Test Blu-ray / Miranda, réalisé par Tinto Brass

MIRANDA réalisé par Tinto Brass, disponible en DVD et Combo Blu-ray + DVD le 22 août 2023 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Serena Grandi, Andrea Occhipinti, Franco Interlenghi, Andy J. Forest, Franco Branciaroli, Malisa Longo, Laura Sassi, Isabelle Illiers…

Scénario : Tinto Brass, d’après la pièce de théâtre de Carlo Goldoni

Photographie : Silvano Ippoliti

Musique : Riz Ortolani

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1985

LE FILM

Italie, début des années 1950. La superbe Miranda tient une auberge. Libertine, elle tente d’oublier son mari, supposé mort à la guerre, dans les bras des hommes de passage dans son établissement : un chauffeur, un Américain, un élu local, un ancien fasciste… Lequel d’entre eux la satisfera à la fois en tant qu’amant et comme mari ? L’heure du choix a sonné et son employé, Toni, espère bien qu’il sera l’heureux élu.

Deux ans après La Clé, Tinto Brass, conforté par son précédent succès, continue sur sa lancée et plonge toujours plus profondément dans l’érotisme avec Miranda. En s’inspirant de la pièce La Locandiera (La Belle aubergiste) de Carlo Goldoni, dont la protagoniste s’appelle Mirandoline, le réalisateur de Caligula dresse un nouveau portrait d’une autre femme libre, qui assume son existence et la dirige comme elle le souhaite, surtout sa sexualité. Après avoir renoncé à engager Stefania Sandrelli, devenue trop chère à la suite du triomphe de La Clé, Tinto Brass jette son dévolu sur Serena Grandi, qui jusqu’à présent n’avait rien fait de vraiment mémorable, en dehors d’AnthropophagousAntropophagus (1980) de Joe d’Amato et quelques apparitions en tant que « silhouette » en tant qu’infirmière, caissière, policière et (c’était alors un passage obligé) prostituée. Le cinéaste remarque ses courbes affolantes (105-60-100) et décide de lui confier le premier rôle de Miranda. Disons-le carrément, les amateurs de poils, de postérieurs proéminents et de poitrines généreuses seront aux anges, Tinto Brass ne reculant devant rien pour mettre en valeur ces trois éléments cinégéniques (et ce dès le tout premier plan), quitte à choquer certains, même si rétrospectivement, la sincérité de la démarche prend le pas sur la vulgarité. Miranda, que son auteur a toujours trouvé supérieur à La Clé, n’est certes pas aussi riche sur le plan thématique, mais n’en reste pas moins une réussite et surtout moderne dans son message féministe.

La plaine du Pô au début des années 1950. Une aubergiste prospère et très serviable, nommée Miranda, attend depuis des années le retour de son mari, Gino, disparu à la guerre. En attendant des nouvelles de son époux, la femme se livre à de nombreuses aventures avec une série de personnages qui gravitent autour de l’auberge : le chauffeur Berto, un amant régulier et la cause de nombreuses querelles ; le riche ex-fasciste Carlo, l’amant de passage, contraint à l’exil mais prêt à couvrir la femme de cadeaux coûteux ou le jeune et beau technicien américain Norman, qui est responsable du gazoduc de méthane. Parmi les prétendants, non déclarés, se trouve aussi Toni, le garçon d’auberge. Toni est sincèrement amoureux de Miranda, mais la femme, sentant ses intentions, ne lui laisse pas la chance d’exprimer ses sentiments.

« La chair ! Vive la chair fraîche ! »

Contrairement à Stefania Sandrelli, Serena Grandi ne brille pas pour son jeu d’actrice, mais nier sa présence et son charisme (entre Claudia Cardinale et…Gina Carano) à l’écran serait mentir. D’ailleurs, Sergio Corbucci, Dino Risi, Lamberto Bava, Sergio Martino la feront tourner peu de temps après et aujourd’hui encore la comédienne continue sa carrière, apparaissant chez Paolo Sorrentino dans La Grande bellezza. Dans Miranda, si elle ne crève pas non plus l’écran, sa spontanéité et son naturel participent au charme de ce quinzième long métrage de Tinto Brass, qui avec son directeur de la photographie Silvano Ippoliti (La Clé, Big Guns, Le Grand Silence, Attention les dégâts, Un drôle de flic) créent un véritable écrin pour leur vedette, caressée par la caméra à chaque plan, scrutée sur tous les angles, désirée pour chacune de ses courbes. Également au générique, Andrea Occhipinti (Il Divo, La Maison de la terreur, L’Éventreur de New York), Franco Interlenghi (Les Garçons, Ulysse, Les Vitelloni) et la mythique Malisa Longo (California, Elsa Fraülen SS, Helga, la louve de Stilberg) complètent la distribution et relèvent le niveau de jeu de la comédienne principale.

Tinto Brass, aussi scénariste et monteur, ne manque pas d’élégance en dépit de ce que pouvaient déclarer ses détracteurs. Certes, celui-ci n’hésite pas à user de gros plans sur ce qu’habituellement la décence ou la morale préfère suggérer (en rendant ainsi un hommage explicite à L’Origine du Monde de Courbet), mais il le fait sans aucun racolage, dans le but de livrer une ode à la femme, à son sexe, à son cul et à sa sensualité. Miranda est ainsi libre de jouer avec les hommes qui voudraient l’enlever et l’emmener à l’autre bout du monde. Avant de prendre sa décision, elle compte bien profiter, tout en prodiguant quelques conseils en la matière à ses amies et en parlant ouvertement de sexe avec elles. Mais comme souvent chez Tinto Brass, la gaudriole et la débauche laissent transparaître une mélancolie et même un malaise des personnages qui remplissent comme qui dirait le vide de leur existence. Raison pour laquelle son cinéma ne pourra jamais être taxé de gratuit ou même vide de sens.

LE BLU-RAY

Titre inédit dans nos contrées, Miranda apparaît dans les bacs français en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Sidonis Calysta, avec un visuel qui devrait attirer l’oeil des coquins. Le menu principal est animé et musical.

Sidonis propose toute d’abord une présentation du film par François Guérif (13’). L’occasion d’en savoir plus sur le quinzième long-métrage de Tinto Brass, qui « cette fois, y va carrément ». Ensuite, le complice de l’éditeur donne des indications sur l’adaptation (« assez fidèle ») de la pièce de théâtre La Locandiera de Carlo Goldoni, la représentation de l’érotisme chez Tinto Brass, la psychologie des personnages, le casting, le contexte historique de l’histoire, les intentions et les partis-pris du réalisateur. En raison de ses spoilers, ce bonus est à visionner après avoir (re)vu le film.

Nous passons à une interview de Tinto Brass datant de 2006 (13’). « J’ai choisi des femmes différentes, mais elles ont toutes un cul d’enfer ! » démarre d’emblée le cinéaste. Le ton est donné. Celui-ci explique « avec La Clé, je me suis affranchi des complexes et des préjugés que j’avais moi-même assimilés ». Tinto Brass, faisant désormais fi des critiques sur sa façon d’aborder l’érotisme à l’écran, décide de s’y plonger corps et bien, sans retenue. C’est pour cette raison que le réalisateur trouve Miranda plus réussi sur le plan cinématographique que La Clé. Les lieux de tournage, le casting, l’adaptation de Goldoni, ce que reflète les scènes de danse dans son œuvre et les costumes sont aussi les sujets analysés.

Le dernier supplément est un autre entretien avec Tinto Brass, cette fois en français (26’). Un moment qui part un peu dans tous les sens et qui s’avère parfois difficile à suivre, mais nous en tirons suffisamment de satisfaction. Le réalisateur se livre sur son premier souvenir lié au cinéma érotique, Docteur Jekyll et M. Hyde de Victor Fleming, devant lequel Tinto Brass connaîtra sa première éjaculation en raison d’une comédienne arborant une chemise de nuit légèrement transparente. Le réalisateur évoque tour à tour la notion de voyeurisme au cinéma et donc le rapport avec le spectateur, les liens très étroits qu’il associe entre la salle de cinéma et un bordel, la différence entre l’érotisme et la pornographie, sa fascination pour « le cul » des femmes, la cinégénie de la ville de Venise, l’évolution du cinéma érotique et parle d’un projet qui lui tient à coeur sur les Borgia.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Rebelote pour Sidonis Calysta, voici que déboule l’édition HD de Miranda après celle de La Clé. L’éditeur a encore frappé. Dès le générique d’ouverture, l’image, au format respecté, affiche une propreté remarquable et une stabilité jamais prise en défaut, la clarté est de mise, les couleurs sont élégantes, le grain cinéma est bien géré (y compris sur les très nombreuses scènes de brouillard), les contrastes plutôt riches, le piqué agréable. La définition flatte les mirettes, la compression demeure discrète.

Les pistes italienne (à privilégier) et française (incomplète car il s’agit de la version intégrale) sont présentées en DTS HD Master Audio et instaurent toutes deux un bon confort acoustique, sans souffle, propre, avec une très bonne délivrance des dialogues. La belle partition de Riz Ortolani bénéficie d’une belle ouverture des canaux, le doublage français est correct et les effets annexes riches. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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