Test Blu-ray / Priscilla, réalisé par Sofia Coppola

PRISCILLA réalisé par Sofia Coppola, disponible en DVD et Blu-ray le 3 mai 2024 chez ARP Sélection.

Avec :  Cailee Spaeny, Jacob Elordi, Ari Cohen, Dagmara Dominczyk, Tim Post, Lynne Griffin, Dan Beirne, Rodrigo Fernandez-Stoll…

Scénario : Sofia Coppola, d’après le livre Elvis et moi de Priscilla Presley

Photographie : Philippe Le Sourd

Musique : Phoenix

Durée : 1h53

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Quand Priscilla rencontre Elvis, elle est collégienne. Lui, à vingt-quatre ans, est déjà une star mondiale. De leur idylle secrète à leur mariage iconique, Sofia Coppola dresse le portrait de Priscilla, une adolescente effacée qui lentement se réveillera de son conte de fées pour prendre sa vie en main.

C’est une histoire qui revenait de droit à Sofia Coppola et qui s’intègre parfaitement dans sa filmographie. Priscilla est un biopic, celui consacré à Priscilla Presley, compagne (évidemment) du King et mère de sa fille Lisa Marie (décédée en 2023 à l’âge de 54 ans), un nouveau portrait de femme, un autre récit d’émancipation. La critique n’a pas été tendre avec Priscilla, aussi bien de la part des professionnels que des spectateurs. Pourtant, ce drame biographique s’avère bien plus réussi et intéressant que The Bling Ring, le plus mauvais film de son auteure, le vide absolu, qui avait été porté par des avis dithyrambiques. On est ici entre Marie-Antoinette et Somewhere, avec une adolescente de 14 ans (comme Marie-Antoinette quand elle épouse le dauphin Louis) qui se retrouve littéralement prise au piège par un ogre et enfermée dans une maison de poupée où celle-ci doit attendre d’être manipulée avec des épingles par le vaudou qui la retient, la fascine, l’entraîne dans un (faux) conte de fées. Basé sur les mémoires de Priscilla Presley, Elvis and Me, le huitième long-métrage de Sofia Coppola est un film sur l’attente, sur l’emprise, sur la frustration, sur l’ennui, des thèmes (pour ne pas dire des obsessions) déjà abordés et par ailleurs récurrents chez la cinéaste, qui signe une nouvelle grande réussite à son palmarès.

En 1959, Priscilla Beaulieu, âgée de 14 ans,vient d’arriver à Bad Nauheim, en Allemagne. Son père y est affecté sur une base militaire américaine. Elle rencontre Elvis Presley, qui accomplit son service militaire, lors d’une soirée. Elvis s’intéresse tout de suite à l’adolescente, mais reste conscient de la différence d’âge, le chanteur ayant dix ans de plus. Les parents de celle-ci sont quant à eux très réticents à la voir fréquenter une star, alors qu’elle est encore très jeune. Lorsqu’Elvis rentre aux États-Unis, Priscilla reste sans nouvelles, et est vite convaincue qu’il l’a oubliée. Mais en 1962, Elvis reprend contact avec elle, et l’invite à lui rendre visite à Graceland. Il lui offre un billet aller-retour en avion en première classe, et Priscilla fait alors la connaissance de sa famille et ses amis. Le King l’emmène pour un week-end à Las Vegas, et Priscilla est terriblement déçue de devoir retourner en Allemagne. Elvis parvient ensuite à convaincre les Beaulieu de la laisser venir s’installer chez lui pour y terminer ses études secondaires. Elle fréquente une école catholique voisine, où elle est un objet de curiosité pour les élèves. Quant à Elvis, il s’absente longuement pour tourner des films. Il remodèle l’apparence de Priscilla, choisissant ses vêtements et lui demandant de se teindre les cheveux en noir. Priscilla obtient de justesse son diplôme de fin d’études. Les relations du couple restent chastes, Elvis veut attendre le mariage, et juge que Priscilla est encore trop jeune. Déjà fortement dépendant aux médicaments, il s’absente souvent pour des tournées ou des tournages de films, et Priscilla reste seule dans leur luxueuse résidence, lisant dans la presse des articles sur ses flirts avec des actrices. Elle se rend une fois sur un plateau sans prévenir, mais Elvis la renvoie à Graceland. Alors que leur relation se détériore, Elvis la demande en mariage et Priscilla tombe rapidement enceinte.

Espérant un sursaut, la jeune femme se sent au contraire encore plus contrainte de rester au domicile conjugal, à attendre qu’Elvis, s’absentant souvent et étant de plus en plus dépendant à divers médicaments, revienne chez eux. Ils mènent des vies de plus en plus séparées. Mais on ne quitte pas ainsi un Dieu vivant. Tout le cinéma de Sofia Coppola est dans Priscilla. Au-delà de son sujet avec lequel la réalisatrice s’est forcément sentie en totale adéquation, le cinéphile reconnaîtra ce spleen unique, cette atmosphère ouatée, ce chic-glamour qui dissimule la tristesse et la mélancolie qui figent les visages. Si beaucoup ont critiqué l’absence de rythme ou la redondance des événements, Priscilla reflète l’existence de sa protagoniste, tout d’abord hypnotisée (comme celles de son âge) par celui qui était encore au début de sa carrière musicale et qui effrayait les puritains avec sa gestuelle provocante, avant de se laisser embarquer dans un rêve éveillé, qui tourne vite, non pas au cauchemar (quoique), mais qui demeure au point mort.

Le quotidien de Priscilla va rapidement se résumer à devoir attendre celui dont elle amoureuse, en enfilant les vêtements qu’il aura sélectionnés pour elle, en se maquillant comme il le souhaite, en changeant même la couleur de ses cheveux. Priscilla se plie à ce petit jeu malgré-elle, mais les années passent, les époques changent, les caractères s’échauffent et s’imposent. Sofia Coppola a confié le rôle-titre à Cailee Spaeny (née en 1998), vue dans Pacific Rim: Uprising de Steven S. DeKnight, Sale temps à l’hôtel El RoyaleBad Times at the El Royale de Drew Goddard, dans la (géniale) mini-série Mare of Easttown, le récent Civil War d’Alex Garland et prochainement comme vedette d’Alien: Romulus de Fede Álvarez. Récompensée par la Coupe Volpi de la meilleure interprétation féminine à la Mostra de Venise en 2023 pour Priscilla, elle est exceptionnelle, magnétique et crève l’écran du début à la fin. Grande prestation également de son partenaire Jacob Elordi, lui aussi très convoité (chez Paul Schrader, Guillermo Del Toro, la série Euphoria), impressionnant de vérité dans la peau d’Elvis Presley, auquel il apporte un mélange étonnant de sensualité et d’ambiguïté.

Remarquablement mis en scène, magnifiquement photographié par Philippe Le Sourd (déjà l’oeuvre sur Les Proies, sur Peut-être de Cédric Klapisch), sans oublier l’envoûtante partition du groupe Phoenix, Priscilla est étonnamment perçu comme un opus anodin dans la filmographie de Sofia Coppola, ce qui est loin d’être le cas puisqu’il s’agit même et sans doute d’un de ses meilleurs films.

LE BLU-RAY

300.000 spectateurs, c’est un joli score pour Priscilla dans les salles françaises, ce qui confirme encore l’attachement du public hexagonal pour les films de Sofia Coppola. C’est ARP Sélection qui se charge de la sortie de Priscilla dans les bacs, en DVD et Blu-ray. La jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend le visuel de l’affiche d’exploitation. Surétui cartonné en sus. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur joint la bande-annonce, ainsi qu’un making of riche en images de tournage et en interviews (27’). La réalisatrice et ses comédiens reviennent sur l’histoire et les personnages, le boulot sur les décors et les costumes est disséqué, l’adaptation du livre de Priscilla Presley (également présente) est évoquée, le casting passé au peigne fin.

L’Image et le son

ARP Sélection prend soin de l’édition Blu-ray du film de Sofia Coppola. Voici donc un très beau master HD. Respectueuse des volontés artistiques originales concoctées par Philippe Le Sourd, la copie de Priscilla se révèle un petit bijou technique avec des teintes à la fois chaudes et froides dans les extérieurs et chatoyantes dans les pièces de Graceland, le tout soutenu par un encodage AVC solide. Le piqué, tout comme les contrastes, sont tranchants, les arrière-plans sont bien détaillés, le relief omniprésent et les détails souvent foisonnants.

En version originale comme en français, les deux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 ne font pas dans la surenchère, mais proposent une spatialisation suffisamment immersive durant 1h50. Si beaucoup de séquences voient l’action canalisée sur les frontales avec quelques dialogues qui auraient mérité parfois d’être relevés sur la centrale, d’autres scènes tirent leur épingle du jeu grâce à des effets latéraux particulièrement frappants, même si c’est la bande son du film (Phoenix) qui se fait principalement entendre sur les enceintes latérales.

Crédits images : © ARP Sélection /  A24 / The Apartment / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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