Test Blu-ray / Leurs enfants après eux, réalisé par Ludovic & Zoran Boukherma

LEURS ENFANTS APRÈS EUX réalisé par Ludovic & Zoran Boukherma, disponible en DVD & Blu-ray le 14 mai 2025 chez Warner Bros.

Acteurs : Paul Kircher, Angelina Woreth, Sayyid El Alami, Gilles Lellouche, Ludivine Sagnier, Louise Lehry, Louis Memmi…

Scénario : Ludovic & Zoran Boukherma, d’après le roman de Nicolas Mathieu

Photographie : Augustin Barbaroux

Musique : Amaury Chabauty

Durée : 2h20

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Août 92. Une vallée perdue dans l’Est, des hauts fourneaux qui ne brûlent plus. Anthony, quatorze ans, s’ennuie ferme. Un après-midi de canicule au bord du lac, il rencontre Stéphanie. Le coup de foudre est tel que le soir même, il emprunte secrètement la moto de son père pour se rendre à une soirée où il espère la retrouver. Lorsque le lendemain matin, il s’aperçoit que la moto a disparu, sa vie bascule.

Elle est là l’adaptation du roman de Nicolas Mathieu, paru en 2018, récompensé par le prix Goncourt, traduit en une vingtaine de langues et vendu à près d’un demi-million d’exemplaires. Autant dire que les producteurs n’ont pas attendu longtemps pour envisager cette transposition et c’est finalement les frères (jumeaux) Boukherma, Ludovic et Zoran, découverts en 2020 avec Teddy, suivi de L’Année du requin deux ans plus tard, qui décrochent la timbale. Gilles Lellouche avait sérieusement été envisagé derrière la caméra, avant que celui décide finalement de se consacrer à L’Amour ouf, aussi produit par Alain Attal et Hugo Sélignac. Résultat des courses, malgré un budget confortable de 12 millions d’euros, d’un casting soigné et une apparente fidélité au livre d’origine, cela n’a pas pris auprès du public, puisque seulement 315.000 spectateurs auront eu la curiosité d’aller découvrir cette mouture cinématographique d’un des plus grands succès en librairie de ces dernières années dans nos contrées. Si l’entreprise ne manquait pas d’ambitions, les producteurs ayant même déclaré à Variety en 2023 que ce qui avait plu à Nicolas Mathieu dans la proposition d’adapter son roman était de faire un film « dans la veine du cinéma de Paul Thomas Anderson et Martin Scorsese », rien ne fonctionne à l’écran. Illustration pâle, pour ne pas dire sans âme, à laquelle n’a d’ailleurs pas participé l’auteur (et cela se voit), Leurs enfants après eux version « film » ne donnera sûrement pas envie aux spectateurs de lire le roman si ceux-ci ne l’auraient pas encore découvert, et décevra forcément les autres, qui attendaient, non pas de retrouver les personnages pour lesquels ils s’étaient pris d’affection, ils sont présents, mais plutôt la sève, la moelle politique et sociale qui parcourait chaque page de l’ouvrage. Peut-être est-ce dû à l’âge des réalisateurs, nés en 1992 et qui n’ont qu’une vision d’enfant des années qu’ils dépeignent, ainsi qu’une méconnaissance, non pas des « gens du coin », mais du décor (contrairement à Farid Bentoumi et son formidable Rouge, ou Baptiste Debraux et son premier film Un homme en fuite) dans lequel se déroule l’action (ils viennent du Lot-et-Garonne), toujours est-il que Leurs enfants après eux est un ratage monumental, qui tombe systématiquement dans la vulgarité, le pathos et la beaufitude que Nicolas Mathieu évitait dans son livre. Malgré le Prix Marcello Mastroianni du meilleur espoir remporté par Paul Kircher à la Mostra de Venise 2024, l’échec commercial est amplement justifié et compréhensible.

Dans l’Est de la France, en ce mois d’août 1992, c’est l’été et il fait chaud. Anthony Casati, quatorze ans, partage son ennui avec son cousin. Ils décident d’aller au lac, où ils rencontrent Clémence et Stéphanie. Le cœur d’Anthony va s’accélérer pour cette dernière. Stéphanie les invite à une fête qui a lieu le soir-même. Pour s’y rendre avec son cousin, Anthony emprunte la moto qui appartient à son père, sans avoir eu son autorisation. Lorsque le soleil se lève, le deux-roues n’est plus là. Il soupçonne Hacine, un adolescent d’origine marocaine habitant dans une cité. Mis au courant du vol, le père d’Hacine lui brûle la main et lui impose de rentrer au Maroc. La moto est retrouvée en feu devant le domicile des Casati, ce qui entraînera une crise de colère du père d’Anthony et le divorce de ses parents. On retrouve ensuite Anthony et sa mère deux ans plus tard, en août 1994…

Il y a un gros problème dans Leurs enfants après eux. C’est que les adolescents dépeints par les metteurs en scène, ne ressemblent en rien à ceux des années 1990. Un décalage se fait d’emblée, un côté artificiel s’installe aussi et restera durant les pénibles 140 minutes (!). Là où une série télévisée aurait plus judicieuse (cela avait d’ailleurs été envisagé), les quatre parties, reprises du roman, se trouvent déséquilibrées ici, 1h05 pour l’été 92, 25 minutes pour le second, trente minutes pour l’été 95 et un quart d’heure pour le final. Tout ce qui participait à l’évolution des personnages dans le livre est complètement absent ici. Les personnages manquent de chair et s’apparentent à des coquilles vides, peu aidés par une interprétation quelque peu neurasthénique. Si Paul Kircher était impressionnant dans Le Règne animal, il apparaît bourré de tics, le regard de poisson mort dissimulé derrière ses mèches de cheveux.

Sa partenaire Angelina Woreth (Ma vie ma gueule, Just Kids) parvient à rendre Stéphanie foncièrement antipathique et donc jamais attachante, à tel point qu’on en vient à se demander ce qu’Anthony peut lui trouver. L’objet de son affection demeure incompréhensible et l’intérêt sans fondement. Mention spéciale au personnage d’Hacine, incarné par Sayyid El Alami (Zombi Child, La Chambre des merveilles), qui n’est que l’ombre, l’esquisse de ce qu’il était dans l’oeuvre de Nicolas Mathieu. Si Gilles Lellouche s’en sort miraculeusement dans la peau de Patrick (même si son racisme a été évincé), le père d’Anthony, cela ne va pas mieux pour Ludivine Sagnier, qui après sa désastreuse interprétation dans Quand vient l’automne de François Ozon, se permet de repousser les limites et d’être encore plus mauvaise.

Si l’on met de côté le livre, ce qui est difficile, mais on peut y arriver, Leurs enfants après eux est un accident industriel. Les frères Boukherma n’étaient assurément pas ceux à placer aux manettes d’un tel long-métrage, font de l’esbroufe et tombent dans les excès inappropriés pour ce récit, le montage est aux pâquerettes, le romanesque est digne d’un soap-opéra (aucune réplique ne tombe juste), la bande-son attendue, tout est figé, y compris et en premier lieu les protagonistes qui semblent les mêmes du début à la fin, sans évolution de 14 à 20 ans…

En fait ce que les réalisateurs parviennent à faire ressentir aux spectateurs, c’est l’ennui dans lequel pataugent les protagonistes…mais cela est sans doute involontaire et les 2h20 du film en paraissent le double. Autant dire que c’est aussi interminable qu’oubliable.

LE BLU-RAY

C’est chez Warner Bros. que sort le film des frères Boukherma, en DVD et en Blu-ray. Une édition on ne peut plus sobre, réduite au minimum vital avec une jaquette (reprenant le visuel de l’affiche d’exploitation), glissée dans un boîtier classique (mais écologique, utilisant moins de plastique) de couleur bleue. Le menu principal est fixe et muet.

Et aucun bonus sur cette édition. Pour cela, il faudra vous tourner vers l’édition Fnac, qui comprend un DVD supplémentaire, sur lequel sont disponibles des scènes coupées, un commentaire des réalisateurs sur certaines séquences, un making of et une interview de Nicolas Mathieu.

L’Image et le son

Warner prend soin du service après-vente du film des Boukherma. Voici donc un très beau master HD. Respectueuse des volontés artistiques originales concoctées par Augustin Barbaroux (La Passagère, Teddy, L’Ordre des médecins), dont un faux grain argentique ajouté en post-production, la copie se révèle un petit bijou technique avec des teintes chatoyantes, le tout soutenu par un encodage AVC solide. Le piqué, tout comme les contrastes, sont tranchants, les arrière-plans sont magnifiquement détaillés, le relief omniprésent et les détails foisonnants sur le cadre large. Le Blu-ray est indéniablement l’écrin tout désigné si vous désirez découvrir le film, ou lui redonner une chance.

L’éditeur a également soigné le confort acoustique et livre un immersif mixage DTS-HD Master Audio 5.1. Saluons l’impressionnante balance des frontales comme des latérales. Les effets annexes sont omniprésents et dynamiques, les voix solidement exsudées par la centrale, tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des séquences au moment opportun. La spatialisation musicale est luxuriante. L’éditeur joint également une piste Stéréo de fort bon acabit, une autre en Audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Warner Bros. / Warner Bros. France / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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