Test Blu-ray / Vénus en fourrure, réalisé par Massimo Dallamano

VÉNUS EN FOURRURE (Venere in peliccia – Le Malizie di Venere) réalisé par Massimo Dallamano, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 4 mars 2025 chez Artus Films.

Acteurs : Laura Antonelli, Régis Vallée, Loren Ewing, Renate Kasché, Werner Pochath, Mady Rahl, Wolf Ackva, Peter Heeg, Josil Raquel…

Scénario : Fabio Massimo, d’après l’oeuvre de Leopold von Sacher-Masoch

Photographie : Sergio d’Offizi

Musique : Gianfranco Reverberi

Durée : 1h23

Date de sortie initiale : 1969

LE FILM

Le romancier Séverin, en quête d’un sujet pris sur le vif, assiste par un trou aménagé dans le mur au spectacle des plaisirs de Wanda, une célèbre call-girl arrivée pour se reposer dans l’auberge où il séjourne. Repris alors par une obsession érotique qui remonte à sa plus tendre enfance, Séverin décide de posséder Wanda.

Laura Antonelli begins…enfin, pas vraiment. En effet, la belle (euphémisme) avait déjà dévoilé ses charmes en 1966 dans l’improbable et frappadingue L’Espion qui venait du surgelé Le spie vengono dal semifreddo de Mario Bava, dans lequel, alors âgée de 25 ans, elle illuminait le film de son sex-appeal en passant quasiment tout le métrage en petite nuisette affriolante. 1969, année érotique, mais pas que(eue). Alors qu’elle apparaît dans Exécutions Un detective de Romolo Guerrieri, distribué dans les salles italiennes, Laura Antonelli tient le rôle-titre de Vénus en fourrure Venere in peliccia de Massimo Dallamano (1917-1976), coproduction germano-helvético-italienne, qui n’aura pas l’honneur de sortir de l’autre côté des Alpes, ou tout du moins dans une combinaison de salles restreintes, avant d’être rapidement retiré de la circulation en raison de la censure. Elle y fait pourtant sensation en s’affichant pour la première fois dans le simple appareil et ce à de multiples reprises (et dès les premières secondes), dans quelques scènes érotiques assez osées pour l’époque. C’est en découvrant ce film (et sa prestation) dans quelques copies qui circulaient sous le manteau, que des producteurs et réalisateurs italiens décident de l’engager peu de temps après, jusqu’à exploser littéralement avec les triomphes successifs de Ma femme est un violon Il merlo maschio de Pasquale Festa Campanile et du mythique MaliciaMalizia de Salvatore Samperi. Une star est née, ou est sur le point de naître dans Vénus en fourrure, romance dramatique évidemment inspirée de l’oeuvre de Leopold von Sacher-Masoch (le « masochisme » vient de son nom) publiée en 1870, mais librement et qui donne matière au réalisateur Massimo Dallamano, pour expérimenter le cadre et ses remarquables recherches plastiques. Ainsi, Laura Antonelli apparaît comme étant un fascinant « objet » à sculpter et si la comédienne est parfois maladroite dans son jeu, elle reste encore aujourd’hui l’une des plus fascinantes créatures de l’histoire du cinéma.

Séverin, réside dans un hôtel au bord d’un lac pour travailler sur son prochain livre. Arrive alors Wanda, un mannequin au pouvoir de séduction hypnotique. Séverin va d’abord espionner discrètement Wanda sous sa douche, se promener nue dans son manteau en fourrure, ou bien encore se donner à des inconnus. Elle lui rappelle ses premiers émois érotiques de son enfance. Puis il va l’entraîner dans une relation sadomasochiste sulfureuse.

Après que Laura Antonelli soit devenue un sex-symbol en Italie, pour ne pas dire dans le monde entier, le film de Massimo Dallamano a été remonté, agrémenté de quelques scènes de procès (pour remplacer celles de sexe) et rebapstisé Le Malizie du Venere, afin de surfer sur le succès colossal (près de 12 millions d’entrées) de Malicia, pour sortir enfin sur les écrans italiens en 1975. Une version forcément rejetée par le cinéaste. En ce qui concerne l’oeuvre originale, nous reconnaissons la griffe de son auteur, celle de Massimo Dallamano donc, brillant formaliste, ancien directeur de la photographie de renom (L’Homme aux cent visages de Dino Risi, les deux premiers volets de la Trilogie du Dollar), qui comme metteur en scène ne comptait alors qu’un western (Bandidos) et un giallo (Le Tueur frappe trois foisLa Morte non ha sesso). Rétrospectivement parlant, les fans du réalisateur retrouveront certaines similarités avec ce que beaucoup considèrent comme étant son chef d’oeuvre, Mais… qu’avez vous fait à Solange ?Cosa avete fatto a Solange?, notamment dans cette manière de filmer les corps et leur contact avec la nature.

Vénus en fourrure s’éloigne du roman de Sacher-Masoch, qui inspirera aussi Jess Franco et bien plus tard Roman Polanski, mais en retient ce jeu du chat et de la souris entre Severin et Wanda. Le scénario imputable au méconnu Fabio Massimo (et pour cause, puisqu’il s’agit de sa seule incursion au cinéma) est sans doute un poil trop bavard, mais soyons honnêtes, le spectateur (pour ne pas dire essentiellement la gent masculine surtout) n’aura d’yeux que pour Laura Antonelli, filmée sous tous les angles, mise en valeur par une photographie léchée du grand Sergio D’Offizi (Détenu en attente de jugement, Les Sorcières du bord du lac, Cannibal Holocaust). Le thème de la passion perverse est bien abordé et à ce titre, l’acteur Régis Vallée (très rare au cinéma) s’en tire fort bien dans le registre de l’ambiguïté.

Souvent captivant à regarder et à analyser, Vénus en fourrure bénéficie de superbes décors naturels, d’un rythme vif, d’un montage soigné et resserré (1h20, montre en main), sans oublier un humour noir qui irrigue le récit du début à la fin. Si certains parallèles auraient pu être évités (surtout celui de la jument excitée par un cheval, qui doit laisser sa place à un jeune étalon fougueux), tout comme certains dialogues (« la monotonie naît de la fidélité », « sois cruelle comma la nature, quand elle détruit ce qu’elle a créé », « le bonheur est tel qu’il me rend malheureux ») qui ne sont pas sans annoncer les logorrhées d’Alain Cuny dans Emmanuelle de Just Jaeckin, le film de Massimo Dallamano demeure une belle expérience de cinéma à part entière.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Artus Films n’était pas revenu à Massimo Dallamano depuis Bandidos, que l’éditeur avait sorti en DVD en 2013. Après Section de choc et Mais qu’avez-vous fait à Solange ?, disponibles en Blu-ray chez Le Chat qui fume, le réalisateur italien est à nouveau à l’honneur avec Vénus en fourrure, dont Artus Films prend le plus grand soin, en concoctant un superbe Digipack à deux volets, glissés dans un fourreau cartonné très élégant. Notons que le titre est disponible sous deux visuels différents, dont l’un, mettant en avant les charmes de Laura Antonelli, est uniquement disponible à la vente uniquement sur le site de l’éditeur et proposé à 250 exemplaires uniquement. Le menu principal est fixe et musical.

Si la forme est toujours aussi tristoune, Emmanuel Le Gagne (Culturopoing) et Sébastien Gayraud (écrivain et conférencier, spécialiste de l’horreur et du cinéma d’exploitation) se retrouvent pour nous présenter Vénus en fourrure (42’30). Une intervention souvent décevante, tout simplement parce que le film de Massimo Dallamano n’est réellement abordé que dans les dix dernières minutes, les deux invités d’Artus (qui indiquent au passage qu’il s’agit d’une œuvre mineure, malgré ses qualités formelles) passant essentiellement leur temps à évoquer plutôt le livre de Leopold von Sacher-Masoch et ses autres adaptations. Quelques informations sont tout de même glanées sur le cinéaste, ainsi que sur sa carrière comme directeur de la photographie, sans oublier certains de ses thèmes récurrents. Peu d’éléments marquants donc durant cette (trop) longue exposition.

Le chef opérateur Sergio d’Offizi revient sur Vénus en fourrure (9’). Durant cette interview, le directeur de la photographie né en 1934 (et toujours de ce monde), indique comment il est arrivé sur ce projet, mais aussi que son confrère Giuseppe Gatti, qui officiait comme cameraman sur le film, a pratiquement fait tout le boulot sur le film de Massimo Dallamano, d’Offizi étant entre-temps appelé sur un autre projet. Ce dernier parle du réalisateur (« un peu soupe au lait »), des conditions de tournage en Allemagne et en Espagne, du casting, ainsi que du remontage sorti dans les salles italiennes en 1975.

Place ensuite à la directrice artistique Alida Cappellini (16’). Sans aucun doute l’entretien le plus intéressant présent dans cette interactivité. L’ancienne actrice vue chez Mario Mattoli, Pupu Avati et Steno, partage ses souvenirs liés à Vénus à la fourrure, pour lequel elle a dû trouver la perle rare parmi toutes les actrices magnifiques qui se présentaient pour obtenir le premier rôle du film de Massimo Dallamano. Alida Cappellini se remémore avoir été « émerveillée par l’harmonie de cette créature, dont le corps était plus qu’une œuvre d’art  » nommée Laura Antonelli, qui allait accéder pour la première fois en haut de l’affiche. Elle déclare entre autres que la comédienne était alors peu à l’aise avec les scènes dénudées, n’hésitant pas pour l’aider à se sentir mieux, à lui faire arborer des sparadraps couleur chair sur les tétons, pour la « vêtir » quelque peu. La prestation de Régis Vallée (« un homme vraiment charmant, très compétent et gentil »), la censure qui allait interdire l’exploitation du film dans les salles italiennes, les costumes, le travail du directeur de la photographie Sergio d’Offizi, les conditions de tournage en Espagne, en Allemagne et à Rome, sans oublier le remontage de Vénus en fourrure en 1975 (expurgé de ses scènes érotiques et rebaptisé), sont aussi les sujets abordés.

L’interactivité se clôt sur un Diaporama d’affiches et de photos d’exploitation, sans oublier la bande-annonce.

L’Image et le son

Attendu par les fans de Massimo Dallamano et ceux de Laure Antonelli, Vénus en fourrure s’offre enfin à nous en Haute définition (1080p), dans une nouvelle copie (française, d’après les credits) entièrement restaurée. Cette édition renforce les contrastes et l’homogénéité n’est jamais prise en défaut. L’image est stable, entièrement débarrassée de scories diverses et variées, les scènes en extérieur affichent une superbe luminosité, tout comme un relief inattendu, un piqué souvent pointu et des couleurs vives et scintillantes. N’oublions pas les séquences aux éclairages tamisés, superbement rendues.

En italien comme en français, les mixages 2.0 instaurent un bon confort acoustique. Les dialogues sont délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. La composition de Gianfranco Reverberi (Delirio caldo, Django, prépare ton cerceuil) dispose d’un très bel écrin. Doublage français très réussi, avec notamment à la barre la talentueuse Tania Torrens, voix récurrente de Sigourney Weaver dans nos contrées, ainsi que l’immense Claude Bertrand, qui s’éclate à doubler Bruno.

Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.