Test Blu-ray / La Fille sur la balançoire, réalisé par Richard Fleischer

LA FILLE SUR LA BALANÇOIRE (The Girl in the Red Velvet Swing) réalisé par Richard Fleischer, disponible en DVD et Blu-ray le 2 octobre 2018 chez Rimini Editions

Acteurs : Ray Milland, Joan Collins, Farley Granger, Luther Adler, Cornelia Otis Skinner, Glenda Farrell, Frances Fuller, Phillip Reed…

Scénario : Walter Reisch, Charles Brackett

Photographie : Milton R. Krasner

Musique : Leigh Harline

Durée : 1h49

Date de sortie initiale : 1955

LE FILM

Dans l’Amérique des années 1900, Stanford White, célèbre architecte new-yorkais, marié mais séducteur réputé âgé de 47 ans, remarque dans une troupe de danseuses de cabaret Evelyn Nesbit, qui n’a que 16 ans. Cette dernière tombe sous son charme, mais celui-ci, torturé par sa conscience, cherche à éloigner la jeune femme, dont il est tombé amoureux. La jeune fille est également convoitée par un riche oisif, Harry Thaw. Quatre ans plus tard, celui-ci l’épouse. Mais, sa jalousie s’exacerbe à l’encontre de White. Un soir, dans un cabaret fréquenté par la haute société, il abat l’architecte de trois coups de revolver. Lors du procès Evelyn cédera aux pressions de sa belle mère et fera un faux témoignage pour sauver la tête de son mari.

Fils du pionnier de l’animation Max Fleischer (producteur de Popeye et de Betty Boop), Richard Fleischer (1916-2006) tente d’abord de devenir comédien mais se retrouve rapidement dans la salle de montage pour s’occuper des films d’actualités pour la RKO. Après quelques courts-métrages remarqués en tant que réalisateur, Richard Fleischer se voit confier quelques séries B. C’est le cas d’Assassin sans visage, remarquable film noir d’une heure montre en main tourné en seulement dix jours en 1949. Jalon de l’histoire du film criminel, l’oeuvre de Richard Fleischer repose sur une mise en scène stylisée et demeure l’un des premiers films à traiter de manière réaliste de la figure du serial killer.

Sous contrat avec la RKO, Richard O. Fleischer, signe plus tard Bodyguard, un petit polar à l’intrigue banale et même sans surprise, qu’il parvient à élever grâce à une mise en scène inspirée et dynamique, une direction d’acteurs parfaite (parfait Lawrence Tierney et dernière apparition de l’adorable Priscilla Lane) et même quelques touches d’humour qui font mouche. Série B vive et dynamique, particulièrement intéressante sur le plan visuel et faisant fi d’un budget somme toute restreint, bourrée d’idées (la scène finale dans l’abattoir) et de trouvailles sympathiques (un gros plan sur un oeil), Bodyguard, ce quatrième long-métrage de Richard Fleischer, se voit encore aujourd’hui comme une belle curiosité.

Tous ces petits longs métrages vont permettre à Richard Fleischer de révéler son savoir-faire. Sa spécialité ? Les polars secs et nerveux à l’instar du Pigeon d’argile grâce auquel le cinéaste transcende une fois de plus un postulat de départ classique pour s’amuser avec les outils techniques mis à sa disposition. Dès 1952 avec L’Enigme du Chicago Express, le réalisateur est reconnu dans le monde entier comme étant un nouveau maître du cinéma. Cette ascension fulgurante lui ouvrira les portes des grands studios Hollywoodiens où il démontrera son immense talent et son goût pour un éclectisme peu commun : Vingt Mille lieues sous les mers (1954), Les Inconnus dans la ville (1955), Les Vikings (1958). Juste après avoir connu le succès dans le monde entier avec sa transposition de l’oeuvre de Jules Verne, Richard Fleischer enchaîne avec La Fille sur la balançoire. Si ce film semble plus classique qu’à son habitude, The Girl on the Red Velvet Swing annonce pourtant les œuvres à venir de Richard Fleischer, notamment celles basées sur des faits divers criminels. Ou comment La Fille sur la balançoire s’inscrit bel et bien dans une filmographie éclectique – 60 films en 45 ans – et pourtant cohérente.

Ayant envisagé dans sa jeunesse des études pour devenir psychiatre, Richard Fleischer s’est toujours intéressé aux obsessions de ses personnages, d’un côté ou de l’autre de la justice. Ce sera notamment le cas dans Le Génie du mal (1959), adapté du roman Crime (1956) de l’écrivain et journaliste Meyer Levin, dans lequel le cinéaste s’inspire de l’affaire Leopold et Loeb, que Levin avait par ailleurs couvert pour le compte du Daily News en 1924 alors qu’il fréquentait la même Université que les deux criminels. Nathan Leopold et Richard Loeb étaient deux riches et brillants étudiants en droit de l’Université de Chicago, fascinés par la théorie du surhumain de Friedrich Nietzsche. Se sentant intellectuellement au-dessus du commun des mortels et donc des lois, les deux étudiants ont décidé de tuer un adolescent de 14 ans pour le seul plaisir de réaliser un crime parfait et d’éliminer un être inférieur, donc « inutile ». Un fait divers qui avait déjà inspiré La Corde d’Alfred Hitchcock, réalisé dix années auparavant. Ce qui intéresse Richard Fleischer et ce qui le passionnera tout au long de sa vie, c’est surtout ce qui peut conduire un homme à commettre l’irréparable. Le Génie du mal sera d’ailleurs le premier volet d’une trilogie criminelle en devenir avec L’Étrangleur de Boston en 1968 et L’Étrangleur de la place Rillington en 1971. Cinéaste prolifique, il est et demeure assurément l’un des plus grands metteurs en scène et raconteur d’histoires de l’industrie hollywoodienne.

Quand on se couche avec des chiens, on se lève avec des puces…

Entre le film à costumes, une touche de comédie musicale, le mélodrame passionnel, l’étude psychologique et un soupçon d’histoire criminelle, La Fille sur la balançoire, inspiré d’une histoire vraie qui avait été appelée « Le Procès du siècle » et qui avait défrayé la chronique au début du XXe siècle, repose sur un scénario en béton écrit par les immenses Walter Reisch (Voyage au centre de la terre de Henry Levin, Niagara de Henry Hathaway, Ninotchka d’Ernst Lubitsch) et Charles Brackett (Boulevard du crépuscule, La Scandaleuse de Berlin). Richard Fleischer a donc les mains libres pour dérouler son récit à travers une reconstitution soignée, une virtuosité unique et un art jamais démenti de la conduite dramaturgique, tout en se penchant sur une nouvelle approche du « Mal » et des recoins les plus sombres de l’âme humaine.

Avec son CinémaScope sublime et la flamboyante photographie du chef opérateur Milton R. Krasner (Ève, 7 ans de réflexion, La Conquête de l’Ouest) aux couleurs étincelantes qui contrastent avec la noirceur du propos, La Fille sur la balançoire demeure un vrai joyau et continue aujourd’hui de faire le bonheur des cinéphiles.

Dans la première partie de La Fille sur la balançoire, Richard Fleischer observe ses personnages avec une patience et l’oeil aiguisé d’un entomologiste. Le réalisateur pose le cadre, donne aux spectateurs ce qu’ils sont venus voir, à savoir un trio de stars élégantes, superbes et qui portent admirablement le costume. Le décor est faste, les couleurs éclatantes, le cadre large renvoie aux plus grands spectacles cinématographiques d’alors. Pourtant, il y a quelque chose de menaçant, pour ne pas dire pourri qui couve dans La Fille sur la balançoire. Si les faits réels ont été quelque peu « adoucis » – la jeune Evelyn Nesbit, 14 ans, avait  été violée par Stanford White – Richard Fleischer n’est pas dupe quant au comportement inapproprié de ses protagonistes masculins.

Ray Milland compose un architecte de renom, peut-être le plus connu des Etats-Unis, marié, qui entreprend une relation avec une très jeune femme (ici âgée de 16 ans), plus ou moins consentie. Le film étonne par sa frontalité, surtout lorsque White décide finalement de s’occuper d’Evelyn comme s’il s’agissait de « sa fille », en voulant lui faire reprendre des études. Fantasme incestueux ? Pédophilie ? Il s’agit bien de cela, mais Richard Fleischer est assez malin pour faire passer le message malgré un code Hays omnipotent. De son côté, Farley Granger compose un Harry K. Thaw ambiguë, playboy colérique et millionnaire qui vit sous le joug d’une mère qu’on imagine à la fois castratrice et également incestueuse. Troisième élément de ce triangle « amoureux », Joan Collins, dans un rôle pensé pour Marilyn Monroe, subjugue à chaque apparition. Mais en dépit de son apparente innocence, le spectateur s’interroge sur le caractère arriviste de cette apparente oie blanche qui souhaite s’élever dans l’échelle sociale. Son jeune âge la perdra puisqu’elle se retrouvera au milieu d’un règlement de comptes fatal, qui lui fera comprendre qu’on ne peut jouer innocemment dans le monde adulte.

Le dernier acte, après le meurtre, est un modèle du genre. Ou l’art de l’ellipse chez Richard Fleischer. Les grandes étapes du procès sont résumées via le titre des manchettes affiché sur les devantures d’un magasin, jusqu’au verdict. Quant à l’épilogue dans la prison, il reste d’une brutalité peu commune et d’un cynisme tout aussi rare. Un autre bijou noir dissimulé dans l’immense filmographie du cinéaste. Ce fait divers sera également évoqué dans Ragtime de Milos Forman (1981) et repris par Claude Chabrol dans La Fille coupée en deux (2007).

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de La Fille sur la balançoire, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui très élégant. Le menu principal est animé et musical.

Critique cinéma et chargée de cours à l’université Paris 3, Ophélie Wiel replace La Fille sur la balançoire dans la carrière de Richard Fleischer et revient sur les thèmes, les partis pris, la psychologie des personnages et le casting du film qui nous intéresse, sans oublier d’évoquer le fait divers qui l’a inspiré (20’). Ophélie Wiel indique comment le cinéaste et les scénaristes ont su contourner le tristement célèbre code Hays, afin d’aborder la sexualité déviante du personnage incarné par Ray Milland.

L’Image et le son

L’édition HD de La Fille sur la balançoire est aléatoire. Rien à redire sur le fabuleux cadre large et la vivacité de la colorimétrie, en particulier sur les quelques scènes chantées aux costumes étincelants (jaune, rose, on en prend plein les yeux) ou de la balançoire éponyme. En revanche, le master est encore parsemé de points blancs, de scories diverses et variées, de raccords de montage. La définition décroche sur les fondus enchaînés et la dernière bobine est la plus abîmée du lot avec une recrudescence des poussières. Les contrastes sont malgré tout fabuleux, malgré des fourmillements, des flous intempestifs, des séquences tournées en transparence visibles comme le nez au milieu de la figure. La gestion du grain est également inégale avec de temps en temps des scènes plus lissées et à l’aspect plus artificiel. Ce Blu-ray est une exclusivité mondiale.

Point de Haute-Définition en ce qui concerne l’acoustique. La version originale bénéficie d’une piste LPCM 2.0 (à privilégier), mais également d’une option Dolby Digital 5.1 correcte, qui spatialise la musique de façon dynamique. Quelques effets latéraux parviennent à se faire entendre, même si l’ensemble reste essentiellement frontal. Les voix sont de temps à autre assez confinées ou au contraire trop aiguës. La piste française LPCM 2.0 est de bon acabit, au doublage soigné. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : ©  Twentieh Century Fox Home Entretainment LLC All Rights Reserved / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Point de chute, réalisé par Robert Hossein

POINT DE CHUTE réalisé par Robert Hossein, disponible en combo DVD/Blu-ray le 5 juin 2018 chez TF1 Studio

Acteurs :  Johnny Hallyday, Robert Hossein, Pascale Rivault, Albert Minski, Robert Dalban, Christian Barbier, Marie-Christine Boulard, Yasmine Zimmerman…

Scénario :  Claude Desailly, Robert Hossein

Photographie : Daniel Diot

Musique : André Hossein

Durée : 1h20

Année de sortie : 1970

LE FILM

Trois voyous enlèvent une jeune fille de quinze ans, Catherine, pour obtenir de son père le versement d’une rançon. Ils la séquestrent dans une cabane perdue au bord de la mer et la battent. Seul Eddie, un jeune voyou, gardien de la jeune fille, s’insurge contre ces méthodes. À travers un fait divers tragique, le portrait de deux adolescents dans un climat d’angoisse et de violence.

Tout de suite après Le Spécialiste de Sergio Corbucci, Johnny Hallyday persévère dans le cinéma et enchaîne avec Point de chute, un drame sentimentalo-policier coécrit, mis en scène et interprété par Robert Hossein, qui était passé derrière la caméra dès 1955 avec Les Salauds vont en enfer. Si ce petit film reste méconnu, Johnny Hallyday y trouve l’un de ses meilleurs rôles et signe d’ailleurs une excellente performance. Quasi-mutique du début à la fin, les dialogues sont d’ailleurs réduits à leur plus strict minimum, le comédien est bien dirigé, filmé et s’impose sans mal dans la peau de ce personnage de bad boy malgré-lui, qui va tomber amoureux de la jeune fille que lui et ses complices ont kidnappé dans le but de demander une rançon. Jeux de masques, au sens propre comme au figuré, retournements de situations et valse des sentiments, Point de chute est une très jolie surprise, délicate et qui n’a pas peur des envolées romanesques.

Lui, Vlad « le Roumain », est un jeune voyou, dur, sans scrupules. Elle, Catherine, une toute jeune fille, une lycéenne, d’une famille de la haute bourgeoisie. Ils n’ont rien en commun l’un et l’autre. Catherine est enlevée par des gangsters, et Vlad est chargé de la garder dans une cabane isolée au bord de la mer. Un monde les sépare, ils n’ont rien à se dire et ce n’est pas la situation qui va les rapprocher. Pourtant, en dépit de tout, au fil des heures qui s’écoulent dans l’attente de la rançon, des liens silencieux et invisibles se créent entre eux…

Le film démarre sur une séquence en N&B. Une plage comme décor principal. On assiste à la reconstitution d’un crime qui vient d’avoir lieu. Un inspecteur de police (Robert Dalban, très belle présence) découvre la clé de l’énigme dans un cahier d’écolière caché sous un matelas. Puis, dix minutes après, les événements passés sont racontés en couleur. Sur un rythme lent, mais maîtrisé, Robert Hossein prend le temps d’observer le regard bleu azur de son protagoniste, dissimulé derrière un masque blanc sans expression. A l’instar de deux animaux sauvages, Vlad (Johnny Hallyday donc) et Catherine (Pascale Rivault) s’observent, s’affrontent, rivalisent, avant de finalement s’apprivoiser. Vlad tombe alors le masque, se révèle attentionné envers Catherine malgré ses tentatives d’évasion. Quand ses complices reviennent, Vlad se rend compte qu’il ne peut plus supporter le traitement violent accordé à Catherine.

Robert Hossein instaure une très belle atmosphère éthérée et dépouillée grâce à la photo de Daniel Diot, mais aussi avec le décor de la petite cahute en bois paumée sur une plage du Nord sur fond de ciel ivoire, tandis que la musique récurrente d’André Hossein, qui rappelle le thème principal de Jeux interdits, apporte une vraie mélancolie à l’ensemble. On s’attache à ce voyou repenti auquel Johnny Hallyday apporte une vraie sensibilité et même une certaine poésie. Le chanteur prouve d’ailleurs qu’il n’est jamais aussi bon comédien que lorsque ses répliques sont rares. Contrairement au Spécialiste, dans lequel son jeu était à la limite de la parodie involontaire (ou pas) de Clint Eastwood, Lee Van Cleef et Franco Nero, Johnny Hallyday signe une vraie prestation émouvante dans Point de chute, peut-être la plus convaincante de sa carrière sur grand écran.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Point de chute, disponible chez TF1 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Comme sur le Blu-ray du Spécialiste, Jean-François Rauger présente ici Point de chute. Le directeur de la programmation de la Cinémathèque française est beaucoup plus succinct que pour l’autre film avec Johnny Hallyday, puisque son introduction ne dure que sept minutes. Rauger se penche surtout sur l’évolution du jeu d’acteur de Johnny Hallyday au cinéma, sur les personnages et les thèmes du film de Robert Hossein.

Ce qui va ravir les fans du chanteur, c’est la présence du concert de Johnny Hallyday à la prison de Bochuz (40’). Cette prestation légendaire de 1974 a été filmée par la Radio Télévision Suisse. Durant cette représentation présentée pour la première fois en version restaurée Haute Définition, Johnny Hallyday enchaîne onze titres (dont Que je t’aime, Toute la musique que j’aime, Les Portes du pénitencier, Blue Suede Shoes, Tutti frutti) devant les prisonniers visiblement conquis.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce, durant laquelle une critique enflammée affirme que « Robert Hossein est désormais l’égal d’un Hitchcock ». Cette édition combo Blu-ray/DVD dispose également un livret exclusif et inédit de 36 pages comprenant des photos d’exploitation du film et les propos de Robert Hossein et Johnny Hallyday sur Point de chute.

L’Image et le son

Difficile de faire mieux que ce master restauré 4K à partir du négatif image ! Ce Blu-ray permet aux spectateurs de redécouvrir totalement Point de chute, dès la séquence d’ouverture en N&B. La définition est exemplaire avec des contrastes denses, des noirs profonds, des blancs lumineux et un grain original heureusement préservé. La partie en couleur est peut-être moins précise, mais la clarté est de mise, le piqué aussi tranchant qu’inédit et les détails étonnent par leur précision. Toutefois, en raison des partis pris esthétiques, quelques flous sporadiques sont à noter, des séquences paraissent plus douces et les arrière-plans peuvent paraître moins précis. Mais cela reste anecdotique.

L’éditeur est aux petits soins avec le film de Robert Hossein puisque la piste mono bénéficie d’un encodage en DTS HD-Master Audio. Si quelques saturations et chuintements demeurent, l’écoute se révèle fluide, équilibrée, limpide. Aucun craquement intempestif ne vient perturber l’oreille des spectateurs, les ambiances sont précises. Les dialogues sont clairs, sans souffle. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : ©  TF1 Studio / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Un homme amoureux, réalisé par Diane Kurys

UN HOMME AMOUREUX réalisé par Diane Kurys, disponible en combo Blu-ray/DVD le 11 avril 2018 chez Pathé

Acteurs :  Peter Coyote, Greta Scacchi, Claudia Cardinale, Jamie Lee Curtis, Peter Riegert, John Berry, Vincent Lindon, Jean Pigozzi, Elia Katz…

ScénarioDiane Kurys, Olivier Schatzky

Photographie : Bernard Zitzermann

Musique : Georges Delerue

Durée : 1h59

Année de sortie : 1987

LE FILM

Venu tourner un film à Cineccitta, Peter Elliot, star du cinéma américain, s’éprend de sa jeune partenaire française, Jane Steiner. Il est marié et père de deux enfants, et leur liaison enflammée perturbe le tournage et remet en cause toutes leurs certitudes à l’écran et dans la vie.

Un homme amoureux, également connu sous le titre A Man in Love, est l’un des sommets de la carrière de la réalisatrice, scénariste, productrice et actrice Diane Kurys. Née à Lyon en 1948, fille d’immigrants polonais et russes, la cinéaste fait ses débuts derrière la caméra avec Diabolo menthe. C’est un triomphe. Le film obtient le Prix Louis-Delluc. 3 millions de spectateurs se déplacent dans les salles en 1977 et Diabolo menthe devient le sixième plus grand succès de l’année, ainsi que le deuxième film français le plus vu derrière L’Animal de Claude Zidi. Difficile de se remettre d’un pareil phénomène de société. S’ensuivent Cocktail Molotov en 1980, puis Coup de foudre en 1983, inspiré des propres souvenirs de famille de la réalisatrice. Le film obtient un grand succès dans le monde et reçoit de nombreux prix dans les festivals, avant d’être nommé à l’Oscar du meilleur film étranger. Cette reconnaissance internationale donne l’opportunité à Diane Kurys de développer certains projets aux Etats-Unis, qui ne voient malheureusement pas le jour en raison de divergences artistiques avec les producteurs. Qu’à cela ne tienne, Diane Kurys parvient à mettre en route Un homme amoureux, ode au cinéma et histoire d’amour qui réunit un casting exceptionnel.

Imaginez cette affiche : Peter Coyote, Greta Scacchi, Claudia Cardinale, Jamie Lee Curtis, Vincent Lindon et Peter Riegert, réunis dans les mythiques studios de Cinecittà, où la vie et le cinéma s’entrecroisent, se frôlent, se heurtent et s’imbriquent. Comme La Nuit américaine de François Truffaut, grande référence de Diane Kurys, l’histoire d’Un homme amoureux se focalise sur un couple de comédiens venus d’horizons différents, lui est une star confirmée, elle débute dans le métier, en couple chacun de leur côté, qui vont néanmoins vivre l’amour fou, une passion charnelle incandescente, sous le soleil estival de Rome et en passant par les rives de la Seine de Paris.

Le scénario coécrit par Diane Kurys et Olivier Schatzky rend un merveilleux hommage au cinéma italien, à la magie du 7e art, aux comédiens toujours sur le fil tendu entre la fiction et la réalité. La cinéaste s’amuse à faire perdre leurs repères aux spectateurs, en mélangeant la vie des protagonistes, avec celles de leurs personnages qu’ils incarnent dans un film racontant l’histoire de l’écrivain Cesare Pavese, interprété par Steve Elliott, joué par Peter Coyote. Steve tombe alors éperdument amoureux de sa partenaire, et on le comprend, puisque celle-ci est incarnée par Greta Scacchi. Furieusement romanesque, Un homme amoureux, filmé dans un sublime Scope photographié par le chef opérateur Bernard Zitzermann (La Banquière, La Balance), flatte à la fois le coeur et l’âme, embrase l’audience par sa sensualité et sa beauté plastique, tandis que la partition de Georges Delerue, qui n’est pas sans rappeler celle de La Peau douce de François Truffaut (décidément) berce cette valse des sentiments et sonde toujours plus cette mise en abyme voulue par la réalisatrice.

Sélectionné pour ouvrir la 40e édition du Festival de Cannes en 1987, Un homme amoureux connaîtra un succès d’estime avec quasiment 800.000 spectateurs. Souvent oublié dans la filmographie de Diane Kurys, il mérite pourtant d’être redécouvert, comme un trésor caché, ce qu’il est indéniablement, d’autant plus qu’il fait parfois écho avec le récent et magnifique Call Me By Your Name de Luca Guadagnino.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Un homme amoureux, disponible chez Pathé, a été réalisé à partir d’un check-disc. Cette édition comporte également le DVD du film. Le menu principal est animé et musical.

Après avoir supervisé la restauration d’Un homme amoureux, Diane Kurys revient sur la genèse, la production, le tournage et la sortie de son quatrième long métrage. Sans langue de bois, la réalisatrice se penche point par point sur son seul film tourné en langue anglaise avec un casting international. Un film qu’elle juge « ambitieux et difficile à faire », « un tournage très agréable en Italie, malgré une mise en route chaotique et quelques faux départs ». On apprend également que le rôle principal avait été proposé à Robert de Niro, Dustin Hoffman, Al Pacino et William Hurt, qui ont tous poliment refusé par peur d’être « confondu » avec le personnage. Diane Kurys est également critique envers son propre travail, n’hésitant pas à dire qu’elle en changerait certains éléments. Enfin, le casting et l’équipe technique sont passées en revue. Un très beau moment passé en compagnie de la cinéaste. Cependant, il est dommage de ne pas retrouver le making of de 25 minutes proposé sur le DVD du film en 2005.

L’Image et le son

Un homme amoureux s’offre à nous en Haute-Définition dans une nouvelle et superbe copie entièrement restaurée 2K en 2017 par Pathé et les laboratoires Eclair Group, sous la supervision de la réalisatrice, à partir d’une numérisation 4K du négatif original. Ce Blu-ray renforce les contrastes, la densité des noirs et la stabilité de l’image. La copie est entièrement débarrassée des scories diverses et variées, les couleurs sont ardentes, vives et chatoyantes, certains décors brillent de mille feux, les détails sont légion aux quatre coins du cadre large. Les scènes en extérieur affichent une luminosité inédite, tout comme un relief inattendu, un piqué pointu. Tous les défauts constatés sur l’édition DVD en 2005 chez le même éditeur ont été éradiqués, à l’instar des pompages, du bruit vidéo dans les arrière-plans, ainsi que les instabilités de l’étalonnage. Revoir Un homme amoureux dans ces conditions techniques permet de redécouvrir totalement le film de Diane Kurys.

Les mixages DTS-HD Master Audio Stéréo français et anglais instaurent un bon confort acoustique. Les dialogues sont ici délivrés avec suffisamment d’ardeur et de clarté, sans doute trop sur la VF, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. Chose amusante, Peter Riegert est doublé en français par un certain Patrick Bruel. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiovision.

Crédits images : © Pathé / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr