Test Blu-ray / A la recherche du plaisir, réalisé par Silvio Amadio

A LA RECHERCHE DU PLAISIR (Alla ricerca del piacere) réalisé par Silvio Amadio, disponible en Édition Collector limité (1000ex) Blu-ray + DVD + CD le 15 juin 2017 chez Le Chat qui fume

Acteurs : Barbara Bouchet, Farley Granger, Rosalba Neri, Nino Segurini, Dino Mele, Umberto Raho, Patrizia Viotti

Scénario : Silvio Amadio

Photographie : Aldo Giordani

Musique : Teo Usuelli

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Greta Franklin s’établit sur une île près de Venise et entre en contact avec Richard Stuart, qui vit dans une magnifique maison en compagnie de son épouse Elonora. Elle est engagée comme nouvelle secrétaire par Richard, la précédente ayant disparu dans d’étranges circonstances. Richard et Eleonora ignorent que Greta a une bonne raison d’accepter ce job : elle connaissait personnellement Sally…

L’oeuvre éclectique du réalisateur italien Silvio Amadio (1926-1995) n’est pas restée dans la mémoire des cinéphiles. Il faut dire que ses derniers films aux titres fleuris et explicites comme Comment faire cocu les maris jaloux, Les Polissonnes excitées, Si douce, si perverse ou bien encore La Lycéenne a grandi ont souvent éclipsé d’autres opus nettement plus intéressants. C’est le cas d’A la recherche du plaisir Alla ricerca del piacere (1972), également connu sous le titre américain Amuck ! ou bien encore Maniac Mansion, superbe variation du giallo, qui s’avère avant tout un drame-thriller psychologique et érotique brillant et passionnant. La sublime Barbara Bouchet, au sommet de sa carrière (la même année que La Longue nuit de l’exorcisme de Lucio Fulci) et de sa beauté, qui enchaînait alors les tournages en Italie depuis la fin des années 1960, porte le film sur ses belles épaules – et quelle chute de reins mamma mia ! – et inspire Silvio Amadio.

Greta Franklin (Barbara Bouchet) part en Italie suite à son embauche comme secrétaire auprès de l’écrivain notoire Richard Stuart (Farley Granger), qui possède un vaste domaine isolé sur une île aux alentours de Venise. Mais son but premier est de retrouver Sally, son amie, son amante, disparue alors qu’elle occupait le même poste. Eleonora (Rosalba Neri), la femme de Stuart, bisexuelle, lui fait bientôt des avances, puis la drogue pour assouvir ses désirs. Lors d’une soirée décadente, Stuart diffuse un petit film amateur dans lequel Greta reconnaît Sally. Décidée à enquêter sur ce couple sulfureux, elle ne s’aperçoit pas qu’elle tombe dans le piège qu’il lui tend. Un piège dangereux, peut-être même mortel.

A la recherche du plaisir n’est pas un énième film de genre, bâclé et réalisé à la va-vite. Certes, nous sommes en plein cinéma d’exploitation, mais Silvio Amadio soigne chaque plan, instaure une atmosphère trouble et troublante du début à la fin, pour ne pas dire jusqu’à la toute dernière seconde. Dès le générique, le cinéaste transporte le spectateur à Venise, avec Barbara Bouchet qui découvre la ville. Puis, le personnage s’en éloigne pour finalement débarquer sur une petite île près de la Sérénissime, dans une grande demeure. En quelques minutes, le réalisateur a donc dressé le tableau et isole cette jeune secrétaire. A la recherche du plaisir s’avère un véritable jeu de pistes, reposant sur la mise en scène (toute l’investigation de Greta est vraiment une référence), l’étrangeté et la beauté des décors, sans oublier la peur distillée par celles et ceux qui gravitent autour de Greta.

Découvert chez Alfred Hitchcock dans La Corde (1948) et L’Inconnu du Nord-Express (1951), premier rôle chez Luchino Visconti dans Senso en 1954, Farley Granger sort de quinze ans d’apparitions à la télévision, avant d’être à nouveau appelé par le cinéma italien au début des années 1970. Il apporte à Amuck ! son charme venimeux, suintant et semble se délecter de ce personnage ambigu et machiavélique. N’oublions pas la sensuelle Rosalba Neri (La Polak dans la saga Angélique, Lady Frankenstein, cette obsédée sexuelle, Les Vierges de la pleine Lune) et son regard troublant, peu avare de ses charmes, dont la scène saphique avec Barbara Bouchet, tournée au ralenti sur une musique envoûtante de Teo Usuelli (Le Lit conjugal, Dilinger est mort) reste probablement la plus célèbre du film.

A la recherche du plaisir combine de façon assez virtuose le film d’enquête et l’histoire d’amour, en jouant avec les codes du giallo sans pour autant entrer dans cette catégorie puisqu’il n’y a ici aucun tueur ganté, ni crime à l’arme blanche réalisé en caméra subjective, juste une brute épaisse au cerveau en compote qui utilise ses mains pendant une partie de jambes en l’air qui tourne mal. Ce qui n’empêche pas A la recherche du plaisir d’être une immense réussite, anxiogène, culte auprès des amateurs, aussi rare que précieux, d’autant plus que le film n’est jamais sorti en France.

LE BLU-RAY

Que dire si ce n’est que Le Chat qui fume nous offre une nouvelle fois un magnifique objet qui devrait intégrer la DVD-Bluraythèque de tout cinéphile qui se respecte ! Le combo Digipack à trois volets de ce nouveau titre « Exploitation italienne », renferme à la fois le DVD du film, le Blu-ray et également le CD de la bande originale de Teo Usuelli, que l’auteur de ces mots écoute d’ailleurs en fond pendant qu’il écrit cette chronique. Sur le verso des volets, nous trouvons l’affiche américaine du film (Amuck !), ainsi que deux visuels provenant de l’exploitation italienne. L’ensemble se glisse dans un fourreau cartonné du plus bel effet, au visuel superbe, jaune « giallo » et attractif. Cette édition collector est limitée à 1000 exemplaires. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Après avoir écouté ces 52 minutes de musique enivrante, regardons ce que le Chat nous propose en guise de suppléments.

On commence par l’excellente interview de la comédienne Rosalba Neri (16’). Visiblement heureuse et émue de partager ses souvenirs liés à A la recherche du plaisir, l’actrice évoque le tournage à Venise et dans ses environs, y compris dans la villa de la styliste Roberta di Camerino. Rosalba Neri en vient ensuite à sa collaboration avec le réalisateur Silvio Amadio, « un homme et cinéaste très dur, qui inspirait la crainte », parle de son personnage et de ses partenaires, sans oublier les conditions des prises de vues de la célèbre séquence saphique avec Barbara Bouchet.

Cette dernière prend ensuite la parole dans un entretien (19′) plus détaché que celui de Rosalba Neri, comme si la comédienne gardait un souvenir amer de « jouer à peu près toujours le même personnage » et qu’elle voulait être mieux considérée que pour sa participation aux films d’exploitation. En italien, la comédienne indique que l’année 1972 fut pourtant la plus intense de sa carrière – « Souvent, je ne savais même pas dans quel film j’étais en train de jouer ! » – avec plus de 8 films tournés quasi-simultanément. Barbara Bouchet ne parvient pas à réaliser que « ce genre de film » ait pu traverser les décennies et déclare que c’est à Quentin Tarantino – qui avait voulu la rencontrer lors de sa venue au Festival de Venise – que l’on doit entre autres ce regain de popularité. Contrairement à sa partenaire, l’actrice décrit Silvio Amadio comme un homme assez calme et doux, qui ne s’agitait jamais, toujours très gentil et aimable, dont elle garde un très bon souvenir. Barbara Bouchet parle ensuite du travail du réalisateur, du tournage à Venise et des scènes érotiques, de ses partenaires.

Nous passons à l’entretien avec Stefano Amadio (22’), fils du réalisateur Silvio Amadio, qui propose un portrait de son père et un panorama de sa carrière. Son enfance, ses débuts dans le cinéma grâce à son beau-frère Massimo Girotti et à Luchino Visconti, ses premières mises en scène, ses succès et les genres abordés (péplum, western, policier, comédie) sont évoqués. Puis Stefano Amadio aborde A la recherche du plaisir à travers des anecdotes amusantes (celle sur Barbara Bouchet nue sur le plateau, devant le regard médusé des techniciens) et souvenirs divers. Quand on lui demande quelle empreinte  a laissé son père dans le cinéma italien, Stefano Amadio répond « une petite empreinte, mais son sérieux et son professionnalisme demeurent auprès de ceux qui ont travaillé avec lui ».

Le supplément qui suit donne la parole à l’excellent Philippe Chouvel, journaliste chez Psychovision, qui propose une présentation d’A la recherche du plaisir (« pas un des meilleurs gialli, mais un thriller de bonne facture qui possède de nombreuses qualités »), tout en revenant sur l’ensemble de la carrière de Silvio Amadio (24’). Ce bonus complète parfaitement ce qui a déjà été entendu précédemment et propose de nombreux éléments pertinents, d’autant plus que l’énumération des films du cinéaste (dont les quatre comédies grivoises avec Gloria Guida) donne sérieusement envie de redécouvrir cette oeuvre. Philippe Chouvel s’extasie – on le comprend – sur la scène saphique entre Barbara Bouchet et Rosalba Neri et se dit ravi que le film soit enfin disponible dans les meilleures conditions possibles.

Le dernier bonus de cette section est désormais le rendez-vous incontournable où l’éditeur demande à un invité de donner ses trois gialli préférés. C’est au tour du directeur de la Cinémathèque Jean-François Rauger de s’y coller (12’), d’expliquer sa vision du giallo et de parler de l’évolution du genre. L’intéressé donne plus que trois titres, à savoir Les Frissons de l’angoisseProfondo Rosso de Dario Argento (dont il défend la version courte), Six femmes pour l’assassinSei donne per l’assassino, Cinq filles dans une nuit chaude d’été5 bambole per la luna d’agosto et La Baie sanglanteReazione a catena de Mario Bava, L’Emmurée vivanteSette note in nero de Lucio Fulci, Les Rendez-vous de SatanPerché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ? de Giuliano Carnimeo.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces de films disponibles ou prochainement prévus chez Le Chat qui fume. Par ailleurs, le trailer d’A la recherche du plaisir vaut le coup d’oeil pour son (faux ?) micro-trottoir de spectateurs (« Ceux qui ont fait ce film devraient être arrêtés ! », « Je n’ai jamais vu autant de sexe et de nudité dans un film ! ») réalisé après une projection du film de Silvio Amadio. Certains jubilent, d’autres sont choqués. La bande-annonce insiste bien sur le caractère sexuel du film pour appâter, tandis qu’une voix annonce que des coupes ont dû être faites (malgré un aperçu de la scène saphique), mais que le film sera bien présenté dans sa version intégrale dans les salles. « Un film si réaliste et troublant, que vous aurez envie de quitter la salle, mais vous n’en serez pas capable ! ».

L’Image et le son

L’élévation HD (1080p) magnifie les partis pris esthétiques de la photographie signée Aldo Giordani, chef opérateur culte à qui l’on doit les images de On l’appelle Trinita et de sa suite, ou bien encore Dommage que tu sois une canaille et Moi, moi, moi et les autres d’Alessandro Blasetti. La photo éthérée d’A la recherche du plaisir baigne dans des teintes brunes du plus bel effet. Le piqué dépend des volontés artistiques originales et s’avère plus incisif sur toutes les lumineuses séquences tournées en extérieur. La copie est très propre, la restauration est superbe, aucune poussière n’est à signaler, les contrastes sont concis, les noirs souvent denses, les couleurs éclatantes. La gestion du grain original est équilibrée mais tend à être plus appuyé sur les scènes sombres et nocturnes. Mais le codec AVC consolide l’ensemble avec brio, les arrière-plans sont stables, la profondeur de champ est indéniable et les détails d’une richesse incontestée sur le magnifique cadre large. Un très beau Blu-ray qui permet de (re)découvrir totalement le film, présenté en version intégrale, de Silvio Amadio !

Comme pour l’image, le son a également été restauré. Résultat : aucun souci acoustique constaté sur ce mixage italien DTS-HD Master Audio Mono, pas même un souffle parasite. Le confort phonique de cette piste unique est total, les dialogues sont clairs et nets, même si les voix des comédiens, enregistrées en postsynchronisation, peuvent parfois saturer ou apparaître en très léger décalage avec le mouvement des lèvres. La composition de Teo Usuelli est excellemment délivrée. Notons que les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Tuez Charley Varrick !, réalisé par Don Siegel

TUEZ CHARLEY VARRICK ! (Charley Varrick) réalisé par Don Siegel, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 28 juin 2017 chez Wild Sild Vidéo.

Acteurs : Walter Matthau, Joe Don Baker, Felicia Farr, Andrew Robinson, Sheree North, Norman Fell, Jacqueline Scott

Scénario : Howard Rodman, Dean Riesner d’après le roman de John Reese, Les Pillards (The Looters)

Photographie : Michael C. Butler

Musique : Lalo Schifrin

Durée : 1h50

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

Au Nouveau Mexique. Charley Varrick, sa femme et deux complices braquent une petite banque locale. Le hold-up tourne mal et des coups de feu sont échangés entre les bandits et la police. Réalisant qu’ils ont dérobé une somme colossale, disproportionnée par rapport à la modestie de l’établissement, Charley Varrick soupçonne aussitôt l’argent d’appartenir à la mafia…

C’est un film qui n’avait pas fait grand bruit à sa sortie en 1973 et qui est aujourd’hui devenu très prisé par les cinéphiles. Tuez Charley Varrick !Charley Varrick en version originale et un temps envisagé sous le titre The Last of the Independents, renvoyant au slogan de l’entreprise du personnage principal (et finalement utilisé comme tagline de l’affiche principale), est réalisé par Don Siegel (1912-1991) après le triomphe international de L’Inspecteur Harry. Polar violent, drôle et émouvant, Tuez Charley Varrick ! offre à Walter Matthau un de ses rôles emblématiques, même si très éloigné des comédies qui ont fait sa renommée aux côtés de son comparse Jack Lemmon. Loin d’être un contre-emploi puisque l’acteur avait déjà participé à quelques drames et films sombres, le personnage de Charley Varrick n’est pas immédiatement attachant, mais la bonhommie naturelle et le visage buriné de Walter Matthau emportent l’adhésion par petites touches.

Antihéros comme les affectionnait Don Siegel, Charley Varrick n’est qu’un bonhomme dans la foule qui a décidé d’en venir au braquage pour s’en sortir. Ancien cascadeur de métier avec sa femme Nadine, devenu un modeste chef d’entreprise d’épandage d’insecticides, il décide d’attaquer une petite banque au Nouveau-Mexique avec l’aide de plusieurs complices, dont Harman, un jeune homme nerveux et porté sur la bouteille. Mais l’opération tourne au désastre : Nadine est tuée, ainsi qu’un autre de la bande. Les rescapés prennent la fuite. A leur grande surprise, Charley et Harman découvrent que le magot empoché va bien au-delà des quelques milliers de dollars envisagés. Le total se porte à 750.000 dollars, en réalité dérobés à la pègre qui utilisait la banque comme tirelire. L’organisation criminelle lance à leurs trousses une impitoyable brute, Molly. Pour sauver sa peau, Varrick se met en tête de restituer l’argent, ce qui ne plaît évidemment pas à Harman.

Tuez Charley Varrick ! est une course contre la montre menée à cent à l’heure, du moins dans sa première partie, véritable leçon de mise en scène, de montage, de cadrage et de rythme. Du générique, superbe, estampillé « A Siegel Film », montrant la petite vie qui s’anime à l’aube, dans une petite bourgade, en passant à l’introduction des personnages, la tension qui monte, le braquage, la poursuite, l’adieu à Nadine, les spectateurs en prennent plein les yeux. Après, Tuez Charley Varrick ! adopte un rythme plus apaisé, malgré une tension maintenue. Sous ses airs patauds, taiseux et détachés, la bouche ruminant sans cesse un chewing-gum, Varrick renferme une volonté de s’en sortir et s’avère même un froid calculateur, n’hésitant pas à se servir de son dernier acolyte comme appât (excellent Andrew Robinson, le mythique Scorpio de L’Inspecteur Harry), afin d’attirer le mercenaire Molly, campé par un Joe Don Baker (Luke la main froide, Demain ne meurt jamais) complètement allumé, vicieux et glaçant, avec sa pipe vissée à la bouche et le stetson sur la tête. Tuez Charley Varrick ! prend ensuite la forme d’une succession de rencontres, donnant au film un aspect documentaire de la vie rurale. Chaque personne vers qui se tourne Charley Varrick, s’avère ambitieuse, attirée par le fric, prête à dénoncer s’il y a quelques dollars à se faire. C’est le cas du vieil armurier handicapé ou encore de la photographe sexy qui fabrique à l’occasion des faux papiers. Pris au dépourvu par le magot emporté, Charley Varrick va être obligé d’improviser. C’est là le génie de Don Siegel d’avoir confié le rôle à Walter Matthau, dont la trogne ne laisse rien passer en apparence, mais dont on ne doute jamais du bouillonnement intérieur.

En fait, Don Siegel parvient à faire perdre ses repères aux spectateurs en adoptant un rythme plus posé, tout en renforçant la menace qui pèse sur Varrick et son complice avec le personnage de Molly qui se rapproche petit à petit de leur caravane, grâce aux appels passés à la mafia par ceux qui ont croisés la route du braqueur. On ne comprend pas ce que Varrick prépare ou même s’il possède une porte de sortie. Il faut pour cela attendre le dernier acte hallucinant de la poursuite entre une voiture et un biplan pulvérisateur dans le décor d’une casse de bagnoles. Don Siegel agrippe alors le spectateur et parvient à renverser la vapeur en découpant son film de façon plus brutale, tandis que la partition de l’immense Lalo Schifrin s’emballe et se décompose même en deux temps. Jusqu’au dénouement complètement inattendu et qui boucle la boucle en se terminant sur la même image qui ouvrait alors le film, tandis que le dernier des indépendants perd définitivement son identité pour pouvoir survivre. Chaque élément du scénario, du plan de Varrick donc, était à sa place.

Rollercoaster cinématographique et Rolls-Royce de la série B, souvent cachée dans l’ombre de L’Inspecteur Harry, Tuez Charley Varrick ! est une œuvre riche, captivante et intelligente, qu’on a beau connaître par coeur, mais qu’on a de cesse de redécouvrir avec toujours autant de plaisir.

LE BLU-RAY

Le test a été réalisé sur un check-disc. Cette édition de Tuez Charley Varrick ! se compose du Blu-ray et du DVD du film, ainsi que d’un livre exclusif de 180 pages, spécialement écrit par Doug Headline (co-fondateur de la revue Starfix), illustré de photos d’archives rares. Le menu principal est animé et musical.

Pour accompagner le film, l’éditeur propose un formidable documentaire rétrospectif intitulé Le Dernier des indépendants (2014, 72’), qui croise les interventions du compositeur Lalo Schifrin, Kristoffer Tabori (fils de Don Siegel), Howard A. Rodman (fils du coscénariste Howard Rodman), des comédiens Andrew Robinson (Harman) et Jacqueline Scott (Nadine), ainsi que du cascadeur Craig R. Baxley. Ces témoignages passionnants permettent d’en savoir évidemment plus sur les conditions de tournage et de production de Tuez Charley Varrick !, mais aussi sur la méthode de Don Siegel. Un portrait franc et nuancé du cinéaste se dessine tout au long de ces 72 minutes, bien illustré par quelques photos de plateau et portraits. Chaque intervenant s’exprime sur leur collaboration avec Don Siegel et Walter Matthau, la mise en scène, les thèmes du film, et bien d’autres éléments qui devraient ravir les cinéphiles.

Que ceux qui possèdent l’ancienne (et très bonne) édition DVD sortie chez Bac Films la conservent, puisque nous ne retrouvons pas l’excellente analyse du film par le regretté Alain Corneau sur ce Blu-ray.

L’Image et le son

Ce nouveau master restauré HD de Tuez Charley Varrick ! brille souvent de mille feux et s’impose comme une grande réussite technique à ajouter au palmarès de l’éditeur. Le cadre offre une profondeur de champ très plaisante, le piqué est acéré, la stabilité jamais démentie, les contrastes soignés. Si les noirs manquent parfois de stabilité et la définition vacille quelque peu sur les séquences sombres, la colorimétrie retrouve un éclat et une chaleur bienvenus sur les scènes diurnes. Les gros plans sont souvent épatants (les traits creusés de Walter Matthau entre autres), les détails abondent et la gestion du grain est épatante. C’est beau, c’est carré, c’est élégant.

Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 2.0 Surround sont propres et distillent parfaitement la musique de Lalo Schifrin. La piste anglaise (avec les sous-titres français imposés) est la plus équilibrée du lot avec une homogénéité entre les dialogues et les bruitages. Au jeu des différences, la version française s’avère plus chuintante et couverte, avec certaines ambiances et d’autres effets annexes qui peinent à se faire entendre quand on compare avec la piste anglaise. Le changement de langue est impossible à la volée et nécessite le retour au menu contextuel.

Crédits images : © Wild Side / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Belle Ensorceleuse, réalisé par René Clair

LA BELLE ENSORCELEUSE (The Flame of New Orleans) réalisé par René Clair, disponible en DVD et combo Blu-ray/DVD le 7 février 2017 chez Elephant Films

Acteurs : Marlene Dietrich, Bruce Cabot, Roland Young, Mischa Auer, Andy Devine, Neville Cooper, Eddie Quillan, Laura Hope Crews, Frank Jenks

Scénario : Norman Crasna

Photographie : Rudolph Maté

Musique : Frank Skinner

Durée : 1h19

Date de sortie initiale : 1941

LE FILM

Une belle aventurière du siècle dernier fraîchement débarquée à la Nouvelle-Orléans part à la recherche d’hommes beaux et riches. Elle trouve son bonheur en la personne d’un banquier avec lequel elle décide de convoler en justes noces. Oui mais voilà, elle est loin d’être insensible au charme d’un beau marin, capitaine d’un vieux rafiot.

Suite à l’échec de l’ambitieux et décrié Le Dernier Milliardaire en 1934, le cinéaste français René Clair (1898-1981) répond positivement à une offre du producteur-réalisateur Alexander Korda : se rendre à Londres pour réaliser Fantôme à vendre, The Ghost Goes West en version originale. Cette comédie-fantastique aux effets spéciaux désuets mais furieusement poétiques, plus gros succès britannique de l’année 1935, lui permet d’enchaîner avec Fausses nouvelles avec Maurice Chevalier, succès beaucoup plus relatif, avant de se voir proposer un projet américain et non des moindres, diriger la star Marlene Dietrich ! En 1941, René Clair se retrouve donc aux commandes de La Belle EnsorceleuseThe Flame of New Orleans pour le compte des studios Universal, une comédie dans laquelle la comédienne s’amuse à jouer une escroc.

En 1840, deux pêcheurs retirent des eaux boueuses du Mississippi une robe de mariée à la dérive. La légende de la comtesse Claire Ledoux (Marlene Dietrich), noyée le jour de ses noces, prend son essor. Mais est-ce bien ce qui s’est passé ? D’autant plus que le corps n’a pas été retrouvé. Retour en arrière donc, pour éclairer ce mystère… Lorsqu’elle débarque sur les quais turbulents de La Nouvelle-Orléans, Claire Ledoux, qui n’a de comtesse que la prétention, jette son dévolu sur un banquier riche et bête, Charles Giraud (Roland Young), qu’elle s’arrange pour séduire dans les couloirs de l’opéra. Une ultime manigance doit lui assurer les faveurs du banquier mais l’intervention d’un marin, beau et pauvre, Robert Latour (Bruce Cabot, excellent et bondissant), fait échouer la manoeuvre. Claire commence par en être fâchée.

C’est une récréation pour Marlene Dietrich. René Clair apporte son sens de la mise en scène et du montage pour livrer un vrai vaudeville en costumes, qui ne laisse pas un moment de répit à ses personnages, ainsi qu’aux spectateurs. Mais ce rythme endiablé – le film dure 79 minutes – ne parvient parfois pas à masquer un scénario trop léger. Ce qui importe ici c’est d’admirer la comédienne, véritable aventurière, dans des robes sublimes, feignant de s’évanouir afin d’attirer sa prochaine cible – l’homme le plus riche de la ville si possible – à dépouiller. Il faut voir avec quelle jubilation Marlene Dietrich accentue son oeil de biche derrière son éventail (excellente ouverture à l’opéra) ou à changer de costume, d’attitude et de maquillage pour tromper son monde, en se faisant passer pour une autre, après qu’une de ses anciennes victimes l’ait reconnu. Elle est également excellemment entourée par toute une troupe de comédiens qui lui renvoient la balle avec brio, René Clair prenant soin du moindre second rôle, en particulier de la servante Clementine (Theresa Harris), complice de tous les coups de notre chère Comtesse.

La Belle ensorceleuse est une œuvre somme toute anecdotique, pour laquelle le metteur en scène met sa maestria habituelle au service d’un récit léger et souvent truculent. Avec des dialogues très drôles, des situations cocasses, une interprétation inspirée et la sublime photographie de Rudolph Maté (La Passion de Jeanne d’Arc de Carl Theodor Dreyer, Liliom de Fritz Lang), cette histoire pleine de fantaisie et de charme, portée par la composition enjouée de Frank Skiner, est à redécouvrir, surtout pour se rendre compte à quel point Marlene Dietrich était tout aussi convaincante dans le registre de la comédie, tout en conservant son image de femme fatale.

LE BLU-RAY

Disponible en DVD chez Universal depuis 2005, La Belle Ensorceleuse atterrit dans l’escarcelle d’Elephant Films, en combo Blu-ray-DVD qui plus est ! Le titre intègre l’impressionnante et sublime collection Cinéma MasterClass de l’éditeur. Le test de l’édition HD a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est fixe et musical.

Dans un premier temps, le journaliste et critique de cinéma Xavier Leherpeur propose un portrait de Marlene Dietrich (12’30). Visiblement fasciné par la comédienne – qui ne le serait pas – l’intéressé évoque les grandes étapes de sa carrière avec ce qu’il faut de propos dithyrambiques. Certes, Xavier Leherpeur est passionné par son sujet, mais il se contente essentiellement de dresser une liste de ses films les plus célèbres, ceux tournés avec Josef von Sternberg (L’Ange bleu en Allemagne, les autres aux Etats-Unis) et les artistes qui se sont inspirés du mythe Dietrich (Lauren Bacall, Rita Hayworth…Madonna), tout en évoquant brièvement le caractère farouche, indépendant et sexuel de la comédienne qui en a fait l’un des premiers modèles du mouvement féministe. Un portrait simple, pour ne pas dire simpliste, anecdotique, même si sympathique.

La présentation du film par le même Xavier Leherpeur (12’) s’avère une fois de plus décevante. Alors certes le journaliste et critique de cinéma a du bagou, mais ses propos n’ont aucun intérêt puisqu’il se contente de paraphraser les scènes clés du film. Le reste du temps, Xavier Leherpeur cite quelques films de la carrière de René Clair et aligne les superlatifs et les phrases toutes faites, sans jamais se pencher sur le fond. Passez votre chemin, surtout qu’il ne reste plus grand-chose sur les 12 minutes du supplément une fois que vous avez retiré les extraits – beaucoup trop longs – du film. Espérons que l’éditeur revienne très vite vers Jean-Pierre Dionnet.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et une galerie de photos.

L’Image et le son

La Belle Ensorceleuse est disponible en Haute-Définition, dans un Blu-ray au format 1080p et dans son format respecté 1.33. La copie proposée par Elephant Films est une version restaurée. Sans être exceptionnelle, l’image se révèle correcte, même si quelques scories demeurent, ainsi que diverses tâches et griffures. La compression demeure solide, la luminosité fait plaisir, certaines séquences parviennent à sortir du lot grâce à un relief certain, tandis que les contrastes sont plutôt bien assurés. Le grain cinéma est évidemment conservé et équilibré. Peu importent les défauts constatés, les décrochages sur les fondus enchaînés et le piqué émoussé, revoir une oeuvre de René Clair est toujours un plaisir. Notons également que cette édition HD est une première mondiale.

Comme pour l’image, le son alterne le bon et le médiocre. La version anglaise DTS HD Master Audio 2.0 l’emporte haut la main sur la piste française, beaucoup plus confidentielle et qui se concentre uniquement sur le report des voix, au détriment des effets annexes et de la musique. En anglais, les dialogues sont plus dynamiques et naturels et l’écoute reste plus ou moins homogène. Si les grésillements et les saturations ne sont pas rares, au moins les partis pris originaux sont respectés. La version française propose le doublage d’époque.

Crédits images : © Elephant Films / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Cantique des cantiques, réalisé par Rouben Mamoulian

LE CANTIQUE DES CANTIQUES (The Song of Songs) réalisé par Rouben Mamoulian, disponible en DVD et combo Blu-ray/DVD le 7 février 2017 chez Elephant Films

Acteurs : Marlene Dietrich, Brian Aherne, Lionel Atwill, Alison Skipworth, Hardie Albright, Helen Freeman

Scénario : Leo Birinsky, Samuel Hoffenstein d’après le roman de de Hermann Sudermann

Photographie : Victor Milner

Musique : Karl Hajos, Herman Hand, Bernhard Kaun, Milan Roder

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1933

LE FILM

Une jeune paysanne orpheline, Lily, part vivre à Berlin chez sa tante, une libraire au tempérament bien trempé. Rapidement, elle fait la connaissance de Richard, un séduisant sculpteur dont l’atelier se trouve en face de la librairie. Charmé par les formes de la jeune femme, il lui propose de poser pour lui.

Le Cantique des cantiquesSong of songs, également connu sous un autre titre français, Cantique d’amour, est le premier film que Marlene Dietrich tourne avec un autre réalisateur que Josef von Sternberg depuis son arrivée et son triomphe aux Etats-Unis. Ce mélodrame est mis en scène par Rouben Mamoulian (1897-1987), cinéaste et producteur géorgien, d’origine arménienne. Eclectique, il commence sa carrière à la fin des années 1920 avec Applause, puis enchaîne quasiment un film par an jusqu’à la fin des années 1930. Rouben Mamoulian n’a que quatre films à son actif, dont la comédie musicale Aimez-moi ce soir avec Maurice Chevalier et surtout le film d’épouvante Docteur Jekyll et M. Hyde avec Fredric March dans le(s) rôle(s) titre(s), quand il se voit confier Le Cantique des cantiques. Marlene Dietrich connaît son premier revers avec Vénus Blonde, qui n’a pas convaincu la critique et encore moins les spectateurs. On lui propose alors une nouvelle adaptation – la troisième, après deux transpositions en 1918 et 1924 – du roman Das Hohelied (1908) de Hermann Sudermann (L’Aurore) et de la pièce de théâtre d’Edward Sheldon qui en a découlé. D’abord très réticente, tout comme Rouben Mamoulian qui détestait l’histoire originale, la comédienne accepte finalement le rôle de Lily, une jeune paysanne qui vient de perdre son père.

Lily quitte la campagne afin d’être recueillie par sa tante, Madame Rasmussen, libraire à Berlin, une femme autoritaire, rigide et légèrement portée sur l’alcool. De la fenêtre de sa chambre, Lily aperçoit un atelier de sculpteur qui la fascine. Un jour, Richard le sculpteur entre dans la librairie et semble captivé par le corps de Lily, il la persuade de venir poser pour elle. Elle accepte après avoir hésité et déjoue la surveillance de sa tante pour se rendre chez Richard qui la convainc de se déshabiller pour prendre la pose. Bientôt une très belle sculpture prend forme et les deux jeunes gens entament une idylle. Survient alors le vieux Baron von Merzbach, mécène de Richard et colonel des hussards, qui tombe en admiration devant la statue et de son modèle. Il demande à être présenté à Lily. Très vite, le Baron souhaite littéralement « s’emparer » de la jeune femme.

Manifeste féministe et critique de la femme-objet, Le Cantique des cantiques apparaît tout d’abord léger dans le ton adopté et dans l’interprétation de Marlene Dietrich, qui en fait même un peu trop dans le rôle de l’ingénue. Son personnage candide, qui n’a jamais quitté son foyer, est obligée de rejoindre la grande ville. Innocente, elle ne sait pas qu’elle risque de devenir l’objet de toutes les convoitises, même si elle dissimule son corps sous 9 jupons. Mais sa vieille tante, délaissée par ses propres enfants et qui souhaite la traiter comme sa fille, la rappelle à l’ordre et l’avertit que ses formes peuvent rendre les hommes fous. C’est alors qu’un sculpteur, Richard Waldow (Brian Aherne) rentre dans sa vie et tombe sous le charme de Lily, ou plutôt de son corps qu’il souhaite immédiatement reproduire pour une sculpture qu’un Baron (Lionel Atwill, génialement abject) lui a commandée. Lors d’une visite, ce dernier tombe lui aussi amoureux de Lily, ou plutôt de sa reproduction. Le Cantique des cantiques dresse alors le portrait d’une femme convoitée pour son corps et non pour ce qu’elle est.

Lily, rêvant du grand amour absolu, passionnée et espérant que l’homme qui l’aimera pour son âme apparaîtra un jour devant elle, se retrouve entre deux hommes. Le premier a d’abord aimé son corps avant de tomber amoureux d’elle, le second demeure fasciné par l’oeuvre d’art inspirée par le corps de Lily et jette son dévolu sur la jeune femme. Le Baron rappelle d’ailleurs à Richard que quand il souhaite acquérir quelque chose, il finit toujours par l’obtenir d’une façon ou d’une autre. Devant se résoudre à laisser partir Lily, Richard lui laisse un mot et l’informe qu’il la quitte, ne pouvant lui offrir la vie qu’elle mérite d’avoir. Cela laisse le chemin libre pour le Baron, qui épouse rapidement Lily et en fait très vite sa « chose » en lui faisant apprendre le piano et le français, mais aussi en la violant la nuit de noces en la faisant boire. Lily devient son « singe savant » qu’il exhibe avec fierté devant ses invités.

Remarquable plaidoyer pour la condition des femmes et le droit à disposer d’elles-mêmes, Le Cantique des cantiques est un film élégamment mis en scène, comprenant quelques scènes d’un érotisme rare et osé pour un film de 1933. C’est le cas du sculpteur qui caresse de façon très suggestive sa statue en regardant le corps nu de son modèle. Juste avant l’instauration du tristement célèbre Code Hays, Marlene Dietrich apparaît ici très dénudée. On comprend au final ce qui a séduit la comédienne dans cette histoire prônant l’indépendance des femmes.

LE BLU-RAY

Disponible en DVD chez Universal depuis 2005 sous le titre Cantique d’amour, Le Cantique des cantiques atterrit dans l’escarcelle d’Elephant Films, en combo Blu-ray-DVD qui plus est ! Le titre intègre l’impressionnante et sublime collection Cinéma MasterClass de l’éditeur. Le test de l’édition HD a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est fixe et musical.

Dans un premier temps, le journaliste et critique de cinéma Xavier Leherpeur propose un portrait de Marlene Dietrich (12’30). Visiblement fasciné par la comédienne – qui ne le serait pas – l’intéressé évoque les grandes étapes de sa carrière avec ce qu’il faut de propos dithyrambiques. Certes, Xavier Leherpeur est passionné par son sujet, mais il se contente essentiellement de dresser une liste de ses films les plus célèbres, ceux tournés avec Josef von Sternberg (L’Ange bleu en Allemagne, les autres aux Etats-Unis) et les artistes qui se sont inspirés du mythe Dietrich (Lauren Bacall, Rita Hayworth…Madonna), tout en évoquant brièvement le caractère farouche, indépendant et sexuel de la comédienne qui en a fait l’un des premiers modèles du mouvement féministe. Un portrait simple, pour ne pas dire simpliste, anecdotique, même si sympathique.

En revanche, la présentation du film par le même Xavier Leherpeur (13’) manque singulièrement d’intérêt. Le journaliste et critique de cinéma ne fait que paraphraser ce qui se déroule dans le film en indiquant ici et là une petite information anecdotique, en indiquant qu’il trouve la scène « formidable », sans jamais revenir une seule fois sur les conditions de tournage ou sur le fait que ni Rouben Mamoulian ni Marlene Dietrich ne voulaient au départ faire le film. En introduction, un panneau indique que des éléments de certaines scènes clés sont dévoilés. En réalité il n’y a que cela, le tout entrecoupé d’extraits beaucoup trop longs du film.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et une galerie de photos.

L’Image et le son

Le master HD au format 1080p du Cantique des cantiques n’est pas aussi convaincant que celui de Vénus Blonde. Cette édition pourtant restaurée contient encore quelques points, griffures, rayures et poussières, surtout durant le générique en ouverture, avec diverses instabilités. Signalons que ces défauts tendent à s’amenuiser au fil du visionnage. Si le N&B retrouve une certaine fermeté, une clarté plaisante et une densité indéniable, le piqué et la gestion du grain restent aléatoires. Au début du film, Rouben Mamoulian use de certains stockshots qui n’ont évidemment pas été restaurés comme le reste du film et se voient donc comme le nez au milieu de la figure. Des fondus enchaînés décrochent, un bruit vidéo est notable mais aidé par un encodage solide, un effet de pompage peut agacer sur les scènes sombres, tandis que d’autres sortent du lot et se révèlent particulièrement belles – la superbe photo diffuse est signée Victor Milner (Haute pègre, L’odyssée du docteur Wassell) – détaillées et dignes du support Blu-ray made in Elephant. La copie est proposée dans son format 1.33 respecté.

La bande-son semble avoir été restaurée également car peu de craquements sont à déplorer. Les dialogues, tout comme la musique, demeurent propres et distincts sur cette piste unique DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Certains échanges sont peut-être plus étouffés que d’autres, un petit souffle est audible du début à la fin, mais le confort acoustique est appréciable. Précisons que le spectateur devra actionner lui-même les sous-titres français en début de film et que la dernière réplique n’a pas été traduite !

Crédits images : © Elephant Films / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / John Wick 2, réalisé par Chad Stahelski

JOHN WICK 2 (John Wick : Chapter 2) réalisé par Chad Stahelski, disponible en DVD et Blu-ray le 22 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Keanu Reeves, Common, Laurence Fishburne, Riccardo Scamarcio, John Leguizamo, Franco Nero, Ruby Rose, Bridget Moynahan, Ian McShane, Peter Stormare, Claudia Gerini

Scénario : Derek Kolstad

Photographie : Dan Laustsen

Musique : Tyler Bates, Joel J. Richard

Durée : 2h03

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

John Wick est forcé de sortir de sa retraite volontaire par un de ses ex-associés qui cherche à prendre le contrôle d’une mystérieuse confrérie de tueurs internationaux. Parce qu’il est lié à cet homme par un serment, John se rend à Rome, où il va devoir affronter certains des tueurs les plus dangereux du monde.

John Wick premier du nom, avait créé la surprise en 2014. Tourné pour un budget de 20 millions de dollars, le film, parfaite synthèse du cinéma, du roman-graphique et du jeu vidéo, en rapporte 106 millions dans le monde et attire même plus de 400.000 spectateurs dans les salles françaises. Galvanisés par ce succès, Keanu Reeves et le réalisateur Chad Stahelski remettent le couvert trois ans après pour une suite démentielle, encore plus fun, encore mieux réalisée, encore plus « tout ». Si deux ans se sont écoulés entre les deux tournages, l’intrigue de ce second opus, ou « chapitre deux » comme l’indique le titre original, reprend là où le premier s’était arrêté, après l’implacable vengeance de l’ancien tueur à gages contre les mafieux russes qui avaient tué son chien et volé sa voiture.

John Wick compte profiter de sa retraite. Mais il est contacté par Santino D’Antonio, un gangster italien qui a besoin de ses services. Il souhaite prendre la place de sa soeur dans son organisation mafieuse. Wick est obligé d’accepter en raison d’une dette importante envers D’Antonio. A Rome, il approche Gianna, la soeur de Santino, dans une boîte de nuit. Se sentant prise au piège, la jeune femme préfère se suicider plutôt qu’être abattue. Mais Cassian, son garde du corps, jure alors de la venger.

Toutes les qualités professionnelles de l’ancien assassin explosent littéralement dans ce deuxième épisode, comme si le premier, pourtant très généreux, n’avait été qu’une mise en bouche. Parallèlement aux fusillades, bastons, règlements de comptes en tous genres et poursuites à pied ou en voiture, le metteur en scène, le comédien principal et le scénariste Derek Kolstad créent une vraie mythologie à partir de ce qui avait été annoncé dans le premier. Le monde souterrain de John Wick s’étend, prend une ampleur inespérée, répondant à tous les fantasmes et espoirs des fans, suite à l’excellent bouche-à-oreille qui a largement contribué au succès critique et commercial du premier chapitre.

Ancien cascadeur et coordinateur, assistant réalisateur, Chad Stahelski commence sa carrière en doublant Brandon Lee après l’accident qui a coûté la vie au jeune comédien sur le tournage de The Crow. Après avoir oeuvré sur Los Angeles 2013, Alien, la résurrection, il fait la rencontre de Keanu Reeves en 1999 sur Matrix, où il officie comme doublure officielle de la star. Ils se retrouveront sur les deux autres volets de la trilogie. Ce triomphe international fait de Chad Stahelski un des cascadeurs les plus demandés par Hollywood (Van Helsing, Spider-Man 2, 300, Die Hard 4: Retour en enfer, les deux premiers Expendables) jusqu’à ce qu’il décide de passer lui-même derrière la caméra pour John Wick, avec l’aide de David Leitch, co-réalisateur non crédité. Le succès ayant été au rendez-vous, la suite de John Wick est lancée en même temps qu’une trilogie est annoncée. Chad Stahelski se retrouve cette fois seul aux commandes.

John Wick 2 est un vrai torrent d’action et de violence chorégraphiée, ponctué par un humour noir percutant. Du point de vue visuel, le film est absolument remarquable. La photographie stylisée de Dan Laustsen (Silent Hill, Crimson Peak) ainsi que la mise en scène virtuose et le montage toujours lisible, subjuguent et mettent en valeur chaque affrontement, tout comme le soin apporté aux décors et aux costumes. Keanu Reeves assure le show. Spectaculaire, très investi, charismatique, il trouve à plus de cinquante ans un des rôles qui marqueront sa carrière, au même titre que celui de Neo dans la trilogie Matrix. Par ailleurs, John Wick 2 joue avec le spectre des films des Wachowski, dans la rigueur des combats, mais aussi dans son atmosphère et ses partis pris. On a même souvent l’impression que les personnages s’avèrent reliés à une matrice. Le lien méta se fait encore plus évident avec l’apparition de Laurence Fishburne, dans un rôle pas si éloigné de celui de Morpheus qu’il tenait dans la trilogie. N’oublions pas la participation de Riccardo Scamarcio (classe et venimeux), Ian McShane (impérial), l’incroyable Ruby Rose, Common, John Leguizamo et même Franco « Django » Nero qui complètent ce casting idéal. Les fans apprécieront.

D’une suprême élégance, John Wick 2 – qui a plus que doublé le score du premier au box-office américain – repousse donc toutes les limites et peut se targuer d’être une des meilleures suites jamais proposées au cinéma. C’est peu dire que nous attendons le troisième avec impatience, surtout après ce que le fascinant et ambitieux épilogue met en place.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de John Wick 2, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est dynamique, animé et musical.

Attention, grande édition ! Assurément l’un des Blu-ray de l’année pour Metropolitan. Voilà ce que réserve la section des suppléments.

On commence par un commentaire audio en version originale sous-titrée en français de Chad Stahelski et de Keanu Reeves. Les deux complices ne sont pas avares en anecdotes, s’avèrent à l’aise dans l’exercice et parviennent à maintenir l’intérêt pendant les 123 minutes du long métrage. Le comédien relance sans arrêt le réalisateur sur la fabrication de telle ou telle scène, le casting est passé au peigne fin, tout comme la préparation des acteurs, le tournage des cascades, les répétitions, sans oublier l’écriture du scénario, les éléments apportés pour ce second volet et les bases posées pour le troisième. Tous les sujets abordés durant ce commentaire sont illustrés en images dans les bonus suivants, mais ne manquez pas ce moment très sympa.

L’éditeur présente ensuite près d’1h15 de featurettes promotionnelles, de scènes coupées et même une bande-annonce parodique.

Les séquences laissées sur le banc de montage (8’), montées mais non mixées, montrent l’introduction originale de Santino D’Antonio (Riccardo Scamarcio), qui vient tout d’abord s’en prendre de manière violente à Aurelio (John Leguizamo) avec ses sbires, pour savoir où se trouve la voiture de John Wick. Une autre scène se focalise sur D’Antonio, prenant un peu trop ses aises à l’hôtel Continental devant un Winston (Ian McShane) outré. La dernière séquence montre John Wick qui se présente face à un cardinal.

Les modules suivants, Retro Wick : le succès surprise de John Wick (4 min 30), L’entraînement (12’), Prévisualisations des scènes d’action (5’), Keanu & Chad (10’), Le monde souterrain (5’), En voiture ! (5’), La conception d’une scène (10’), Les outils de John (8’) dissèquent chaque scène d’action à travers de très nombreuses images de Keanu Reeves à l’entraînement, des répétitions, de tournage, le tout largement commenté par les comédiens, le réalisateur, les responsables des cascades, des producteurs, et de tout ce petit monde visiblement heureux de faire partie du projet.

Ces segments insistent sur la performance physique de Keanu Reeves. L’acteur est montré pendant ses semaines d’immersion auprès des frères Machado qui lui ont enseigné leur forme de jiu-jitsu brésilien. On y voit Keanu Reeves, déjà rompu à de nombreux styles d’arts martiaux, transpirant à grosses gouttes dans son kimono, mais toujours le sourire aux lèvres avec une visible soif d’apprendre et de se perfectionner. Sa formation intensive, y compris le maniement des armes – à balles réelles – auprès de Taran Butler, véritable tireur d’élite, aura duré 5 mois à raison de cinq heures par jour. Très impressionnant.

Le tournage à Rome au sein des Thermes de Caracalla, l’engouement suscité par le premier volet, l’investissement des comédiens, les armes du personnage, les costumes et bien d’autres éléments sont abordés au fil de ces suppléments absolument passionnants.

L’interactivité se clôt sur un montage compilant toutes les victimes de John Wick dans ce second volet (on vous dit le résultat : 116), ainsi qu’une bande-annonce parodique de John Wick premier du nom, intitulée Dog Wick, dans laquelle le chien venge la mort de son maître en prenant les armes et en piégeant sa niche. Oui. D’autres bandes-annonces, présentant les films disponibles chez Metropolitan Vidéo, sont disponibles en fin de parcours.

L’Image et le son

John Wick 2 a été intégralement tourné en numérique et cela se voit. L’édition Blu-ray est donc tout indiquée et même indispensable pour (re)découvrir le film de Chad Stahelski, d’autant plus que cette édition HD est en tout point renversante de beauté. Les partis pris stylisés de la photographie signée Dan Laustsen, chef opérateur danois qui a marqué les cinéphiles pour son travail sur Le Veilleur de nuit (et son remake) d’Ole Bornedal, ou bien encore Le Pacte des loups et Silent Hill de Christophe Gans, sont magnifiquement restitués à travers ce transfert qui s’impose comme un disque de référence. Le cadre large fourmille de détails, les contrastes sont spectaculairement denses, le relief omniprésent, le piqué acéré comme la lame d’un scalpel (ou la mine d’un crayon) et l’étalonnage spécifique des couleurs est conservé. Le codec AVC consolide tout cela avec une belle fermeté y compris sur les nombreuses séquences agitées ou sombres. Resplendissant.

Attention les oreilles ! John Wick 2 va mettre à mal votre installation ainsi que vos murs, votre sol et vos rapports avec vos voisins. On espère que vos murs sont bien insonorisés ! Passés les logos des maisons de production, les enceintes explosent littéralement et rien ne s’arrêtera plus jusqu’au générique de fin. Les déflagrations, crépitations, désintégrations et d’autres mots en « tions » sont ardemment réparties aux quatre coins cardinaux grâce à l’ébouriffant mixage anglais Dolby Atmos et au DTS-HD Master Audio 5.1 français, avec un net avantage dans la langue de Shakespeare. La musique de Tyler Bates et Joel J. Richard souligne l’ensemble avec fracas et le caisson de basses se déplace tout seul sur le sol. Ex-plo-sif !

Crédits images : © Niko Tavernise – Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Baron Rouge, réalisé par Roger Corman

LE BARON ROUGE (Von Richthofen and Brown) réalisé par Roger Corman, disponible en DVD et Blu-ray le 23 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : John Phillip Law, Don Stroud, Barry Primus, Corin Redgrave, Karen Ericson, Hurd Hatfield, Stephen McHattie

Scénario : John William Corrington, Joyce Hooper Corrington

Photographie : Michael Reed

Musique : Hugo Friedhofer

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1971

LE FILM

En 1916, dans la France occupée, une forte rivalité oppose d’un côté le baron von Richthofen, surnommé le « Baron Rouge », qui est à la tête de l’escadrille allemande et de l’autre l’as canadien Roy Brown.

Découvreur de talents (Martin Scorsese, Francis Ford Coppola, Joe Dante, Ron Howard, Jonathan Demme, Jack Nicholson, Monte Hellman, Curtis Hanson), Pape de la série B, le prolifique Roger Corman (né en 1926), aujourd’hui producteur de plus de 400 films, a réalisé près d’une cinquantaine de longs métrages de 1955 à 1990. Mis en scène en 1971, Le Baron RougeVon Richthofen & Brown est rétrospectivement un de ses derniers films en tant que réalisateur. Quand il entreprend ce drame de guerre, Roger Corman a déjà 45 films derrière-lui – tournés en 15 ans donc, un record – et se trouve dans un état de fatigue extrême. Le cinéaste avoue d’ailleurs avoir souffert pendant les prises de vues du Baron Rouge, surtout en raison des pressions de la United Artists qui ne lui laisse pas entièrement carte blanche. A l’issue du tournage, suite à cette expérience, Roger Corman crée sa propre société de production et de distribution, New World Pictures, décide d’arrêter la mise en scène et prend même une année sabbatique. Il y reviendra toutefois en 1978 avec Les Gladiateurs de l’an 2000 puis en 1980 avec Les Mercenaires de l’espace, bien qu’il ne soit pas crédité, avant un dernier baroud d’honneur à la caméra en 1990 avec La Résurrection de Frankenstein. Le film qui nous intéresse, Le Baron Rouge, est un formidable opus et typique de l’école Corman.

Le cinéaste fait fi d’un budget somme doute modeste (sa spécialité), moins d’un million de dollars, pour livrer un film de guerre généreux en scènes d’affrontements, qui sont restés célèbres pour ses très nombreuses séquences de combats aériens. En embarquant réellement ses comédiens (et ses caméras) dans les avions d’époque, sans utiliser de transparences qui auraient ruiné l’ensemble, Roger Corman obtient un réalisme inattendu. Une bonne moitié du film se déroule dans les airs où les prestations demeurent particulièrement bluffantes, authentiques et impressionnantes.

1916. Le baron Manfred von Richthofen rejoint le major Oswald Boelcke et son escadrille en France occupée. Cet homme, à la volonté farouche de gagner la guerre et âgé de 23 seulement, appartient pourtant à la vieille école : il se montre chevaleresque et aristocrate dans sa façon de mener le combat. Son attitude est plutôt mal ressentie par plusieurs de ses compagnons, dont Hermann Goering. Dès son arrivée, von Richthofen fait repeindre l’escadrille en couleurs vives, ce qui lui vaut le surnom de «Baron Rouge». Bientôt, la rivalité entre le pilote canadien Roy Brown et le baron se transforme en véritable massacre. Les deux hommes iront jusqu’au bout et n’hésiteront pas à se battre par armées interposées.

L’acteur américain John Phillip Law (Barbarella) campe un Baron Manfred von Richthofen froid voire glacial, mais parvient à rendre son personnage humain, sans pour autant le rendre attachant. Véritable machine de guerre, qui agit pour son pays et qui prend soin des hommes de son escadrille, il imprime la pellicule de ses traits figés et de son regard perçant. Son adversaire, le canadien Roy Brown est interprété par l’Hawaïen Don Stroud, grand habitué des séries B, vu dernièrement dans Django Unchained de Quentin Tarantino et le chef d’oeuvre de la saga James Bond, Permis de tuer. Evidemment plus « détendu » que son homologue allemand, Roy Brown n’en demeure pas moins aussi dangereux une fois installé aux commandes de son avion. Ce qui fait la particularité du Baron Rouge, c’est que Roger Corman n’appuie pas le côté « méchant » des allemands ou au contraire le côté « héroïque » des Alliés, comme certains de ses confrères. Les deux camps sont montrés à égalité. Patriotes, engagés dans cette guerre qu’ils espèrent gagner, les allemands et les anglais subissent autant de pertes et prennent conscience que la mort peut frapper à n’importe quel moment.

Roger Corman soigne sa mise en scène, enchaîne les rebondissements, les scènes de fusillades et d’explosions avec une redoutable efficacité, sans aucun temps mort, même si le film prend beaucoup de libertés avec la véritable histoire, en privilégiant l’action. Alors embarquez sans hésiter dans ce duel sans merci entre deux pilotes légendaires, car Le Baron Rouge reste un formidable spectacle !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Baron Rouge, disponible chez Movinside, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, animé sur une séquence du film. L’éditeur inaugure ici une nouvelle collection consacrée aux films de guerre.

Aucun supplément sur cette édition. Néanmoins, signalons que Le Baron Rouge est le premier Blu-ray d’un film réalisé par Roger Corman édité en France !

L’Image et le son

Movinside présente Le Baron Rouge en Blu-ray au format 1080p et dans son cadre respecté 1.85. Le générique aérien est marqué par un grain très prononcé, quelques instabilités et une colorimétrie terne. Dès la fin des credits, la copie retrouve une nouvelle fraîcheur. La propreté est de mise, toutes les poussières ont disparu, ainsi que les dépôts résiduels et autres scories. La stabilité est indéniable et les teintes s’avèrent plus naturelles du début à la fin. Mention spéciale au ballet des avions fraîchement repeints, dont le zinc rouge du Baron, particulièrement éclatant. Les divers plans flous sont d’origine et la gestion des contrastes renforcée par la Haute-Définition.

La bande-son semble avoir été restaurée. Les dialogues, tout comme la musique, demeurent propres et distincts sur les pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Certains échanges sont peut-être plus étouffés que d’autres, sauf sur la version française où les voix sont trop mises en avant, un très léger souffle est parfois audible, mais le confort acoustique est appréciable. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © United Artists / Movinside / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Port de la drogue, réalisé par Samuel Fuller

LE PORT DE LA DROGUE (Pickup on South Street) réalisé par Samuel Fuller, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez ESC Editions

Acteurs : Richard Widmark, Jean Peters, Thelma Ritter, Murvyn Vye, Richard Kiley, Willis Bouchey

Scénario : Samuel Fuller d’après une histoire originale de Dwight Taylor

Photographie : Joseph MacDonald

Musique : Leigh Harline

Durée : 1h17

Date de sortie initiale : 1953

LE FILM

Dans le métro, Candy se fait voler son portefeuille par Skip Mc Coy, un pickpocket aguerri. Des policiers qui suivaient la jeune femme soupçonnée d’être une agent de liaison communiste, assistent à la scène sans pouvoir intervenir. De retour chez lui, Mc Coy découvre que le portefeuille contient un microfilm. Policiers et communistes vont essayer de le récupérer.

Chef d’oeuvre absolu et inoubliable de l’histoire du cinéma et du film noir, Le Port de la droguePickup on South Street est réalisé par Samuel Fuller (1912-1997) en 1953, qui signe ici son sixième long métrage. Si les cinéphiles qui visionneront le film pour la première fois en version originale se demandent d’où provient la signification du titre français alors que l’intrigue ne mentionne jamais de trafic de stupéfiant, la réponse est politique. La version française du film ne parle plus de vilains espions communistes (alors à la mode dans le genre), mais de trafiquants de drogue. A l’époque, le Parti Communiste français représentait un électorat très important, qu’il ne fallait pas effaroucher. D’où cette adaptation qui a également eu lieu en Allemagne. Concentrons-nous alors sur Pickup on South Street plutôt que sur “Le Port de la drogue”.

Le film plonge immédiatement le spectateur dans le métro bondé et étouffant de New York à l’heure de pointe. Un pickpocket vole le portefeuille de Candy – scène à l’érotisme trouble, sans aucun dialogue, une pure leçon de cadre et de montage – une jeune femme soupçonnée par la police de faire partie d’un réseau d’agents communistes. Candy, affolée, se précipite dans une cabine téléphonique pour prévenir son patron, Joey. Elle apprend que le portefeuille contient un microfilm, dont les informations, ultra-secrètes, sont de première importance. Joey donne à Candy l’adresse d’une indicatrice, Moe Williams, qui connaît bien la pègre new-yorkaise. De son côté, la police tente de récupérer le document et d’identifier le voleur à la tire. Il s’agit d’un certain Skip McCoy.

Tourné en trois semaines, Pickup on South Street, inspiré d’une intrigue de Dwight Taylor, est sans doute le plus grand, le plus beau, le plus intense (on peut continuer longtemps comme ça) des films de Samuel Fuller. La mise en scène virtuose et lyrique, les dialogues percutants, la splendide photographie de Joe MacDonald, la musique jazzy et syncopée de Leigh Harline, son rythme effréné et nerveux (77 minutes sans aucun temps mort) et bien sûr l’immense interprétation subjuguent du début à la fin. L’insolent personnage de Skip McCoy, c’est bien évidemment le grand Richard Widmark, galurin vissé sur la tête, sourire en coin et moqueur, qui crève ici l’écran. Découvert en 1947 dans Le Carrefour de la mortKiss of death de Henry Hathaway, Richard Widmark a ensuite très vite enchaîné avec La Ville abandonnée de William Wellman, La Furie des tropiques d’André De Toth, Okinawa de Lewis Milestone, La Porte s’ouvre de Joseph L. Mankiewicz, Panique dans la rue d’Elia Kazan. Il a également retrouvé Henry Hathway deux fois (Les Marins de l’Orgueilleux et La Sarabande des pantins) avant de se voir offrir le premier rôle dans Pickup on South Street. Sa démarche décontractée, sa facilité à jouer des poings (même avec les femmes), son répondant mordant, contrastent avec la personnalité en réalité complexe de son personnage Skip McCoy. Comme les autres protagonistes du film, Skip n’aspire qu’à survivre et pour lui, le seul moyen d’y parvenir est de détrousser celles et ceux qu’il croise dans les transports en commun. Déjà condamné trois fois, il sait qu’il risque gros s’il est à nouveau arrêté. Autant dire que son dernier larcin qui pouvait paraître “innocent” au premier abord va le conduire là où il était loin de l’imaginer.

Loin d’être “une oeuvre de propagande” – ce que la critique américaine lui a reproché – et plutôt que de se focaliser sur un seul personnage, Samuel Fuller passe de protagoniste en protagoniste, pour finalement dresser le portrait de marginaux et de laissés pour compte dans un quartier pauvre de New York où la violence est omniprésente. Ancien journaliste qui a largement écumé les bas fonds de la Grosse Pomme, le réalisateur prend tout autant de soin pour montrer les rues crasseuses – en s’inspirant ouvertement du néoréalisme de Rome ville ouverte de Roberto Rossellini – que pour décrire le quotidien de Skip McCoy dans sa cahute minable au bord de la rivière, qui lorgne sur le réalisme poétique. Même chose pour Candy, sensuelle Jean Peters, dont on aimerait également caresser l’ovale du visage, prostituée en quête d’indépendance et pour Moe, merveilleusement interprétée par Thelma Ritter, très justement nommée pour l’oscar du meilleur second rôle. Cette femme d’un certain âge, si elle n’a pas réussi sa vie en vendant quelques cravates, souhaite réussir sa mort. Grâce aux indices qu’elle donne à la police, elle se constitue une petite épargne – le coût de ses renseignements suit l’inflation – pour pouvoir se payer un caveau de luxe où elle pourra reposer en paix. Mais au-delà des destins individuels, la solidarité entre démunis et le sens de l’honneur existent. Alors quand quelque chose arrive à Moe, McCoy change de ton.

C’est là l’immense réussite de Pickup on South Street. Une histoire d’espionnage avec des personnages ambigus, on ne peut plus humains, sans jamais omettre l’émotion, l’humour (grinçant) et l’étude sociale, tout cela en faisant battre le coeur des cinéphiles désarmés devant tant de beauté, d’invention et de modernité. La perfection.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray du Port de la drogue, disponible chez ESC Editions, repose dans un très élégant boîtier classique de couleur noire. La jaquette estampillée « Hollywood Legends » ne manque pas de classe. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur joint une présentation et une analyse du film qui nous intéresse par Mathieu Macheret, critique cinéma pour Le Monde (21’). S’il n’évite pas quelques redondances, l’intervenant décortique habilement le chef d’oeuvre de Samuel Fuller. Mathieu Macheret replace le film dans la carrière du cinéaste (le troisième pour la Fox), évoque la raison de l’adaptation française, avant de se focaliser sur la forme et les personnages. Notre interlocuteur ne manque pas de qualificatifs – sensuel, magnifique, incroyable, dynamique, inventif, percutant, violent – et d’arguments, même s’il paraphrase parfois certaines séquences clés, pour défendre une œuvre qui lui tient particulièrement à coeur. On le comprend !

L’Image et le son

Le Port de la drogue avait bénéficié d’une édition DVD chez Carlotta Films en 2004, avant de ressurgir dans le même format chez ESC Editions en novembre 2015. Le même éditeur propose cette fois le film en Haute-Définition avec un Blu-ray au format 1080p. Sublime ! Ce master restauré 4K par la Fox est présenté au format respecté 1.33 est on ne peut plus flatteur pour les mirettes. Tout d’abord, le splendide N&B de Joseph MacDonald (La Poursuite infernale, Niagara, La Lance brisée, La Maison de bambou) retrouve une densité inespérée dès l’ouverture. La restauration est indéniable, aucune poussière ou scorie n’a survécu au scalpel numérique, l’image est d’une stabilité à toutes épreuves. Les contrastes sont fabuleux et le piqué n’a jamais été aussi tranchant. Le grain original est présent, sans lissage excessif, ce qui devrait rassurer les puristes. Hormis quelques plans plus flous, le cadre fourmille de détails, les fondus enchaînés n’entraînent pas de décrochages et cette superbe copie participe à la redécouverte de ce chef d’oeuvre de Samuel Fuller. Une des éditions incontournables de l’année 2017 !

L’éditeur nous propose les versions anglaise et française du Port de la drogue, disponibles en DTS HD Master Audio 2.0. Passons rapidement sur cette dernière, beaucoup moins dynamique, plus étouffée, qui a semble-t-il été sauvée et proposée en guise de curiosité pour les cinéphiles. Un panneau en introduction indique d’ailleurs que la qualité demeure médiocre. La version originale, évidemment plus homogène et naturelle, très propre, est disponible sans souffle parasite et le confort acoustique est largement assuré. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Twentieth Century Fox Film Corporation / ESC Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Silence, réalisé par Martin Scorsese

SILENCE réalisé par Martin Scorsese, disponible en DVD et Blu-ray le 15 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Andrew Garfield, Adam Driver, Liam Neeson, Tadanobu Asano, Ciarán Hinds, Issei Ogata

Scénario : Jay Cocks, Martin Scorsese d’après le roman de Shûsaku Endô

Photographie : Rodrigo Prieto

Musique : Kathryn Kluge, Kim Allen Kluge

Durée : 2h40

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

XVIIème siècle, deux prêtres jésuites se rendent au Japon pour retrouver leur mentor, le père Ferreira, disparu alors qu’il tentait de répandre les enseignements du catholicisme. Au terme d’un dangereux voyage, ils découvrent un pays où le christianisme est décrété illégal et ses fidèles persécutés. Ils devront mener dans la clandestinité cette quête périlleuse qui confrontera leur foi aux pires épreuves.

Dire que Silence s’avère le projet le plus personnel de Martin Scorsese depuis des années, serait un vrai raccourci et de toute façon un argument irrecevable. Son merveilleux épisode pilote de la série Vinyl, Le Loup de Wall Street, Hugo Cabret, Shutter Island ont tous démontré que Martin Scorsese s’est toujours impliqué personnellement dans ses projets, même les plus « commerciaux » et qu’il demeure l’un des plus grands réalisateurs en activité. D’autant plus que le cinéaste a toujours su se remettre en question, tout en avouant apprendre encore aujourd’hui de nouvelles choses sur son métier. Silence est l’adaptation du roman du même nom écrit en 1966 par Shūsaku Endō, écrivain catholique japonais, basé sur des faits historiques réels, qui avait déjà été transposée au cinéma par Masahiro Shinora en 1971 et sélectionné à Cannes l’année suivante. Le « silence » éponyme, renvoie à celui de Dieu face aux souffrances vécues en son nom.

Au XVIIe siècle, les jésuites Rodrigues et Garupe sont envoyés au Japon afin de retrouver le père Ferreira, leur mentor qui les a guidés sur le chemin de la spiritualité. Celui-ci se cache-t-il, a-t-il été exécuté, s’est-il marié ou alors s’est-il converti au bouddhisme ? Rodrigues et Ferreira vont devoir le découvrir, à leurs risques et périls. Sur place, c’est un choc pour eux. Ils affrontent des seigneurs féodaux qui voient d’un mauvais oeil l’arrivée des deux hommes d’Eglise. Au moindre faux pas, Rodrigues et Garupe risquent de mourir noyés, brûlés ou crucifiés. C’est le sort funeste qu’ont déjà subi les Japonais convertis. Depuis 1988, Martin Scorsese essayait de porter ce projet à l’écran. Tout d’abord annoncé avec les comédiens Daniel Day-Lewis, Gael García Bernal, Ken Watanabe et Benicio Del Toro, Silence, avant que le projet soit suspendu, annulé, repris pour être encore reporté, réunit finalement Liam Neeson (sublime), Andrew Garfield, Adam Driver, Issey Ogata (l’empereur Hirohito dans Le Soleil d’Alexander Sokurov, incroyable ici dans le rôle du vieil Inquisiteur), Yosuke Kubozuka et Tadanobu Asano. Après de multiples réécritures et plusieurs tentatives jusqu’alors avortées de rentrer en production faute de financements, Silence a enfin pu voir le jour.

Ce n’est évidemment pas la première fois que Martin Scorsese se penche sur la question de la foi et de la religion. Si les thèmes apparaissent souvent en filigrane, y compris dans ses films sur la mafia, ils demeurent essentiels et le fondement de La Dernière tentation du Christ (1988) et de Kundun (1997). Silence apparaît comme étant un troisième volet d’une trilogie sur le sujet. Animé par la force et la virtuosité de son metteur en scène, ainsi que sur l’investissement viscéral de ses comédiens, Silence, drame historique d’une beauté visuelle incomparable, ne peut laisser le spectateur indifférent. Certes, le sujet peut ne pas créer d’empathie, mais la beauté souvent irréelle des images (tournées en 35mm), des décors, des costumes, laisse pantois d’admiration. Après avoir incarné un homme animé par la parole du Christ dans l’incroyable film de Mel Gibson, Tu ne tueras point Hacksaw Ridge, Andrew Garfield récidive ici et interprète un prêtre jésuite. Quelque peu illuminé, le comédien s’est longuement préparé pour son rôle en s’isolant au Pays de Galles pour une retraite spirituelle et en faisant vœu de silence durant une semaine. Durant près d’un an, il a également étudié le jésuitisme, tout en perdant beaucoup de poids, comme son partenaire Adam Driver.

Silence est une œuvre complexe, difficile d’accès de par son sujet, à la fois universel et hermétique (la persécution des missionnaires jésuites dans le Japon du XVIIème siècle), très lente et qui peut mettre à rude épreuve la patience des spectateurs. Mais chaque plan, chaque seconde est d’une beauté à couper le souffle et emporte l’adhésion, d’autant plus que le sujet abordé est atypique et porté par un Scorsese littéralement habité. Sa passion s’avère contagieuse et le spectateur qui saura pleinement plonger dans cette histoire connaîtra une véritable et unique expérience physique (les séquences de tortures et de crucifixion sont viscérales) et sensorielle. Si l’on excepte l’improbable coupe de cheveux d’Andrew Garfield (et sa tendance à avoir l’air ahuri), visiblement prise en charge par David Beckham, Silence foudroie et le spectateur est placé en tant que troisième témoin de cette histoire dense, aux côtés des personnages interprétés par Andrew Garfield et Adam Driver.

Silence est un film que s’approprie le spectateur, qui parlera différemment à chacun, qui interroge sur la définition de la foi, sur le doute et la croyance. Ce 24e long métrage de fiction de Martin Scorsese est aussi et surtout une extraordinaire leçon de cinéma qui touche à la fois le coeur, l’âme et l’esprit.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Silence, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, légèrement animé et musical.

On pouvait s’attendre à plus, mais le seul supplément disponible sur cette édition, le making of de 24 minutes, s’avère excellent, très bien réalisé et documenté. De nombreuses images montrent Martin Scorsese à l’oeuvre avec ses comédiens et son équipe technique. Un metteur en scène qui doute, anxieux derrière son combo, mais aussi heureux sur le plateau et qui s’avère toujours autant passionné, voire transcendé par le cinéma. De multiples interventions de l’équipe (réalisateur, acteurs, directeur de la photographie, monteuse, producteurs, scénariste, historiens, un prêtre jésuite) s’entrecroisent. La genèse et la longue gestation de Silence sont abordées, tout comme les conditions des prises de vues, le casting, la préparation des comédiens, les personnages, les partis pris, les thèmes sont passés au peigne fin.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et des liens internet.

L’Image et le son

L’univers visuel foisonnant de Martin Scorsese sied à merveille au support Blu-ray. Metropolitan livre un magnifique master HD. Les sublimes partis pris esthétiques du chef opérateur mexicain Rodrigo Prieto (8 mile, 21 grammes, Argo, Le Loup de Wall Street) passent remarquablement le cap du petit écran et les détails foisonnent aux quatre coins du cadre large. Les contrastes affichent une densité impressionnante, le piqué est tranchant comme un scalpel y compris sur les scènes sombres habituellement plus douces. La profondeur de champ demeure abyssale, les détails se renforcent et abondent en extérieur jour, la colorimétrie est vive, bigarrée et étincelante dès la première séquence, le relief demeure palpable tout du long. Un transfert estomaquant de beauté, un léger grain cinéma respecté (tournage en 35mm), une clarté voluptueuse, le tout conforté par un encodage AVC solide comme un roc, voilà un nouveau Blu-ray de démonstration. Le label rouge Metropolitan en quelque sorte.

Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre deux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 français et anglais d’une très grande finesse. La balance des frontales comme des latérales est impressionnante, les effets annexes sont omniprésents dès l’ouverture, les voix solidement exsudées par la centrale (le timbre unique de Liam Neeson), tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun (le fracas des vagues), tout comme celles de l’hypnotique et envoûtante bande originale. La spatialisation est luxuriante. Metropolitan livre également une piste française Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Kerry Brown / Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Arsenal, réalisé par Steven C. Miller

ARSENAL réalisé par Steven C. Miller, disponible en DVD et Blu-ray le 14 juin 2017 chez Marco Polo Production

Acteurs : Nicolas Cage, John Cusack, Adrian Grenier, Johnathon Schaech, Lydia Hull, Heather Johansen

Scénario : Jason Mosberg

Photographie : Brandon Cox

Musique : Ryan Franks, Scott Nickoley

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Quand Mikey, toujours fourré dans les mauvais plans, disparaît et qu’une grosse rançon est demandée, tout le monde pense qu’il a lui-même monté le coup pour récupérer l’argent… surtout qu’il a déjà travaillé dans le passé pour le mafieux Eddie King. Seul JP, son frère, reste persuadé qu’il est réellement en danger et abandonne alors tous ses principes pour tenter de le sauver.

Depuis les grandes réussites de Joe et de Suspect, Nicolas Cage a encore plus accéléré la cadence déjà folle de ses tournages. Depuis ces deux excellents crus, le comédien qui tourne plus vite que son ombre a joué dans 18 films. Dans cette liste, nous sauverons La Sentinelle de Paul Schrader, même si le cinéaste l’a renié pour cause de différends avec le studio LionsGate, The Runner d’Austin Stark, Le Casse des frères Brewer, Dog Eat Dog également de Paul Schrader, Snowden d’Oliver Stone dans lequel le comédien fait une petite participation, USS Indianapolis de Mario Van Peebles. A l’heure où cet article est rédigé, Nicolas Cage a déjà emballé quatre autres longs métrages actuellement en post-production, dont le très attendu Mom and Dad de Brian Taylor. Autant dire que l’acteur n’a pas chômé, en raison de grands problèmes d’argent, de problèmes avec le fisc, d’un comptable véreux, d’un divorce difficile, anyway, Nicolas Cage est obligé de tourner et dans le lot, forcément, certains films s’avèrent particulièrement mauvais. Toutefois, Arsenal parvient à échapper à cette catégorie, même si le film est avant tout une série B.

Dans Arsenal, il n’y joue qu’un rôle secondaire, mais alors quel personnage ! Prothèse nasale, lunette de soleil, peau grêlée, moustache épaisse, moumoute improbable, il y est absolument remarquable et disons-le, on ne voit que lui. Arsenal est un petit thriller bien emballé par Steven C. Miller, réalisateur né en 1981, devenu un spécialiste des films d’action à petit budget. On lui doit un The Aggression Scale avec Ray Wise, Silent Night – sorti en France sous le titre Bloody Christmas – avec Malcolm McDowell et Jaime King, Extraction, First Kill et Marauders avec Bruce Willis. Il vient tout juste de terminer la suite d’Evasion, intitulée Escape Plan 2 : Hades, avec Sylvester Stallone, Dave Bautista, Jaime King et 50 Cent. Autant dire que le metteur en scène ne fait pas dans la dentelle, mais que son efficacité a été remarquée. C’est le cas pour Arsenal.

Sur une trame archi-rabattue, Steven C. Miller soigne sa photographie et sa mise en scène avec des couleurs cramées inspirées des films de Michael Bay et des ralentis stylisés parfois proches du bullet-time. On ne s’ennuie pas devant Arsenal, grâce à ses acteurs, en particulier Nicolas Cage comme nous le disions précédemment dans le rôle d’Eddie King. Survolté, enflammé, le comédien joue ici un immonde salopard cocaïné et psychotique. Extrêmement violent – le film a d’ailleurs été interdit aux moins de 17 ans aux Etats-Unis – son personnage de boss de la pègre nous est présenté en train de passer à tabac une pauvre victime à coups de batte de baseball, en lui fracassant les dents, devant les yeux d’un gamin. Bien que peu présent à l’écran durant la première heure, Nicolas Cage porte le troisième acte de manière percutante, notamment lors d’une baston sanglante avec son frère, interprété par un certain Christopher Coppola…le propre frangin de l’acteur ! A voir pour le croire et surtout pour se rendre compte encore une fois à quel point Nicolas Cage est toujours immense. D’ailleurs, Arsenal apparaît comme une suite non officielle de Deadfall, réalisé par Christopher Coppola en 1993, dans lequel Nicolas Cage arborait déjà le même look et interprétait le personnage d’Eddie !

Au générique, John Cusack, également spécialiste des DTV entre deux belles performances au cinéma (Love & Mercy, Maps to the Stars), qui est ici plus discret et moins présent à l’écran. Contrairement à l’excellent Suspect, il ne donne pas la réplique à Nicolas Cage ici et se contente de jouer le flic de service en apportant son nom porteur au projet. Arsenal est surtout porté par Adrian Grenier, connu pour avoir joué le boyfriend d’Anne Hathway dans Le Diable s’habille en Prada et surtout Vince dans la série Entourage, ainsi que par Johnathon Schaech, le Jonah Hex de la série DC : Legends of Tomorrow. Tout ce beau petit monde cohabite, fait le job, conscient de ne pas participer au film du siècle, mais au service d’un réalisateur qui fait du bon boulot en s’inspirant parfois de l’univers du roman graphique et qui possède donc un atout majeur avec la présence d’un Nicolas Cage inspiré et explosif dans le rôle du badguy. Sa prestation, qui rappelle à quel point le bougre est sublime dans les rôles de pourris, vaut bien qu’on accorde 1h35 à Arsenal !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Arsenal, disponible chez Marco Polo Production, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et muet. Le visuel de la jaquette fait la part belle aux deux têtes d’affiche les plus célèbres, entourant ici Adrian Grenier. Dommage que l’éditeur n’ait pas repris l’affiche originale. Aucun supplément, ni de chapitrage d’ailleurs.

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p – AVC. L’éditeur prend soin du thriller de Steven C. Miller et livre un master HD très convaincant et au transfert soigné. Respectueux des volontés artistiques originales, la copie se révèle solide, probablement une des plus belles éditions HD de Marco Polo Production, alliant des teintes chaudes, ambrées et dorées (des filtres jaunes-orangés pour résumer) avec les bleus électriques du ciel. Le piqué est parfois doux en raison des partis pris esthétiques, les blancs sont cramés, les arrière-plans manquent de profondeur, mais ces légers bémols n’entravent en rien les conditions de visionnage. Les contrastes sont tranchants, la colorimétrie joliment laquée, le relief omniprésent et les visages, en particulier la trogne de Nicolas Cage avec son faux nez, sont détaillés à souhait.

Du côté acoustique, les mixages français et anglais DTS-HD Master Audio 5.1 créent un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique et à quelques effets latéraux. Des ambiances naturelles percent les enceintes arrière sans se forcer mais avec une efficacité chronique. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. C’est assez rare pour qu’on le signale, Nicolas Cage n’est pas doublé en français par l’excellent Dominique Collignon-Maurin. Autant vous dire que la surprise est de taille… mauvaise même. A éviter donc. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale, et le changement impossible à la volée.

Crédits images : © Marco Polo Production / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / L’Enfer au-dessous de zéro, réalisé par Mark Robson

L’ENFER AU-DESSOUS DE ZÉRO (Hell Below Zero) réalisé par Mark Robson, disponible en DVD le 23 mai 2017 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Alan Ladd, Joan Tetzel, Basil Sydney, Stanley Baker, Joseph Tomelty, Niall MacGinnis

Scénario : Alec Coppel, Max Trell, Richard Maibaum d’après le roman de Hammond Innes

Photographie : John Wilcox

Musique : Clifton Parker

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1954

LE FILM

Lorsque son père capitaine est porté disparu en Antarctique, sa fille Judie Nordhall part immédiatement à sa recherche. En chemin, elle rencontre un ancien officier de la Navy, Duncan Craig. Ce dernier, qui tombe immédiatement sous le charme de la jeune femme, s’engage comme matelot sur le baleinier qui doit effectuer les recherches.

Entre Les Bérets rouges de Terence Young et La Brigade héroïque de Raoul Walsh, Alan Ladd trouve le temps de tourner un petit film d’aventures bien connu des cinéphiles, L’Enfer au-dessous de zéroHell Below Zero, produit par Albert R. Broccoli, bien avant qu’il ne lance la saga James Bond. Au sommet de sa carrière, le comédien sort du triomphe du western L’Homme des vallées perduesShane de George Stevens. En dehors de ses deux collaborations avec le cinéaste Delmer Daves sur L’Aigle solitaire (1954) et L’Or du Hollandais (1958), Alan Ladd ne parviendra jamais à retrouver les faveurs du public. Il sombre progressivement dans l’alcool et les médicaments jusqu’à sa mort prématurée en 1964 à l’âge de 50 ans.

L’Enfer au-dessous de zéro est un divertissement désuet réalisé par le canadien Mark Robson (1913-1978), ancien monteur de Jacques Tourneur sur La Féline et Vaudou, mais aussi d’Orson Welles sur La Splendeur des Amberson. Eclectique, mais aussi inégal, on lui doit Le Champion avec Kirk Douglas (1949), Le Procès avec Glenn Ford (1955), Plus dure sera la chute avec Humphrey Bogart (1956), ainsi que deux films de guerre très célèbres, L’Express du colonel Von Ryan avec Frank Sinatra (1965) et Les Centurions avec Anthony Quinn et Alain Delon (1966). L’un de ses derniers films, Tremblement de terre (1974) demeure l’un des fleurons du genre catastrophe. Bon technicien, Mark Robson s’en tire honorablement derrière la caméra sur L’Enfer au-dessous de zéro, même s’il n’est pas aidé par des transparences omniprésentes et surtout très mal fichues, ainsi que par l’utilisation de maquettes visibles et rudimentaires, sans oublier des décors en carton-pâte supposés représenter l’Antarctique. Tout est fait pour nous faire croire qu’Alan Ladd déambule sur le pont d’un baleinier, mais malgré les efforts de l’équipe des effets spéciaux, cela ne fonctionne pas. Mark Robson incruste des images très impressionnantes, pour ne pas dire horribles, provenant d’un documentaire sur la chasse à la baleine, qui pourraient encore heurter les défenseurs de la cause animale et les spectateurs les plus sensibles.

L’histoire ne manque pas d’attraits. Le Baker, un navire de Bland Nordhal Whaling company signale la disparition en mer de son capitaine, Bernd Nordhah, qui se serait suicidé. Aussitôt informés, Judie, la fille du disparu et son associé John Bland s’envolent pour l’Antarctique dans l’espoir de retrouver sa trace. Sur le chemin Judie fait la connaissance de Duncan Craig, un ancien officier de la Navy à qui elle confie sa crainte que son père ait pu être assassiné. Séduit, Duncan se fait embaucher comme premier matelot sur le baleinier où Judie embarque. Le médecin du bord, que l’ivresse rend bavard, lui raconte que Nordhal a très certainement été victime de son associé et ancien fiancé de Judie. La magie du Technicolor opère, mais L’Enfer au-dessous de zéro vaut essentiellement pour la prestation d’Alan Ladd, élégant, sourire en coin, regard de velours, qui n’hésite pas à donner du poing et qui s’en sort d’ailleurs pas mal dans les bagarres. A ses côtés, l’actrice Joan Tetzel, vue dans Le Procès Paradine d’Alfred Hitchcock, qui a peu tourné pour le cinéma, se révèle charmante et l’alchimie fonctionne avec son partenaire. Le badguy, c’est le vénéneux Stanley Baker avec sa trogne taillée à la serpe, qui tient la dragée haute à Alan Ladd et qui s’avère parfait en salaud de service.

L’Enfer au-dessous de zéro reste un spectacle agréable, qui se laisse agréablement suivre grâce au talent de ses comédiens, à ses nombreuses péripéties sur les eaux glacées de l’Antarctique et à son petit souffle romanesque.

LE DVD

Le DVD de L’Enfer au-dessous de zéro, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Comme pour ses titres western et polars, l’éditeur a confié la présentation de L’Enfer au-dessous de zéro à l’imminent Patrick Brion (7’). L’historien du cinéma évoque le tournage du film en Angleterre et ne cache pas son plaisir d’avoir revu Alan Ladd à l’écran en avouant que cela faisait longtemps qu’il n’avait pas visionné un long métrage avec le comédien. Brion revient rapidement sur le statut de star de l’acteur, tout en donnant quelques indications sur le réalisateur Mark Robson et l’usage des stockshots.

Sidonis nous gratifie ensuite d’un documentaire rétrospectif sur Alan Ladd réalisé en 1998 et intitulé Le Véritable homme tranquille (57’). Constitué d’archives personnelles, de photos, de films de famille, d’extraits, de bandes-annonces d’époque, ce module croise également les interventions – doublées par une voix-off française – de quelques acteurs (Lizabeth Scott , Mona Freeman, Peter Hansen, Paricia Medina), réalisateurs (Edward Dmytryk), d’historiens du cinéma et de proches (David Ladd, le fils du comédien). La réalisation est classique, comme une illustration en images de la fiche Wikipédia d’Alan Ladd (on y brasse son enfance, le trauma avec le suicide de sa mère devant ses yeux, ses débuts, ses premiers succès, ses problèmes avec l’alcool et les médicaments, sa vie de famille, son rapport avec les femmes), mais l’ensemble est suffisamment intéressant et n’est pas avare en images rares voire inédites.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos et d’affiches d’exploitation.

L’Image et le son

Si L’Enfer au-dessous de zéro a un temps été annoncé en Haute-Définition par Sidonis Calysta, force est de constater que l’éditeur a dû revoir ses ambitions puisqu’il ne propose le film de Mark Robson qu’en DVD. Vu l’état de la copie, cela semble plus raisonnable. Non pas que le master 1.33 (16/9) soit « ultra » mauvais, mais en raison de l’étalonnage des couleurs qui laisse parfois vraiment à désirer, tout comme le lissage vraiment trop important du grain original ! A tel point que les transparences, déjà mauvaises à la base, donnent à l’ensemble un côté artificiel assez laid. La gestion des contrastes est elle aussi aléatoire, parfois pendant une même séquence. Un effet de pompage n’a pu être équilibré, quelques scories demeurent, tâches, points, fils en bord de cadre et rayures verticales, les stockshots sont tout de suite visibles (ou moins, puisqu’ils sont souvent flous), bref, ce n’est pas très reluisant tout ça.

Que votre choix se porte sur la version originale (avec sous-titres français imposés) ou la version française, la restauration est en revanche fort satisfaisante ici. Aucun souffle constaté sur les deux pistes, l’écoute est claire, frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes et la musique sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise, mais le confort acoustique est assuré sur les deux options. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.

Crédits images : © Columbia / Sidonis Calysta / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr