Test Blu-ray / Butterfly Kiss, réalisé par Michael Winterbottom

BUTTERFLY KISS réalisé par Michael Winterbottom, disponible en combo DVD/Blu-ray le 5 septembre 2017 chez Outplay

Acteurs : Saskia Reeves, Amanda Plummer, Kathy Jamieson, Des McAleer, Lisa Riley, Freda Dowie…

Scénario : Frank Cottrell Boyce, Michael Winterbottom

Photographie : Seamus McGarvey

Musique : John Harle

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1995

LE FILM

Eunice, une femme visiblement dangereuse, passe sa vie à arpenter les autoroutes du nord de l’Angleterre à la recherche d’Edith, la seule qui lui ait jamais témoigné de l’amour. Dans une station-service, elle rencontre Miriam, qui quitte tout pour la suivre, même si elle devine très vite qu’Eunice est une meurtrière.

« Je t’aurai corrompu bien avant que tu me bonifies. »

Inclassable et prolifique, le cinéaste britannique Michael Winterbottom (né en 1961) fait ses débuts à la télévision en 1990 avec le drame Forget About Me. Il enchaîne très vite en réalisant quelques séries (Family, Cracker), puis signe un deuxième téléfilm Under the Sun en 1992. Mais c’est avec son troisième film, cette fois réalisé pour le cinéma en 1995, que Michael Winterbottom se fait connaître sur la scène internationale. Sur une idée du scénariste Frank Cottrell Boyce, Butterfly Kiss est un road-trip mortel, éprouvant et hypnotique, rapidement devenu culte auprès des cinéphiles.

Le film est à l’image de ses conditions de prises de vues puisque réalisé dans l’urgence, avec une équipe réduite et un budget limité de 400.000 livres. Imprévisible et extravertie, Eunice arpente les autoroutes du nord de l’Angleterre à la recherche d’une dénommée Edith, qui lui aurait écrit des lettres d’amour. Dans une station-service, elle rencontre Miriam, jeune femme réservée et solitaire, coincée entre son métier de caissière et sa mère, âgée et invalide. Fascinée par Eunice, Miriam décide de tout quitter pour la suivre. Très vite, elle comprend qu’Eunice est une meurtrière mais ne peut se résoudre à la quitter. Film choc, Butterfly Kiss n’a rien perdu de son magnétisme. Absolument fascinant, viscéral, sombre et parcouru pourtant par un indéfectible amour, le troisième long métrage de Michael Winterbottom convie le spectateur à prendre place auprès de deux jeunes femmes à qui la vie n’a pas fait de cadeau, embarquées dans une mortelle randonnée. Si la violence est finalement « soft » à l’écran, ce sont avant tout les actes et leurs conséquences qui foudroient l’audience. Très tôt, Michael Winterbottom aimait déjà jouer avec l’empathie du spectateur envers des personnages détestables, difficile d’accès, peu recommandables. Des marginaux, des solitaires, des êtres rejetés par la société. Une marginalisation qui n’est pas volontaire ou le fruit d’une révolte.

Le réalisateur de Jude, Bienvenue à Sarajevo, 9 Songs, Tournage dans un jardin anglais, Un coeur invaincu et The Killer Inside Me dresse le portrait sans fard de deux jeunes femmes que tout oppose, mais dont l’alchimie est immédiate et qui se retrouvent unies par les sentiments qu’elles ont l’une pour l’autre. Eunice est interprétée par l’ahurissante et insaisissable Amanda Plummer. L’actrice américano-canadienne livre une prestation ébouriffante et inquiétante. Elle se fond totalement dans la peau d’Eunice, coincée malgré-elle dans une boucle constituée de voies rapides, qui passe de station-service en restaurants autoroutiers à la recherche une certaine Judith et une chanson d’amour en vinyle, même si on ne lui propose que des K7. Cheveux de feu, regard habité, son corps est recouvert de 17 tatouages, ses seins percés par des anneaux, son abdomen et son dos recouverts de chaînes et de cadenas. Elle rencontre Miriam, jeune employée d’une station-service. Timide, effacée, ingrate peut-être, douce, elle se prend d’affection pour Eunice et souhaite lui venir en aide. Elle lui propose alors l’hospitalité chez sa vieille mère, handicapée clouée sur un fauteuil roulant. Mais le désir de révolte est plus fort que tout et très vite Eunice envoie tout balader. Elle retourne sur la route. Pour la première fois de sa vie, Miriam quitte elle aussi son domicile, bien décidée à rejoindre Eunice sur la route, là où le destin voudra bien les conduire. Elle découvre très vite qu’Eunice est une tueuse, qui laisse des cadavres derrière elle, ou plutôt dans le coffre des voitures qu’elle trouve sur son chemin. Métamorphosée pour son rôle, Saskia Reeves livre une prestation tout aussi impressionnante et crève autant l’écran que sa partenaire, même si son personnage peut tout d’abord paraître plus effacé par nature. Pourtant, Miriam évolue autant qu’Eunice.

Ces deux jeunes femmes opposées rentrent en confrontation, se scrutent, s’embrassent, se caressent, s’avèrent les facettes d’une même pièce. Si Miriam souhaiterait bouffer la vie comme Eunice en agissant de façon impulsive sans se soucier des conséquences, Eunice voudrait être sereine comme Miriam. Ces deux corps qui s’attirent physiquement vont ensuite se tirer vers le haut, sur une route cimentée où le ciel grisâtre contraste avec la campagne verdâtre du Lancashire et le sang écarlate.

Résolument violent, même si les assassinats ne sont pas montrés à part ceux du chauffeur-routier et du représentant, Butterfly Kiss démontre que la société impitoyable est en partie responsable de cette implosion. Toutefois, Michael Winterbottom et son scénariste ne cherchent pas de circonstances atténuantes pour les actes commis par les personnages. Certains spectateurs n’y verront que deux pauvres nanas timbrées – il faut dire que le cinéaste ne fait rien pour les caresser dans le sens du poil – et un récit qui n’aspire visiblement que le rejet, mais l’empathie se crée, tandis que l’audience patiente et investie sera entraînée dans le sillage de Miriam et d’Eunice, jusqu’au dénouement libérateur, le châtiment rédempteur tant attendu, l’absolution dans une ablution, au crépuscule. Une folle, troublante et fiévreuse odyssée bercée par les chansons des Cranberries et PJ Harvey, qui n’a pas pris une ride depuis sa sortie. Un film coup de poing. Un chef d’oeuvre.

LE BLU-RAY

Pour cette sortie, l’éditeur Outplay a concocté un magnifique combo Blu-ray/DVD. Les deux disques reposent dans un superbe Digipack à trois volets, composé du portrait des deux personnages et d’un encart pour un livret. L’ensemble est glissé dans un fourreau cartonné au visuel très élégant et attractif. Grand travail éditorial.

Comme nous l’indiquons plus haut, cette édition comprend un livret de 16 pages composé de photos du film, mais surtout d’un entretien de Michael Winterbottom réalisé par Michel Ciment et Yann Tobin pour le n°430 de la revue Positif publié en décembre 1996. Le réalisateur revient sur les lieux du tournage, les conditions de prises de vues, son travail avec le scénariste Frank Cottrell Boyce, les thèmes du film, la création des personnages et leur difficulté à les faire accepter auprès des spectateurs.

En guise de supplément vidéo, Outplay a confié à l’imminent N.T. « Yann » Binh, journaliste, critique, enseignant de cinéma à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, la présentation de Butterfly Kiss de Michael Winterbottom (31’). A travers cet exposé passionnant, mister Binh (pardon) reprend peu ou prou les mêmes arguments et informations distillés dans l’interview du cinéaste dont il avait recueilli les propos pour le magazine Positif il y a plus de vingt ans. Cela lui permet d’approfondir les thèmes, de se pencher un peu plus sur le fond et la forme de Butterfly Kiss, tout en replaçant le film dans la carrière du réalisateur. Yann Binh indique même l’influence du cinéma d’Ingmar Bergman, auquel Michael Winterbottom venait de consacrer deux documentaires, dans son premier long métrage pour le cinéma. La genèse de Butterfly Kiss, l’évolution des personnages, leur trajectoire, leur quête, le casting et encore bien d’autres éléments sont abordés dans cette remarquable analyse du film.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Alors qu’il demeurait inédit dans nos contrées en DVD, l’éditeur Outplay frappe fort puisque non seulement Butterfly Kiss est enfin disponible en DVD, mais aussi et pour la première fois en Blu-ray (1080p) ! C’est une exclusivité mondiale et cela mérite vraiment d’être souligné. Nous sommes donc face à un nouveau master Haute-Définition issu d’une restauration qui a visiblement quelques heures de vol, mais qui n’en demeure pas moins fort correcte. Ce master ne cherche pas à épater la galerie, cela serait d’ailleurs difficile avec les partis pris de la photographie de Seamus McGarvey (High Fidelity, World Trade Center, Avengers), mais les volontés artistiques sont heureusement respectées avec des couleurs atténuées qui se réchauffent au fur et à mesure du parcours des deux personnages, un grain cinéma aléatoire, des contrastes du même acabit. Le piqué est évident, les détails souvent plaisants et malgré divers points et tâches fréquemment constatables, la copie demeure propre et stable.

Seule la version originale est ici disponible en DTS-HD Master Audio 2.0, ainsi que les sous-titres français non verrouillés. L’écoute s’avère claire, sans aucun souffle, avec une restitution dynamique des dialogues, ainsi que des effets annexes, notamment du trafic automobile incessant. La musique de John Harle ainsi que les chansons qui illustrent le film (The Cranberries, Patsy Cline, Björk, PJ Harvey) ne manquent pas de coffre et le confort acoustique est largement assuré. Les sous-titres français pour le public sourd et malentendant sont également au menu.

Crédits images : © British Screen and The Merseyside Film Production Fund. / Dan Films LTD / Outplay / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Pris au piège, réalisé par Álex de la Iglesia

PRIS AU PIÈGE (El Bar) réalisé par Álex de la Iglesia, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez L’Atelier d’Images et Condor Entertainment

Acteurs : Blanca Suarez, Mario Casas, Carmen Machi, Secun de la Rosa, Jaime Ordonez, Terele Pávez, Joaquin Climent, Alejandro Awada…

Scénario : Álex de la Iglesia, Jorge Guerricaechevarría 

Photographie : Ángel Amorós

Musique : Carlos Riera, Joan Valent

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Madrid, 9 heures du matin. Des clients, qui ne se connaissent pas sont dans un bar. L’un d’entre eux sort et se fait tirer dessus, les autres se retrouvent bientôt prisonniers de l’établissement.

Le réalisateur espagnol fou, expert de l’humour noir et grinçant est de retour avec une satire socio-politique. A l’instar de son récent Un jour de chance, chaque protagoniste plongé dans une situation extraordinaire et dans laquelle dépend leur survie, va apparaître sous son vrai visage et dévoiler qui se cache réellement derrière la façade affichée quotidiennement. Comme souvent chez Álex de la Iglesia, la situation sociale est au centre de Pris au piège El Bar, comédie brutale et cinglante, jubilatoire et décalée.

Avec sa virtuosité coutumière (malgré un espace confiné), un montage alerte et une photographie à couper le souffle, Álex de la Iglesia signe un film ovni très attachant, virulent, émouvant et drôle. Merveilleux directeur d’acteurs, il offre à ses comédiens l’occasion de composer des personnages explosifs, sournois, pathétiques, menteurs, hypocrites et égoïstes que n’auraient pas reniés la comédie italienne, grande source d’inspiration du réalisateur, et qui s’apparentent souvent à des cousins ibériques des mythiques Monstres. A travers une galerie de personnages hétéroclites présentés dans un fabuleux plan-séquence en guise d’ouverture, une jeune femme belle et sexy qui a visiblement réussi dans la vie (Blanca Suárez), un représentant en lingerie fine (Alejandro Awada), un ex-flic (Joaquín Climent), un SDF aux dents gâtées prénommé Israel (sensationnel Jaime Ordóñez, déjà présent dans Les sorcières de Zugarramurdi), deux tenanciers de bar (Secun de la Rosa et la regrettée Terele Pávez), un hipster (Mario Casas), une accro au jeu (Carmen Machi) et d’autres individus de la vie de tous les jours, Álex de la Iglesia dresse le portrait d’une société effrayée qui se dissimule derrière des faux-semblants, qui s’écroulent dès que leurs petites habitudes sont rattrapées par la réalité.

Dans un quartier de Madrid, en début de matinée. Quelques clients, habitués ou non, qui se connaissent de visu ou qui se rencontrent pour la première fois, prennent tranquillement leur café dans un bar. Quand soudain, un homme qui vient de sortir est tué net sous leurs yeux par la balle d’un sniper. Ils réalisent alors qu’ils sont dans sa ligne de mire, se retrouvant de fait prisonniers du bar et en danger de mort. Le compte à rebours est lancé pour trouver le moyen de s’échapper ! Quelques minutes plus tard, un homme imposant, au corps enflé, sort des toilettes en toussant jusqu’à tomber raide mort à leurs pieds. Le petit groupe comprend alors que cet individu a été victime d’une arme bactériologique et qu’ils se trouvent tous confinés dans le bar, à la merci de l’armée, prête à les tuer l’un après l’autre. Pris au piège (d’où le titre français), la tension monte, les non-dits éclatent, certains sont plus facilement pris pour cible à l’instar du hipster qui fait peur en raison de sa barbe…Le réseau ne passe plus et les chaînes d’informations restent muettes. La paranoïa entre en éruption.

Álex de la Iglesia réalise un film fou, qui ne ressemble qu’à lui. Inclassable, capable de combiner le sordide au sexy en plongeant notamment la bombe Blanca Suárez (La Piel que habito, Les Amants passagers) dans les égouts, le cinéaste espagnol montre qu’il n’a rien perdu de sa verve et qu’il n’est pas prêt de se calmer à cinquante ans passés. Si la première partie peut parfois mettre les nerfs à rude épreuve avec son avalanche de dialogues vachards et sa musique omniprésente, Pris au piège devient très vite un redoutable tour de force et prend même la forme inattendue d’un survival invraisemblable avec errance dans les bas-fonds où tous les coups semblent permis, comme dans un thriller d’épouvante. Mais pour y accéder, il faut encore pouvoir glisser dans un espace réduit et s’enduire d’huile, séquence aussi tordante que tordue et même érotique quand Blanca Suárez (encore elle, mais ceux qui verront le film comprendront pourquoi), en petite tenue, est badigeonnée des pieds à la tête pour pouvoir s’introduire dans l’interstice.

Álex de la Iglesia réunit les différentes faces cachées de l’Espagne contemporaine, qui vit sous la crainte de devenir elle aussi la cible récurrente d’attentats comme Paris (qui sont évoqués au travers d’une réplique), repliée sur elle-même, victime d’amalgames, prête à dénoncer et à rejeter celui ou celle qui semble ne pas lui inspirer confiance. Pris au piègeEl Bar est donc un film 100 % Álex de la Iglesia qui à travers le genre, réalise une fois de plus une sensationnelle radiographie de son pays en crise et au bord du gouffre, traitée avec intelligence, maestria et une savoureuse amoralité. Un grand spectacle, injustement privé d’une sortie dans les salles françaises, comme le précédent film du cinéaste, Mi Gran Noche.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Pris au piège, coédité par L’Atelier d’Images et Condor Entertainment, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le visuel de la jaquette est attractif. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Cette édition comporte tout d’abord une interview d’Álex de la Iglesia (15’), réalisée en prévision de la sortie de Pris au piège dans les bacs français. Contrairement à ses films, le réalisateur apparaît toujours calme et posé et cet entretien ne déroge pas à la règle. Álex de la Iglesia revient sur son rapport aux spectateurs, sur les thèmes abordés dans Pris au piège (la peur et sur ce qu’elle engendre chez l’être humain), sur la longue gestation du film (entre dix et quinze ans) et l’évolution des personnages au fil du récit, tout en indiquant quelques-unes de ses références comme The Thing de John Carpenter, ainsi que ses intentions de mise en scène. Quelques photos dévoilent l’envers du décor.

Nous trouvons également un excellent making of (37’) constitué d’entretiens avec les comédiens du film et d’Álex de la Iglesia, ainsi que de très nombreuses et impressionnantes images de tournage. Dans la première partie, nous assistons à la première lecture du scénario avec toute l’équipe réunie, puis nous passons aux prises de vues souvent très difficiles quand les acteurs sont plongés dans la fange, même si les égouts ont évidemment été créés en studios. Les comédiens se montrent véritablement investis, notamment Jaime Ordóñez dont le corps était véritablement recouvert d’ecchymoses que devaient dissimuler les maquilleurs ! Chaque acteur présente son personnage et aborde les thèmes du film, tandis que la caméra s’immisce dans les loges où les maquilleurs s’apprêtent à donner naissance à Israel. Comment la scène du trou a-t-elle été tournée ? Les bagarres ? La poursuite dans les égouts ? L’affrontement final ? L’épilogue ? Il faudra visionner ce formidable documentaire pour le savoir.

L’Image et le son

Que voilà un bel objet ! Les deux éditeurs ont mis les petits plats dans les grands et offre à la belle photo d’Ángel Amorós (Mi Gran Noche) un superbe écrin qui restitue adroitement les partis pris esthétiques originaux. Le piqué est diaboliquement ciselé, le cadre large flatte les rétines, les contrastes sont particulièrement riches et tranchés, les noirs concis et la colorimétrie froide des décors est bigarrée à souhait. L’ensemble est soutenu par une compression AVC de haute volée et fort élégante, et malgré quelques sensibles pertes des détails sur quelques plans sombres, ce master français HD (1080p) est brillant, dense et minutieux, avec même un léger grain très plaisant.

Le confort acoustique a été soigné avec deux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 espagnol et français, aussi probants dans les scènes agitées que dans les séquences plus calmes, même si effectivement il n’y en a pas beaucoup puisque tous les personnages sont sans cesse en train de parler « très fort ». Les pics de violence peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales, avec des effets foisonnants qui environnent le spectateur de partout. A ce titre, l’acte final dans les égouts mettra à mal votre installation ! Les ambiances annexes sont omniprésentes et dynamiques, les voix solidement exsudées par la centrale, tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des séquences au moment opportun. La spatialisation musicale est luxuriante avec un net avantage pour la version originale. Si possible, évitez la version française. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale et le changement de langue non verrouillé à la volée.

Crédits images : © Helher Escribano / L’Atelier d’Images / Condor Entertainment / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Magnus, réalisé par Benjamin Ree

MAGNUS réalisé par Benjamin Ree, disponible en DVD le 5 septembre 2017 chez Pretty Pictures

Acteurs : Magnus Carlsen, Garry Kasparov, Viswanathan Anand…

Scénario : Linn-Jeanethe Kyed, Benjamin Ree

Photographie : Øyvind Asbjørnsen, Magnus Flåto, Vanchinathan Murugesan, Benjamin Ree

Musique : Uno Helmersson

Durée : 1h15

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

En 2004, à l’âge de 13 ans, Magnus Carlsen décide qu’il deviendra champion du monde d’échecs. A mesure qu’il s’épanouit, le jeune prodige gravit les échelons du classement international, au prix de sacrifices personnels, mais aussi grâce au soutien de ses amis, et d’une famille très impliquée dans sa carrière.

Il fallait bien un film-documentaire rétrospectif pour raconter le destin du norvégien Magnus Carlsen, connu sous le nom du Mozart des échecs. Tout simplement et sobrement intitulé Magnus, le documentaire réalisé par son compatriote Benjamin Ree se penche sur ce véritable phénomène national devenu mondial, en compilant des archives personnelles provenant de la famille de Magnus, avec des images provenant de compétitions internationales, ainsi que de très rares interventions de la famille de l’intéressé et de Magnus lui-même. Des photos et films de vacances sur lesquels Magnus est montré comme un enfant « à part », dans son monde, perdu dans ses pensées, à l’écart, jusqu’à sa découverte des chiffres et la révélation des échecs grâce à son père, le film s’intéresse à l’un des êtres les plus extraordinaires de ces vingt dernières années.

Loin de tout académisme, Magnus est souvent filmé comme un véritable match de boxe. Entre les dernières réflexions quelques minutes avant « l’entrée sur le ring », jusqu’à l’escorte avec son père (omniprésent, tout comme sa famille qui n’est jamais bien loin) et de ses conseillers jusque devant la table où repose l’échiquier sur lequel reposeront toutes les attentions, Magnus est devenu en quelques années le plus grand de sa catégorie à l’instar d’un sportif qui aurait remporté toutes les médailles jusqu’au Saint Graal espéré. Né le 30 novembre 1990, Magnus Carlsen évolue devant l’écran à travers une mosaïque d’images revenant sur chaque étape décisive de sa vie. Ainsi, le petit garçon effacé de 1994, qui se tient loin de ses sœurs devient par la magie du montage une petite vedette dans sa catégorie, puis continue son chemin jusqu’à devenir grand maître international, numéro un mondial au classement Elo et champion du monde en titre. Au-delà de sa dimension documentaire, Magnus se suit comme une histoire sur une personnalité hors-du-commun.

Bercé par de nombreux films de genre, le cinéphile pourra trouver une dimension quasi-fantastique au personnage principal, doté d’une mémoire qui dépasse l’entendement à l’instar du challenge relevé par Magnus en 2013. Invité par la prestigieuse université d’Harvard, Magnus Carlsen, les yeux bandés, doit affronter dix des meilleurs avocats joueurs d’échecs au monde. Ainsi, il doit mémoriser la position de 320 pièces et déplacements, tout en calculant dix coups et contre-attaques par échiquier. Pari relevé, Magnus remporte ses dix victoires. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui sont abordés au fil de ce documentaire, où les défaites ne sont pas oubliées, ainsi que les moments où Magnus perd pied et craque sous la pression.

Dix ans auparavant, en 2004, Magnus, s’installe calmement et attend son adversaire qui n’est autre que Garry Kasparov. Si l’enfant est éliminé dès le premier tour, ce n’est pas sans mal et le champion du monde et d’échecs connaît quelques sueurs froides, largement relayées dans les médias. Désormais, le jeune Magnus Carlsen est observé dans le monde entier et devient grand maître à l’âge de 13 ans. Il faudra attendre 2013 après être devenu le champion du tournoi des candidats de Londres et le nouveau prétendant au titre de champion du monde, pour que Magnus affronte l’indien Viswanathan Anand et atteigne l’objectif qu’il s’était fixé depuis sa plus tendre enfance.

A l’écran, le petit garçon s’affirme et devient un homme, semble s’apaiser à mesure qu’il prend son envol. Magnus est un documentaire remarquable, un récit initiatique doublé d’un document sportif et même sociologique. Court (75 minutes montre en main sur plus de 500 heures filmées en dix ans), mais dense et passionnant du début à la fin.

LE DVD

Nous devons la sortie en DVD de Magnus à l’éditeur/distributeur Pretty Pictures. Le disque repose dans un boîtier classique de couleur noire. La jaquette est attractive, le menu principal animé et musical.

L’éditeur ne vient pas les mains vides. Le premier supplément est une interview cool et décontractée du réalisateur Benjamin Ree (12’) réalisée en Norvège pour annoncer la sortie du film au cinéma, notamment pour la Première au Festival de Tribeca. L’invité en dit un peu plus sur sa rencontre avec Magnus Carlsen, la genèse du projet, ses intentions et l’évolution de Magnus au fil des années passées à ses côtés.

Si vous faites partie des 600 millions de joueurs d’échecs dans le monde, alors vous vous dirigerez sur le second supplément puisque Magnus Carlsen y donne quelques leçons pour aider ceux qui voudraient débuter, ou pour conseiller ceux qui souhaiteraient se perfectionner (21’).

L’Image et le son

Difficile de juger une image comme celle de Magnus puisque le film est un collage de différentes sources vidéo analogiques et numériques. Dans l’ensemble, la copie est très propre, nette, les contrastes affirmés. La gestion du piqué est aléatoire et dépend des conditions de prises de vues.

Le mixage Dolby Digital 5.1 instaure un excellent confort acoustique. La musique est constamment spatialisée, les effets latéraux naturels et convaincants (applaudissements, ambiances avant et après les divers championnats), les voix bien délivrées par la centrale et les frontales en grande forme. La Stéréo conviendra aisément à ceux qui ne seraient pas équipés sur la scène arrière. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © Pretty Pictures / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / L.A. Rush, réalisé par Mark et Robb Cullen

L.A. RUSH (Once Upon a Time in Venice) réalisé par Mark et Robb Cullen, disponible en DVD et Blu-ray le 5 juillet 2017 chez AB Vidéo

Acteurs : Bruce Willis, Jason Momoa, Famke Janssen, John Goodman, Ana Flavia Gavlak, Elisabeth Röhm, Thomas Middleditch, Stephanie Sigman, Jessica Gomes…

Scénario : Mark et Robb Cullen

Photographie : Amir Mokri

Musique : Jeff Cardoni

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Steve Ford, vieux détective privé et légende de L.A, est engagé par un promoteur pour arrêter un graffiteur qui fait des dessins obscènes sur son immeuble. Menant son enquête, Steve voit sa vie prendre une autre dimension, lorsque son chien Buddy se retrouve aux mains de Spyder, un chef de gang lié aux cartels de la drogue. Face à cette situation, Steve est forcé d’utiliser la manière forte…

Au fait, il va comment Bruce Willis ? Cela fait longtemps qu’on ne l’a pas vu au cinéma ! Pourtant, à 62 ans, le comédien tourne – presque – autant qu’un Nicolas Cage et ses derniers films sont arrivés directement dans les bacs ou en VOD en France. En dehors d’un caméo dans Split (et pour cause) de M. Night Shyamalan, sa dernière véritable apparition sur le grand écran remonte à Sin City : J’ai tué pour elle de Frank Miller et Robert Rodriguez. Depuis, Bruce Willis enchaîne les séries B et Z comme des perles sur un collier dans des œuvres aux titres inconnus, Sans compromis, Fire with Fire : Vengeance par le feu, The Prince, Vice, Extraction, Braqueurs, Precious Cargo, Marauders, en affichant sur les visuels la même moue et les yeux plissés. Parfois, l’acteur semble se souvenir de son métier et qu’il peut être très bon quand il s’en donne la peine. C’est le cas de ce L.A. Rush Once Upon a Time in Venice.

Contrairement à ce que la jaquette pourrait faire penser, il ne s’agit en aucun cas d’un film d’action, bien que Bruce Willis et Jason Momoa y figurent la pétoire à la main. L.A. Rush est une comédie et cela tombe bien puisque Bruce Willis a toujours excellé dans le genre. S’il est indéniable que ce petit film léger et décalé aurait bien eu du mal à se démarquer du tout-venant pour une sortie dans les salles, il n’en demeure pas moins qu’on passe un bon et agréable moment. Bruce Willis a visiblement décidé de s’amuser et de sortir un peu de sa torpeur en jouant notamment avec son image, tout en rappelant son personnage de Joe Hallenbeck du Dernier Samaritain de Tony Scott. On le voit donc (sa doublure certes) en train d’échapper à quelques sbires, en faisant du skateboard dans le plus simple appareil et en dissimulant son pistolet dans la raie des fesses. Avec le sourire en coin bien entendu.

Il interprète Steve Ford, un détective de Los Angeles sur le déclin, qui voit sa vie prendre une autre dimension lorsque son chien est kidnappé par un gang. Car les dangereux trafiquants n’ont aucune idée de ce dont Ford est capable pour retrouver son fidèle compagnon. Voilà un pitch qui n’est pas sans rappeler le sublime John Wick de David Leitch et Chad Stahelski. Sauf que la comparaison s’arrête là puisque Steve Ford est tout sauf un homme d’action. Plus proche d’un Jeff Lebowski, le privé préfère rester là à ne rien faire, à prévenir quelques jeunes adolescents sur les dangers de la fumette ou des maladies vénériennes contractées avec quelques femmes de petite vertu. Le reste du temps, Steve range le bazar qui s’entasse sur son bureau, donne quelques indications à son jeune associé John (sympathique Thomas Middleditch de la série Silicon Valley), aide le promoteur immobilier Lou le Juif (Adam Goldberg) à mettre la main sur un artiste de rue qui a décidé de lui nuire en le représentant en fâcheuse posture sur la façade d’un immeuble qu’il souhaite mettre en vente. En dehors du travail, ou de ses occupations plutôt, Steve rend visite à son meilleur ami Dave Phillips (John Goodman, génial), propriétaire d’un magasin de planches de surf, qui déprime en raison de son divorce. Steve s’occupe également de sa sœur Katey (Famke Janssen) et de sa petite nièce, qu’il considère un peu comme la fille qu’il n’a pas eue, surtout depuis que le père de cette dernière les a abandonnées. Au milieu de tout ça, Steve voue un amour inconsidéré pour le chien de Katey, « même s’il a des gaz ». Jusqu’au jour où des petites frappes à la solde d’un chef de gang improbable (Jason Momoa excellent en abruti au bandana sur la tête) viennent cambrioler la maison de Katey en prenant avec eux le chien adoré de Steve. Ce dernier voit rouge. Il est bien décidé à retrouver son toutou.

Voilà L.A. Rush, une bonne et attachante comédie écrite et réalisée par les frères Cullen, qui avaient déjà signé Top Cops de Kevin Smith en 2010, avec Bruce Willis déjà en haut de l’affiche. Le film s’avère une chronique, celle d’un mec qui voulait se la couler douce sous le soleil ardent de la Californie et qui doit agir de temps en temps, d’une part parce que c’est son boulot (il est le seul privé de son quartier), d’autre part pour rendre parfois service à ses proches. L.A. Rush fonctionne grâce à l’alchimie de ses comédiens, mais aussi par l’abattage de Bruce Willis, qui a certes du mal à faire croire qu’il peut encore courir sans être essoufflé, mais qui ne recule devant rien pour faire marrer les spectateurs, quitte à arborer une robe, perruque et rouge à lèvres en étant poursuivi par une bande de travestis. Le film enchaîne les petits morceaux de bravoure sans se forcer, mais avec suffisamment d’efficacité et beaucoup de second degré pour ne pas ennuyer l’audience, tout en soignant la photographie et le montage. 5 minutes d’action sur 1h30, mais on rit le reste du temps et c’est déjà ça de pris !

LE BLU-RAY

L.A. Rush débarque directement en DVD et Blu-ray dans les bacs français, sous la houlette d’AB Vidéo. Le visuel de la jaquette est on ne peut plus trompeur puisque l’on pourrait croire qu’il s’agit d’un film d’action et que Bruce Willis et Jason Momoa ne sont pas là pour rigoler. Mais il s’agit bel et bien d’une comédie et Jason Momoa est loin d’inspirer la crainte ici. Le menu principal est animé et musical.

Outre la bande-annonce en version française, l’éditeur joint également un making of promotionnel, constitué de quelques images de tournage, d’autres tirées directement du film (un peu trop d’ailleurs) et d’interviews de quelques comédiens et même de Stuart Wilson, qui double le comédien Bruce Willis depuis une dizaine d’années. Aucune intervention de l’acteur principal ou des frères Cullen.

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p. Très belle copie HD (master français d’ailleurs) que celle éditée par AB Vidéo et qui restitue des belles couleurs estivales et chaudes du chef opérateur Amir Mokri, habituellement occupé sur des grosses productions comme Pixels, Transformers: L’âge de l’extinction, Man of Steel et Fast and Furious 4. Le piqué est aiguisé, restituant chaque cheveu grisonnant sur le crâne de Bruce Willis, les contrastes sont denses, le cadre large fourmille de détails aux quatre coins. C’est superbe, c’est lumineux, on en prend plein les yeux, le ciel est azur, la mer verte et les décolletés ne manquent pas de profondeur.

Vous pouvez compter sur les mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français pour vous plonger délicatement mais sûrement dans l’ambiance du film, bien que l’action demeure souvent réduite. La bande originale est la mieux lotie. Toutes les enceintes sont exploitées, les voix sont très imposantes sur la centrale et se lient à merveille avec la balance frontale, riche et dense, ainsi que les enceintes latérales qui distillent quelques effets naturels. Le caisson de basses se mêle également à la partie. Notons que la version originale l’emporte sur la piste française, se révèle plus naturelle et homogène, y compris du point de vue de la spatialisation musicale. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale et le changement de langue verrouillé à la volée. Deux pistes Stéréo sont également au menu.

Crédits images : ©Venice PL, LLC, All Rights Reserved / AB Vidéo / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Crazy Six, réalisé par Albert Pyun

CRAZY SIX réalisé par Albert Pyun, disponible en DVD et Blu-ray le 12 septembre 2017 chez Metropolian Vidéo

Acteurs : Rob Lowe, Mario Van Peebles, Ice-T, Burt Reynolds, Ivana Milicevic, Thom Mathews…

Scénario : Galen Yuen

Photographie : George Mooradian

Musique : Anthony Riparetti

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 1997

LE FILM

Dix ans après la chute de l’Union Soviétique, de puissantes organisations mafieuses règnent sur la région et contrôlent le trafic des armes et des technologies de pointe. A Prague, plaque tournante du réseau, Billie, surnommé Crazy Six, et son gang se sont alliés à la bande de Dirty Mao pour contrer Raul, le chef d’un des plus puissants cartels du crime d’Europe. Mais l’affrontement tourne au massacre : face à l’argent et au pouvoir, c’est chacun pour soi…

Pour beaucoup d’amateurs de cinéma Bis, Albert Pyun (né en 1954), est le réalisateur de Cyborg (1989) avec Jean-Claude Van Damme. Depuis son premier long métrage, le film d’heroic-fantasy L’Epée sauvage (1982), le metteur en scène américain né à Hawaii est devenu un spécialiste du cinéma d’action tourné avec des moyens souvent dérisoires, mais une imagination débordante. On compte aujourd’hui à son palmarès plus de 50 séries B d’action et de science-fiction, parmi lesquelles Nemesis (1992) et ses suites, Kickboxeur 2 : Le Successeur (1991), un Captain America (1990) considéré comme un des pires films de tous les temps (merci la Cannon), Explosion imminente (2001) avec Steven Seagal, Tom Sizemore et Dennis Hopper ou bien encore Adrénaline (1996) avec Christophe(r) Lambert. Réalisé en 1997 dans le cadre d’une exploitation directe en VHS, Crazy Six possède une bonne réputation par les cinéphiles déviants qui s’intéressent à Albert Pyun.

Alors qu’il vient de mettre en scène l’excellent Mean Guns, le réalisateur parvient à délocaliser son équipe technique à Bratislava en Slovaquie, ainsi que son casting hétéroclite composé de has-been Rob Lowe, Mario Van Peebles, Ice-T et Burt Reynolds. Tout ce beau petit monde est réuni pour une histoire quasi-inclassable de casse et de vol de plutonium qui tourne mal. Avant même le générique, un carton écrit en lettres roses sur fond noir et de musique rock indique :  « Europe de l’Est. Dix ans après la chute du Communisme. Autrefois, il y avait de l’espoir, à présent les ténèbres règnent ! Désormais, c’est une route commerciale pour le trafic de drogue et d’armes. Des chasseurs de fortune sont venus du monde entier, des criminels, des toxicomanes, des âmes perdues. La région est aujourd’hui appelée le pays du crime ». Voilà, bienvenue dans un monde de brutes !

Tourné en à peine dix jours, Crazy Six démontre une fois de plus qu’Albert Pyun n’est sûrement pas un manchot ou un tâcheron – même si « ça fait toujours plaisir à entendre » – et crée une véritable expérience cinématographique avec les moyens qui ont pu être mis à sa disposition. Evidemment, on ne peut pas faire plus série B que Crazy Six, mais ce film n’est aucunement une série Z puisque porté par une véritable envie de cinéma et de faire du bon travail. Comme très souvent, les acteurs n’étaient présents qu’une seule journée et toutes leurs scènes ont été emballées à la suite, chacun de leur côté. Par la magie du montage, leurs prestations ont ensuite été rassemblées, du moins autant que faire se peut. C’est donc la raison pour laquelle les têtes d’affiche n’apparaissent jamais sur le même plan. De plus, Albert Pyun et son fidèle chef opérateur George Mooradian jouent avec les couleurs et plongent les personnages dans une palette spécifique, en les isolant encore plus. Cela rajoute au côté « chacun pour soi » de ce monde indéfinissable dans lequel déambule notamment un junkie aux cheveux gras interprété par un Rob Lowe émouvant et qui n’est plus l’ombre que de lui-même. Le comédien erre, les épaules voutées, complètement paumé et rend attachant ce pauvre type dévoré par ses démons.

Cinéphile et passionné par le polar, Albert Pyun joue avec les codes inhérents au genre, filme des tronches en gros plan, use des fondus enchaînés pour créer un état de transe et un sentiment de proche fatalité. Les personnages dont on retient à peine les noms s’affrontent dans une sorte de purgatoire peuplé de laissés-pour-compte. Ice-T joue un baron de la drogue aux dents acérées, Burt Reynolds incarne un shérif américain anachronique avec stetson et santiags, Mario Van Peebles s’adresse en français dans le texte à ses hommes de main et à son chihuahua prénommé Bijou. Crazy Six révèle également le talent et la beauté de l’actrice américaine d’origine croate Ivana Milicevic, qui n’a depuis jamais cessé de tourner pour la télévision (Gotham, Banshee) et le cinéma (Casino Royale, Bataille à Seattle, La Peur au ventre). Elle interprète une chanteuse qui essaye de donner un peu de vie dans un bastringue d’une ville indéterminée et dont les mélodies ponctuent le film quasiment du début à la fin. Grâce à elle, Billie (Rob Lowe) alias Crazy Six verra enfin le bout du tunnel.

Improbable, mais qui n’a d’ailleurs aucune volonté d’être réaliste et plausible, le film puzzle d’Albert Pyun n’a de cesse de décontenancer et d’intriguer. On peut s’ennuyer en raison d’un manque de rythme et d’intérêt certes, surtout que l’intrigue s’avère rapidement redondante, mais finalement le charme agit, d’autant plus que Crazy Six ne ressemble pour ainsi dire à aucun autre film, si ce n’est à Albert Pyun lui-même. Si elle s’avère bancale, cette œuvre est irriguée tout du long par un amour immense pour le cinéma, à l’instar d’un film réalisé par Ed Wood, ce qui la rend séduisante et finalement agréable.

LE BLU-RAY

Après une édition au rabais chez TF1 Vidéo en 2004, Crazy Six est enfin repris en main par Metropolitan Vidéo. L’éditeur n’a pas fait les choses à moitié pour les amateurs du cinéma d’Albert Pyun – il y en a et c’est tant mieux – puisque Crazy Six est accompagné d’Explosion imminente pour une séance double-programme ! A la manière de ses récentes sorties consacrées à Jean-Claude Van Damme et prochainement à Dolph Lundgren (bientôt sur Homepopcorn.fr), deux films d’Albert Pyun se trouvent donc réunis sur la même galette. Le test d’Explosion imminente suivra très prochainement. En attendant, une fois le disque inséré, un menu fixe et muet nous propose de sélectionner directement le film, la langue et le supplément désiré.

A l’occasion de cette édition HD de Crazy Six, nous trouvons une excellente présentation du film par Nicolas Rioult, journaliste, auteur de Starfix, histoire d’une revue et présenté ici en tant que « Pyunophile » (15’). Passionnée et passionnante, cette introduction est bourrée d’informations sur la production du film qui nous intéresse et sur les conditions de tournage de Crazy Six. Nicolas Rioult annonce d’emblée que Crazy Six est pour lui le chef d’oeuvre d’Albert Pyun. Il aborde également la méthode du cinéaste, le tournage en Slovaquie, le casting, le montage puzzle puisque les acteurs ne se sont jamais croisés sur le plateau, sans oublier les références au film de Walter Hill Les Rues de feuStreets of fire (1984) qui a beaucoup marqué Albert Pyun et qui en réalisera d’ailleurs une suite non-officielle en 2012 avec Michael Paré, Road to Hell. Le fond du film n’est pas oublié, ainsi que le travail du directeur de la photographie George Mooradian et le compositeur Anthony Riparetti. Cela fait vraiment plaisir de voir un film d’Albert Pyun être aussi bien défendu !

L’interactivité se clôt sur un supplément intitulé « Curiosités », qui s’avère en réalité une galerie de photos et qui indique également tous les passages musicaux du film.

L’Image et le son

Le master HD de Crazy Six est au format 1080p. Présenté dans son cadre large 2.35 original, le film d’Albert Pyun est disponible dans une copie stable, très bien restaurée et même flatteuse. Les fans du film seront ravis de revoir Crazy Six dans ces conditions avec les partis pris expérimentaux et stylisés du chef opérateur George Mooradian, fidèle collaborateur du réalisateur. La photo joue avec les couleurs, orange, jaune, rose, bleu, tout y passe, caractérisant souvent un personnage spécifique puisque le comédien est filmé devant un fond uni, à l’instar de la séquence du bar avant la fusillade. Le master est très propre, le grain bien géré, les flous sont inhérents aux conditions de tournage, le piqué est souvent étonnant et la gestion des contrastes fort correcte.

Etonnamment, la version française DTS-HD Master Audio 2.0 s’en tire mieux que son homologue, surtout en ce qui concerne la délivrance des dialogues et les effets annexes beaucoup plus percutants. Dans les deux cas, l’écoute est propre et les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale qui s’avère indispensable afin de profiter de la prestation en français (en partie du moins) de Mario Van Peebles. Aucun souffle constaté

Crédits images : © Metropolitan Filmexport / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Brimstone, réalisé par Martin Koolhoven

BRIMSTONE réalisé par Martin Koolhoven, disponible en DVD et Blu-ray le 23 août 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Guy Pearce, Dakota Fanning, Carice van Houten, Kit Harington, Emilia Jones, Ivy George…

Scénario : Martin Koolhoven

Photographie : Rogier Stoffers

Musique : Junkie XL

Durée : 2h29

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Dans l’Ouest américain, à la fin du XIX siècle. Liz, une jeune femme d’une vingtaine d’années, mène une vie paisible auprès de sa famille. Mais sa vie va basculer le jour où un sinistre prêcheur leur rend visite. Liz devra prendre la fuite face à cet homme qui la traque sans répit depuis l’enfance…

Depuis dix ans, rares sont les westerns qui ont su en plus marquer les cinéphiles. Citons pêle-mêle L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford d’Andrew Dominik (2007), 3h10 pour Yuma de James Mangold (2008), Appaloosa d’Ed Harris (2008), Blackthoarn de Mateo Gil (2010), True Grit des frères Coen (2010), Shérif JacksonSweetwater des frères Miller (2013), Gold de Thomas Arslan (2013), The Salvation de Kristian Levring (2014) et Bone Tomahawk de S. Craig Zahler (2015). Le Django Unchained de Quentin Tarantino s’avérait plus une parodie qu’un véritable western pur et dur comme pouvait l’être Les Huit Salopards en 2016. Dans cette poignée de films, trois se démarquent par la nationalité de leurs réalisateurs et donc par leur interprétation singulière du mythe américain, entre l’espagnol Mateo Gil, l’allemand Thomas Arslan et le danois Kristian Levring. Il faudra désormais compter sur le néerlandais Martin Koolhoven qui signe et réalise avec Brimstone un très grand film, un western à la frontière de plusieurs genres, qui n’est pas sans rappeler La Nuit du Chasseur de Charles Laughton (1955).

Sélectionné en compétition officielle à la Mostra de Venise en 2016 et interdit en salles aux moins de 16 ans en France, Brimstone voit ses 150 minutes divisées en quatre chapitres, Revelation, Exodus, Genesis et Retribution (Châtiment), qui racontent l’histoire à rebours. En se servant du western comme support et repères, Martin Koolhoven déjoue les codes et livre en réalité une redoutable et admirable relecture du boogeyman, ici caractérisé par le personnage d’un pasteur fou à lier, qui a décidé d’épouser sa propre fille et d’avoir des enfants avec elle.

Brimstone est un véritable jeu de pistes dans lequel la jeune Liz se retrouve comme enfermée dans un labyrinthe avec un prédateur lancé à sa poursuite. Le prêcheur déviant et conforté dans ses noirs desseins par la religion, du moins par sa manière d’interpréter les textes sacrés, est incarné par Guy Pearce. Acteur caméléon, passant d’un registre à l’autre, la théâtralité de son jeu a souvent créé un décalage inquiétant comme dans Des hommes sans loi de John Hillcoat. Ridicule et pathétique, il est aussi et surtout immonde, terrifiant et angoissant dans Brimstone, avançant comme un monstre invulnérable, bien décidé à rattraper sa fille qui s’est échappée après la mort brutale de sa mère, interprétée ici par Carice Van Houten.

Liz est aussi le rôle d’une résurrection, celle de Dakota Fanning. Alors que sa sœur Elle enchaîne les projets, celle qui avait estomaqué la planète entière à travers ses prestations dans Man on fire de Tony Scott (2004) et La Guerre des mondes de Steven Spielberg (2005), se faisait plus rare sur les écrans. A part quelques apparitions dans la saga Twilight et une première tentative pour sortir du carcan de l’enfant-comédien dans Les Runaways de Floria Sigismondi, Dakota Fanning avait quelque peu disparu du devant de la scène. Elle crève à nouveau l’écran dans Brimstone dans un rôle quasi-muet. N’oublions pas la grande performance de la jeune Emilia Jones, qui interprète le même personnage enfant et au stade de l’adolescence. Seul bémol au tableau avec la participation du falot Kit Harington (plus connu sous le nom de Jon Snow dans la série événement Game of Thrones), qui promène son absence de charisme et une mauvaise imitation de Woody Harrelson dans quelques séquences.

Magnifiquement photographié par le chef opérateur Rogier Stoffers (Rock academy, Je te promets) et sans oublier la composition hypnotique de Junkie XL, ce western crépusculaire, quasi-fantastique, brutal et très violent – certaines scènes demeurent déconseillées aux spectateurs les plus sensibles – réalisé d’un point de vue féminin, récit initiatique, drame psychologique et fable sur le fanatisme religieux subjugue du début à la fin, s’avère aussi éprouvant que puissant et flamboyant.

LE BLU-RAY

L’édition HD de Brimstone a été réalisée à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Celles et ceux qui auraient été subjugués par Brimstone, devront se ruer sur les scènes coupées (14’). Ces séquences auraient pu tout à fait être intégrées au montage final et ont sûrement été mises de côté en raison de la durée déjà conséquente du film. Quelques scènes sont introduites par le clap et la voix du réalisateur Martin Koolhoven, notamment lors de la scène alternative du duel dans la rue. D’autres séquences appuient le caractère rebelle du beau-fils de Liz à son égard (il demande à son père qu’elle s’en aille de la maison), ou bien prolongent la pendaison de la prostituée où toutes ses amies lui rendent hommage à travers une prière.

Le meilleur de cette interactivité demeure l’interview de Martin Koolhoven (23’), qui posément évoque la genèse de Brimstone (né après son refus de réaliser une comedie-romantique !) et la longue et difficile gestation de son western qu’il voulait personnel et original. Il évoque également la forme du récit, le désir de jouer avec les genres, ses références (Il était une fois dans l’Ouest est le film qui lui a donné envie de faire du cinéma), la façon d’aborder la violence à l’écran, le casting et le travail avec les comédiens, les personnages et leur évolution et les lieux de tournage en Hongrie, en Espagne, en Allemagne et en Autriche.

L’éditeur propose également un document (36’) essentiellement destiné aux musiciens ainsi qu’aux passionnés de musiques de films. Junkie XL de son vrai nom Tom Holkenborg, est le compositeur de la musique de Brimstone. On lui doit également les musiques de Deadpool, La Tour Sombre, Batman v Superman: L’aube de la justice et Mad Max: Fury Road. Filmé par plusieurs caméras et entouré d’ordinateurs, Junkie XL s’adresse directement à ses confrères, aux débutants et tout simplement aux plus curieux, dans le but de détailler toutes les étapes qui ont mené à l’un des thèmes principaux du film de Martin Koolhoven. Si l’entreprise est à saluer, ce module est beaucoup trop long et des néophytes risquent de décrocher rapidement, d’autant plus que Junkie XL utilise un jargon réservé aux initiés.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et une galerie de photos du film et du tournage.

Signalons que l’édition 2 DVD contient en plus des entretiens avec Dakota Fanning, Guy Pearce et Kit Harington !

L’Image et le son

M6 Vidéo signe un sans-faute avec ce master HD immaculé de Brimstone. Tout d’abord, c’est la clarté et le relief des séquences diurnes qui impressionnent et flattent la rétine. Les couleurs sont chatoyantes puis deviennent de plus en plus froides jusqu’à la partie enneigée, le piqué est vigoureusement acéré, les détails abondent aux quatre coins du cadre large, restituant admirablement la beauté des paysages et les contrastes affichent une densité remarquable. Ajoutez à cela une profondeur de champ constante, des ambiances tamisées séduisantes et des teintes irrésistibles et vous obtenez le nec plus ultra de la Haute-Définition. Un transfert très élégant mais rien de très étonnant quand on sait que Brimstone a été tourné avec la caméra numérique Arri Alexa XT.

Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 5.1 se révèlent particulièrement riches et instaurent un large confort acoustique. En version originale, les dialogues auraient néanmoins mérité d’être un peu plus relevés sur la centrale, mais nous vous conseillons d’éviter l’horrible doublage français. Dans les deux cas, la spatialisation musicale demeure évidente, les latérales soutiennent l’ensemble comme il se doit, les ambiances naturelles ne manquent pas tandis que le caisson de basses intervient à bon escient. Deux DTS-HD Master Audio 2.0, forcément moins enveloppantes, sont également disponibles, ainsi que les sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants.

Crédits images : © The jokers / M6 Vidéo / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Usurpation, réalisé par Jonathan Baker

USURPATION (Inconceivable) réalisé par Jonathan Baker, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez Condor Entertainment

Acteurs : Nicolas Cage, Gina Gershon, Nicky Whelan, Faye Dunaway, Natalie Eva Marie, Leah Huebner, Jonathan Baker, James Van Patten…

Scénario : Chloe King

Photographie : Brandon Cox

Musique : Kevin Kiner

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Brian mène une vie paisible et confortable avec sa femme Angela et leur fille. Le jour où leur voisine est retrouvée noyée, leur quotidien semble irrémédiablement déraper : Angela échappe de peu à un accident mortel, et des objets disparaissent de la villa. Brian sombre peu à peu dans la paranoïa : que cache l’intrigante jeune femme qui vient de s’installer dans leur guest house ? Leur cauchemar aurait-il un lien avec une mystérieuse série de meurtres remontant à plusieurs années ?

Les Direct To Video avec Nicolas Cage se suivent et ne se ressemblent pas ! UsurpationInconceivable est déjà le cinquième film avec le comédien à débarquer dans les bacs en France cette année. Après les excellents USS Indianapolis de Mario Van Peebles et Dog Eat Dog de Paul Shrader, le passable Arsenal et le raté Vengeance, Usurpation s’avère une série B plutôt réussie qui fleure bon les années 1990 et qui lorgne plus particulièrement sur le grand classique de Curtis Hanson, La Main sur le berceau.

En dehors de Dog Eat Dog, Nicolas Cage apparaissait plutôt comme un second rôle dans ses derniers films, laissant la place à ses partenaires, ce qui lui laissait probablement le temps de faire la navette entre ses divers tournages simultanés et ses joggings matinaux. Il n’est pas mauvais ici, très sobre et donc bon et attachant. Il retrouve Gina Gershon à qu’il avait déjà donné la réplique il y a vingt ans dans Volte-Face, le chef d’oeuvre de John Woo. Les années ont passé, la comédienne a vraisemblablement eu recours à quelques injections, ce qui ne l’empêche pas d’être avant tout excellente, charismatique et toujours aussi sexy. Visiblement très complice, le couple fonctionne très bien à l’écran.

Mais le réalisateur Jonathan Baker, dont il s’agit du premier long métrage, donne le beau rôle à la méconnue Nicky Whelan, blonde incendiaire aux yeux bleus perçants, qui campe une redoutable garce et dont le personnage fait donc sérieusement penser à celui campé par la sulfureuse Rebecca De Mornay dans La Main sur le berceau. Habituée des séries télévisées, elle fait une prestation remarquée – surtout par la gent masculine – en 2011 dans B.A.T (bon à tirer) des frères Farrelly face à un Owen Wilson bouleversé par ses charmes. Ses autres apparitions à l’écran demeurent discrètes et oubliables. Elle faisait également partie du catastrophique Le ChaosLeft Behind de Vic Armstrong, l’un des pires films avec Nicolas Cage sorti en 2014. Après un petit détour chez Terrence Malick dans Knight of Cups et également au générique de Dog Eat Dog, Nicky Whelan retrouve donc Nicolas Cage pour la troisième fois de sa carrière. Elle est impeccable dans le rôle de la détraquée Katie, devenue stérile après un problème médical, qui décide de « reprendre ses droits » sur les enfants nés grâce à ses derniers ovules qui avaient pu être sauvés. Après avoir kidnappé une petite fille et tué le père de cette dernière, elle parvient à s’incruster dans la vie d’un couple de médecins, Brian et Angela (Cage et Gershon), qui ont eu leur enfant par insémination artificielle, mais dont ils ignorent la provenance de l’ovule. Katie sombre de plus en plus dans la folie, tandis que Brian et Angela se sentent de plus en plus menacés.

Comme au bon vieux temps de la saga Hollywood Night qui a fait les belles soirées de TF1 le samedi de 1993 à 1999, Usurpation distille une petite dose de venin souvent jubilatoire, teinté d’érotisme soft, mais plaisant. La mise en scène de Jonathan Baker est soignée, tout comme le cadre et la direction d’acteurs. S’il n’est évidemment pas inoubliable, ce thriller où même Faye Dunaway vient faire un petit coucou s’avère fort sympathique, divertissant, en aucun cas un navet et encore moins un nanar, mais il est souvent utile de le préciser à certains spectateurs qui croient encore que Nicolas Cage demeure uniquement abonné aux deux catégories. Usurpation remplit parfaitement son contrat, sans se forcer certes, mais avec efficacité et un sens du travail bien fait.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Usurpation, disponible chez Condor Entertainment, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Le visuel de la jaquette est soigné et saura attirer l’oeil des admirateurs de Nicolas Cage les plus fervents. Il y en a encore. Aucun supplément.

L’Image et le son

Condor Entertainment livre un beau master HD d’Usurpation, même si le Blu-ray est au format 1080i. Le cadre large et les contrastes sont plutôt ciselés, les détails agréables, la colorimétrie chaude côtoie un léger grain cinéma flatteur. Si le piqué est sans doute un peu doux à notre goût, les noirs sont denses, le relief et la profondeur de champ sont éloquents, l’encodage AVC est solide comme un roc, excepté sur quelques séquences en extérieur. Signalons divers moirages constatables sur les surfaces rayées.

Du côté acoustique, les mixages français et anglais DTS-HD Master Audio 5.1 créent un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique et à quelques effets latéraux. Des ambiances naturelles percent les enceintes arrière avec une efficacité chronique. Le doublage français est convaincant et par ailleurs le mixage s’avère plus dynamique dans la langue de Molière qu’en version originale. Les sous-titres français ne sont pas imposés et le changement de langue n’est pas verrouillé pendant le visionnage.

Crédits images : © Condor Entertainment / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Kermesse des aigles, réalisé par George Roy Hill

LA KERMESSE DES AIGLES (The Great Waldo Pepper) réalisé par George Roy Hill, disponible en DVD et combo Blu-ray/DVD le 5 septembre 2017 chez Elephant Films

Acteurs : Robert Redford, Bo Svenson, Bo Brundin, Susan Sarandon, Geoffrey Lewis…

Scénario : George Roy Hill, William Goldman

Photographie : Robert Surtees

Musique : Henry Mancini

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Après la Première Guerre mondiale, l’aviateur Waldo Pepper gagne sa vie en donnant des spectacles aériens et des baptêmes de l’air aux citoyens de petites villes américaines. Frustré de n’être jamais devenu un as de l’aviation, il s’invente un passé prestigieux, prétendant avoir survécu à un affrontement contre l’as allemand Ernst Kessler. Mais alors que son talent le mène à Hollywood, où il devient cascadeur, son passé le rattrape sous la forme de Ernst Kessler, venu participer à un tournage…

Après Butch Cassidy et le Kid (1969) et L’Arnaque (1973, Oscar du meilleur réalisateur), le cinéaste George Roy Hill (1921-2002) et le comédien Robert Redford s’associent pour un troisième et dernier tour de piste avec La Kermesse des aiglesThe Great Waldo Pepper réalisé en 1974. Le neuvième long métrage de George Roy Hill demeure un formidable spectacle dont les véritables, authentiques et vertigineuses prouesses aériennes, certaines réalisées par Robert Redford lui-même et sans avoir recours aux sempiternelles transparences, ne cessent d’impressionner encore aujourd’hui.

Dans les années 20, le pilote Waldo Pepper se produit dans des cirques volants du Nebraska. Ancien pilote de combat, racontant à qui veut bien l’entendre – et le croire – qu’il avait volé avec la force aérienne américaine lors de la Première Guerre Mondiale, il aime raconter une de ses aventures durant laquelle il aurait affronté le pilote allemand Ernst Kessler, qu’il considère alors comme le plus grand du monde. Son talent pour les acrobaties périlleuses et son ambition conduisent Waldo à Hollywood où il doit tourner un film qui reconstitue justement les exploits d’Ernst Kessler, auxquels il a voulu assister et participer. C’est alors que Waldo se retrouve face à l’homme qu’il a toujours idolâtré, venu comme conseiller technique sur le plateau. Waldo voit alors son rêve se réaliser. Comme dans la plupart de ses films, George Roy Hill distille une furieuse mélancolie et une nostalgie à fleur de peau dans La Kermesse des aigles en dressant le portrait d’un homme qui n’a jamais cessé de vivre dans le fantasme, jusqu’à être rattrapé par le destin. A l’instar de La Castagne qu’il réalisera en 1977, le cinéaste oscille entre le drame et la comédie.

La Kermesse des aigles est souvent léger et reflète l’innocence d’une Amérique post-Première Guerre mondiale et avant le rouleau compresseur de la crise économique. Le personnage incarné par Robert Redford est charmeur et bondissant, vante ses talents d’acrobate et de pilote émérite, devant une population en quête de sensations. Mais George Roy Hill – grand amateur d’aviation et lui-même pilote sur le tournage – nous montre également que tout ceci n’est que vernis puisque Waldo Pepper est avant tout un homme qui vit dans le déni, qui se ment à lui-même avant de mentir aux autres et qui se contente de poudre aux yeux. Il ne sait faire qu’une seule chose, voler et seule compte l’adrénaline. Alors quand son autorisation de piloter lui est retirée puisqu’il n’a pas de licence et que le gouvernement américain souhaite réguler le trafic aérien en le démocratisant, Waldo ne sait plus quoi faire. S’il s’était déjà contenté de faire le clown et des cascades devant les yeux ébahis, Waldo doit se rendre à l’évidence. On lui interdit tout simplement de vivre s’il ne peut plus voler à sa guise. Une deuxième chance s’offre à lui, la dernière, quand son chemin va enfin croiser celui qu’il imaginait combattre. L’occasion de se mesurer à lui, quitte à en mourir. Mais cet homme, Ernst Kessler, bien que possédant toutes les décorations militaires et un prestige international, est lui aussi devenu l’ombre de lui-même depuis qu’il ne vole plus.

La Kermesse des aigles met en relief la difficile voire l’impossible reconversion professionnelle des anciens pilotes de la Grande guerre. Après Gatsby le Magnifique de Jack Clayton et avant Les Trois Jours du condor de Sydney Pollack, Robert Redford est évidemment parfait dans ce rôle complexe, pour lequel il s’est une fois de plus très investi au point d’exécuter quelques cascades et pirouettes à plus de mille mètres d’altitude. Le baroudeur est également soutenu devant la caméra par un casting quatre étoiles, dont les sublimes Susan Sarandon et Margot Kidder, mais aussi les talentueux Bo Svenson et Geoffrey Lewis, sans oublier la beauté de la photo du chef opérateur Robert Surtees (Ben-Hur, Le Lauréat, L’Arnaque) et le grand Henry Mancini à la baguette. En d’autres termes, La Kermesse des aigles, c’est la classe absolue du cinéma.

LE BLU-RAY

La Kermesse des aigles est disponible en combo Blu-ray-DVD chez Elephant Films. Le test de l’édition HD a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

L’interactivité est le gros point faible de cette édition. En effet, en dehors d’un lot de bandes-annonces et une galerie de photos, la présentation du film par Julien Comelli (12’) n’a strictement aucun intérêt puisque le journaliste en culture pop se contente d’énumérer les films réalisés par George Roy Hill, ceux écrits par William Goldman et ceux dans lesquels ont joué les principaux comédiens de La Kermesse des aigles. Vous gagnerez votre temps à consulter IMDB directement, plutôt que de visionner ce segment sans aucun rythme et platement réalisé.

L’Image et le son

La Kermesse des aigles renaît littéralement de ses cendres avec ce nouveau master Haute-Définition (1080p, AVC) grâce à Elephant Films ! C’est superbe. Alors qu’il ne bénéficiait que d’une simple édition DVD depuis une quinzaine d’années chez Universal Pictures, le film de George Roy Hill est de retour dans les bacs dans une édition digne de ce nom. La propreté de la copie est bluffante, le grain original respecté flatte les mirettes, la luminosité des scènes diurnes est élégante, tout comme la gestion des contrastes et la stabilité est de mise. Certes, le générique en ouverture est un peu plus défraîchi et grumeleux, tandis que certaines séquences sombres s’avèrent moins définies, mais cela reste anecdotique. Le cadre large offre une profondeur de champ inédite et regorge de détails, le piqué est à l’avenant et la colorimétrie étincelante.

La Kermesse des aigles est disponible en version originale et française DTS HD Master Audio 2.0. La première instaure un confort acoustique plaisant avec une délivrance suffisante des dialogues, des effets annexes convaincants et surtout une belle restitution de la musique. La piste française se focalise souvent sur les voix au détriment des ambiances environnantes et de la composition d’Henry Mancini. Les deux options acoustiques sont propres et dynamiques.

Crédits images : © Universal Pictures / Elephant Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Osiris, la 9ème planète, réalisé par Shane Abbess

OSIRIS, LA 9ÈME PLANÈTE (The Osiris Child – Science Fiction Volume One) réalisé par Shane Abbess, disponible en DVD et Blu-ray le 29 août 2017 chez Wild Side Video

Acteurs : Kellan Lutz, Daniel MacPherson, Luke Ford, Isabel Lucas, Temuera Morrison, Rachel Griffiths, Teagan Croft…

Scénario : Shane Abbess, Brian Cachia

Photographie : Carl Robertson

Musique : Brian Cachia

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Dans un futur lointain, l’humanité est lancée dans une course à la colonisation interplanétaire. Kane, lieutenant pour l’entreprise Exor, a pour mission d’organiser la vie dans ces nouveaux mondes. Mais un jour, il découvre que des prisonniers se sont emparés d’un virus mortel qu’ils menacent de diffuser sur Osiris, planète où vit la fille de Kane. Il se lance alors dans une course contre la montre à travers l’univers pour sauver sa fille sans se douter que dans l’ombre, une terrible machination est déjà à l’oeuvre…

Bon…on aurait bien voulu l’aimer ce film, Osiris, la 9ème planèteScience Fiction Volume One: The Osiris Child, sorti directement dans les bacs français avec un visuel clinquant. Malheureusement et bien que le réalisateur australien Shane Abbess soit précédé d’une assez bonne réputation, ce film fantastique s’avère un redoutable navet. C’est d’autant plus dommage que l’on sent réellement le potentiel du metteur en scène, remarqué en 2007 avec son premier long métrage Gabriel, mélange d’action, d’épouvante et de fantasy, dans lequel l’Ange Gabriel est conduit à mener l’ultime bataille contre les forces des ténèbres qui ont décidé de dominer le monde. Son deuxième film Infini est un thriller de science-fiction réalisé en 2015 coécrit avec Brian Cachia, également compositeur. Pour son long métrage suivant, Osiris, la 9ème planète, Shane Abbess n’aura pas eu à attendre presque dix ans puisque le film est sorti en 2016.

Cela part plutôt bien avec une belle mise en image, une photo et un cadre soignés. Le spectateur sent qu’on le caresse dans le sens du poil et que tout ne peut que bien se dérouler. Malheureusement, on déchante rapidement. Très vite, le montage complètement haché gâche tout et surtout l’indigence de l’interprétation emporte ce film de science-fiction sur les rives du navet intergalactique. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas vu autant de comédiens aussi mauvais et dépourvus de charisme. La palme revient une fois de plus à l’inénarrable Kellan Lutz, l’un des pires acteurs de tous les temps, une endive comme on en fait rarement aujourd’hui. Vu dans la saga Twilight, Expendables 3 et La Légende d’Hercule de Renny Harlin où même la 3D ne lui donnait aucun relief, il intègre le top 10 des comédiens les plus improbables. Avec son regard inexpressif et sa barbe qui semble avoir été peinte au pochoir, il déambule dans le film comme s’il était paumé avec sa pétoire. Il n’est guère aidé par Daniel MacPherson, dont pas une réplique ne tombe juste et qui semble constamment en hyperventilation, tandis que l’actrice Isabel Lucas, vue dans Transformers – La revanche et le navrant remake de L’Aube rouge, ajoute un nouveau navet à son potager déjà bien garni.

L’intrigue est divisée en plusieurs chapitres. Celui consacré à l’incarcération d’un des personnages principaux dans une prison high-tech ferait passer Fortress 2 pour du Béla Tarr. On rit, mais pas comme on pourrait le faire devant un nanar. Osiris, la 9ème planète est une œuvre qui se prend bien trop au sérieux alors que le manque de budget l’empêche constamment d’être crédible. Certains plans détonnent pourtant par leur beauté plastique à l’instar de la séquence de combat aérien qui ne dure malheureusement que cinq petites minutes. Durant ce laps de temps, on regrette sincèrement que tout le film ne soit pas aussi élégant que cette scène qui se déroule dans les nuages. Le reste n’est qu’ennui, simpliste, copie de toute une tripotée de films que l’on s’amuse à reconnaître et à énumérer. Un mix entre Starship Troopers, District 9 (le seul bon film de Neil Blomkamp à ce jour), Mad Max et…Max et les Maximonstres. Mad Max et les Maximonstres en quelque sorte.

Les fans de série B de science-fiction et de fantastique risquent de trouver le temps long puisqu’il ne se passe quasiment rien. L’action demeure incompréhensible, l’intrigue faussement décousue n’a aucun intérêt, bref, on s’ennuie royalement. Le « Volume deux » semble avorté.

LE BLU-RAY

Le test de l’édition HD d’Osiris, la 9ème planète a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical. L’édition Steelbook contient le DVD et le Blu-ray.

L’éditeur a réussi à mettre la main sur un making of entièrement promotionnel (24’), constitué d’interviews de toute l’équipe et de très rares images de tournage. Le réalisateur, le coscénariste (et compositeur), les comédiens et les producteurs s’en donnent à coeur joie dans les superlatifs, un tel est magnifique, un autre est extraordinaire, tout le monde il est beau. On en apprend tout juste sur la genèse du film, l’évolution du scénario (rires) et les intentions de Shane Abbess.

C’est beau

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p. Wild Side Video prend soin de ce titre qui sort directement dans les bacs chez nous. Ce master HD français (les credits sont dans la langue de Molière) est soigné et le transfert solide. Respectueuse des volontés artistiques originales la copie d’Osiris, la 9ème planète se révèle propre, lumineux et tire agréablement partie de la HD avec des teintes chaudes, une palette chromatique spécifique, le tout soutenu par un solide encodage. Le piqué, tout comme les contrastes, sont souvent tranchants, les arrière-plans sont détaillés, le relief plaisant, les noirs denses et les détails foisonnants. Hormis quelques légers fléchissements de la définition sur les scènes sombres et une incrustation des effets visuels parfois visibles, cette édition Blu-ray permet de découvrir Osiris, la 9ème planète dans de très bonnes conditions techniques. Un bel écrin pour un film en toc.

En anglais comme en français, les pistes DTS-HD Master Audio 5.1 assurent le spectacle acoustique avec brio. La version française jouit d’un dynamique report des voix et même si elle s’avère moins riche que la version originale, elle n’en demeure pas moins immersive. Dans les deux cas, la balance frontale en met plein les oreilles lors des séquences d’affrontements. Seul bémol, les voix manquent parfois de punch au milieu de tout ce fracas. Quelques scènes sortent du lot avec un usage probant des ambiances latérales et du caisson de basses. La musique profite également d’une belle délivrance, mettant toutes les enceintes à contribution, même à volume peu élevé. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.

Crédits images : © Sean O’ReillyStorm Vision Entertainment / Wild Side Video / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Mort vous va si bien, réalisé par Robert Zemeckis

LA MORT VOUS VA SI BIEN (Death Becomes Her) réalisé par Martin Provost, disponible en DVD et Blu-ray le 29 août 2017 chez ESC Editions

Acteurs : Meryl Streep, Bruce Willis, Goldie Hawn, Isabella Rossellini, Ian Ogilvy, Adam Storke, Nancy Fish…

Scénario : Martin Donovan, David Koepp

Photographie : Dean Cundey

Musique : Alan Silvestri

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1992

LE FILM

Depuis des années, Madeline, une actrice médiocre, vole les amants de son amie Helen, écrivain. Un soir, cette dernière se rend au spectacle de son amie, accompagnée de son fiancé Ernest, séduisant chirurgien esthétique. Une fois de plus, l’actrice joue de ses charmes et finit par épouser Ernest. Helen sombre dans la dépression et devient obèse, vouant une haine secrète envers son ancienne amie. Quatorze années plus tard, Madeline essaye désespérément de lutter contre l’inévitable vieillissement de son corps. Elle a totalement anéanti Ernest, devenu alcoolique et qui en est réduit à voir sa femme parader avec ses jeunes amants. C’est alors que Helen entre alors en scène, plus sublime que jamais et venue pour reprendre son dû.

« Où avez-vous mis ma femme ?

Elle est morte monsieur, on l’a emmené à la morgue !

La morgue ?! Elle va être furieuse ! »

Souvent sous-estimé, La Mort vous va si bienDeath Becomes Her est pourtant une œuvre centrale dans l’immense filmographie de Robert Zemeckis. Sorti sur les écrans en 1992, cette comédie-fantastique et fantastique comédie par ailleurs, est un film somme qui résume tout ce que le cinéaste avait abordé jusqu’alors et qui prépare ses prochains opus. Drôle, mais également sombre et parfois proche des films d’épouvante des studios Universal qui fleurissaient dans les années 1930-40 (plus particulièrement Frankenstein), le huitième long métrage de Robert Zemeckis mérite amplement d’être reconsidéré et n’a souvent rien à envier aux autres films plus prestigieux de son auteur.

Madeline Ashton, chanteuse sur le déclin, se désespère de vieillir. Son succès ne se résume plus qu’au nombre de ses conquêtes masculines, qu’elle a le don de ravir à sa meilleure amie, Helen. C’est ainsi que Madeline épouse Ernest Menville, un chirurgien esthétique qu’Helen venait juste de lui présenter. La malheureuse ne s’en remet pas, cède à la boulimie et prend un terrible embonpoint. Pourtant, quelques années plus tard, Madeline retrouve Helen plus éblouissante que jamais. Folle de rage, la chanteuse accepte l’offre de Lisle, une étrange créature, mi-esthéticienne, mi-sorcière, qui lui vend un remède miracle supposé lui procurer une jeunesse éternelle. Les ennuis ne font que commencer. Réalisé entre Retour vers le futur 3 (1990) et Forrest Gump (1994), La Mort vous va si bien réunit la quête d’un trésor comme celle d’A la poursuite du diamant vert (ici la fontaine de jouvence), la course contre le temps de la trilogie Retour vers le futur (ici le vieillissement), et l’opposition de l’homme et de la créature (Qui veut la peau de Roger Rabbit ?). Toujours au top de la technologie, Robert Zemeckis use de l’émergence des images de synthèse, qui ont participé au triomphe international de Terminator 2 – Le Jugement dernier l’année précédente, tout en ayant recours aux effets spéciaux traditionnels et plus particulièrement aux animatroniques.

Film de transition, La Mort vous va si bien se situe à une période charnière du cinéma, y compris pour le réalisateur qui fait comme qui dirait ses adieux au divertissement made in Amblin avec Steven Spielberg à la barre (ses quatre derniers films), avant d’entamer une nouvelle partie de sa carrière avec des films plus adultes qui regroupent Forrest Gump, Contact, Apparences et Seul au monde. La Mort vous va si bien est incontestablement un film à redécouvrir. On s’amuse avant tout devant le jeu survolté de son trio star. Déjantées, Meryl Streep et Goldie Hawn s’en donnent à coeur joie devant la caméra toujours inspirée et virtuose de Robert Zemeckis puisque le cinéaste traite leurs personnages comme des cartoons live (ou dead c’est selon) – grâce aux fabuleux effets visuels mis à sa disposition – sans cesse en représentation, qui vivent dans un monde de chimères et régit par ce que leur renvoie leur reflet dans le miroir. S’ils ne bénéficient sans doute pas de la même fluidité que les images de synthèse d’aujourd’hui, les effets (Oscar et BAFTA des meilleurs effets visuels en 1993) du cou tordu de Meryl Streep et du trou dans l’abdomen de Goldie Hawn demeurent fort corrects et le film ne fait pas son quart de siècle.

Entre Le Dernier Samaritain de Tony Scott et Piège en eaux troubles de Rowdy Herrington, Bruce Willis trouve ici l’un de ses meilleurs rôles. Emouvant, pathétique et même tragique, le personnage d’Ernest est le plus beau de La Mort vous va si bien, celui par qui la rédemption arrive, qui donne encore confiance en l’être humain en refusant le pacte faustien que lui propose la pourtant affriolante Lisle Von Rhoman (Isabella Rossellini). Death Becomes Her est certes une comédie jubilatoire (avec un formidable caméo de Sydney Pollack en toubib dépassé par les événements), marquée par des dialogues vachards et hilarants brillamment écrits par Martin Donovan et David Koepp, mais également une critique noire, cruelle et acide sur le culte du glamour, de la jeunesse éternelle et de la recherche de la postérité. L’industrie hollywoodienne passe à la casserole et on y croise au passage James Dean et Jim Morrison, jeunes pour l’éternité.

Du point de vue technique, Robert Zemeckis ne cesse d’innover et enchaîne les morceaux de bravoure. Ses plans-séquences sophistiqués sont d’une beauté ahurissante et soutenus par la photographie élégante du chef opérateur Dean Cundey, habituellement complice de John Carpenter, tandis que la musique d’Alan Silvestri est comme d’habitude en parfaite osmose avec le travail du cinéaste.

Cette relecture du Portrait de Dorian Gray croisée avec Boulevard du crépusculeSunset Boulevard de Billy Wilder, où Norma Desmond aurait trouvé le secret pour contrer les affres du temps est donc bien plus qu’un film anecdotique comme la critique l’avait qualifié à sa sortie et ce malgré un succès honnête dans les salles. 25 ans après, La Mort vous va si bien peut enfin être reconnu à sa juste valeur.

LE BLU-RAY

Le test a été réalisé à partir d’un check-disc. La jaquette reprend le célèbre visuel de l’affiche française. Le menu principal est quant à lui animé sur la musique d’Alan Silvestri.

Plus d’une heure de suppléments, voilà qui fait plaisir pour remettre en avant La Mort vous va si bien. ESC Editions a donc vu les choses en grand et nous propose de passionnants entretiens.

On commence par la présentation croisée des journalistes Jacky Goldberg et Vincent Ostria (21’) dans le segment intitulé Robert Zemeckis, ce film vous va si bien. Si l’intervention du second s’avère anecdotique et manque d’entrain, celle du premier mérite vraiment l’attention du spectateur. Jacky Goldberg présente tout d’abord les débuts de Robert Zemeckis, pris sous l’aile de Steven Spielberg, à l’instar de ses confrères Joe Dante, Chris Columbus et Barry Levinson. Considéré comme « le bon élève », contrairement à Joe Dante qui serait plutôt le « fils rebelle », Robert Zemeckis arrive à un tournant de sa carrière avec La Mort vous va si bien. Jacky Goldberg évoque l’intelligence du casting (avec Bruce Willis et Meryl Streep qui « n’ont pas d’âge »), croise habilement le fond et la forme du film qui nous intéresse, dissèque la dualité humanité/monstruosité (thème récurrent chez le cinéaste) et démontre que La Mort vous va si bien n’a rien du film mineur dans la carrière de Robert Zemeckis. Dans la dernière partie de ce module, Jacky Goldberg évoque la réception du film et met judicieusement en parallèle certains films du cinéaste avec ceux de James Cameron. En effet, leurs œuvres se sont souvent répondues dans le sens où les deux réalisateurs ont toujours été à la pointe de la technologie et ont su utiliser les nouveaux outils mis à leur disposition en matière d’effets spéciaux pour raconter leurs histoires, à l’instar de la motion-capture.

Nous retrouvons Jacky Goldberg dans un second supplément où il est cette fois seul en piste, Bruce Willis, itinéraire d’un héros ordinaire (22’). A travers une brillante analyse, le journaliste croise divers films et donc différents personnages interprétés par Bruce Willis au cours de sa carrière, et démontre que son merveilleux contre-emploi dans La Mort vous va si bien n’est finalement pas si singulier. Après une rapide présentation des débuts de la carrière du comédien, Jacky Goldberg en vient à la nouvelle figure du héros créée par Bruce Willis dans Piège de cristal. Moins indestructible en apparence que Sylvester Stallone et qu’Arnold Schwarzenegger, Bruce Willis compose des héros qui n’ont pas choisi de l’être, ce qui renforce l’empathie des spectateurs et ainsi une meilleure identification. Habitué des comédies, chez Blake Edwards et dans la série Clair de lune, l’acteur devient une star du film d’action à l’âge de 33 ans. Dans la seconde partie, Jacky Goldberg se penche sur la nature quasi-incassable et immortelle du corps de Bruce Willis à l’écran, dont le point d’orgue demeure le film de M. Night Shyamalan, Incassable. Un corps qui prend en charge l’humour dans le registre de la comédie, mais qui est blessé, égratigné, mais qui résiste, qui encaisse les coups et qui finalement ne peut mourir (ou presque) dans les films d’action. Enfin, Jacky Goldberg évoque les dernières étapes dans la carrière de Bruce Willis, en disant que « lé héros ironique est devenu cynique », presque anachronique dans le monde du cinéma contemporain. Le journaliste sauve Clones et Looper, avant de parler brièvement des catastrophiques années 2010 où l’acteur enchaîne les productions bas de gamme sortant directement en DVD, en espérant un prochain sursaut dans la suite d’Incassable.

A l’occasion de cette sortie en Haute-Définition, les responsables des effets spéciaux mécaniques Alec Gillis et Tom Woodruff Jr., qui comptent à leur actif des films comme Cocoon, Aliens – le retour, Alien 3, Terminator, Wolf et bien d’autres classiques, reviennent sur leur collaboration avec Robert Zemeckis sur La Mort vous va si bien (21’). Les deux amis et confrères évoquent leur arrivée sur le projet, avec pour mission de créer des versions robotiques de Meryl Streep et de Goldie Hawn. La Mort vous va si bien se situe à une période charnière dans le domaine des effets visuels, entre Terminator 2 – Le Jugement dernier et Abyss, mais avant Jurassic Park. Si La Mort vous va si bien bénéficie d’images de synthèse, le film repose encore sur de nombreux animatroniques. Alec Gillis et Tom Woodruff Jr. reviennent en détails sur la création du cou tordu, du trou dans l’abdomen, de la réalisation de la séquence de l’escalier et donnent même le secret de la poitrine redressée de Meryl Streep…réalisée en un tour de main.

L’interactivité se clôt sur un module précieux (3’) constitué d’une rapide présentation d’Alec Gillis et Tom Woodruff Jr et d’images d’archives montrant la création des effets mécaniques dans les ateliers des effets spéciaux.

Seul très léger bémol : il est dommage de ne pas retrouver le making of d’époque de 9 minutes présent sur le DVD Universal.

L’Image et le son

Jusqu’à présent, La Mort vous va si bien n’avait pas été gâté avec seulement une petite édition en DVD disponible depuis 2000 et quasiment dépourvue de suppléments. Le nouveau master Haute Définition proposé ici par ESC Editions remplit son contrat et offre à La Mort vous va si bien…une cure de jouvence. Ce lifting (!) sied notamment aux couleurs de la photo élégante du grand chef opérateur Dean Cundey à qui l’on doit les images mythiques d’Halloween – la nuit des masques, Fog, New York 1997, The Thing, la trilogie Retour vers le futur, Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, bref un remarquable C.V. La restauration est de haut niveau, aucune scorie n’a survécu, les contrastes ont été revus à la hausse. En dehors de deux ou trois séquences sombres et du générique d’ouverture au bruit vidéo certain, la gestion du grain est solide. Si le teint des comédiens tire parfois sur le rosé, cela a toujours été le cas. Les séquences aux effets spéciaux numériques détonnent quelque peu, mais dans l’ensemble la copie est équilibrée et l’apport HD plus que probant.

Point de remixage à l’horizon comme cela avait tout d’abord été annoncé, les pistes anglaise et française sont présentées en DTS-HD Master Audio 2.0. et instaurent toutes deux un très large et semblable confort acoustique. La musique d’Alan Silvestri, à redécouvrir absolument, bénéficie d’une large ouverture des canaux, le doublage français est brillant, les effets annexes riches et le report des voix dynamique. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Universal pictures / ESC Editions / ESC Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr