque. Invités sur le plateau d’une émission réalisée pour une chaîne de télévision en Floride, le réalisateur, scénariste, monteur et producteur Don Coscarelli et le comédien Angus Scrimm répondent aux questions de l’animateur George Capwell (28’). Alors que Phantasm vient tout juste de sortir dans les salles, les deux intervenants réalisent la promotion du film. Le réalisateur aborde la genèse du projet, les conditions de production et de tournage (Coscarelli a été obligé d’emprunter de l’argent à son père), son amour pour les films d’horreur, comment le film a ensuite été acheté, les origines du titre. De son côté, en mode Tall Man, Angus Scrimm raconte l’histoire à sa manière, ses débuts au théâtre et au cinéma, mais aussi comment il a créé son personnage grâce à son costume (plus large que sa morphologie), des chaussures compensées, le maquillage et sa voix.

Angus Scrimm est de retour dans le bonus suivant dans lequel le comédien intervient à la convention Fangoria en 1989, un an après la sortie de Phantasm 2 (10’). A la manière de Gollum qui discute avec Sméagol, Angus Scrimm laisse parfois le Tall Man prendre le dessus, quand il ne dialogue tout simplement pas avec lui-même, pour le plus grand plaisir des spectateurs hilares. Entre deux délires très réussis, Angus Scrimm s’exprime sur ce rôle, celui de sa vie et s’amuse du peu de dialogues qu’il possède dans les deux films. Par ailleurs, il reprend chaque réplique déclamée sur le ton de son personnage, cinq pour Phantasm et dix pour sa suite. Booooooooy ????!!!!

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale et une galerie de photos.

Dommage de ne pas retrouver les commentaires audio du réalisateur accompagné de ses acteurs d’un côté et des producteurs de l’autre, les scènes coupées et le module sur les effets spéciaux pourtant présents sur l’édition américaine. Mais ce serait faire la fine bouche, car notre édition est vraiment formidable.

Egalement au programme mais non reçu pour ce test, vous trouverez un livret de Marc Toullec intitulé « Au coeur du Phantasm », réalisé à l’occasion de cette édition.

L’Image et le son

ESC Editions / Sidonis Calysta nous livre la tant attendue nouvelle copie tirée d’un master restauré en 4K par Bad Robot, la société de production de J.J. Abrams. Alors, si les puristes risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain original, force est de constater que Phantasm renaît bel et bien de ses cendres ! Totalement invisible en France depuis une vingtaine d’années, le film de Don Coscarelli bénéficie enfin d’une édition digne de ce nom. La propreté du master est ébouriffante. Toutes les scories, poussières, griffures ont été purement et simplement éradiquées grâce au scalpel numérique. Ce Blu-ray au format 1080p (AVC) s’avère tout autant saisissant dans son rendu des scènes diurnes que pour les séquences sombres, l’image est souvent éclatante avec un piqué inédit, une profondeur de champ impressionnante et un relief des textures que nous n’attendions pas. Les couleurs retrouvent une deuxième jeunesse, à tel point que l’on pourrait même distinguer le maquillage outrancier du Tall Man. Hormis le manque de patine argentique sur certains plans qui pourrait parfois donner un côté artificiel à l’entreprise (même si on a déjà vu bien pire dans le genre), l’élévation HD pour Phantasm est indispensable et le lifting de premier ordre.

La version originale bénéficie d’un remixage DTS-HD Master Audio 5.1. Au premier abord on pouvait craindre le pire. Il n’en est rien, bien au contraire. Cette option acoustique séduisante permet à la composition enivrante de Fred Myrow et Malcolm Seagrave d’environner le spectateur pour mieux le plonger dans l’atmosphère du film. Les effets latéraux ajoutés ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono DTS-HD Master Audio. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement grinçants. Les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale. Aucun souffle constaté.

Crédits images : © ESC Editions / Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’Invasion des profanateurs, réalisé par Philip Kaufman

L’INVASION DES PROFANATEURS (Invasion of the body snatchers) réalisé par Philip Kaufman, disponible en DVD et Blu-ray le 25 avril 2017 chez Rimini Editions

Acteurs : Donald Sutherland, Brooke Adams, Leonard Nimoy, Jeff Goldblum, Veronica Cartwright, Art Hindle, Kevin McCarthy, Don Siegel, Tom Luddy

Scénario : W.D. Richter d’après le roman de Jack Finney

Photographie : Michael Chapman

Musique : Denny Zeitlin

Durée : 1h55

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Elizabeth s’aperçoit un jour du comportement étrange de son ami. Puis, peu à peu, d’autres personnes se transforment ainsi bizarrement. Pendant leur sommeil, une plante fabrique leur double parfait, tandis que l’original disparaît.

L’Invasion des profanateursInvasion of the Body Snatchers de Philip Kaufman est bien plus qu’un simple remake du film culte réalisé par Don Siegel en 1956. C’est une fabuleuse relecture du livre original de Jack Finney paru en 1955 (mais publié en 1977 en France sous le titre Graines d’épouvante) qui s’inscrit dans le cinéma hollywoodien des années 1970 placé sous le signe de la paranoïa. De mystérieuses particules venues de l’espace arrivent sur la Terre. A San Francisco, Elizabeth Driscoll (Brooke Adams) cueille une fleur étrange sur un arbre de son quartier et tente de l’identifier, en vain. Intriguée, elle s’en ouvre à son compagnon, sans réussir à éveiller son intérêt. De plus en plus inquiète, Elizabeth se confie à Matthew Bennell (Donald Sutherland), son collègue de bureau au ministère de la Santé. Plus tard, lors d’une réception, Jack (Jeff Goldblum), un ami de Matthew, décide de rentrer chez lui se reposer. Quelques heures après, son épouse constate avec un légitime effroi qu’il s’est transformé en une énorme «cosse», semblable à un embryon.

Près de 40 ans après sa sortie, L’Invasion des profanateurs demeure une référence de la science-fiction. Anxiogène, sombre, le film malmène son audience du début à la fin. Le dénouement aura traumatisé plus d’un spectateur et fait toujours son effet, y compris sur celles et ceux qui connaissent pourtant l’épilogue du film. En transposant ce récit à San Francisco, le réalisateur Philip Kaufman, qui avait auparavant signé en 1972 La Légende de Jesse James avec Cliff Robertson et Robert Duvall (qui fait ici un étrange caméo au début du film dans le rôle du prêtre sur la balançoire), ainsi que le scénario de Josey Wales hors-la-loi de Clint Eastwood en 1976, étend la folie et le danger de son invasion éponyme. Paradoxalement, cela renforce l’enfermement des personnages qui tentent de s’échapper. Cette ville extraordinaire et l’une des plus belles filmées au cinéma, s’apparente alors à un terrain de jeu dangereux, où les derniers êtres humains doivent fuir dans des rues souvent désertées. La tension est maintenue tout du long, l’attachement envers les personnages est trouble puisque chacun peut avoir été « répliqué » à un moment ou à un autre.

Le scénario de W.D. Richter, futur réalisateur des Aventures de Buckaroo Banzaï à travers la 8e dimension (1984) et scénariste des Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin de John Carpenter (1986) est un bijou et réserve son lot de surprises. Du point de vue technique, outre la virtuosité de Philip Kaufman et la grande réussite des effets visuels, la photographie de Michael Chapman, l’un des plus grands chefs opérateurs de l’histoire du cinéma (Taxi Driver, Raging Bull, Le Fugitif), renforce cette impression de claustration qui se resserre à mesure que les personnages se voient obliger de courir sans cesse pour échapper aux griffes des envahisseurs. N’oublions pas la partition de Denny Zeitlin, la seule incursion au cinéma du compositeur, qui donne des frissons et envoûte toujours les spectateurs. Evidemment, nous retenons aussi et surtout la performance de comédiens immenses, dominés par un Donald Sutherland en état de grâce et qui passait de grands films en grands rôles, de M*A*S*H de Robert Altman, en passant par Klute d’Alan J. Pakula, Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg, 1900 de Bernardo Bertolucci ou bien encore Le Casanova de Fellini de Federico Fellini. Cependant, sa prestation n’éclipse jamais celle de ses partenaires, notamment une Brooke Adams intrigante et débarquant des Moissons du ciel de Terrence Malick, un Jeff Goldblum âgé de 25 ans et déjà pince-sans-rire, une Veronica Cartwright affrontait déjà des aliens avant celui de Ridley Scott, et surtout un Leonard Nimoy froid comme la glace, qui impressionne à chaque regard ou réplique. Deux apparitions de premier choix sont également au programme, celle de Don Siegel en personne, dans le rôle d’un chauffeur de taxi ambigu, et celle de Kevin McCarthy, premier rôle du film original, qui fait ici le lien avec L’Invasion des profanateurs de sépultures.

A la fois thriller, film d’horreur et de science-fiction, L’Invasion des profanateurs est aussi un film politique angoissant et redoutablement pessimiste, parfait reflet d’une Amérique post-Watergate, en manque de repère et livrée à elle-même, alors que le Siegel reflétait plutôt la peur héritée du maccarthysme. Les derniers êtres humains sont ici les derniers représentants de l’individualité et du libre-arbitre, qui doivent lutter pour préserver ce qu’il leur reste de plus cher, pour ne pas être dupliqué et remplacé par un être programmé, sans haine et sans amour, né dans une cosse, métaphore de la standardisation. Après cette fabuleuse adaptation, Abel Ferrara y reviendra en 1993 avec Body Snatchers, ainsi qu’Oliver Hirschbiegel en 2007 avec Daniel Craig et Nicole Kidman dans Invasion. Les profanateurs feront sûrement leur retour un jour ou l’autre…

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de L’Invasion des profanateurs, disponible chez Rimini Editions, repose dans boîtier classique de couleur noire. Le visuel de la jaquette est très élégant, jouant sur la duplicité du personnage joué par Donald Sutherland. Le menu principal est animé et musical. L’éditeur joint également un livret de 12 pages rédigé par Pascal Montéville et intitulé Invasion(s), que nous retrouvons au cours d’un des suppléments détaillés ci-dessous.

Nous commençons cette large interactivité par l’entretien avec Brooke Adams (9’-2016). Chaleureuse, drôle et visiblement ravie de partager ses souvenirs liés au tournage de L’Invasion des profanateurs, la comédienne entame cette interview en indiquant qu’elle ne connaissait pas le film de Don Siegel. La rencontre et le travail avec Philip Kaufman, la scène de nu, la psychologie des personnages, la collaboration avec ses partenaires de jeu, la photographie de Michael Chapman, Brooke Adams aborde tous ces sujets, sans oublier de nous refaire son « truc avec les yeux » qui a marqué tant de spectateurs.

Dans un module réalisé en 2007, le scénariste W.D. Richter, le réalisateur Philip Kaufman, le directeur de la photographie Michael Chapman, les comédiens Donald Sutherland et Veronica Cartwright reviennent à leur tour sur leur adaptation du livre de Jack Finney (15’). Ces intervenants mentionnent les thèmes du film, les partis pris, les différences avec le film de Don Siegel, le tournage à San Francisco et la surprise de la scène finale.

Ne manquez pas le segment intitulé Une invasion signée Jack Finney (28’), qui donne la parole à Pascal Montéville, enseignant en Sciences Politiques à School Year Abroad de Rennes et qui propose un formidable comparatif entre les films de Don Siegel et Philip Kaufman, mais également des films avec le roman original de Jack Finney, tout en évoquant rapidement les deux adaptations suivantes. Notre interlocuteur passe en revue les thèmes du livre et la façon dont les réalisateurs ont su chacun refléter le climat politique et social de leur époque. Vous en saurez beaucoup plus sur la publication de ce roman qui a su marquer l’histoire de la science-fiction des années 1950. Enfin, Pascal Montéville donne également son point de vue sur le film qui nous intéresse.

Les suppléments suivants sont uniquement disponibles sur l’édition Blu-ray :

On passe à l’interview du comédien canadien Art Hindle, l’interprète du Dr. Geoffrey Howell dans L’Invasion des profanateurs (25’). Aujourd’hui paumé dans les séries B et Z au cinéma et à la télévision, Art Hindle ne cache pas son enthousiasme à évoquer sa participation au film de Philip Kaufman, tout en rappelant qu’il avait également participé au classique Black Christmas (1974) de Bob Clark puis juste après dans Chromosome 3 de David Cronenberg (1979). Très attachant l’acteur parle de son amour pour la science-fiction depuis son enfance et se souvient également que sa mère cinéphile l’avait emmené voir la version de Don Siegel au cinéma. A son tour, Art Hindle aborde le travail avec Philip Kaufman, sa découverte du scénario, les partis pris, le travail du chef opérateur, son personnage, ses partenaires (avec un « Leonard Nimoy merveilleux », une « Brooke Adams formidable» et un « Donald Sutherland froid, distant et un peu dédaigneux »), tout en avouant que L’Invasion des profanateurs est le film sur lequel il a préféré travailler.

C’est ensuite au tour du scénariste W.D. Richter de se pencher sur son travail (16’). Comment transposer le roman original, sans copier le travail déjà effectué par Don Siegel dans sa version du livre de Jack Finney ? Comment le tournage s’est-il déroulé ? W.D. Richter répond à ces questions, tout en avouant que le script était modifié en permanence. Les thèmes, mais aussi les effets visuels, le choix des comédiens, l’apparition de Don Siegel et de Kevin McCarthy, ainsi que la fin tenue secrète jusqu’au dernier moment, y compris pour les acteurs, sont également passés au peigne fin.

Dernier bonus tout aussi indispensable de cette édition HD, celui de la rencontre avec le compositeur Denny Zeitlin (15’). Chose rare dans l’histoire du cinéma, notre interlocuteur, enseignant en psychanalyse n’a composé qu’une seule partition, celle de L’Invasion des profanateurs de Philip Kaufman ! L’intéressé explique comment il est arrivé sur ce projet et comment il a relevé le défi d’écrire la musique du film qui nous intéresse. S’il se dit toujours très fier d’avoir participé à L’Invasion des profanateurs, Denny Zeitlin revient sur la difficulté de cette tâche à laquelle il consacrait entre 18 à 22 heures par jour pendant 10 semaines. Ce documentaire se clôt sur une petite démo au piano, tandis que Denny Zeitlin indique avoir reçu de nombreuses propositions à la sortie du film, mais qu’il a poliment décliné pour se consacrer à sa véritable vie professionnelle.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce. Un très grand merci à Rimini Editions !

L’Image et le son

L’éditeur nous permet de redécouvrir L’Invasion des profanateurs dans de belles conditions techniques, même si les partis pris esthétiques du chef opérateur Michael Chapman, donnent constamment du fil à retordre au codec AVC. Quelques séquences nocturnes demeurent altérées avec des noirs poreux virant au bleu, une baisse de la définition avec des plans flous, un grain plus hasardeux et une gestion des contrastes déséquilibrée. En dépit de diverses scènes à la définition aléatoire et de sensibles fourmillements, la propreté est indéniable et le dépoussiérage conséquent, la copie demeure très appréciable, et l’apport HD (1080p) est loin d’être négligeable. Les séquences diurnes lumineuses sont bien restituées avec parfois un halo de lumière vaporeux fort plaisant. On découvre aussi un lot de détails inédits qui flatte la rétine, d’autant que le cadre est stable et superbement exploité.

Malgré ce qui est mentionné sur la jaquette, point de piste anglaise en 5.1 ! La version originale bénéficie d’un mixage Stéréo qui instaure un confort acoustique convaincant. Cette option séduisante permet à la composition enivrante de Denny Zeitlin de s’étendre convenablement afin de mieux plonger le spectateur dans l’atmosphère du film. Les effets annexes ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés, bien qu’ils auraient pu être un poil plus relevés. Même chose pour la balance frontale, qui assure correctement le spectacle, même si l’on pouvait cependant espérer un ensemble plus riche et dynamique. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono qui fait ce qu’elle peut pour imposer ses ambiances, les dialogues et la musique. Dommage que les sous-titres français soient imposés sur la version originale. Le changement de langue est impossible à la volée et nécessite le retour au menu contextuel. Dans les deux cas, aucun souffle constaté.

Crédits images : © Rimini Editions / MGM / Captures du Blu-ray :  Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / La Plage sanglante, réalisé par Jeffrey Bloom

LA PLAGE SANGLANTE (Blood Beach) réalisé par Jeffrey Bloom, disponible en DVD chez Zylo

Acteurs : David Huffman, Marianna Hill, Burt Young, Otis Young, Lena Pousette, John Saxon, Darrell Fetty, Stefan Gierasch

Scénario : Jeffrey Bloom

Photographie : Steven Poster

Musique : Gil Melle

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

En Californie, une femme disparaît mystérieusement en se promenant sur la plage. Le capitaine Pearson et Harry Caulder veulent résoudre cette énigme, d’autant qu’on retrouve sur la plage le corps sans tête du chien de la disparue. Les phénomènes étranges se multiplient comme une adolescente qui a les jambes lacérées. Une enquête est alors ouverte.

Cette fois-ci, le danger ne vient pas de la mer…

Quelle petite pépite que cette Plage sanglante ! Réalisé par Jeffrey Bloom en 1980, Blood Beach est un modèle du genre horreur Bis et tient toutes ses promesses, à savoir offrir quelques savoureux moments d’épouvante, de jolies nanas bronzées sous le soleil californien, des kékés habillés en fluo dans un coin et un humour décalé qui indique que tout ceci n’est pas à prendre au sérieux. Jeffrey Bloom est avant tout scénariste. On lui doit entre autres un étonnant (ou improbable c’est selon) 28 Secondes pour un hold-up de George Englund, interprété par Jean-Claude Killy, notre skieur national et médaillé d’or aux Jeux Olympiques, dans sa seule incursion au cinéma. La Plage sanglante arrive cinq ans après que Steven Spielberg ait fichu la trouille au monde entier, tout en faisant déserter les plages à cause de son requin affamé. Le film de Jeffrey Bloom s’engouffre dans la brèche, mais propose un divertissement intelligent puisque la menace est non seulement invisible et ne provient pas d’un squale ou d’un piranha.

N’attendez pas une débauche d’hémoglobine et les spectateurs avides de sang risquent de trouver le temps long puisque le réalisateur joue avant tout sur la tension et les effets inattendus, tout en ajoutant une petite pincée sexy. Les effets spéciaux sont très réussis et les effets d’aspiration des victimes dans le sable font encore leur effet aujourd’hui. De plus, Jeffrey Bloom use de la présence du comédien Burt Young, bien connu des cinéphiles pour son rôle de Paulie dans la saga Rocky, qui avec son galurin vissé sur la tête donne un côté film-noir parasité par un élément d’horreur. Un peu comme si le détective d’un polar des années 1940 se retrouvait catapulté en plein cinéma d’exploitation. Au-delà de son aspect divertissant, La Plage sanglante repose également sur une très bonne mise en scène. Le cinéaste parvient à rendre son décor inquiétant et angoissant.

Le film vaut également pour la très belle photo luminescente signée Steven Poster, chef opérateur qui faisait ici ses débuts au cinéma et qui allait par la suite collaborer avec Ridley Scott (Traquée), Richard Kelly (Donnie Darko et Southland Tales)…et Patrice Leconte (1 chance sur 2). En ce qui concerne l’interprétation, David Huffman incarne le héros du film, qui ne fait pas grand-chose certes, mais qui attire la sympathie avec son personnage qui semble plus intéressé par une ancienne conquête que par ce qui se passe sur la plage dont il a la garde. Après quelques apparitions dans F.I.S.T. de Norman Jewison et Firefox, l’arme absolue de Clint Eastwood, le comédien est malheureusement assassiné en 1985 à l’âge de 39 ans. N’oublions pas la tronche de l’excellent John Saxon, aujourd’hui toujours en activité à plus de 80 ans et 200 films à son actif, qui a connu son heure de gloire auprès de Bruce Lee dans Opération Dragon (Roper, c’était lui !) et vu plus tard dans Les Griffes de la nuit de Wes Craven (encore un rôle de flic) puis Une nuit en enfer de Robert Rodriguez dans le rôle de l’agent Stanley Chase.

Alors venez planter votre parasol sur cette plage Bis infiniment sympathique et maligne, en aucun cas un nanar, et qui mérite vraiment d’être reconsidéré dans nos contrées où La Plage sanglante est malheureusement et injustement méconnue.

LE DVD

La Plage sanglante bénéficie d’un tout petit tirage très limité à 500 exemplaires grâce à Zylo. Le DVD est entre autres disponible sur Ulule, ainsi que chez les vendeurs spécialisés suivants : Sin’Art, Metaluna store, Ciel Rouge, Cine-matouvu, sans oublier leurs sites internet correspondants. Le DVD repose dans un boîtier Amaray classique et le menu principal est quant à lui fixe et musical. La jaquette reprend le visuel de l’affiche originale, particulièrement efficace.

Dans la section Interactivité, nous trouvons la bande-annonce originale, un spot TV, un diaporama de photos et d’affiches, ainsi qu’une scène coupée. Un carton en introduction indique que cette séquence « Visite à la police » se situait dans le film juste après la disparition de Hoagy et approfondissait le travail entre Harry Caulder et le Lieutenant Piantadosi (2′).

L’Image et le son

Ce master repris du DVD allemand (voir le titre pendant le générique), comporte encore des raccords de montage, des tâches, des points, des rayures et certaines séquences s’avèrent plus altérées. Néanmoins, la copie proposée ne démérite pas et ne manque pas d’élégance. La stabilité est de mise, tout comme la gestion du grain original. Même si La Plage sanglante est proposée dans un format 1.33 (le film a été tourné en 1.85…), le « confort » de visionnage est assuré, la clarté est évidente. L’image trouve un équilibre convenable. L’éditeur indique que le montage proposé est la version dite « européenne ».

Les versions anglaise, française et espagnole sont disponibles. Elles disposent toutes d’un mixage Dolby Digital Mono 2.0 relativement efficace, sans souffle, même si certains échanges résonnent quelque peu et s’avèrent quelque peu métalliques. Les conditions sont remplies pour apprécier pleinement le film et ses dialogues, dynamiques et propres, ainsi que la composition de Gil Melle (Le Mystère Andromède). La piste anglaise est évidemment la plus naturelle et la plus aérée du lot.

Crédits images : © Zylo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Monstres invisibles, réalisé par Arthur Crabtree

MONSTRES INVISIBLES (Fiend Without a Face) réalisé par Arthur Crabtree, disponible en DVD le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Marshall Thompson, Kynaston Reeves, Kim Parker, Stanley Maxted, Terry Kilburn, James Dyrenforth, Robert MacKenzie

Scénario : Herbert J. Leder d’après la nouvelle « The Thought Monster » d’Amelia Reynolds Long

Photographie : Lionel Banes

Musique : Buxton Orr

Durée : 1h14

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Durant les essais d’un radar expérimental dans une base militaire au Manitoba, des fermiers du voisinage meurent dans d’étranges circonstances. L’autopsie révèle que les cadavres n’ont plus de cerveau ni moelle épinière et, pour toute blessure, un tout petit trou à la base de la nuque. Le major Jeff Cummings va mener une enquête afin de comprendre les raisons de ce phénomène.

C’est un petit film de science-fiction horrifique qui pourrait paraître banal au milieu de toutes les productions britanniques indépendantes du genre dans les années 1950 et pourtant Monstres invisiblesFiend Without a Face se démarque par ses effets spéciaux et son quart d’heure final peuplé de créatures qui ne sont pas sans rappeler celles du premier Alien au premier stade de leur évolution. Produit par Amalgamated Productions pour un budget de 50.000 livres, écrit par Herbert J. Lederpar (The Frozen Dead), d’après une nouvelle d’Amelia Reynolds Long publiée dans les années 1930, réalisé en 1958 par Arthur Crabtree (Crimes au musée des horreurs), ancien chef opérateur passé à la mise en scène après la Seconde Guerre mondiale, Monstres invisibles fonctionne encore bien aujourd’hui. D’une part pour son message d’avertissement contre les dangers du nucléaire dans un premier acte « documentaire » avec les séquences montrant les diverses tâches spécifiques des navigateurs et tout ce qui touche à la conquête de l’air, d’autre part dans la partie horreur plus singulière avec la traque de ces étranges cerveaux à queue et aux antennes d’escargots, qui ont la capacité de se rendre invisibles.

En plus de cela, ces êtres difformes s’attaquent aux êtres humains en s’enroulant autour de leur cou pour leur planter un dard dans la nuque, afin de leur aspirer le cerveau et la moelle épinière ! Autant dire que notre héros, le major Jeff Cummings, va avoir du pain sur la planche quand les morts suspectes s’accumulent autour de la base dont il est l’un des responsables. Il faut dire que cette station expérimentale américaine installée près d’une petite ville canadienne a entraîné quelques tensions entre l’armée et les locaux. Les fermiers se plaignent du bruit causé par les nombreux décollages et atterrissages, cause de stress pour leurs vaches, et les gens ne voient pas d’un bon oeil l’utilisation du nucléaire requise pour les essais d’un radar expérimental. Ces divisions entre les deux partis ne vont pas aider Cummings. Arthur Crabtree s’en sort très bien derrière la caméra et parvient à créer un certain suspens grâce à beaucoup d’inventivité, la suggestion et les bruitages inquiétants particulièrement réussis quand les vampires cérébraux sont à l’oeuvre.

Les crimes sont très efficaces puisque les créatures sont, comme le titre français l’indique, invisibles. De ce fait, les victimes entendent un bruit de succion, rampant, puis se tiennent la gorge en hurlant en tentant d’écarter quelque chose qui semble leur serrer le cou, avant de s’écrouler les yeux révulsés. Ces monstres ne seront donc visibles que dans le dernier quart d’heure, où multipliés, avides de chair humaine et de matière grise, animés par l’énergie atomique, ils se jetteront l’un après l’autre sur nos héros un rien désappointés de voir des cervelets vivants, autonomes et grouillants dans les fougères. Heureusement, ils vont résister en leur tirant dessus et même à coups de hache avec du bon gros sang (en N&B) qui bouillonne et qui brûle comme de l’acide.

Popularisé grâce à la série Daktari, le comédien Marshall Thompson tourne alors depuis une quinzaine d’années quand on lui propose le rôle principal de Monstres invisibles. Un an plus tard, il retrouvera un rôle quasi-similaire dans un film du même genre dans le célèbre et aussi culte Pionnier de l’espace de Robert Day. Les effets spéciaux de Monstres invisibles, révolutionnaires à l’époque et réalisés par des spécialistes au moyen d’ordinateurs perfectionnés dans l’animation image par image, possèdent encore une vraie magie poétique et participent à la réussite ainsi qu’à la postérité de cette série B.

LE DVD

Le DVD de Monstres invisibles, disponible chez Movinside, a été testé à partir d’un check-disc. Le film d’Arthur Crabtree intègre la collection « Trésors du fantastique » dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

A l’occasion de la sortie de Monstres invisibles en DVD, Marc Toullec, journaliste et ancien co-rédacteur en chef de Mad Movies, propose une présentation du film d’Arthur Crabtree (16’). Très informative, cette introduction en apprend beaucoup sur le statut culte du film (en raison de son dernier acte anthologique), les conditions de production, l’écriture du scénario, le casting, la réalisation des effets spéciaux et le remake avorté du film dans les années 80-90. Marc Toullec enchaîne les anecdotes sur Monstres invisibles pour notre plus grand plaisir.

L’Image et le son

Jusqu’alors inédit en DVD en France, Movinside offre un master au format original un peu fatigué de Monstres invisibles, bien que l’encodage tente de consolider l’ensemble. Le titre du film est étonnamment en allemand, ce qui indique où l’éditeur a pu mettre la main sur la copie. La gestion des contrastes est aléatoire, la copie laisse encore passer de nombreuses poussières, scories, rayures verticales, raccords de montage, surtout durant la première partie et les divers stock-shots. Le piqué est donc médiocre, mais les noirs ne manquent pas de concision et la copie est lumineuse sur les séquences diurnes.

Le confort acoustique est de mise, rarement parasité par quelques fluctuations ou chuintements, par ailleurs imputables aux conditions de conservation ou tout simplement aux affres du temps. Les sous-titres français ne sont pas verrouillés et seule la version originale Dolby Digital mono est proposée ici. Les dialogues sont clairs et distincts, tout comme les effets sonores à l’instar des bruits de succion assez dérangeants.

Crédits images : © Movinside – MGM / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr