EXFILTRÉS réalisé par Emmanuel Hamon, disponible en DVD le 17 juillet 2019 chez Metropolitan Vidéo
Acteurs : Swann Arlaud, Finnegan Oldfield, Jisca Kalvanda, Charles Berling, Kassem Al Khoja, Ethan Palisson, Sophie Cattani, Andrino Mpioso, Driss Ramdi, Mathieu Lourdel…
Scénario : Emmanuel Hamon, Benjamin Dupas
Photographie : Thomas Bataille
Musique : Armand Amar
Durée : 1h38
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
A Paris, deux jeunes activistes montent une opération d’exfiltration à hauts risques pour ramener en France une mère et son jeune fils pris au piège dans l’enfer de Daech.
Ancien assistant de Régis Wargnier sur Indochine (1991), de Diane Kurys sur Après l’amour (1991), de Patrice Chéreau sur La Reine Margot (1994), de Robert Altman sur Prêt-à-porter (1994) et de Philippe Lioret sur Tenue correcte exigée (1996), Emmanuel Hamon possède un C.V. fort recommandable. Il se tourne vers le documentaire politique, social et historique. Fort de cette expérience, le réalisateur signe un premier long métrage, Exfiltrés, qui reflète ses préoccupations, sa connaissance du terrain, des enjeux politiques, du terrorisme. Véritable tour de force, Exfiltrés est un thriller haut de gamme inspiré par une histoire vraie, merveilleusement interprété, couillu, tendu, passionnant et qui fait froid dans le dos.
Faustine est une assistante sociale récemment convertie à l’Islam. En 2015, elle part en Turquie à l’appel de l’État islamique, avec son fils Noah, âgé de seulement 5 ans. Elle doit travailler dans une maternité. Mais peu à peu, elle se rend compte que tout n’est pas comme elle l’espérait. Alors qu’elle se trouve à Raqqa en Syrie, elle appelle à l’aide son mari Sylvain, infirmier à Paris. Deux activistes – le Français Gabriel et le Syrien Adnan – sont touchés la détresse de Sylvain, démuni. Ils vont ainsi tenter de monter une opération très risquée pour les exfiltrer.
Juste après la formidable comédie policière Un beau voyou, Swann Arlaud et Charles Berling se donnent à nouveau la réplique dans Exfiltrés. Le ton est certes différent, mais l’alchimie entre les deux comédiens est une fois de plus évidente. Emmanuel Hamon s’entoure d’un casting solide avec également le désormais incontournable Finnegan Oldfield (Nocturama, Réparer les vivants), Jisca Kalvanda (révélation de Divines), les trop rares Sophie Cattani (Tomboy, Chercher le garçon) et Aurélia Petit (Oublier Cheyenne, La Science des rêves), ainsi que le nouveau venu Kassem Al Khoja dans le rôle d’Adnan. Emanuel Hamon prend comme partis pris de ne pas « expliquer » le contexte pour situer son récit, en évitant le « traité de géopolitique expliquant la vérité sur la situation au Moyen-Orient » selon ses dires. On entre de plain-pied dans l’histoire, en 2015, sur le vif, caméra portée. Au spectateur de se mêler aux personnages, d’apprendre à les connaître, de saisir leur mission.
Exfiltrés ne cherche pas facilement l’empathie. D’ailleurs, Gabriel (Finnegan Oldfield) restera le plus énigmatique. Froid, mais déterminé, courageux, le personnage reste aussi trouble et complexe. Même chose en ce qui concerne Faustine, que l’on peut facilement détester pour ce qu’elle a fait à son compagnon en ravissant leur enfant et en s’enfuyant en Syrie, le laissant tout d’abord sans réponse à ses questions. Le film d’Emmanuel Hamon s’appuie sur le montage vif de Yorgos Lamprinos (Jusqu’à la garde de Xavier Legrand), une interprétation exceptionnelle, une photographie qui a de la gueule (Thomas Bataille), un sens du thriller politique évident et fort encourageant, ainsi que des décors naturels – le tournage a eu lieu en Jordanie – impressionnants.
Coécrit par Benjamin Dupas (Vernon Subutex, Dix pour cent, Kaboul Kitchen), Exfiltrés prend aux tripes du début à la fin, sans laisser un moment de répit aux spectateurs. On pense également au très bon Ultimatum d’Alain Tasma, sorti en 2009, qui plongeait Jasmine Trinca et Gaspard Ulliel en pleine guerre du Golfe, ainsi qu’à Terre promise (2004) d’Amos Gitaï avec Rosamund Pike et Anne Parillaud, ou plus récemment au Made in France de Nicolas Boukhrief sorti en 2015 entre les deux attentats parisiens. Le cinéaste passe de Paris à Rakka, sans jamais relâcher la tension, en montrant, sans en rajouter, l’enfer dans lequel Faustine s’est jetée avec son fils de cinq ans. L’émotion est également au rendez-vous avec Swann Arlaud, décidément parfait dans le rôle de Sylvain, le mari et père, plongé dans l’angoisse de ne jamais revoir les siens.
Entre drame intimiste et thriller politique, Exfiltrés est une grande découverte et probablement l’un des meilleurs films de l’année 2019, ni plus ni moins.
LE DVD
Exfiltrés n’est proposé qu’en DVD par Metropolitan. La jaquette reprend le visuel de l’affiche du film. Même chose pour le menu principal, fixe et musical.
Dommage…la section des suppléments est vide en dehors d’un lot de bandes-annonces.
L’Image et le son
Si l’on excepte deux ou trois plans plus doux, ce master standard se révèle irréprochable. Que l’histoire se déroule dans les décors parisiens aux teintes plus froides ou en Syrie, ce DVD restitue brillamment la belle photographie du chef opérateur Thomas Bataille. Le relief est omniprésent, la colorimétrie est vive et chatoyante, le piqué aiguisé comme une lame de rasoir, la clarté de mise et les contrastes d’une densité indiscutable. Le cadre large est magnifiquement exploité, les détails sont légion et la profondeur de champ impressionnante. Superbe DVD sorti encore une fois de l’écurie Metropolitan.
Exfiltrés repose en grande partie sur les dialogues et il ne faut donc pas en attendre beaucoup du mixage Dolby Digital 5.1. Ici, c’est surtout la composition d’Armand Amar (Le Concert) qui jouit d’une spatialisation concrète, même si les ambiances naturelles sont solides sur les frontales comme sur les latérales. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants.