
WILL PENNY, LE SOLITAIRE (Will Penny) réalisé par Tom Gries, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD + Livre le 15 novembre 2024 chez Sidonis Calysta.
Acteurs : Charlton Heston, Joan Hackett, Donald Pleasence, Lee Majors, Bruce Dern, Ben Johnson, Slim Pickens, Clifton James…
Scénario : Tom Gries
Photographie : Lucien Ballard
Musique : David Raksin
Durée : 1h45
Date de sortie initiale : 1967
LE FILM
Will Penny, cowboy sur le retour, se voit confier la surveillance d’un troupeau pour l’hiver. En prenant possession de sa hutte, il la trouve occupée par Catherine et Horace, une femme et son jeune fils, abandonnés par leur guide alors qu’ils entendaient rejoindre leur mari et père. Isolés par la neige, ils pensent devoir cohabiter pendant les mois d’hiver. Mais une bande de rôdeurs à la recherche de Will va contrarier l’idylle naissante entre Will et Catherine.

À juste titre, Will Penny, le solitaire, ou tout simplement Will Penny, est l’un des meilleurs westerns américains des années 1960 et par ailleurs le film que Charlton Heston citait comme étant celui qu’il préférait dans son illustre carrière. À la fin des années 1960, le western américain classique est pour ainsi dire mort, l’Italie ayant repris le flambeau en l’arrangeant à sa sauce et en y intégrant entre autres une violence alors retenue par les studios hollywoodiens. Tom Gries (1922-1977) est connu pour son travail de scénariste, touchant à tous les genres et signant moult histoires pour diverses séries B. Essentiellement à la télévision, Tom Gries se spécialise aussi dans le western et commence à passer derrière la caméra sur une quantité astronomique de séries. Désormais âgé de 45 ans, il pense à nouveau au grand écran et envisage de mettre en scène une histoire qu’il a écrite seul, celle de Will Penny, le solitaire, que l’on conseille à Charlton Heston. Celui-ci, emballé, souhaite un réalisateur de renom, mais Tom Gries reste intraitable, s’il vend son scénario à la Paramount, il sera aussi celui aux manettes. La star, alors entre Khartoum de Basil Dearden et La Planète des singes – Planet of the Apes de Franklin J. Schaffner, rencontre Tom Gries et se laisse facilement convaincre. Il ne regrettera jamais son choix, citant tout le reste de sa vie que Will Penny, le solitaire restera son film favori. Ce western annonce le Nouvel Hollywood, sur le point de naître, offre à Charlton Heston un de ses plus beaux rôles et plonge le spectateur dans un Ouest Américain authentique, qui sent la crasse, le froid, la sueur, qui n’a rien de glamour ou de romanesque, mais qui broie les êtres et où la loi de la jungle laisse les moins préparés sur le bas-côté. Un chef d’oeuvre.


Will Penny, cowboy solitaire approchant la cinquantaine, tue Romulus Quint pour défendre ses deux camarades d’une bande de rôdeurs. Il est ensuite engagé par un propriétaire de ranch pour surveiller du bétail dans les montagnes pendant le rude hiver, mais il est rattrapé par le père et les frères de celui qu’il a tué. Laissé mourant, il se réfugie dans sa cabane où se trouvent déjà une jeune femme, Catherine Allen, et son fils, abandonnés par leur guide. Il n’a pas eu le cœur de les en chasser. Catherine va le soigner, Will découvre la vie et l’amour auprès d’une femme intelligente et volontaire, il est heureux de la compagnie du jeune Horace. Mais la bande de rôdeurs surgit à nouveau, terrorise Will, Catherine et Horace pendant plusieurs jours. Will parvient à s’enfuir pour trouver de l’aide.


Certains cinéphiles connaissent Tom Gries pour deux autres westerns. Le Solitaire de Fort Humboldt – Breakheart Pass (1975) avec Charles Bronson et Richard Crenna, un ersatz d’Agatha Christie particulièrement réjouissant, ainsi que Les 100 fusils – 100 Rifles, avec Burt Reynolds et surtout RAQUEL WELCH (les capitales s’imposent), inoubliable, qui crève l’écran, le pulvérise, l’incendie de sa présence érotique. Si sa carrière au cinéma restera toutefois confidentielle, et ce malgré deux autres collaborations avec Charlton Heston pour Number One (1969) et Le Maître des îles – The Hawaiians (1970), Will Penny, le solitaire est et demeure son plus grand film.


En réalité, l’histoire est basée sur un épisode de la série télévisée créée et produite par Sam Peckinpah de 1960, The Westerner, avec Brian Keith, intitulé « Line Camp », écrit et réalisé par Tom Gries. Ce dernier en reprend la trame et bénéficie d’un budget plus conséquent, grâce à la présence de Charlton Heston dans le rôle-titre. D’emblée, on se prend d’affection pour ce cowboy vieillissant, qui s’éprend d’une inconnue (merveilleuse Joan Hackett) qui se rend en Californie avec son jeune fils, afin d’y retrouver son mari. Alors que l’hiver passe, Will et Catherine tombent amoureux, et Will développe une affection paternelle pour Horace, également en manque de père. Mais c’était sans compter la présence de la famille Quint, qui a quelques comptes à régler avec Will.


La première partie quasi-documentaire, plante le décor, le quotidien du personnage principal, ses liens avec ses compagnons, dont les jeunes Lee Majors et Anthony Zerbe, présents à la télé dans des séries de western. Will Penny, désormais au chômage après une mission arrivée à son terme décide de partir vers le sud pour échapper à l’hiver qui approche. Un matin, Blue, l’un de ses amis s’apprête à tirer sur un wapiti près du lit d’une rivière. Mystérieusement, l’élan est abattu par un tire provenant des environs. Alors que Blue et Dutchy s’apprêtent à s’emparer de la bête, ils rencontrent le tireur, un « rawhider » et sa famille. Les deux groupes se disputent le droit à la viande. Des coups de feu éclatent et Will surgit, tire et tue l’un des fils du Preacher. Ce dernier jure une vengeance biblique. Dutchy se blesse accidentellement lors de l’échange. Le trio part alors à la recherche d’un médecin et se rend d’abord dans un magasin de randonnée voisin, où ils rencontrent Catherine Allen et son fils Horace. Après avoir bu quelques verres de whisky, ils se dirigent vers la ville la plus proche et laissent Dutchy chez le médecin. Blue décide de chercher du travail en ville, tandis que Will continue seul. Il tombe sur un cheval sans cavalier et découvre un cow-boy mort, jeté de sa selle. Will remet le corps au ranch Flat Iron pour lequel le cow-boy a roulé et se voit proposer un emploi. Will s’engage à parcourir les confins du ranch Flat Iron pendant l’hiver. En arrivant en haut de la chaîne, il trouve Catherine et Horace, hébergés dans la cabane du cavalier après avoir été abandonnés par leur guide. Il part inspecter la clôture, les avertissant qu’ils devront partir à son retour dans une semaine. Le lendemain matin, alors que Will dort dehors, près de la clôture, il est pris en embuscade et sauvagement battu et poignardé par le Preacher et ses fils. Ils le dévalisent et le laissent pour mort, mais il se traîne jusqu’à la cabane, où Catherine le soigne lentement.


C’est là que Will Penny change de braquet, suspend le temps, pour que Will et Catherine puissent se découvrir, tandis que le vieux cowboy (solitaire, analphabète, mais pas tant sauvage que ça) se prend d’affection pour Horace et réciproquement. Tom Gries foudroie en plein coeur, en donnant à son protagoniste une chance qu’il n’a jamais eue jusqu’à présent. Celle d’aimer, d’être aimé et de, pourquoi pas, fonder une famille. Mais la veille de Noël, la famille Quint (Donald Pleasence, bien allumé en prêcheur fanatique, Bruce Dern, génial) fait irruption dans la cabane, force Will à effectuer les corvées et contraint Catherine à choisir l’un de ses fils, vauriens, belliqueux et irascibles. Will et Catherine vont alors tenter le tout pour le tout.


Il n’est pas impossible que vous ne puissiez retenir vos larmes à la fin de Will Penny, le solitaire. Ce dénouement, anti-Hollywoodien, bouleversant, inoubliable, restera longtemps gravé dans votre mémoire. Impeccablement réalisé par un Tom Gries sans cesse inspiré, solidement épaulé le légendaire chef opérateur Lucien Ballard (7 secondes en enfer, Les 4 fils de Katie Elder, Le Tueur s’est évadé), Will Penny, le solitaire est un magnifique western doublé d’un drame existentiel, intimiste et psychologique, dont résonne encore le thème principal signé David Raksin (Quinze jours ailleurs, Les Ensorcelés). Inoubliable donc.


LE COMBO BLU-RAY + DVD + LIVRE
Will Penny avait déjà connu une première vie en DVD chez Paramount et ce depuis 2003. Après une réédition en 2006, plus aucun signe de vie de ce chef d’oeuvre. 2024, Will Penny, le solitaire revient en DVD et en Combo Blu-ray + DVD + Livre chez Sidonis Calysta, dans la collection Silver. Une splendide mouture. Les deux disques reposent dans un Mediabook très élégant et le livre de 50 pages écrit par Jean-François Giré donne moult informations sur le film de Tom Gries. Les conditions de production et de tournage, les westerns de Charlton Heston, la carrière de Tom Gries sont entre autres les points abordés et le tout formidablement illustré. Le menu principal est animé et musical.

Jean-François Giré intervient également dans un bonus en vidéo (27’30). Celles et ceux qui auront lu le livre joint à cette édition retrouveront les mêmes arguments que dans l’ouvrage. Cette présentation, très bonne au demeurant, contient des spoilers et n’est à visionner qu’après avoir vu le film. Ce qui devrait être logiquement le cas chaque fois, mais sait-on jamais. Toujours est-il que Jean-François Giré s’exprime volontiers sur Will Penny, le solitaire, qui ne l’avait pas tant marqué à sa sortie que de nos jours, et qui avait pourtant été encensé à sa sortie par les critiques et les cinéphiles. Le spécialiste du western revient sur ce western crépusculaire, réaliste, « sans doute l’un des meilleurs réalisés sur la vie quotidienne des cowboys et sur cette période ». Le réalisateur Tom Gries, les conditions de tournage, la psychologie des personnages sont aussi largement évoqués.


Nous trouvons un petit supplément fort sympathique, dans lequel Charlton Heston rend visite à Rod Redwing, le plus grand expert en armes d’Hollywood (4’45). Dans son arsenal privé (« le plus célèbre du monde, situé dans les studios Paramount ») sont ainsi disposées des milliers d’armes, « certaines étant capables de tirer à balles réelles » nous précise-t-on. Alec, si tu nous lis…La star débarque afin de choisir son arme pour Will Penny, le solitaire, dont les prises de vues sont sur le point de débuter.




Sidonis Calysta a ensuite mis la main sur deux modules présents sur l’édition DVD de 2003. Dans le premier (3’25), Charlton Heston et John Gries (le fils de Tom Gries, qui interprète Horace dans Will Penny) s’expriment sur le casting du film. Le second bonus (13’20) convie les mêmes intervenants, ainsi que l’historien du western Miles Hood Swarthout, qui parlent cette fois de la production, du tournage, de l’accueil et de la pérennité du film.



Une fois de plus et uniquement sur le Blu-ray, l’éditeur joint le long documentaire consacré à Charlton Heston réalisé en 1995 (50’), déjà proposé sur d’autres titres de la collection consacrée à la star hollywoodienne. Le comédien revient sur son parcours, les grandes étapes de sa carrière, ses rôles emblématiques (et il y en a un paquet), ainsi que sur ses grandes collaborations, tandis que sa fille, Gregory Peck, Carroll Baker, Janet Leigh, le producteur Walter Seltzer et bien d’autres s’expriment sur l’acteur et l’homme qu’ils ont côtoyé dans la vie privée. De nombreux extraits de films viennent illustrer ces très beaux propos, ainsi que des archives personnelles et des images de tournage.








L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Sidonis Calysta édite Will Penny, le solitaire en Blu-ray, dans une version restaurée. Dès le générique d’ouverture, la copie affiche une remarquable propreté. La texture argentique est préservée et solidement gérée, les couleurs ne déçoivent jamais, aucun fourmillement constaté. La copie HD au format 1080p trouve un équilibre fort convenable jusqu’à la fin. Le piqué est appréciable, les contrastes bien gérés, le cadre large n’est pas avare en détails.Will Penny n’a jamais paru aussi net et lumineux qu’à travers ce Blu-ray.

L’éditeur ne propose pas un inutile remixage 5.1, mais encode les versions anglaise et française en DTS-HD Master Audio mono 2.0. Passons rapidement sur la version française au doublage très réussi (Michel Gatineau prêtant ici son superbe timbre à Charlton Heston), mais dont les voix paraissent souvent sourdes et confinées. La version originale s’avère plus riche, vive, propre et aérée.


Crédits images : © Sidonis Calysta / Paramount Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr