Test Blu-ray / Une langouste au petit déjeuner, réalisé par Giorgio Capitani

UNE LANGOUSTE AU PETIT DÉJEUNER (Aragosta a colazione) réalisé par Giorgio Capitani, disponible en DVD et Blu-ray depuis le 25 août 2021 chez LCJ Editions & Productions.

Acteurs : Enrico Montesano, Claude Brasseur, Janet Agren, Claudine Auger, Silvia Dionisio, Roberto Della Casa, Geoffrey Copleston, Letizia D’Adderio…

Scénario : Laura Toscano, Franco Marotta, Jacques Dorfmann & Guy Lionel

Photographie : Carlo Carlini

Musique : Piero Umiliani

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1979

LE FILM

Enrico est un représentant de commerce qui ne réussit pas dans son métier, ce que lui reprochent sa femme et sa fille. Il rate son suicide, et cherche du réconfort auprès d’un de ses amis, qui lui demande un service en échange.

Pour les cinéphiles, Giorgio Capitani (1927-2017) reste surtout le réalisateur du péplum Le Grand défi : Hercule, Samson, Maciste, et Ursus, les invincibles Ercole, Sansone, Maciste e Ursus gli invincibili, dans lequel Alan Steel et Howard Ross se partageaient les exploits. Ancien assistant de Vittorio Cottafavi (Les Cents Cavaliers), pour lequel il a écrit quelques films, Giorgio Capitani se spécialise dans la comédie. Il dirige Vittorio Gassman dans Pleins Feux sur l’archange L’arcangelo (1969), la divine Catherine Spaak dans Mais qui donc porte la culotte ? La schiava io ce l’ho e tu no (1973), Sophia Loren, Marcello Mastroianni et Aldo Maccione dans La Pépée du gangster La pupa del gangster (1975). L’une de ses rencontres importantes dans le métier restera celle avec l’acteur Enrico Montesano, méconnu en France, mais grande vedette dans son pays, avec lequel il fera quatre comédies, Les Bonshommes Pane, burro e marmellata (1977), Io tigro, tu tigri, egli tigra (1978), Une langouste au petit déjeuner Aragosta a colazione (1979) et Je hais les blondes Odio le bionde (1980). Le film qui nous concerne aujourd’hui, leur troisième collaboration, est une coproduction franco-italienne, dans laquelle Enrico Montesano donne la réplique à Claude Brasseur, dans une de ses rares incursions dans le cinéma transalpin. Honnêtement, nous n’attendions pas grand-chose de cette comédie et nous sommes très agréablement surpris. Car on rit du début à la fin devant cette Langouste au petit déjeuner ! On rit, même vraiment de bon coeur devant toutes les catastrophes déclenchées par le personnage principal ! Enchaînement ininterrompu de gags, soulignés par une musique pouët-pouët comme on les aime de Piero Umiliani (Tropique du Cancer, Viva Django, Il Vigile), Aragosta a colazione avait tout du nanar sur le papier, mais se révèle être un vaudeville survitaminé très influencé par La Party The Party (1968) de Blake Edwards, mené à cent à l’heure et formidablement interprété, y compris par un casting féminin à se damner, composé de Silvia Dionisio, Claudine Auger et Janet Agren.

Enrico Tucci (Enrico Montesano) est un homme qui dans la vie n’a accumulé que des échecs : tant au travail, où il est à deux pas d’un énième licenciement de vendeur de lunettes de toilettes, que dans la vie privée, où il est marié à Matilde (Silvia Dionisio), serveuse dans un restaurant, qui le considère comme un raté. Enrico n’est même pas capable de se suicider, que ça soit avec du gaz, car la bonbonne est vide, ou même en se jetant dans le vide, sa chute étant amortie par le passage d’un camion transportant des matelas. La vie de Mario Spinosi (Claude Brasseur) est totalement différente. Ancien footballeur désormais entretenu par sa riche épouse Carla (Claudine Auger), il n’a en commun avec Enrico que d’avoir fréquenté le même lycée. Pour éviter un énième renvoi, Enrico demande de l’aide à Mario, après avoir vu sa photo dans un journal. Mais c’était sans savoir que Mario avait en fait profité du départ de sa femme, pour organiser un dîner en tête-à-tête avec une jeune hôtesse de l’air, Monique (Janet Agren). En raison d’une grève, Carla revient par surprise à la maison. Pris de court, Mario décide de faire passer Enrico pour le mari de Monique, s’engageant auprès de son ancien « ami » à lui acheter un grand nombre de lunettes de W.C. Suite à une série de malentendus, Enrico va se retrouver invité à un dîner organisé par Carla pour convaincre un important entrepreneur allemand de signer un contrat avec elle. Le buffet est organisé par le restaurant où travaille Matilde. Tout ce beau petit monde passera donc la soirée à s’éviter, à se croiser, à se rentrer dedans, au sens propre comme au figuré.

Franchement, quel pied ! En voyant l’affiche, en prenant connaissance du titre et du pitch, on pouvait s’attendre à du nanar, ce qui n’est pas le cas. Si Une langouste au petit déjeuner frôle souvent le genre, la maestria des comédiens et les innombrables quiproquos emportent facilement et immédiatement l’adhésion. Enrico Montesano est un vrai personnage comique, digne d’un Totò, à la fois tragique (le personnage a quand même fait plusieurs tentatives de suicide !) et pourtant hilarant et même poétique, du début à la fin. Claude Brasseur a guère tourné en Italie. On l’a vu chez Duccio Tessari dans Les Enfants de chœur Gli eroi, on le reverra dans Ensemble, c’est un bordel… séparés, un désastre Quando la coppia scoppia de Steno et Matrimoni Les femmes comme les hommes ne sont pas des anges de Cristina Comencini. Dans Une langouste au petit-déjeuner, il se met au diapason de son partenaire, roule beaucoup des yeux, gesticule et parle fort, se fout même à poil devant la caméra, ne tient pas en place et prend visiblement un plaisir aussi immense que contagieux dans cette comédie de boulevard.

Les deux têtes d’affiche ont la chance de prendre dans leurs bras trois sublimes actrices. Tout d’abord la suédoise Janet Agren, vue dans L’Assassin a réservé 9 fauteuils L’assassino ha riservato nove poltrone de Giuseppe Bennati, et qui tournera chez Lucio Fulci dans Frayeurs Paura nella città dei morti viventi et chez Umberto Lenzi dans La Secte des cannibales Mangiati Vivi. La seconde est la française Claudine Auger, l’éternelle Domino d’Opération Tonnerre Thunderball de Terence Young, qui tournait autant des deux côtés des Alpes, en passant de l’univers de Jacques Deray (Un peu de soleil dans l’eau froide, Flic Story) et d’Alain Jessua (Jeu de massacre) à celui d’Ettore Scola (Belfagor le Magnifique L’arcidiavolo), Dino Risi (Opération San Gennaro Operazione San Gennaro), Nanny Loy (Jeux d’adultes Il padre di famiglia), Mario Bava (La Baie sanglante Ecologia del delitto) et de Mario Monicelli (Voyage avec Anita Viaggio con Anita). Deux ans après Les Bonshommes, Claudine Auger retrouve ainsi Giorgio Capitani et Enrico Montesano. La troisième n’est autre que l’italienne Silvia Dionisio, épouse du réalisateur Ruggero Deodato, dont la filmographie fait encore le bonheur des amateurs de cinéma Bis, puisqu’on y trouve Le Sadique de la treizième heure Nude… si muore d’Antonio Margheriti, Du sang pour Dracula Dracula cerca sanque di vergine e mori di sete de Paul Morrissey, MKS… 118 – Poliziotti violenti de Michele Massimo Tarantini et bien d’autres. Presque dix ans après son explosion avec Une jeune fille nommée Julien La ragazza di nome Giulio de Tonino Valerii, elle trouvait dans Une langouste au petit déjeuner un de ses derniers rôles au cinéma. Toutes les comédiennes rivalisent d’humour avec leurs partenaires masculins, s’avèrent complètement déchaîné et y dévoilent même tous leurs charmes irrésistibles.

Tous ces ingrédients mélangés débouchent sur un cocktail stimulant, un remontant immédiat aux tracas du quotidien, auquel on repense même après coup. Preuve qu’Une langouste au petit déjeuner a tout pour devenir un petit film culte pour celui et celle qui lui consacrera une projection.

LE BLU-RAY

Inédit dans nos contrées en DVD, Une langouste au petit déjeuner apparaît en édition Standard et en Blu-ray chez LCJ Editions & Productions. La jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, saura taper dans l’oeil du cinéphile quelque peu déviant. Le menu principal est fixe et musical.

Aucun supplément.

L’Image et le son

Jusqu’alors inédit en DVD et restauré par Eclair Classics, Une langouste au petit déjeuner de Giorgio Capitani bénéficie d’un beau transfert avec un grain naturel très bien géré, y compris sur les séquences sombres. La définition est équilibrée malgré un générique marqué par quelques fourmillements. Le master trouve un équilibre fort convenable tout de suite après. Les partis pris esthétiques sont savamment pris en charge et restitués. Les contrastes sont plutôt bien appuyés, la copie affiche une propreté ainsi qu’une stabilité rarement prises en défaut (un ou deux plans flous ici et là) et les séquences diurnes sont lumineuses à souhait.

En italien (non sous-titré !!!) comme en français, les pistes mono 2.0 s’avèrent plutôt bien nettoyées et offrent des conditions acoustiques suffisantes. Notons l’absence de souffle intempestif, les voix demeurent bien restituées et les saturations limitées. Le doublage est très réussi avec Pierre Arditi qui prête sa voix à Enrico Montesano.

Crédits images : © LCJ Editions & Productions / Italian International Film / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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