Test DVD / Indiscret, réalisé par Stanley Donen

INDISCRET (Indiscreet) réalisé par Stanley Donen, disponible en DVD le 21 octobre 2019 chez Les Films du Paradoxe

Acteurs : Cary Grant, Ingrid Bergman, Cecil Parker, Phyllis Calvert, David Kossoff, Megs Jenkins…

Scénario : Norman Krasna d’après sa pièce de théâtre

Photographie : Frederick A. Young

Musique : Richard Rodney Bennett, Ken Jones

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

De retour de Londres, une célèbre comédienne, célibataire endurcie, tombe sous le charme d’un ami de son beau-frère. Fonctionnaire de l’OTAN, il se présente comme l’un de ses plus fervents admirateurs et l’invite à assister à son discours. Mais cet homme séduisant cache un gros défaut : il est un célibataire convaincu ! Pour éviter de s’engager en amour, il fait croire que son épouse refuse le divorce…

En 1958, le cinéaste Stanley Donen (1924-2019) a le vent en poupe ! 14 films réalisés en à peine dix ans ! Ancien danseur et collaborateur de Gene Kelly, il devient réalisateur à la fin des années 1940 avec Un jour à New York, film musical mettant en scène son acolyte et Frank Sinatra. Sa carrière est lancée et sera placée sous le signe de la comédie-musicale, dont le film le plus emblématique restera à jamais Chantons sous la pluie (1952). Dans les années 1950, Stanley Donen enchaîne les projets et dirige les plus grands, les plus grandes surtout, comme Janet Leigh, Debbie Reynold, Cyd Charisse, Audrey Hepburn et Doris Day. En 1957, il signe Embrasse-la pour moi Kiss Them for Me avec Cary Grant, qui donne la réplique à la sulfureuse Jayne Mansfield. Enchantés par cette collaboration le comédien et Stanley Donen décident de remettre le couvert tout de suite après. Ce sera IndiscretIndiscreet, adapté de la pièce de théâtre de Norman Krasna, scénariste émérite et auteur du formidable La Femme la plus riche du monde (1934) de William A. Seiter et du légendaire Noël Blanc White Christmas (1954) de Michael Curtiz. Cette comédie très élégante vaut essentiellement pour son couple vedette, Cary Grant et Ingrid Bergman, réunis à l’écran douze ans après le chef d’oeuvre d’Alfred Hitchcock, Les EnchaînésNotorious.

Anna Kalman, célèbre comédienne, est de retour à Londres après avoir raccourci son voyage à Majorque. Ce retour précipité surprend sa sœur Margaret et son mari Alfred. Célibataire endurcie, Anna tombe au premier regard sous le charme de Philip Adams, invité par Alfred. Haut fonctionnaire de l’OTAN venu de San Francisco, Philip se présente comme l’un des plus fervents admirateurs de la comédienne et l’invite à assister à son discours. Ce séduisant homme cache cependant un gros défaut : il est lui aussi un célibataire convaincu ! Pour ne pas risquer l’engagement avec la jolie Anna, il lui fait alors croire qu’il a une épouse qui lui refuse le divorce.

Alors certes, Indiscret demeure essentiellement du théâtre filmé, mais tout de même, quelle classe ! On suivrait ces comédiens – nommés tous les deux aux Golden Globes en 1959 – partout, même s’ils restaient face à face sans rien dire pendant 90 minutes. D’ailleurs, c’est à peu près le cas au cours d’une séquence, de trente secondes seulement, durant laquelle les deux têtes d’affiche, habillés par Pierre Balmain et Christian Dior, prennent l’ascenseur et se regardent sans bouger, tandis que la cabine les emmène quelques étages plus haut, dans l’appartement luxueux de la demoiselle, où ils tomberont dans les bas l’un de l’autre. Si Les Enchaînés avait rendu fou les pontes du Code Hays avec ce long baiser de deux minutes, entrecoupé de dialogues murmurés du bout des lèvres, Indiscret joue la carte du silence qui en dit long sur l’attraction sexuelle des deux individus. Cary Grant (1904-1986), qui a toujours déclaré qu’il s’agissait de son film préféré, est évidemment parfait en séduisant fonctionnaire, célibataire endurci, qui ne souhaite pas se marier et encore moins renoncer aux femmes. A 54 ans, les cheveux légèrement grisonnants, il entamait alors la dernière partie de sa carrière, avant de prendre sa retraite en 1966. Sa spontanéité, la fraîcheur de son jeu, son élégance raffinée n’ont pas bougé depuis les années 1930 et l’on se souviendra encore longtemps de la séquence irrésistible durant laquelle il entame une danse écossaise endiablée devant une foule admirative.

Ingrid Bergman commençait également à se faire rare sur les écrans et ne devait encore apparaître qu’une dizaine de fois au cinéma. Suprêmement chic, même le visage barbouillé de crème hydratante, la comédienne démontre son potentiel comique, ce qu’elle aura finalement très peu l’occasion de faire. L’alchimie avec son partenaire est évidente (quelle scène de coup de foudre !) et fait le sel de cette histoire somme toute classique, mais redoutablement efficace, drôle et savoureuse. De son côté, Stanley Donen tente d’aérer la pièce de théâtre originale. S’il n’est pas Billy Wilder ou George Cukor, il y parvient la plupart du temps, même si l’action qui se déroule souvent chez Anna, peut parfois paraître étouffante. Heureusement, les répliques fusent à cent à l’heure et apportent le vent de fraîcheur nécessaire pour emporter le spectateur dans le sillage des comédiens qui se démènent avec autant d’énergie qu’au début de leurs carrières respectives.

Stanley Donen en profite également pour jouer avec la censure qui interdisait alors de montrer un homme et une femme dans le même lit, en utilisant le procédé du split-screen, qui grâce à l’inventivité de la mise en scène parvient quand même à réunir les personnages sous les draps, au cours d’une conversation anodine au téléphone. Procédé qui sera repris l’année suivante par Michael Gordon dans Confidences sur l’oreillerPillow Talk.

Indiscret est une comédie romantique simple, mais peut-elle l’être vraiment quand elle est portée par deux des plus beaux et talentueux acteurs du monde ?

LE DVD

Nouvel éditeur dans nos colonnes, Les Films du Paradoxe nous a confiés quelques-uns de leurs titres sortis en DVD. Un catalogue alléchant qui propose des titres de George Marshall (Houdini le grand magicien avec Tony Curtis et Janet Leigh), Hugo Fregonese (Le Souffle sauvage avec Gary Cooper et Barbara Stanwyck), Jack Arnold (Escale à Tokyo avec Lana Turner), Delbert mann (Le Téléphone rouge avec Rock Hudson), Blake Edwards (Vacances à Paris avec Tony Curtis) et bien d’autres. Le DVD d’Indiscret prend la forme d’un slim-digipack. Très élégant, cet objet se compose de trois photogrammes tirés du film qui nous intéresse. A l’intérieur, vous trouverez un petit catalogue indiquant les films disponibles chez Les Films du Paradoxe. Belle sérigraphie. Le menu principal est fixe et musical.

Pas de suppléments.

L’Image et le son

Voilà un Stanley Donen qui demeurait inédit dans les bacs français ! Le master proposé ici par Les Films du Paradoxe présente un grain épais, qui évite le côté grumeleux de certaines copies trouvées on ne sait où et qui reste plutôt bien géré du début à la fin. Le piqué est forcément émoussé, mais l’image est stable, très propre et les couleurs diffuses sont élégantes. Quelques décrochages sur les fondus enchaînés sont constatés, ainsi que de très infimes poussières. Un transfert pas désagréable du tout.

Seule la version originale est proposée ici avec les sous-titres français non imposés. A l’exception de quelques dialogues sensiblement chuintants, l’écoute est ici fluide et sans bavure.

Crédits images : © Les Films du Paradoxe / Paramount Pictures / Hollywood Classics International / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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