Test DVD / La Famille Fang, réalisé par Jason Bateman

LA FAMILLE FANG (The Family Fang) réalisé par Jason Bateman, disponible en DVD le 22 juin 2017 chez Metropolian Vidéo

Acteurs : Nicole Kidman, Jason Bateman, Christopher Walken, Kathryn Hahn, Marin Ireland, Michael Chernus, Harris Yulin, Alexandra Wentworth

Scénario : David Lindsay-Abaire d’après le roman de Kevin Wilson

Photographie : Ken Seng

Musique : Carter Burwell

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2015

LE FILM

De retour dans la maison familiale, Baxter et Annie soignent les cicatrices d’une éducation qui échappe aux conventions. Lorsque leurs parents, des artistes célèbres pour élaborer des canulars en public, disparaissent dans des circonstances troublantes, le frère et la soeur mènent l’enquête, indécis quant à la raison de cette disparition : est-ce un jeu stupide ou une ruse élaborée ? Rien ne pouvait les préparer à ce qu’ils vont finir par découvrir.

Comédien aussi talentueux qu’attachant, Jason Bateman demeure pourtant méconnu dans nos contrées. Les spectateurs français l’ont néanmoins vu dans de nombreuses comédies à succès, Dodgeball – Même pas mal !, Starsky et Hutch, La Rupture, Juno, Paul, Hancock, les deux Comment tuer son boss ?, sans toutefois parvenir à retenir son nom, pourtant facile à mémoriser. Ayant commencé sa carrière quand il avait une dizaine d’années, notamment dans La Petite maison dans la prairie dans le rôle de James Cooper Ingalls, Jason Bateman n’a jamais arrêté de tourner pour le cinéma et la télévision. Parallèlement à sa carrière d’acteur, il a également fait ses premiers pas derrière la caméra en réalisant quelques épisodes des séries Valerie, La Vie de famille, Un frère sur les bras, Les Jumelles s’en mêlent, avant de mettre en scène son premier long métrage pour le cinéma avec Bad Words, sorti directement en DVD et Blu-ray en France en 2014. En 2015, il signe son deuxième film La Famille Fang, toujours inédit en France, adaptation du roman éponyme de Kevin Wilson.

Caleb (Christopher Walken) et Camille Fang (Maryann Plunkett) sont des artistes qui ont dédié leur vie à la performance et aux happenings. Annie (Nicole Kidman) et Buster (Jason Bateman), leurs deux enfants, ont toujours fait partie – parfois contre leur gré – de leurs œuvres filmées à l’insu des passants choqués. Pas facile de grandir avec des parents pareils. Une fois adultes, ils s’aperçoivent que le chaos de leur enfance les a rendus quelque peu inadaptés à la société. Annie est une comédienne qui enchaîne les mauvais films, qui doit se résoudre à tourner topless pour relancer sa carrière, tandis que Buster est un écrivain raté en manque d’inspiration. Le poids des parents pèse sur ces deux quadras. Alors quand Baxter a un petit accident de pomme de terre – lancée dans la figure par un patator – et qu’il apprend que son père et sa mère débarquent pour le soutenir, les souvenirs d’une enfance marquée par l’excentricité de leurs parents artistes, qui les utilisaient comme cobayes et complices malgré eux de leurs performances, reviennent vite à la surface. La Famille Fang est un film délicat et amer sur l’héritage et les relations familiales. Formidablement interprétée, notamment par Jason Bateman lui-même et Nicole Kidman (productrice et qui a acquis les droits du livre pour le cinéma), capable d’illuminer le moindre petit film de sa présence malgré son visage quelque peu figé en raison de chirurgie plastique, cette comédie-dramatique est typique du cinéma indépendant américain.

On connaît la musique, mais La Famille Fang fonctionne grâce à son approche mélancolique et à la complexité des personnages. Jusqu’où des artistes peuvent-ils aller pour l’amour de leur art et pour faire bouger les consciences ? Doivent-ils mettre en péril leur propre famille ? Et comment les enfants peuvent-ils accepter de passer au second plan dans la vie de leurs parents ? La Famille Fang passe du passé au présent, montrant les parents et leurs rejetons dans leurs performances, entre amusement pour le « bien-être personnel » et la « révolution » pour inciter les témoins de leurs happenings à réfléchir sur la condition humaine. Le malaise s’installe quand les parents organisent un nouveau coup fourré en obligeant A et B (surnoms des gamins en raison de la première lettre de leurs prénoms respectifs, encore une blague) à jouer Roméo et Juliette, où les deux ados doivent alors s’embrasser sur scène.

Sur un scénario écrit par David Lindsay-Abaire (l’excellent Rabbit Hole de John Cameron Mitchell, avec Nicole Kidman), La Famille Fang ne joue pas sur l’empathie immédiate et montre les fêlures de ses personnages, qui se dévoilent par strates. C’est là toute la réussite du film difficile à cerner de Jason Bateman, qui mérite vraiment d’être découvert.

LE DVD

Le test du DVD – pas d’édition HD pour ce titre – de La Famille Fang, disponible chez Metropolitan, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces de titres disponibles chez l’éditeur.

L’Image et le son

Pour son second long-métrage, Jason Bateman jouit d’un atout de taille en la personne de Ken Seng, directeur de la photographie de Deadpool, Projet X et Disconnect. Le master SD concocté par Metropolitan restitue joliment la colorimétrie originale, même si les contrastes auraient gagné à être plus renforcés. Un très léger grain se fait ressentir, les scènes diurnes sont claires mais le piqué n’est pas aussi ciselé qu’espéré. Signalons quelques artefacts de compression visibles durant les scènes se déroulant en intérieur, sans toutefois que les conditions de visionnage s’en trouvent affectées. La définition n’est certes pas optimale, mais solide et largement suffisante pour découvrir ce film singulier.

En anglais comme en français, les pistes Dolby Digital 5.1 remplissent aisément leur office et même, plongent le spectateur dans une ambiance musicale inattendue. D’entrée de jeu, les effets naturels se font entendre sur l’ensemble des enceintes et bénéficient d’une belle ouverture frontale et latérale. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et le confort acoustique est assuré du début à la fin.

Crédits images : © Metropolitan Vidéo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Revenger, réalisé par Walter Hill

REVENGER (The Assignment) réalisé par Walter Hill, disponible en DVD et Blu-ray le 6 juin 2017 chez TF1 Vidéo

Acteurs : Michelle Rodriguez, Sigourney Weaver, Tony Shalhoub, Caitlin Gerard, Terry Chen, Anthony LaPaglia

Scénario : Walter Hill, Denis Hamill

Photographie : James Liston

Musique : Giorgio Moroder, Raney Shockne

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Une chirurgienne brillante et manipulatrice décide de se venger du meurtre de son frère. Elle est prête à tout pour retrouver le tueur et lui faire payer son crime….au-delà de l’imaginable.
Frank Kitchen est un tueur sans pitié qui pourchasse ses proies et les abat froidement pour éxécuter ses contrats. Mais cette fois ci, le contrat, c’est lui. Un contrat motivé par un puissant désir de vengeance qui doit le mener sur le chemin de la rédemption. Après s’être fait kidnapper, Frank se réveille avec un nouveau visage…
Comprenant qu’il est l’objet d’une terrible manipulation, c’est à son tour de mettre en œuvre sa vengeance : elle sera redoutable !

Si Du plomb dans la tête avait marqué le retour de Walter Hill derrière la caméra dix ans après Un seul deviendra invincible, le cinéaste n’aura pas attendu aussi longtemps pour livrer son nouveau film Revenger, The Assignment en version originale. Comme pour son précédent long métrage, Walter Hill adapte une bande dessinée, publiée en France sous le titre Corps et Ame (chez Rue de Sèvres), cosignée par le réalisateur lui-même avec Matz et Jef. Revenger reprend la même intrigue. Frank n’est pas un type bien. Des hommes, il en a descendus des dizaines, proprement, sans histoires, un vrai pro. Pourtant, il aurait pu se douter que cette affaire payée le double était louche. Mais le réveil est bien plus rude que tout ce qu’il pouvait imaginer : si son âme est toujours homme, son corps, lui, est devenu femme. Une vengeance pour un crime passé. Sa vengeance à lui commence, et elle ne laissera personne indemne. Walter Hill ne le cache pas, Revenger, dont le script initial – sous le titre Tomboy – remonte aux années 1970, est une pure série B tournée avec un budget très restreint (on parle de 2,5 millions de dollars) et une intrigue réduite au plus simple.

Le plus amusant du film car le plus improbable, c’est bien évidemment la performance de Michelle Rodriguez, qui n’est certes pas la plus sobre des comédiennes, mais qui a l’air de s’amuser à jouer un tueur à gages, avec la barbe qui n’a d’égale que la perruque de Christophe Lambert dans Vercingétorix : la légende du druide roi et le service trois-pièces en latex, qui subit une vaginoplastie comme représailles après un contrat qui a mal tourné. Autant dire que le réveil est difficile pour ce mec macho qui lève des nanas dans les bars éclairés aux néons. Mais s’il doit dorénavant prendre des hormones et « accepter » sa nouvelle situation, il, ou elle désormais, est bien décidée à retrouver celle qui est responsable de cette nouvelle identité, tout en flinguant les sbires qui se mettront sur sa route. Michelle Rodriguez en fait des tonnes, fronçant les yeux et en faisant la moue, pétoires à la main et démarche de camionneuse. Ça défouraille pas mal, mais malheureusement le récit ne suit pas une seconde.

Revenger qui se complaît dans une esthétique craspec avec une nonchalance assumée, tout en plagiant l’idée centrale du chef d’oeuvre de Pedro Almodóvar, La Piel que habito, avec un zest de Sin City avec cette voix-off omniprésente. Entre Michelle Rodriguez d’un côté en mode bulldozer, et Sigourney Weaver sanglée dans une camisole de force qui tape la discute avec son toubib Tony Shalhoub, Revenger est un film qui adopte un rythme de croisière avec le frein à main serré, tandis que le spectateur attend toujours la scène d’action qui viendra un peu remuer tout ça. Peine perdue.

Revenger est un thriller pulp, mâtiné de plans directement issus de la BD avec des arrêts sur image « comics » qui tentent de donner une identité à l’ensemble. Ce n’est pas déplaisant, surtout avec ce personnage principal qui tente de renouer avec son identité, ce qui vaut quelques réflexions sur le genre, mais Revenger est tellement lent, lambda et déjà-vu, qu’il ne se distingue jamais du tout-venant. Et qu’est-ce que c’est bavard ! C’est vraiment dommage, surtout que Walter Hill avait prouvé avec le réjouissant Du plomb dans la tête, buddy movie renvoyant directement à ceux réalisés dans les années 80, qu’il en avait encore sous le capot.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Revenger, disponible chez TF1 Vidéo après un passage en VOD, a été réalisé à partir d’un check disc. Le menu principal est animé et musical.

Edition minimaliste pour Revenger puisque l’éditeur ne livre qu’un petit entretien de Walter Hill et de Michelle Rodriguez (12’), visiblement réalisé à l’occasion de la promotion du film par le journaliste Didier Allouch. Dans un premier temps, le réalisateur monopolise la parole tandis que la comédienne se contente d’acquiescer et de renifler dans le micro Studiocanal. Walter Hill revient sur la genèse de Revenger, sur le budget restreint et le fait de réaliser une série B, sur les partis pris et la BD à l’origine du film. Michelle Rodriguez sort ensuite de sa torpeur et de son rhume pour indiquer à quel point elle s’est sentie femme en incarnant un homme. Merci Michelle.

L’Image et le son

Le master HD (1080p) français de Revenger édité par TF1 Vidéo restitue habilement les volontés artistiques du chef opérateur James Liston (Lost Identity) en conservant un très léger grain cinéma, des couleurs à la fois chaudes et froides, des contrastes léchés ainsi qu’un relief constamment palpable. La compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre large et les visages des comédiens, le piqué est aiguisé, les noirs denses, les blancs cramés et la copie éclatante. Les très nombreuses séquences nocturnes jouissent également d’une belle définition, même si les détails se perdent quelque peu.

Pour un film de ce genre, nous nous attendions à un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 plus ardent. En français comme en anglais, la scène latérale distille ses effets avec une étonnante parcimonie et il faut véritablement attendre les quelques séquences d’action pour que la spatialisation se fasse enfin concrète et que le caisson de basses se réveille. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. Les dialogues manquent de punch et d’intelligibilité sous la percutante balance frontale.

Crédits images : © TF1 Vidéo / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

 

 

Test Blu-ray / The Bye Bye Man, réalisé par Stacy Title

THE BYE BYE MAN réalisé par Stacy Title, disponible en DVD et en Blu-ray (version non censurée) le 22 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Douglas Smith, Lucien Laviscount, Cressida Bonas, Carrie-Anne Moss, Faye Dunaway, Doug Jones, Jenna Kanell, Michael Trucco

Scénario : Jonathan Penner d’après la nouvelle The Bridge to Body Island de Robert Damon Schneck

Photographie : James Kniest

Musique : The Newton Brothers

Durée : 1h36 (version cinéma) 1h39 (version non censurée)

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Lorsque trois étudiants s’installent dans une vieille maison aux abords de leur campus, ils libèrent inconsciemment le Bye Bye Man, une entité surnaturelle qui ne hante que ceux qui découvrent son nom. Les amis comprennent alors qu’il n’y a qu’un moyen d’échapper à sa malédiction et d’éviter qu’elle ne se propage : ne pas le dire, ne pas y croire. Quand le Bye Bye Man arrive à s’immiscer dans vos pensées, il prend le contrôle et vous fait commettre l’irréparable…

The Bye Bye Man marque le retour au cinéma de la réalisatrice Stacy Title, révélée en 1995 avec L’Ultime souper. Attirée par l’épouvante, la cinéaste a également signé Let the Devil Wear Black en 1999 et Hood of Horror en 2006. A part une participation à un show collectif réalisé pour la télévision, The Greatest Show Ever, nous étions sans nouvelles de Stacy Title. The Bye Bye Man est l’adaptation d’une nouvelle de Robert Damon Schneck intitulée The Bridge to Body Island. Le film aurait dû être distribué dans les salles françaises l’été 2016, sortie finalement annulée en raison du report de l’exploitation américaine (dans une version finalement tronquée) et surtout des critiques très négatives. Pourtant cela partait bien.

On est tout d’abord happé par un prologue filmé en plan-séquence, d’une incroyable brutalité sèche. En octobre 1969, un homme débarque dans une petite bourgade du Wisconsin. Armé d’un fusil, il demande à l’une de ses connaissances si « elle connaît son nom ou l’a dit à quelqu’un ? » avant de lui tirer à bout portant. D’autres meurtres suivent rapidement après, un homme handicapé qui rampe sur le sol, les voisins alertés par les détonations, tandis que l’homme au fusil n’arrête pas de répeter « N’y pense pas. Ne dis pas son nom ». Quoi ? Encore Voldemort ? Passée cette formidable introduction, l’action se déroule de nos jours où nous suivons un jeune couple d’étudiants et leur ami, qui viennent de louer une maison – quelque peu délabrée – en dehors du campus afin d’y être plus tranquilles. C’est alors que The Bye Bye Man adopte un rythme de croisière tout aussi peinard et s’enlise rapidement dans tous les clichés du genre.

Les étudiants restent dans cette baraque qui s’avère évidemment très vite hantée ou tout du moins le lieu de phénomènes paranormaux. Les visions cauchemardesques se multiplient, notamment celle du fameux Bye Bye Man interprété par l’incroyable Doug Jones, qui prête une fois de plus sa longue silhouette filiforme à un personnage fantastique après avoir marqué les cinéphiles dans Le Labyrinthe de Pan, les deux Hellboy et même Gainsbourg (Vie héroïque). Mais à côté de ça, les jeunes comédiens, la mannequin Cressida Bonas (l’ex du prince Harry pour les plus people), Douglas Smith (la série Vinyl, Miss Sloane) et Lucien Laviscount font ce qu’ils peuvent pour rendre leurs personnages bébêtes un peu attachants. S’ils y arrivent au départ, la direction d’acteurs va à vau-l’eau dès que le fantastique s’immisce. Constamment au bord de l’apoplexie, les yeux écarquillés, les comédiens en font trop, des tonnes même et il faut attendre l’apparition inattendue de l’excellente Carrie-Anne Moss pour redonner un peu d’intérêt à l’ensemble. Trop rare, l’actrice canadienne vole les deux scènes où elle apparaît. Un peu plus tard dans le film, on est encore plus surpris de voir, ou plutôt de reconnaître non sans difficulté, Faye Dunaway, dont le visage ravagé par la chirurgie esthétique fait vraiment peine à voir.

The Bye Bye Man se contente de plagier ouvertement Candyman, Wishmaster, Sinister et autres films convoquant un boogeyman, de mélanger tout cela dans un shaker et de déverser ce cocktail dans le bec des spectateurs en essayant d’adopter la forme du merveilleux It Follows de David Robert Mitchell, en espérant que ceux-ci ne voient pas trop l’entourloupe. Non seulement le film cumule les poncifs comme des perles sur un collier (l’amie médium qui organise une séance de spiritisme), mais en plus la réalisatrice ne parvient jamais à instaurer de suspense, les jumpscares ne fonctionnent jamais car trop attendus, le croquemitaine et son clebs en (mauvaises) images de synthèse ne possèdent aucune aura et les quelques scènes « choc » semblent tirées d’un ersatz de Destination Finale. Déception donc.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de The Bye Bye Man, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobrement animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces et du montage non censuré (3 minutes en plus) uniquement disponible sur l’édition Blu-ray.

L’Image et le son

The Bye Bye Man, DTV dans nos contrées, est proposé en HD dans un format 1080p. Si l’on est d’abord séduit par le rendu de la colorimétrie et de la luminosité durant le prologue, force est de constater que la définition chancelle à plusieurs reprises, avec un piqué trop doux à notre goût et un manque de détails, notamment au niveau des visages des comédiens. Le codec tente de consolider certains plans avec difficulté, surtout sur les nombreuses séquences sombres. De plus, la profondeur de champ est décevante, quelques légers fourmillements s’invitent à la partie, la gestion des contrastes étant au final aléatoire. Toutefois, certains plans sortent aisément du lot avec un relief indéniable.

Vous pouvez compter sur les mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français pour vous plonger dans l’ambiance du film, bien que l’action demeure souvent réduite. La bande originale est la mieux lotie. Toutes les enceintes sont exploitées, les voix sont très imposantes sur la centrale et se lient à merveille avec la balance frontale, riche et dense, ainsi que les enceintes latérales qui distillent gentiment les jumpscares. Le caisson de basses se mêle également à la partie. Notons que la version originale l’emporte sur la piste française (au très mauvais doublage), se révèle plus naturelle et homogène, y compris du point de vue de la spatialisation musicale. La version non censurée est uniquement disponible en version anglaise avec les sous-titres français imposés.

Crédits images : © STX Productions, LLC. All rights reserved / Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Le Cynique, l’Infâme et le Violent, réalisé par Umberto Lenzi

LE CYNIQUE, L’INFÂME, LE VIOLENT (Il Cinico, l’infame, il violento) réalisé par Umberto Lenzi, disponible en combo DVD/Blu-ray le 18 mars 2017 chez The Ecstasy of Films

Acteurs : Maurizio Merli, Tomás Milián, John Saxon, Renzo Palmer, Gabriella Lepori, Claudio Undari, Bruno Corazzari

Scénario : Ernesto Gastaldi, Dardano Sacchetti, Umberto Lenzi d’après une histoire originale de Sauro Scavolini

Photographie : Federico Zanni

Musique : Franco Micalizzi

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1977

LE FILM

Luigi Maietto, dit   »le Chinois » , jeune truand cynique et ambitieux, vient de s’évader de prison. Son premier souhait est de faire mordre la poussière au responsable de sa condamnation à vie, l’ex-commissaire de police Leonardo Tanzi, en lui envoyant deux tueurs. En dépit de graves blessures, il se fait passer pour mort et se cache à Rome pour y donner la chasse à son persécuteur. Le Chinois, qui se croit débarrassé, a repris son activité au sein de la pègre organisée, en s’associant au « boss » italo-américain Frank Di Maggio pour mieux régner en maître sur la Mafia romaine. Tanzi monte un plan machiavélique pour anéantir Le Chinois en l’opposant à Di Maggio. Une guerre sans merci va débuter.

Au cours des années 70, l’Italie subit les revendications politiques des Brigades Rouges et vit ce que l’on appellera plus tard ses « années de plomb » . Reflet social, le cinéma va exprimer cette violence dans une vague de polars urbains âpres et cruels. Fortement inspirés par des films comme L’inspecteur Harry (1971), Un justicier dans la ville (1974) ou encore French Connection (1971), les réalisateurs Enzo G. Castellari, Fernando Di Léo, Umberto Lenzi, et bien d’autres, vont faire mettre en images violence, vengeance et justice. Franco Nero, Tomás Milián, Fabio Testi, ou Maurizio Merli, vont camper les flics, voyous, mafieux, escrocs ou justiciers, pour le plus grand bonheur des spectateurs.

Celui qui nous intéresse ici est Le Cynique, l’Infâme et le Violent Il cinico, l’infame, il violento (et même The Cynic, the Rat and the Fist en anglais !) réalisé par le prolifique Umberto Lenzi (Maciste contre Zorro, Kriminal, Le tueur à l’orchidée) avec le mythique Tomás Milián, comédien cubain qui alternait les séries B lucratives et les films d’auteur chez Mauro Bolognini, Alberto Lattuada, Valerio Zurlini, Liliana Cavani, Bernardo Bertolucci, Michelangelo Antonioni. A l’heure où certaines villes italiennes sont ratissées par certains gangs organisés et les petits commerçants pillés de toutes parts, Le Cynique, l’Infâme et le Violent agit comme un véritable défouloir dans les salles de cinéma en 1977.

Triomphe public, ce thriller violent n’a sans doute pas l’audace de Big Racket d’Enzo G. Castellari, mais n’en demeure pas moins un reflet de l’Italie d’alors et n’a rien perdu de sa férocité aujourd’hui. Porté par le charisme animal de Tomás Milián d’un côté, de Maurizio Merli de l’autre et du comédien italo-américain John Saxon entre les deux, Le Cynique, l’Infâme et le Violent est un véritable festival de bastons aux bruitages à la Terence Hill / Bud Spencer, de répliques cinglantes (en version originale tout du moins), de règlements de comptes (on y casse des jambes avec un cric, on jette de l’acide au visage d’une femme, on défonce la tête d’un homme à l’aide de balles de golf avant de le donner à bouffer à des dogues allemands), ça défouraille sévère. Le tout en gardant l’air décontracté, la chemise au col pelle à tarte bien ouvert sur le torse poilu où brillent les chaînes en or.

Après La rançon de la peurMilano odia : la polizia non può sparare, Bracelets de sangIl giustiziere sfida la città, Opération casseur Napoli violenta, Le Cave sort de sa planqueIl trucido e lo sbirro, Le Clan des pourrisIl trucido e lo sbirro et surtout Brigade spécialeRoma a mano armata dont il s’agit d’une suite (mais contrairement à Merli, Milian n’incarne pas le même personnage), Umberto Lenzi réunit ses précédentes têtes d’affiche pour Le Cynique, l’Infâme et le Violent, même si Tomás Milián et Maurizio Merli, qui ne se supportaient plus au point d’en venir aux mains, n’apparaissent jamais dans le même plan, y compris lors de l’affrontement final, grâce à un montage malin et très découpé.

Maurizio Merli traverse le film en singeant Franco Nero, au point d’y ressembler de façon troublante sur certains plans, comme si rien ne pouvait l’atteindre, en mettant un coup de poing d’abord et en discutant après. L’intrigue est typique du néo-polar italien aka poliziesco, avec quelques ingrédients directement issus du western et même de Mission Impossible lors d’un casse réalisé à l’aide de quelques gadgets (dont des lunettes à infrarouges pour passer à travers des lasers), et l’on suit avec délectation ces trois intrigues en parallèle, jusqu’à ce que le destin réunisse les trois personnages principaux sur la même scène.

Quarante ans après, Le Cynique, l’Infâme et le Violent demeure un savoureux divertissement, un pur plaisir de cinéma Bis, un petit bijou de l’Eurocrime fait évidemment pour remplir le tiroir-caisse, mais avec une redoutable efficacité doublé d’un vrai sens du spectacle populaire.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray et le DVD du Cynique, l’Infâme et le Violent, disponible chez The Ecstasy of Films, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. L’élégante jaquette (réversible) saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de cinéma Bis, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est animé et musical. La tranche de la jaquette indique que ce titre est le numéro 1 de la collection Eurocrime et la sérigraphie du disque arbore les couleurs du drapeau italien.

Pour cette édition limitée, The Ecstasy of Films propose 1h45 de suppléments ! Autant dire que les fans vont être ravis !

On commence par l’entretien avec le réalisateur Umberto Lenzi (22’). Né en 1931, le cinéaste revient tout d’abord sur son amour du film noir américain, ses études au Centro Sperimentale di Cinematografia, ses débuts au cinéma dans le péplum et dans les films de pirates. Puis, Lenzi aborde son travail dans le giallo et le polizieco avec quelques-uns de ses plus grands succès. Le metteur en scène est visiblement heureux de partager ses souvenirs et de revenir sur la période la plus glorieuse de sa carrière. Evidemment, il n’oublie pas de mentionner les acteurs qu’il a fait tourné à plusieurs reprises, Maurizio Merli et Tomás Milián (« qui avait besoin de se charger avant de tourner »), en insistant sur le fait que les deux comédiens, qui ne pouvaient pas se supporter, ne se sont pas croisés une seule fois sur le plateau du Cynique, l’Infâme et le Violent. Le titre original du film « Insieme per una grande rapina » (Ensemble pour un grand casse), utilisé sur le plateau et même pour la bande-annonce, est gentiment moqué de la part de Lenzi puisque cette idée des producteurs ne correspondait pas du tout au film qu’il était en train de tourner. C’est le réalisateur lui-même qui a ensuite trouvé le titre définitif en s’inspirant bien sûr de Sergio Leone. Ne manquez pas ce rendez-vous bourré d’anecdotes intéressantes.

Réalisée peu de temps avant sa disparition, l’interview de Tomás Milián (13’) est également au programme. Aux côtés d’un chat tranquillement endormi, le comédien passe pas mal de temps à parler (en anglais) de son statut d’immense star en Italie, sur ses collaborations avec les plus grands et son triomphe dans les séries B. Milián s’attarde surtout sur ses diverses collaborations avec Umberto Lenzi, « un réalisateur qui avait besoin de travailler avec moi, car il était sûr de gagner de l’argent ». L’acteur se penche notamment sur sa relation avec le cinéaste, « un rapport amour-haine, car je refusais de faire ce qui ne me plaisait pas ». Dans la dernière partie de cet entretien, Tomás Milián aborde le côté défouloir d’incarner des salauds à l’écran, « cela permet de vider son sac et c’est donc plutôt relaxant », ainsi que sa participation aux dialogues pour ses personnages, en indiquant que chacune de ses trouvailles faisait le bonheur des spectateurs.

C’est avec une grande joie que nous découvrons ensuite un entretien avec le grand John Saxon (16’). Visiblement réalisée pour la télévision allemande, cette interview est étrangement présentée, mais les propos n’en demeurent pas moins spontanés, drôles et toujours intéressants. Tenant toujours la forme à 80 ans, le comédien évoque sa collaboration avec Tomás Milián (« avec qui cela s’est très bien passé »), Maurizio Merli (« qui parlait de lui à la troisième personne  et qui était très satisfait de lui-même […] une grande star, mais qui planait un peu »), Umberto Lenzi (« qui criait beaucoup et qui maudissait tout ce qu’il pouvait »). John Saxon se dit surpris par le regain d’intérêt pour le sous-genre polizieco, dont il savait le succès colossal dans les salles, mais qu’il n’allait pas voir au cinéma, préférant les films d’auteurs dans les petites salles souvent éloignées de la ville. Le comédien revient également sur sa carrière en Italie (dont son premier film La Fille qui en savait trop de Mario Bava en 1963) et son attachement pour le pays et sa culture, étant lui-même d’origine italienne.

Le plus long supplément de cette interactivité s’avère l’entretien avec Franco Micalizzi (36’). Le compositeur à qui l’on doit les thèmes de On l’appelle Trinita, Brigade spéciale, Le Cynique, l’Infâme, le Violent, Quand faut y aller, faut y aller et Attention les dégâts revient ici sur l’ensemble de sa carrière et ses rencontres déterminantes. Sa passion pour la musique, ses débuts, ses influences, sa passion pour le jazz, son travail à la maison de disques R.C.A., son arrivée dans l’industrie du cinéma, tous ces sujets sont abordés avec passion par Franco Micalizzi.

Le dernier bonus est une présentation du Cynique, l’Infâme et le Violent par Mike Malloy (11’). S’il recoupe l’essentiel des modules précédents, notre interlocuteur ne manque pas d’imagination pour parler du film qui nous intéresse avec notamment l’apparition d’un fan de Tomás Milián qui tente d’imposer le portrait de son comédien favori au moment où Malloy évoque Merli et Saxon.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale.

L’Image et le son

Alors là, chapeau ! Jusqu’alors inédit en DVD et Blu-ray, Le Cynique, l’Infâme et le Violent déboule en version restaurée et Haute-Définition chez The Ecstasy of Films. Dès le générique d’ouverture (en français), l’image, au format respecté 2.35, affiche une propreté remarquable et une stabilité jamais prise en défaut, la clarté est de mise, les couleurs sont restituées pimpantes, le grain cinéma bien géré, les contrastes riches, le piqué agréable. La définition flatte les mirettes, la compression demeure discrète. C’est superbe ! Le Blu-ray est au format 1080p.

Propre et dynamique, le mixage italien DTS HD Master Audio Mono ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues, laissant une belle place à la musique de Franco Micalizzi . Elle demeure la plus dynamique du lot, mais également la plus virulente et la plus frontale dans ses dialogues par rapport à son homologue à l’adaptation plus « légère ». La version française DTS HD Master Audio Mono pousse un peu trop les dialogues, légèrement chuintants, au détriment des effets annexes. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © OB Films / The Ecstasy of Films / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Ssssnake le cobra, réalisé par Bernard L. Kowalski

SSSSNAKE LE COBRA (Sssssss) réalisé par Bernard L. Kowalski, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O’Connor, Jack Ging, Kathleen King, Reb Brown

Scénario : Hal Dresner d’après une idée originale de Daniel C. Striepeke

Photographie : Gerald Perry Finnerman

Musique : Patrick Williams

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

David, un jeune étudiant, est engagé comme assistant de laboratoire par le docteur Stoner, un herpétologiste spécialisé dans les serpents. Il ne tarde pas à tomber amoureux de la fille du docteur, tandis que ce dernier décide d’utiliser sur lui un sérum secret, destiné à créer un hybride homme-serpent.

Connu en France sous le titre SSSSnake le cobra ou tout simplement SSSSnake, Sssssss (titre original) est réalisé par Bernard L. Kowalski (1929-2007) en 1973. Oeuvrant habituellement pour la télévision sur des séries aussi diverses que variées que M Squad, Perry Mason, Les Incorruptibles, Rawhide, le metteur en scène signe avec ce petit film d’horreur une de ses rares incursions au cinéma. Après Night of the Blood Beast (1958) et Attack of the Giant Leeches (1959) – ou L’Attaque des sangsues géantes – qui lui avaient déjà donné l’occasion de toucher à l’horreur, Bernard L. Kowalski livre une formidable série B qui risque de donner quelques sueurs froides à ophiophobes, aux spectateurs qui ont peur des serpents.

Le docteur Stoner, herpétologiste réputé, conduit des recherches dont l’audace amène ses confrères et commanditaires à s’éloigner de lui. C’est ainsi qu’il a mis au point un sérum, dérivé de venin de cobra, qui peut transformer un homme en serpent. Tout cela dans le but de créer l’espèce parfaite et ultime. Mais sa première victime, Tim, n’est pas devenu tout-à-fait un serpent, et on le montre désormais comme attraction dans les foires. Après avoir refusé d’appuyer ses demandes de subventions, le docteur Daniels, qui ne se doute pas des véritables recherches de Stoner, lui recommande de prendre comme nouvel assistant un de ses étudiants, David Blake. Dans son laboratoire rempli de serpents, Stoner débute sa nouvelle expérience en lui injectant un sérum de son invention, supposé l’immuniser contre le venin. David commence alors à changer.

Produit par la jeune société Zanuck / Brown Productions (qui se préparait à financer un petit film intitulé Les Dents de la mer) pour Universal avec un budget d’un million de dollars, SSSSnake adopte un rythme lent, mais maîtrisé et repose sur un excellent casting, véritablement investi puisque plus de 150 véritables serpents – certains encore venimeux – ont été utilisés et manipulés par les comédiens pour les besoins du film. Bernard L. Kowalski fait preuve de rigueur dans sa mise en scène et sa direction d’acteurs, tout en distillant une tension maintenue pendant plus d’1h30. Le scénario d’Hal Dresner (Luke la main froide et Folies d’avril de Stuart Rosenberg, The Extraordinary Seaman de John Frankenheimer) joue avec les codes du genre en vigueur à l’époque et parvient à rendre réaliste une histoire extraordinaire.

Connu comme étant l’un des éternels seconds couteaux, le comédien Strother Martin, vu chez John Huston, Robert Aldrich, Delmer Daves, John Ford, Sam Peckinpah et George Roy Hill, accède ici au premier rôle. Peu habitué à cet événement, il porte néanmoins le film en créant un décalage intéressant et en rendant son personnage de savant fou inquiétant, qui tombe de plus en plus dans la démence au fil du récit. A ses côtés, les nostalgiques de la série L’Agence tous risques reconnaîtront Dirk Benedict qui interprétait Futé pendant les six saisons. Dans SSSSnake, c’est lui qui incarne le cobaye malgré-lui et qui va voir son corps se transformer, jusqu’à devenir un véritable cobra aux yeux bleus de plus de deux mètres.

Entre Frankenstein et L’Ile du Docteur Moreau, avec une petite touche de Freaks, la monstrueuse parade, SSSSnake s’avère une excellente surprise, récompensée par le Saturn Award du meilleur film de science-fiction en 1975 et sélectionnée en compétition au Festival international du film fantastique d’Avoriaz en 1974. Il n’est pas anodin de penser que SSSSnake ait ensuite largement influencé la série éphémère mais culte Manimal (1983), dans laquelle Simon MacCorkindale possédait la faculté de se transformer en panthère noire, en faucon et même en serpent. Si la mutation est définitive dans SSSSnake, celles dans Manimal font sérieusement penser à la séquence finale du film de Bernard L. Kowalski, par ailleurs la seule à utiliser les effets spéciaux. Le maquillage de Dirk Benedict est par ailleurs très réussi.

Au final, malgré une conclusion quelque peu décevante car trop expédiée, SSSSnake demeure une excellente récréation, relativement ambitieuse et continue de faire le bonheur des adeptes d’histoires horrifiques bien troussées.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de SSSSnake, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique classe de couleur noire. L’élégante jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de fantastique, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.

Dans sa présentation du film (13’30), Marc Toullec rapproche judicieusement SSSSnake de Willard de Daniel Mann, réalisé deux ans plus tôt, et revient sur la genèse du long métrage de Bernard L. Kowalski. Notre spécialiste en films fantastiques évoque ensuite le casting, le producteur Richard D. Zanuck, les effets spéciaux, les maquillages, l’utilisation de véritables serpents sur le plateau, les thèmes et les conditions de tournage. Une introduction simple, concise, bourrée d’anecdotes, enjouée et très sympathique.

L’Image et le son

Fort d’un master au format respecté 1.85 et d’une compression AVC qui consolide l’ensemble avec brio, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir SSSSnake dans de très bonnes conditions techniques. Malgré de légères scories, la restauration est souvent impressionnante, les contrastes bien équilibrés, la copie est propre, stable et lumineuse. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans, détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front de Dirk Benedict au fil du traitement), les couleurs retrouvent un éclat inespéré à l’instar des credits verts. En revanche, certains risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain argentique original, du manque de relief et du piqué trop doux à notre goût.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage Dolby Digital 2.0 Mono. Pas de HD ici donc. Cependant, le confort acoustique est malgré tout assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle probant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste française. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Movinside / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Vénus Blonde, réalisé par Josef von Sternberg

VÉNUS BLONDE (Blonde Venus) réalisé par Josef von Sternberg, disponible en DVD et combo Blu-ray/DVD le 7 février 2017 chez Elephant Films

Acteurs : Marlene Dietrich, Herbert Marshall, Cary Grant, Dickie Moore, Gene Morgan, Rita La Roy

Scénario : Jules Furthman, S.K. Lauren d’après une idée originale de Josef von Sternberg

Photographie : Bert Glennon

Musique : W. Franke Harling, John Leipold, Paul Marquardt, Oscar Potoker

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 1932

LE FILM

Edward Faraday, un chimiste américain, est tombé follement amoureux d’une chanteuse de cabaret allemande, Helen, qu’il a aperçue se baignant dans un lac de montagne. Il a tant et si bien fait qu’il l’a épousée et que le couple s’est installé aux Etats-Unis. Helen a abandonné la scène et se consacre entièrement à leur fils, Johnny. Elle apprend un jour qu’Edward a été victime de radiations, dans son laboratoire et qu’il doit partir en Europe pour une cure. Le traitement que le malheureux doit subir s’avère très onéreux et Helen décide de reprendre son ancien métier. Elle fait alors la connaissance d’un séduisant milliardaire qui lui fait une cour pressante…

En 1930, L’Ange bleuDer blaue Engel marque non seulement la première collaboration entre Marlene Dietrich (1901-1992) et le réalisateur Josef von Sternberg (1894-1969), mais aussi le sacre pour la comédienne et chanteuse qui explose alors aux yeux des spectateurs. Parallèlement, c’est aussi le premier film parlant du cinéma allemand. Alors que la Paramount souhaite trouver une actrice concurrente à Greta Garbo choyée par la Metro-Goldwyn-Mayer, Josef von Sternberg recommande au studio sa nouvelle protégée avant même que L’Ange bleu ne sorte sur les écrans. Marlene Dietrich signe un contrat de 1250 dollars la semaine avec la Paramount et débarque aux Etats-Unis. Josef von Sternberg va largement contribuer à créer le mythe Marlene Dietrich, alors quasi-inconnue chez l’Oncle Sam. Le cinéaste et son actrice tourneront six films aux Etats-Unis : Cœurs brûlésMorocco (1930), Agent X 27Dishonored (1931), Shanghaï Express (1932), Vénus Blonde (1932), Le Cantique des cantiquesSong of Songs (1933), L’Impératrice rougeThe Scarlet Empress (1934) et La Femme et le PantinThe Devil is a Woman (1935). Marlene Dietrich devient très vite une star et obtient même une nomination à l’Oscar de la meilleure actrice pour son premier film en langue anglaise. Les films suivants ne vont faire qu’accroître sa célébrité, tandis que les spectateurs demeurent fascinés par la femme derrière l’actrice. Le film qui nous intéresse, Vénus Blonde, est donc la cinquième collaboration Sternberg/Dietrich.

S’il n’obtiendra pas le même succès que les précédents, ce long métrage n’en demeure pas moins une immense réussite. Un magnifique portrait de femme, transcendé par la prestation de sa comédienne qui enflamme la pellicule. De son côté, Josef von Sternberg, toujours inspiré par sa muse, signe une de ses plus belles mises en scène. Si les spectateurs n’ont pas accueilli ce film comme il le méritait, c’est parce que le cinéaste a voulu montrer une autre facette de la comédienne, loin de la femme fatale que l’audience adorait retrouver. Marlene Dietrich interprète ici Helen, une ancienne danseuse de cabaret venue d’Allemagne, mariée à un chimiste américain, Edward Faraday (Herbert Marshall), malheureusement gravement irradié par du radium. Pour gagner de l’argent dans le but de soigner son mari en Europe, Helen retourne sur scène, dans le rôle de « la Vénus blonde », et obtient chaque nuit un vif succès, y compris lors de son numéro où elle apparaît…déguisée en gorille. Après un striptease des plus affriolants, elle revêt une perruque blonde afro avant d’entamer sa chanson. Elle se sent aussi très attirée par un fringant homme politique, Nick Townsend (Cary Grant dans un de ses premiers films), captivé par la Vénus blonde, qui va lui offrir un soutien financier. Elle fait alors croire à Edward d’avoir obtenu une avance. Grâce à cet argent, Edward peut partir en Allemagne avec l’espoir d’être sauvé par la médecine. Durant son absence, Helen tombe dans les bras de Townsend. Mais Edward revient plus tôt que prévu et découvre son appartement vide et comprend la situation. Helen s’enfuit avec leur fils.

On admire Marlene Dietrich incarner une mère au foyer, aimante, dévouée à son mari, qui a dû arrêter sa carrière pour s’occuper de leur fils, tout en assistant parfois son mari dans ses recherches. Vénus Blonde montre ensuite une femme qui reprend progressivement son indépendance, certes par amour, mais qui décide par elle-même, qui assume ses choix et la conséquence de chacun de ses actes, y compris lorsque ceux-ci s’avèreront mauvais et les conduiront à la rue elle et son enfant de cinq ans. Helen ne baissera jamais les bras, parviendra à s’en tirer un temps en se livrant à la prostitution, mais devra se résoudre à laisser son mari reprendre leur fils. Film à ellipses, Vénus Blonde suit l’itinéraire du personnage d’Helen, son nouveau succès, sa déchéance, sa nouvelle rédemption. Josef von Sternberg ne lâche jamais Marlene Dietrich, filme son corps quasi-nu dans sa première scène (le Code Hays n’entrera en vigueur que deux ans plus tard), son merveilleux visage, ses traits et expressions, sauf quand le personnage doit se résoudre à l’inévitable. La comédienne est alors filmée de dos, le visage dissimulé par un chapeau. Sans une larme et sans un cri.

Vénus Blonde est un très grand film et probablement un des plus beaux rôles féminins du cinéma des années 1930. Mais aucune actrice n’aurait pu l’interpréter comme Marlene Dietrich, dont la véritable personnalité sert ici de terreau à l’incarnation d’Helen. C’est là toute la magie de l’éternelle Marlene, incarner un nouveau personnage tout en étant elle-même à l’écran. On ne voit « qu’elle » quand elle chante Hot Voodoo, You Little So-and-so et I Couldn’t Be Annoyed vêtue d’un smoking blanc et d’un haut-de-forme, mystérieuse, déterminée, indomptable. Vénus Blonde évite le côté mélo larmoyant grâce à la sublime et intense interprétation de Marlene Dietrich et la mise en scène sans cesse inspirée, exceptionnelle et d’une modernité à couper le souffle.

LE BLU-RAY

Disponible en DVD chez Universal depuis 2005, Vénus Blonde atterrit dans l’escarcelle d’Elephant Films, en combo Blu-ray-DVD qui plus est ! Le film intègre l’impressionnante et sublime collection Cinéma MasterClass de l’éditeur. Le test de l’édition HD a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est fixe et musical.

Dans un premier temps, le journaliste et critique de cinéma Xavier Leherpeur propose un portrait de Marlene Dietrich (12’30). Visiblement fasciné par la comédienne – qui ne le serait pas – l’intéressé évoque les grandes étapes de sa carrière avec ce qu’il faut de propos dithyrambiques. Certes, Xavier Leherpeur est passionné par son sujet, mais il se contente essentiellement de dresser une liste de ses films les plus célèbres, ceux tournés avec Josef von Sternberg (L’Ange bleu en Allemagne, les autres aux Etats-Unis) et les artistes qui se sont inspirés du mythe Dietrich (Lauren Bacall, Rita Hayworth…Madonna), tout en évoquant brièvement le caractère farouche, indépendant et sexuel de la comédienne qui en a fait l’un des premiers modèles du mouvement féministe. Un portrait simple, pour ne pas dire simpliste, anecdotique, même si sympathique.

Xavier Leherpeur est de retour pour présenter Vénus Blonde (12’). La plupart du temps, le journaliste se contente de paraphraser les quelques grandes séquences du film, y compris la fin. Même si l’éditeur indique que ce module contient quelques spoilers, dont le dénouement de l’intrigue, nous vous conseillons évidemment de visionner cette « introduction » après le film. Xavier Leherpeur remet Vénus Blonde dans son contexte, ainsi que dans la carrière de Marlene Dietrich et de Josef von Sternberg. Il évoque également les thèmes, la mise en scène, la photographie, l’échec commercial du film et tente de comprendre ce qui a pu décontenancer les spectateurs américains à sa sortie, tout en abordant la psychologie du personnage principal.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et une galerie de photos.

L’Image et le son

Vénus Blonde fait peau neuve en Haute-Définition chez Elephant Films, dans un magnifique Blu-ray au format 1080p. Si le générique reste très légèrement marqué par des rayures verticales, le N&B s’impose immédiatement avec une clarté étonnante, des contrastes denses, une large palette de gris, un grain cinéma excellemment géré. L’image est d’une stabilité à toute épreuve, hormis d’inévitables décrochages sur les nombreux fondus enchaînés et divers stockshots visibles avec un aspect plus grumeleux. Toujours est-il que Vénus Blonde, présenté ici dans son format respecté 1.33, ne fait vraiment pas ses 85 ans ! Ce master offre de formidables conditions pour (re)découvrir le film de Josef von Sternberg. On ne saurait faire mieux.

Seule la version originale est disponible en DTS-HD Dual Mono Mono 2.0. Les dialogues, tout comme la musique et les chansons, demeurent propres et distincts. Certains échanges sont peut-être plus étouffés que d’autres, un petit souffle est parfois audible, mais rien d’important. Le confort acoustique reste très appréciable.

Crédits images : © Elephant Films / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Doomwatch, réalisé par Peter Sasdy

DOOMWATCH réalisé par Peter Sasdy, disponible en DVD le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Ian Bannen, Judy Geeson, John Paul, Simon Oates, Jean Trend, Joby Blanshard, George Sanders

Scénario : Clive Exton d’après la série « Doomwatch »

Photographie : Kenneth Talbot

Musique : John Scott

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Doomwatch, un laboratoire scientifique anglais repère des anomalies biologiques sur la côte ouest du pays. le laboratoire décide alors d’envoyer Del Shaw sur l’île de Balfe, afin que celui-ci enquête. Le scientifique récolte des algues qu’il envoie à Doomwatch. Après les avoir analysées le laboratoire conclue qu’il s’agit d’une contamination chimique. Mais bientôt Del découvre le corps d’un enfant mort enterré dans la forêt.

D’origine hongroise, Peter Sasdy (né en 1935) est un des réalisateurs emblématiques de la célèbre Hammer Film Productions. On lui doit notamment Une messe pour Dracula (1970), Comtesse Dracula (1971), trois épisodes cultes de la série La Maison de tous les cauchemars (1980) et La Fille de Jack l’Eventreur (1971). Spécialisé dans le film d’horreur, il signe Doomwatch en 1972, qui s’inspire de la série télévisée éponyme de la BBC, 38 épisodes tournés entre 1970 et 1972. Dans cette adaptation cinématographique, trois des comédiens de la série font une apparition, John Paul, Simon Oates et Joby Blanshard. Les médecins interprétés par les deux premiers et la spécialiste en informatique incarnée par la troisième laissent la place à un acteur plus chevronné, l’écossais Ian Bannen, vu dans La colline des hommes perdus et The Offence de Sidney Lumet, Le Vol du Phénix et Trop tard pour les héros de Robert Aldrich. Doomwatch s’inscrit dans le genre science-fiction et d’horreur, mais « réaliste ».

Ian Bannen est le docteur Del Shaw est chargé par l’organisation Doomwatch d’analyser les effets d’une marée noire survenue un an auparavant sur la côte de la petite île de Balfe dans les Cornouailles. Alors qu’il commence ses relevés océanographes, il y découvre une population isolée et hostile, qui voit d’un mauvais œil l’arrivée de ce nouveau venu et semble dissimuler un secret. Étonné par leurs comportements, puis par une macabre révélation, Shaw commence à enquêter sur les autochtones, assisté par la jeune institutrice du village, Victoria Brown (Juddy Geeson). Il semble que les villageois soient frappés les uns après les autres d’une maladie mystérieuse, qui déforme leur apparence physique, tout en les rendant extrêmement agressifs. Shaw réalise que les déchets chimiques rejetés dans la mer par un laboratoire travaillant sur de dangereuses expériences, seraient à l’origine de cette étrange malédiction. Mais il se heurte à l’obstination de la population, qui refuse de quitter ses terres, et à l’hypocrisie du laboratoire en question.

Doomwatch démontre l’habileté du réalisateur à rendre inquiétant l’ordinaire, grâce à son sens du cadre et en créant une atmosphère trouble avec des décors en apparence banale. Peter Sasdy bénéficie du travail du chef opérateur Kenneth Talbot, un de ses fidèles collaborateurs, également connu pour avoir éclairé Charley-le-borgne et Solo pour une blonde. Le spectateur plonge dans le brouillard aux côtés du Dr Del Shaw, dans une enquête anxiogène durant laquelle les menaces se multiplient autour du personnage principal. Si Peter Sasdy repousse la révélation jusqu’au dernier acte, le suspense est maintenu, les protagonistes inquiétants et les rebondissements bien menés. Seul faux pas de ce scénario, rendre finalement peu inquiétant, pour ne pas dire inoffensif, le fait que l’armée déverse dans la mer des dizaines de fûts de produits chimiques, puisque les autres, ceux contenant les fameuses hormones de croissance sont les seuls responsables de la mutation de la faune et des habitants !

Doomwatch s’ouvre comme un film de la Hammer, le corps d’une petite fille est transporté dans les bois pour y être enterré en cachette, et se clôt comme une enquête d’Hercule Poirot, pour laquelle Agatha Christie aurait conviée Stephen King à sa table. Autant dire que cette petite série B britannique originale vaut bien d’être découverte en France où elle n’a jamais connu d’exploitation.

LE DVD

Le DVD de Doomwatch, disponible chez Movinside, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. La jaquette est très élégante et attractive. Cette collection « Trésors du fantastique », est dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

Si vous êtes fidèles au rendez-vous, vous savez que chaque titre de cette collection est présenté par l’excellent Marc Toullec. C’est évidemment encore le cas pour Doomwatch (13’). Durant cette intervention dynamique et riche en anecdotes de production, Marc Toullec évoque la série originale, inédite en France et passe en revue le casting, les thèmes du film et le célèbre producteur Tony Tenser, jusqu’alors spécialisé dans le cinéma coquin, qui avait décidé d’ajouter une corde à son arc au milieu des années 1960 en finançant des films d’horreur à petit budget. Parmi ceux-ci, Repulsion réalisé par un certain Roman Polanski…

L’Image et le son

Nous ne sommes pas déçus ! C’est avec un plaisir immense que nous découvrons ce film de Peter Sasby dans de pareilles conditions ! D’emblée, la colorimétrie s’impose, le relief est très appréciable et le piqué est souvent tranchant. Le chef-opérateur Kenneth Talbot voit sa photo ouatée merveilleusement restituée et offre un lot de détails conséquents. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise, les contrastes probants, la copie stable, le grain bien géré et les noirs denses. N’oublions pas non plus la vertueuse restauration et la propreté de la copie, débarrassée de toutes les scories possibles et imaginables.

Comme Doomwatch n’a pas connu de sortie dans les salles françaises, le film est uniquement disponible en version originale aux sous-titres français non imposés. Le mixage anglais Dolby Digital 2.0 Mono instaure un confort acoustique total. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches, sans aucun souffle.

Crédits images : © Tigon British Film Productions. All Rights Reserved / Movinside / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’Empereur du Nord, réalisé par Robert Aldrich

L’EMPEREUR DU NORD (Emperor of the North) réalisé par Robert Aldrich, disponible Combo Blu-ray + DVD le 7 juin 2017 chez Wild Side Video

Acteurs : Lee Marvin, Ernest Borgnine, Keith Carradine, Charles Tyner, Malcolm Atterbury, Simon Oakland

Scénario : Christopher Knopf

Photographie : Joseph F. Biroc

Musique : Frank De Vol

Durée : 2h01

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

Etats-Unis, années 30. La Grande Dépression plonge des millions d’Américains dans la misère. Des vagabonds arpentent le pays à la recherche d’un emploi ou d’une simple soupe. Certains tentent de voyager clandestinement à bord des trains de marchandises. Le plus convoité est celui de la ligne 19. Mais la splendide locomotive est gardée par Shack, une brute sanguinaire et sadique, qui n’hésite pas à s’attaquer sauvagement à tous les « trimardeurs » qui osent monter sur sa machine. Seul un vagabond légendaire, appelé « Numéro 1 », ose défier le chef de train. L’affrontement devient inévitable…

Quand il réalise L’Empereur du Nord en 1973, le cinéaste Robert Aldrich a déjà les 3/4 de sa carrière derrière lui. L’auteur de Bronco Apache, Vera Cruz, En quatrième vitesse, Le Grand couteau, Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?, Chut… chut, chère Charlotte, Les Douze Salopards, Plein la gueule et bien d’autres films qui sont autant de grands classiques et chefs d’oeuvre, s’empare d’un scénario de Christopher Knopf. Inspiré des aventures de Leon Ray Livingston, le film est aussi et surtout une libre adaptation de La Route : Les Vagabonds du rail de Jack London (1907), ouvrage dans lequel l’écrivain relatait son errance aux côtés de vagabonds qui « brûlaient le dur », en d’autres termes qui voyageaient comme passagers clandestins sur le toit des trains. Si L’Empereur du Nord ne possède pas – à tort – le même statut que ses autres films, Robert Aldrich y fait pourtant preuve d’une indéniable virtuosité, sa direction d’acteurs est toujours extraordinaire et ce qui a souvent frappé dans son cinéma, sa spontanéité, son énergie et son élégance, se retrouve dans ce film méconnu.

Ses deux têtes d’affiche, Lee Marvin et Ernest Borgnine, rivalisent de charisme et de talent, tout en prenant un malin et contagieux plaisir à jouer au chat et à la souris, jusqu’à l’affrontement brutal, par coups de marteau, de chaînes et de poutres interposés. Si le premier n’a qu’à se placer devant la caméra pour s’imposer immédiatement avec ses yeux de félins, sa voix caverneuse et son visage buriné, véritable étendard d’une communauté et symbole du défi à l’autorité, le second se taille part du lion dans le rôle du sadique Shack, qui n’hésite pas à assommer les vagabonds d’un coup de marteau, tout en jubilant de les voir se faire écraser sous les roues du train lancé à pleine vitesse. Leur affrontement durant deux heures font tout le sel de ce film, qui n’a connu aucun succès dans les salles, mais qui est ensuite devenu culte. C’est la quatrième fois que les deux comédiens sont réunis à l’écran après Un homme est passé de John Sturges (1955), Les Inconnus dans la ville de Richard Fleischer (1955) et bien sûr Les Douze Salopards de Robert Aldrich (1966).

Quasi-inclassable, résolument moderne, oscillant entre plusieurs genres, L’Empereur du Nord se démarque par un soin particulier à reconstituer l’Amérique du début des années 1930. Comme l’indique un panneau en introduction, durant le pic de la Grande Dépression, les vagabonds parcourent le territoire en train, désespérément en quête d’un travail. Rejetés par la société, ils deviennent une espèce à part. Des nomades qui méprisent la loi et imposent la leur. « L’Homme du rail » se consacre à leur extermination. Il se dresse entre eux et leur seul moyen de survivre, le train. Puis ouverture à l’iris, comme si Robert Aldrich débutait un conte. S’ensuit une chanson légère, racontant le lien entre l’homme et le train, quand le récit est soudain parasité par le personnage de Shack qui se débarrasse sauvagement d’un vagabond ayant pris le train en marche. Puis la musique guillerette de reprendre.

Aldrich n’aura de cesse de casser le rythme de son film, en alternant des séquences douces-amères au temps quasi-suspendu, des scènes de violences sèches ou tout simplement éthérées comme cette longue séquence plongée dans le brouillard. Les dialogues sont très soignés, les personnages animés par une violence primaire, la mise en scène enlevée, le rythme soutenu, l’humour noir efficace, les acteurs parfaits jusqu’aux seconds rôles – excellent Keith Carradine, qui souhaite devenir calife à la place du calife – aux gueules patibulaires. L’Empereur du Nord s’inscrit parmi les grandes réussites du mythique réalisateur et demeure un immense plaisir de cinéphile, spectaculaire, singulier, provocateur, magistralement mis en scène (le train devient un véritable personnage à part entière), mis en musique par Frank De Vol et interprété par des comédiens, des monstres sacrés d’une classe folle avec les paysages de l’Oregon comme toile de fond. Un pur spectacle à redécouvrir.

LE BLU-RAY

Le test a été réalisé sur un check-disc. Cette édition de L’Empereur du Nord se compose du Blu-ray et du DVD du film, ainsi que d’un livret exclusif de 86 pages, spécialement écrit par Doug Headline (co-fondateur de la revue Starfix), illustré de photos d’archives rares. Le menu principal est animé et musical.

Le seul supplément disponible dans la section Interactivité est un entretien avec le scénariste Christopher Knopf réalisé en 2015 (19’). Né en 1927, notre interlocuteur parle tout d’abord de ses débuts dans le milieu du cinéma et ses premiers scénarios adaptés, Le Voleur du Roi (1955) et surtout À des millions de kilomètres de la terre de Nathan Juran (1957), pour lequel il se souvient surtout du travail et de son amitié avec Ray Harryhausen. Pour la télévision, Christopher Knopf signe ensuite des épisodes pour les séries western The Restless Gun et Au nom de la loi sur laquelle il rencontre Steve McQueen. Le scénariste déclare avoir traversé les années 1960 pour le compte de la petite lucarne, jusqu’à ce que le réalisateur Robert Aldrich- après les désistements de Martin Ritt et de Sam Peckinpah – jette son dévolu sur son histoire de L’Empereur du Nord, inspirée par un des récits de Jack London sur la vie des hobos durant la Grande Dépression.

Dans un second temps, Christopher Knopf aborde la psychologie des personnages de L’Empereur du Nord, les recherches effectuées afin de coller au plus près de la réalité, le travail des comédiens et les différences entre son scénario original et celui finalement tourné par Robert Aldrich. Ce dernier explique Knopf, ne voulait pas de sa présence sur le plateau et lui a demandé de réécrire la fin. La conclusion prévoyait que Shack et A No. 1 tombent tous les deux du train, laissant finalement Cigaret seul à bord, terrifié, prenant ainsi la place tant convoitée de la légende. Sachant que Lee Marvin n’accepterait pas un tel épilogue, le cinéaste a donc demandé au scénariste de le changer. Enfin, Christopher Knopf revient sur l’échec du film, son préféré, malgré les bonnes critiques. Le scénariste se dit heureux que cette œuvre soit enfin reconnue et même devenue culte avec les années. N’oublions pas de mentionner les précieuses images de tournage qui viennent illustrer le documentaire. L’occasion de voir Ernest Borgnine et Lee Marvin en pleine répétition du combat final, sous l’oeil attentif de Robert Aldrich !

L’Image et le son

La qualité de ce nouveau master HD issu de la restauration 4K réalisée par la Fox au format 1.85 respecté est exceptionnelle et le film de Robert Aldrich renaît littéralement devant nos yeux. Les contrastes affichent d’emblée une densité inédite, la copie est d’une propreté immaculée, aucune scorie n’a survécu au lifting numérique, le piqué est fort impressionnant sur les gros plans (la sueur, la rosacée de Lee Marvin) et les détails abondent surtout sur les plans diurnes en extérieur qui sont à couper le souffle. Si l’on excepte deux ou trois plans flous sur la séquence où les personnages sont longtemps plongés dans un brouillard à couper au couteau, ces menus accrocs sont bien trop anecdotiques compte tenu de la clarté éblouissante, des noirs concis, du grain cinéma respecté, de la colorimétrie vive et du relief inattendu. Enfin, l’ensemble est consolidé par une compression AVC de haute tenue. Magnifique Blu-ray.

L’éditeur ne propose pas un remixage inutile, mais encode les pistes originale et française en DTS-HD Master Audio mono 2.0. Passons rapidement sur la version française au doublage old-school très réussi, qui se concentre essentiellement sur le report des voix parfois au détriment de certains effets annexes. Les dialogues sont d’ailleurs trop élevés sur certaines séquences, même à faible volume, mais l’écoute demeure propre et nette. Elle n’est pas en revanche aussi fluide et homogène que la version originale, même si le report des dialogues aurait pu être plus ardent. Dans les deux cas, aucun souffle n’est à déplorer, les séquences de train lancé à fond sur les rails sont merveilleusement restituées, dynamiques et vives, tout comme le score de Frank De Vol, collaborateur fidèle de Robert Aldrich, qui profite d’une excellente exploitation des frontales. Les sous-titres sont imposés sur la version originale.

Crédits images : ©-1973-Twentieth-Century-Fox-Film-Corporation.-Renewed-©-2001-Twentieth-Century-Fox-Film-Corporation.-Tous-droits-réservés / Wild Side Video / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Mes trésors, réalisé par Pascal Bourdiaux

MES TRÉSORS réalisé par Pascal Bourdiaux, disponible en DVD le 24 mai 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Jean Reno, Reem Kherici, Camille Chamoux, Bruno Sanches, Pascal Demolon, Jean Reynès, Natalia Verbeke, Alexis Michalik

Scénario : Juliette Sales, Fabien Suarez, Carole Giacobbi, Michèle Giacobbi

Photographie : Vincent Gallot

Musique : Sinclair

Durée : 1h27

LE FILM

Carole est une informaticienne introvertie qui vit encore chez sa mère.
Caroline est une pickpocket rebelle qui écume les grands hôtels de la côte d’Azur.
Les deux jeunes femmes ne se connaissent pas et n’ont rien en commun. Rien, sinon leur père, envolé avant leur naissance et qu’elles n’ont jamais vu.
Jusqu’au jour où… Patrick ressurgit !
Ce voleur international recherché par toutes les polices a frôlé la mort, et décide de rattraper le temps perdu en réunissant ses deux filles autour d’un but commun : le casse d’un Stradivarius à 15 millions d’euros…
Entre les bourdes, l’amateurisme et les chamailleries de ses deux filles, Patrick comprend vite que ce braquage ne va pas être une promenade de santé…

L’année 2017 n’a pas été simple pour le réalisateur Pascal Bourdiaux ! Deux échecs commerciaux et critiques très importants avec Mes trésors en janvier et Boule & Bill 2 en avril ! Avant de mettre en scène son premier long métrage en 2010, Le Mac, 1,5 millions d’entrées, Pascal Bourdiaux a d’abord fait ses classes sur la shortcom Un gars, une fille en réalisant près de 500 épisodes ! Il était aussi l’un des premiers à offrir à Kev Adams la tête d’affiche d’un film avec Fiston, dans lequel le jeune comédien donnait la réplique à Franck Dubosc. Porté par une critique positive et un bon bouche à oreille, près de deux millions de spectateurs avaient accueilli favorablement cette très bonne comédie. Pour Mes trésors, c’est une autre affaire.

S’il pouvait être judicieux d’associer les deux actrices au tempérament volcanique Reem Kherici (Fatal, Paris à tout prix) et Camille Chamoux (Les Gazelles, Maman a tort) avec le vieux briscard Jean Reno, on déchante rapidement. D’une part parce que ce dernier, qui n’a jamais brillé par son jeu d’acteur, apparaît ici comme dans le dernier Visiteurs, très fatigué, figé, pouvant à peine marcher et essoufflé à la moindre réplique, d’autre part en raison du manque d’alchimie entre les comédiennes. Si Reem Kharici s’avère plutôt bonne (on parle de sa performance hein, même s’il est indéniable que…), Camille Chamoux énerve à maintes reprises et en fait des tonnes dans le rôle de la nana coincée. Ne pouvant s’empêcher de grimacer, sa prestation a rapidement raison de notre patience. De plus, il faut bien l’avouer, le scénario un rien paresseux ne fait rien pour arranger les choses. Autant le dire, rien ne fonctionne dans cette comédie sur fond de casse voulue rocambolesque.

Le scénariste de Stars 80 (bah oui) tente d’insuffler un rythme nécessaire à ce genre de comédie, mais rien n’y fait. A part une introduction chic et sympathique qui faire penser à un Mission : Impossible franchouillard, dans laquelle Jean Reno usurpe l’identité d’un violoniste virtuose grâce à un masque caractéristique de la série américaine pour mieux lui dérober son précieux instrument, Mes trésors se met ensuite en mode pilotage automatique. Les scènes s’enchaînent à la va-comme-je-te-pousse, en cumulant les gags mous, les dialogues au rabais, l’action de pacotille et une mise en scène fonctionnelle sur un score pourtant inspiré de Sinclair. On pense alors au Ca$h d’Eric Besnard, sorti en 2008, dans lequel Jean Dujardin affrontait…Jean Reno. De là à croire que Pascal Bourdiaux ait voulu jouer sur une impression de déjà-vu…

Au milieu de tout ce marasme, Bruno Sanches (le comparse d’Alex Lutz dans Catherine et Liliane) et l’excellent Pascal Demolon parviennent à tirer leur épingle du jeu, le premier dans le rôle de l’amoureux timide, le second, toujours classe, dans celui de l’adversaire de Jean Reno, qui tombe sous le charme du personnage joué par Camille Chamoux. Certes, Mes trésors n’a aucune autre prétention que de divertir les spectateurs, mais le film est si poussif que rien ou presque ne fait rire. Et ce n’est pas de voir Jean Reno se trémousser sur Treasure de Bruno Mars qui arrange les choses.

LE DVD

Le DVD de Mes trésors, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé, sobre et musical. Pour cette sortie dans les bacs, le visuel a été repensé par rapport à l’affiche originale, en jouant notamment sur un côté OSS 117 qui n’a aucune raison d’être, et en y rajoutant Pascal Demolon et Bruno Sanches.

Suite à ses 140.000 spectateurs, l’éditeur a jugé bon de ne pas sortir Mes trésors en Blu-ray. Pour accompagner cette sortie en DVD, M6 Vidéo livre quelques entretiens croisés de Camille Chamoux, Reem Kharici et de Jean Reno (11’). En pleine promo, les trois comédiens expliquent ce qui les a séduit dans le scénario, le travail avec le réalisateur et la bonne ambiance sur le plateau.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Le piqué est aléatoire et la gestion des contrastes parfois légère. Les quelques séquences sombres manquent de définition et les détails font cruellement défaut. Heureusement, ça se rattrape un peu sur les scènes diurnes au relief certain, à la luminosité plaisante. La colorimétrie est à l’avenant et le cadre large retrouve enfin une profondeur de champ inespérée. Notons néanmoins quelques légers fourmillements et des noirs inégaux.

Ne vous attendez pas à un déluge d’effets surround si votre choix s’est portée sur la Dolby Digital 5.1, mais la spatialisation est plus que convenable avec de belles ambiances naturelles et un environnement musical fort plaisant. Mes trésors ne se prêtant évidemment pas aux exubérances sonores, le principal de l’action se trouve canalisé sur les frontales où les dialogues ne manquent pas d’intelligibilité. De son côté, la stéréo s’avère ardente et dynamique. Un parfait confort acoustique. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste en Audiodescription.

Crédits images : © Eric TRAVERS – Radar Films / SND / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et combo DVD/Blu-ray le 6 juin 2017 chez ESC Editions & Sidonis Calysta

Acteurs : A. Michael Baldwin, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Kathy Lester, Terrie Kalbus, Kenneth V. Jones, Susan Harper, Lynn Eastman-Rossi

Scénario : Don Coscarelli

Photographie : Don Coscarelli

Musique : Fred Myrow, Malcolm Seagrave

Durée : 1h29

LE FILM

Le jeune Mike, treize ans, assiste en cachette à l’enterrement d’un ami. Après la cérémonie, il voit un colosse s’emparer du cercueil, qu’il soulève comme une plume. Le soir venu, Mike s’introduit dans le grand bâtiment au centre du cimetière et y découvre des activités déconcertantes. Il fait part de ses soupçons à son grand frère Jody, qui retourne avec lui au mausolée. Les deux frères acquièrent la conviction que des forces inconnues s’emparent des défunts dans un but innommable.

Phantasm est l’oeuvre de toute une vie, celle du scénariste et réalisateur américain Don Coscarelli. Né en 1954 à Tripoli, le cinéaste signe d’abord deux longs métrages en 1976, Jim the World’s Greatest, sur lequel il rencontre le comédien Angus Scrimm, puis Kenny & Company. Passionné par le cinéma d’horreur, Don Coscarelli se lance dans l’écriture d’un film de genre en s’isolant au milieu de nulle part, une situation qui lui permet de coucher ses peurs et ses névroses sur le papier. La suite appartient à la légende. Phantasm est un chef d’oeuvre du film fantastique et d’épouvante de la fin des années 1970, un succès qui engendrera quatre suites (1988, 1994, 1998, 2015), dont trois mises en scène par Don Coscarelli lui-même. S’il est également célèbre pour avoir réalisé Bubba Ho-tep en 2002 avec Bruce Campbell dans le rôle d’Elvis qui combat les momies, le cinéaste – qui compte aujourd’hui dix longs métrages à son actif – demeure avant tout le créateur de cette saga mythique.

Egalement producteur, monteur et directeur de la photographie, Don Coscarelli crée un monde foisonnant et virtuose, peuplé de nains dissimulés sous des capuches, un boogeyman gigantesque au teint blafard et à la force herculéenne, un monde parallèle au ciel embrasé, du sang jaune, des doigts coupés qui s’agitent seuls, des mouches géantes, une sphère métallique volante qui se plante dans la tête de la victime et qui la perce à l’aide d’un foret pour y pomper le cerveau. Tout cela pourrait facilement tomber dans l’absurde, mais Don Coscarelli embrasse son sujet avec autant de sérieux que d’humour et parvient à rendre son histoire réaliste et donc emphatique. Plusieurs choses viennent immédiatement en mémoire quand on évoque ce grand classique qu’est Phantasm, mais parmi ce kaléidoscope d’images inoubliables, c’est bel et bien la figure du Tall Man qui vient à l’esprit. Incarné par Lawrence Rory Guy, plus connu sous le nom d’Angus Scrimm (1926-2016), ce croquemitaine ou ce croque-mort plutôt, s’inscrit parmi les personnages les plus emblématiques et énigmatiques du genre aux côtés de Michael Myers, Freddy Krueger, Leatherface et Pinhead. Sa démarche, ses regards, son costume et sa voix (« Booooooy ? ») ont fait de lui une icône de l’épouvante.

Parallèlement à ce boogeyman, Phantasm s’avère un vrai film dramatique qui parle du deuil impossible d’un jeune adolescent pour ses parents et pour son frère aîné. Près de 40 ans après le film nous pouvons nous permettre de dévoiler que le film se révèle être une plongée dans l’imaginaire (quoique…) de Mike. A l’instar du merveilleux film de J.A. Bayona sorti début 2017, Quelques minutes après minuit, Phantasm s’attache à un jeune homme plongé malgré lui dans un monde cauchemardesque pour pouvoir, sans doute, affronter la réalité. Comme dans le Bayona dans lequel un jeune garçon avait recours malgré lui au pouvoir de l’imaginaire pour pouvoir admettre la mort prochaine de sa mère et à préparer son deuil, celui de Phantasm erre dans un cauchemar dans lequel il affronte un croquemitaine aux côtés de son frère aîné Mike. L’épilogue joue alors la carte de la frontière fragile entre le rêve et la réalité, quand les deux mondes rentrent en collision au point de se fondre l’un dans l’autre. La fin reste ouverte et de nombreuses questions en suspens. Si Don Coscarelli n’avait peut-être pas l’intention d’y répondre, du moins immédiatement puisque le second opus ne sera réalisé que dix ans après, on plonge à fond dans cet univers riche et singulier, unique, qui n’a de cesse de surprendre, animé par une passion contagieuse pour le genre, qui enchaîne les scènes anthologiques comme des perles sur un collier en se permettant même quelques soupapes d’humour noir, sans omettre l’émotion.

On ne peut s’empêcher de penser à certaines œuvres de Stephen King, à tel point que si Phantasm avait été une adaptation d’un livre de l’auteur de Carrie, le film se classerait parmi les meilleures transpositions d’une de ses œuvres au cinéma. En s’inscrivant pleinement dans le surréalisme et parfois le macabre diurne (ce qui est assez rare), Phantasm n’est pas sans rappeler Un chien andalou de Luis Buñuel, non seulement en raison de son atmosphère onirique, mais également par son montage de scènes étranges qui fait penser à un puzzle pour lequel chacune des pièces serait caractérisée par un mauvais rêve. Un jeu éclaté et pourtant conduit de main de maître du début à la fin, tandis que l’envoûtante musique de Fred Myrow et Malcolm Seagrave berce les spectateurs comme une comptine entêtante.

A sa sortie, Phantasm est un succès critique et commercial. Le film rapporte près de 12 millions de dollars au box-office nord-américain et attire plus de 500.000 spectateurs en France où il obtient également le prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d’Avoriaz. Le budget de 300.000 dollars est donc largement rentabilisé. Toutefois, Don Coscarelli ne reviendra à Phantasm qu’en 1988, réalisant entre-temps un film d’heroic fantasy, Dar l’invincibleThe Beastmaster.

LE BLU-RAY

C’est un grand jour pour les cinéphiles ! ESC Editions et Sidonis Calysta s’associent pour nous offrir le tant attendu Phantasm en Haute-Définition ! Le film est disponible en DVD, mais aussi en combo Blu-ray/DVD (édition limitée), disposés dans un boîtier métal avec effet arrondi en 3D. Le menu principal est élégant, animé sur des images du film et son célèbre thème principal.

Le premier supplément disponible sur cette édition est une interview croisée (21’) de Guy Astic (Directeur des éditions Rouge Profond, corédacteur en chef de la revue de cinéma Simulacres, parue de novembre 1999 à mai 2003) et de Julien Maury (scénariste et réalisateur, A l’intérieur). Cette présentation souvent passionnante de Phantasm vaut essentiellement pour l’intervention de Guy Astic, qui convoque à la fois le fond et la forme du film de Don Coscarelli, tandis que Julien Maury, qui introduit et clôt ce module, partage surtout ses souvenirs liés à la découverte de ce grand classique quand il était adolescent. Guy Astic revient sur les débuts de Don Coscarelli, sur les partis pris, les intentions du réalisateur, sa façon d’aborder le fantastique, les thèmes (Astic rapproche également Phantasm de Quelques minutes après minuit de J.A. Bayona), la figure du Tall Man, les effets visuels, la séquence de la sphère métallique. Si les propos de Julien Maury s’avèrent donc plutôt anecdotiques bien que passionnés, ceux de Guy Astic méritent l’attention des cinéphiles et des passionnés du genre.

Le supplément suivant est un document d’archives, avec son image vidéo typique de l’époque. Invités sur le plateau d’une émission réalisée pour une chaîne de télévision en Floride, le réalisateur, scénariste, monteur et producteur Don Coscarelli et le comédien Angus Scrimm répondent aux questions de l’animateur George Capwell (28’). Alors que Phantasm vient tout juste de sortir dans les salles, les deux intervenants réalisent la promotion du film. Le réalisateur aborde la genèse du projet, les conditions de production et de tournage (Coscarelli a été obligé d’emprunter de l’argent à son père), son amour pour les films d’horreur, comment le film a ensuite été acheté, les origines du titre. De son côté, en mode Tall Man, Angus Scrimm raconte l’histoire à sa manière, ses débuts au théâtre et au cinéma, mais aussi comment il a créé son personnage grâce à son costume (plus large que sa morphologie), des chaussures compensées, le maquillage et sa voix.

Angus Scrimm est de retour dans le bonus suivant dans lequel le comédien intervient à la convention Fangoria en 1989, un an après la sortie de Phantasm 2 (10’). A la manière de Gollum qui discute avec Sméagol, Angus Scrimm laisse parfois le Tall Man prendre le dessus, quand il ne dialogue tout simplement pas avec lui-même, pour le plus grand plaisir des spectateurs hilares. Entre deux délires très réussis, Angus Scrimm s’exprime sur ce rôle, celui de sa vie et s’amuse du peu de dialogues qu’il possède dans les deux films. Par ailleurs, il reprend chaque réplique déclamée sur le ton de son personnage, cinq pour Phantasm et dix pour sa suite. Booooooooy ????!!!!

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale et une galerie de photos.

Dommage de ne pas retrouver les commentaires audio du réalisateur accompagné de ses acteurs d’un côté et des producteurs de l’autre, les scènes coupées et le module sur les effets spéciaux pourtant présents sur l’édition américaine. Mais ce serait faire la fine bouche, car notre édition est vraiment formidable.

Egalement au programme mais non reçu pour ce test, vous trouverez un livret de Marc Toullec intitulé « Au coeur du Phantasm », réalisé à l’occasion de cette édition.

L’Image et le son

ESC Editions / Sidonis Calysta nous livre la tant attendue nouvelle copie tirée d’un master restauré en 4K par Bad Robot, la société de production de J.J. Abrams. Alors, si les puristes risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain original, force est de constater que Phantasm renaît bel et bien de ses cendres ! Totalement invisible en France depuis une vingtaine d’années, le film de Don Coscarelli bénéficie enfin d’une édition digne de ce nom. La propreté du master est ébouriffante. Toutes les scories, poussières, griffures ont été purement et simplement éradiquées grâce au scalpel numérique. Ce Blu-ray au format 1080p (AVC) s’avère tout autant saisissant dans son rendu des scènes diurnes que pour les séquences sombres, l’image est souvent éclatante avec un piqué inédit, une profondeur de champ impressionnante et un relief des textures que nous n’attendions pas. Les couleurs retrouvent une deuxième jeunesse, à tel point que l’on pourrait même distinguer le maquillage outrancier du Tall Man. Hormis le manque de patine argentique sur certains plans qui pourrait parfois donner un côté artificiel à l’entreprise (même si on a déjà vu bien pire dans le genre), l’élévation HD pour Phantasm est indispensable et le lifting de premier ordre.

La version originale bénéficie d’un remixage DTS-HD Master Audio 5.1. Au premier abord on pouvait craindre le pire. Il n’en est rien, bien au contraire. Cette option acoustique séduisante permet à la composition enivrante de Fred Myrow et Malcolm Seagrave d’environner le spectateur pour mieux le plonger dans l’atmosphère du film. Les effets latéraux ajoutés ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono DTS-HD Master Audio. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement grinçants. Les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale. Aucun souffle constaté.

Crédits images : © ESC Editions / Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr