Test DVD / Madame, réalisé par Amanda Sthers

MADAME réalisé par Amanda Sthers, disponible en DVD le 3 avril 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  Toni Collette, Harvey Keitel, Rossy de Palma, Michael Smiley, Tom Hughes, Violaine Gillibert, Joséphine de La Baume, Stanislas Merhar…

Scénario : Amanda Sthers, Matthew Robbins

Photographie : Régis Blondeau

Musique : Matthieu Gonet

Durée : 1h28

Année de sortie : 2017

LE FILM

Anne et Bob, un couple d’américains fortunés récemment installé à Paris, s’apprêtent à donner un grand dîner, et convient douze invités triés sur le volet, réunissant la haute société anglaise, française et américaine. Mais lorsque Anne réalise qu’un treizième couvert est posé pour Steven, le fils du premier mariage de Bob, elle panique : pour cet événement mondain, hors de question de provoquer le mauvais sort ! Elle demande à Maria, sa domestique, d’enfiler une robe et de se faire passer pour une riche amie espagnole. Maria se retrouve assise à côté de David, un expert en art issu de la noblesse britannique. Aussi quand, sous le charme de Maria, il la recontacte le lendemain, révéler sa véritable identité est impossible. Une romance commence, qui va faire trembler les valeurs élitistes et le mariage d’Anne. A moins que cette dernière n’arrive à l’étouffer…

Madame est le deuxième long métrage d’Amanda Queffélec-Maruani, plus connu sous le nom d’Amanda Sthers. L’écrivaine (Ma place sur la photo, Le Reste de nos vies) se lance dans le monde du cinéma en cosignant Un vrai bonheur, le film (2005) de Didier Caron (d’après sa propre pièce), amusante comédie, mais qui se solde par un bide cinglant. Elle passe naturellement derrière la caméra en 2009 avec Je vais te manquer, film choral au casting conséquent, de Michael Lonsdale à Carole Bouquet, en passant par Pierre Arditi, qui cette fois encore se solde par un échec commercial cuisant. Quasiment dix ans après son coup d’essai, Amanda Sthers revient avec son second long métrage, Madame, dont elle est également la scénariste. Assurément, l’auteure livre son meilleur travail pour le grand écran.

Si les dialogues sont souvent truculents, Madame est surtout porté par des comédiens très en forme, avec en première ligne Rossy de Palma, pour laquelle le rôle principal a été spécialement écrit. C’est d’ailleurs sous l’impulsion, pour ne pas dire « sur commande », de l’épatante actrice espagnole et égérie de Pedro Almodóvar (auquel est fait un petit clin d’oeil), qui avait vu sa pièce de théâtre Le Vieux Juif Blonde, qu’Amanda Sthers lui a concocté ce Madame qui joue sur la différence de classe sociale.

Le postulat est simple. Lors d’un dîner mondain, la maîtresse de maison apprend qu’ils seront treize à table et demande à l’une de ses gouvernantes de se joindre à eux. En partant de ce synopsis, la scénariste-réalisatrice fait se confronter deux univers que tout oppose. Elle convoque un casting international. Aux côtés de Rossy de Palma, Toni Collette, Harvey Keitel, Michael Smiley, Tom Hugues, Stanislas Merhar se donnent la réplique, souvent très piquante, voire acide. On s’amuse de voir la géniale Toni Collette faire du Vélib’, mariée avec un homme plus âgé qu’elle, interprété par Harvey Keitel, dont le personnage, prisonnier de son niveau de vie, préfère aller s’amuser et batifoler avec sa jeune prof de français, incarnée par la divine Joséphine de La Baume. Mention spéciale à l’irlandais Michael Smiley, qui tombe sous le charme de Maria (Rossy de Palma), préférant son naturel, sa beauté intérieure qui illumine la beauté singulière de son visage à la Modigliani et ses blagues coquines aux discussions protocolaires sans intérêt.

Cette situation va mettre chacun des protagonistes face à leurs propres problèmes sentimentaux et sexuels. Ainsi, en se demandant comment Maria a pu conquérir malgré elle son voisin de table, la maîtresse de maison va tenter de reconquérir son époux et tenter de savoir ce qui peut bien plaire chez cette femme. Certes, Madame ne vaut pas pour sa mise en scène, que l’on pourrait qualifier de « fonctionnelle », mais le montage est assez vif, les acteurs en pleine forme, les dialogues amusants. Bien que le film se déroule à Paris de nos jours, on a souvent l’impression que le récit pourrait se dérouler au début du XXe siècle. Ce décalage est souvent étonnant et apporte un charme certain à ce vaudeville au budget modeste (4 millions d’euros), joliment photographié et surtout divertissant.

LE DVD

Après une discrète sortie dans les salles, Madame est pris en charge par Studiocanal pour son arrivée dans les bacs et uniquement en DVD. Le menu principal est fixe et muet.

Aucun supplément.

L’Image et le son

Pas d’édition Haute-Définition pour Madame, mais ce n’est pas une surprise. Avec à peine 100.000 entrées au compteur, la sortie du film d’Amanda Sthers en Blu-ray était pour ainsi dire suicidaire. Toutefois, ce DVD s’en sort avec tous les honneurs. Les intérieurs feutrés bénéficient de très beaux contrastes, les séquences tournées en extérieur sont lumineuses, le piqué est acéré. Le cadre large offre son lot de détails, surtout sur les nombreux gros plans. La colorimétrie est chatoyante, le relief appréciable.

Les versions anglaise et française sont proposées en Dolby Digital 5.1. Disons le, le soutien des latérales est anecdotique pour un film de cet acabit. Les enceintes arrière servent essentiellement à spatialiser la musique de Matthieu Gonet, les tubes Rock ‘n’ Dollars de William Sheller qui ouvre le film, Aserejé de Las Ketchup et quelques ambiances naturelles dans la rue. Les dialogues et la balance frontale jouissent d’une large ouverture, et parviennent à instaurer un confort acoustique suffisant. Une piste française Stéréo est également au programme, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, sans oublier une piste Audiodescription.

Crédits images : © Studiocanal / Sam Hellmann / Thibault Grabherr Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Secret des Marrowbone, réalisé par Sergio G. Sánchez

LE SECRET DES MARROWBONE (El Secreto de Marrowbone ou Marrowbone) réalisé par Sergio G. Sánchez, disponible en DVD et Blu-ray le 18 juillet 2018 chez Metropolian Vidéo

Acteurs :  George MacKay, Anya Taylor-Joy, Charlie Heaton, Mia Goth, Matthew Stagg, Kyle Soller, Nicola Harrison, Tom Fisher…

Scénario : Sergio G. Sánchez

Photographie : Xavi Giménez

Musique : Fernando Velázquez

Durée : 1h51

Année de sortie : 2018

LE FILM

Pour ne pas être séparés, Jack, 20 ans, et ses frères et sœurs plus jeunes, décident de cacher à tout le monde le décès de leur mère qui les élevait seule. Ils se retrouvent livrés à eux-mêmes dans la ferme familiale isolée, mais bientôt, d’étranges phénomènes indiqueraient qu’une présence malveillante hante leur unique refuge…

Alors oui, bien sûr, on a déjà sûrement vu ça plusieurs fois au cinéma ces quinze dernières années, mais Le Secret des MarrowboneEl Secreto de Marrowbone ou tout simplement Marrowbone (titre international) est un film très prometteur. Même si le tournage s’est fait en langue anglaise, le titre espagnol renvoie à ses décors naturels (tout le film y a été tourné), mais aussi et surtout à son cinéaste et scénariste Sergio G. Sánchez. Né en 1973, il signe ici son premier long métrage en tant que réalisateur, après avoir écrit les deux premiers films de J.A. Bayona, L’Orphelinat (2007) et The Impossible (2012). D’ailleurs l’oeuvre de ce dernier, jusque dans la musique composée par Fernando Velázquez (Quelques minutes après minuit), imprègne chaque plan et même l’histoire du Secret des Marrowbone. C’est même ce qui en fait sûrement son relatif point faible, puisque le spectateur un tant soit peu intéressé par le cinéma de genre, surtout ibérique, parviendra à anticiper les rebondissements et le twist à la M. Night Shyamalan. Toutefois, la mise en scène, la beauté de la photographie et l’excellence de ses interprètes valent largement le déplacement.

Lorsque leur mère décède, Jack, ses deux frères et leur sœur se réfugient à Marrowbone, une ferme isolée abandonnée depuis des années et qui appartenait à leur grand-tante. Par peur d’être séparés et placés dans des foyers différents, ils décident d’enterrer le cadavre de leur mère dans le jardin et continuent à faire croire qu’elle est toujours vivante. Un jour, alors qu’ils sont isolés du monde extérieur, un notaire débarque chez eux pour demander à leur mère de signer un testament. La demeure est également hantée et renferme un secret dans le grenier…

En fait, raconter l’histoire du Secret des Marrowbone en dit déjà presque trop. Sans « singer » le cinéma de celui qui lui a donné sa chance dans le milieu, qui apparaît ici en tant que producteur et avec lequel il a fait ses premières armes sur des films importants, Sergio G. Sánchez démontre surtout ici un don pour le storytelling, pour la direction d’acteurs et pour instaurer une ambiance inquiétante, tout en privilégiant l’émotion et les liens entre les personnages. Pas étonnant que le metteur en scène se soit vu remettre le Prix Goya du meilleur nouveau réalisateur en 2018. En fait ce que l’on retient avant tout du Secret des Marrowbone, également influencé par les incontournables du genre (Les Innocents de Jack Clayton, Rebecca d’Alfred Hitchcock, Les Autres d’Alejandro Amenábar), c’est avant tout les comédiens.

Le rôle principal est tenu par le britannique George MacKay, l’une des révélations du magnifique Captain Fantastic de Matt Ross (2016), vu également dans la série 22.11.63 adaptée de l’oeuvre de Stephen King. Magnétique et à fleur de peau, George MacKay est assurément l’un des grands acteurs en devenir et porte admirablement le film de Sergio G. Sánchez. C’est aussi le cas de la désormais incontournable Anya Taylor-Joy. Après The Witch de Robert Eggers, Morgan de Luke Scott et Split de M. Night Shyamalan (bientôt dans Glass), la comédienne confirme son aura, son charisme et l’art d’inspirer les réalisateurs de genre. Le reste du casting est du même acabit avec Charlie Heaton (Stranger Things), Mia Goth (A Cure for Life) et Kyle Soller (la série Poldark), tous vraiment épatants.

Le Secret des Marrowbone a du mal à se sortir d’un certain cahier des charges. On sent le nouveau réalisateur appliqué, chaque plan étant particulièrement soigné, également soutenu par le travail du chef opérateur Xavi Giménez, ancien collaborateur de Jaume Balagueró sur La Secte sans nom ou de Brad Anderson sur The Machinist. Une pléthore de talents réunis à la fois devant et derrière la caméra. Si au final ce conte émeut bien plus qu’il donne les frissons, Le Secret des Marrowbone, présenté en ouverture de Gérardmer en 2018, qui mélange allègrement thriller, horreur, fantastique et histoire d’amour, n’est en aucun cas déplaisant et mérite l’attention des spectateurs et des cinéphiles.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Secret des Maroowbone, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Point de making-of à l’horizon, ni d’interviews, mais une grande quantité de scènes coupées (28’). Ces séquences prolongeaient notamment la relation entre Jack et Allie, ainsi que d’autres moments clés du film. Mais la plupart des scènes laissées sur le banc de montage dévoilaient également trop le twist final et l’on comprend aisément pourquoi le réalisateur les a écartées. On se demande également pourquoi elles avaient été écrites tant celles-ci paraissaient trop explicites. Une fin alternative, très jolie, est également disponible.

L’interactivité comporte également une bande-démo avant/après l’incrustation des effets visuels, ainsi que des bandes-annonces et des liens internet.

L’Image et le son

Metropolitan est synonyme d’excellence : relief, colorimétrie, piqué (acéré), contrastes (impressionnants), densité des noirs, on en prend plein les yeux. Les teintes sont chatoyantes et chaque détail aux quatre coins de l’écran est aussi saisissant qu’étourdissant. Ce transfert immaculé soutenu par un encodage AVC solide comme un roc laisse pantois d’admiration. Heureusement, les scènes sombres sont logées à la même enseigne. Ce master HD du Secret des Marrowbone permet de découvrir le film dans de superbes conditions. Le léger grain inhérent à la photo d’origine est respecté.

Le spectateur est littéralement plongé dans l’atmosphère du film grâce aux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français. La composition de Fernando Velázquez est distillée par l’ensemble des enceintes. Nous sommes en plein conte et les latérales, ainsi que les frontales et le caisson de basses remplissent parfaitement leur fonction, à savoir distiller un lot conséquent d’effets qui font sursauter, même à bas volume. Les conditions acoustiques sont donc soignées, amples, précises, les voix des comédiens jamais noyées. Une piste Audiodescription est également disponible, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Metropolitan FilmExport Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’École buissonnière, réalisé par Nicolas Vanier

L’ÉCOLE BUISSONNIÈRE réalisé par Nicolas Vanier, disponible en DVD et Blu-ray le 13 février 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  François Cluzet, Jean Scandel, Eric Elmosnino, François Berléand, Valérie Karsenti, Thomas Durand, Laurent Gerra, Carolina Jurczak…

Scénario : Jérôme Tonnerre, Nicolas Vanier d’après le livre éponyme de ce dernier

Photographie : Éric Guichard

Durée : 1h55

Année de sortie : 2017

LE FILM

Paris 1930. Paul n’a toujours connu qu’un seul horizon : les hauts murs de son orphelinat parisien. Confié à Célestine, une dame de la campagne, et à son mari Borel, le garde-chasse, l’enfant des villes arrive en Sologne, région souveraine et sauvage. L’immense forêt, les étangs embrumés et les landes, tout ici appartient au comte de la Fresnaye, un veuf taciturne qui vit solitaire dans son manoir. S’il tolère les braconniers sur son domaine, Borel, lui, les traque sans relâche et s’acharne sur le plus rusé d’entre eux, Totoche. Aux côtés du braconnier, grand amoureux de la nature, Paul va faire l’apprentissage de la vie mais aussi de la forêt et de ses secrets. Un secret plus lourd pèse sur le domaine… car Paul n’est pas là par hasard.

Depuis 2004 et le triomphe du Dernier Trappeur (plus de deux millions d’entrées), l’aventurier, écrivain et réalisateur Nicolas Vanier est abonné au succès et le public semble le suivre chaque fois. C’était encore le cas dernièrement pour le remake-reboot de Belle et Sébastien, qui a attiré les spectateurs dans toutes les salles européennes – dont trois millions en France – et qui a engrangé deux suites. Son dernier film en date, L’École buissonnière est l’adaptation de son propre roman et non pas le remake du film du même nom réalisé par Jean-Paul Le Chanois et sorti en 1949, même si on y retrouve également l’importance du contact avec la nature. Né à Dakar, mais ayant grandi en Sologne, Nicolas Vanier rend hommage au Pays de la Loire qui a contribué à lui donner l’amour de la faune et de la flore. Si le metteur en scène n’évite pas le côté carte postale rétro-nostalgique hérité des Choristes de Christophe Barratier, il n’est pas difficile de se laisser porter par l’indéniable beauté des images et les bons sentiments distillés ici et là.

On suit donc l’histoire, deuxième incursion dans la fiction pour Nicolas Vanier après Belle et Sébastien, à travers les yeux de Paul (le jeune Jean Scandel, charismatique et très à l’aise), un orphelin, enfermé depuis toujours sous les combles d’un orphelinat parisien. Jusqu’au jour où il découvre le monde de la campagne en Sologne, lorsqu’il est emmené chez Célestine, épouse du garde-chasse et femme de chambre du comte de La Fresnaye. Paul va découvrir des personnages uniques et inoubliables, dont Totoche le braconnier. Avec sa barbe hirsute et son langage parfois fleuri (« Nom d’une pipe en bois ! »), François Cluzet se la joue Michel Simon dans Boudu sauvé des eaux. S’il en fait un peu des caisses, l’acteur semble s’amuser avec ce personnage de braconnier, qui prend un malin plaisir à faire tourner en bourrique le garde-chasse Borel. Ce dernier est interprété par Eric Elmosnino, qui parvient à surpasser son partenaire dans le genre « monsieur plus », en jouant la caricature à fond de l’agent municipal porté sur la bouteille, rasé avec une biscotte. La confrontation des deux personnages rappelle très souvent celle de Louis de Funès avec Moustache dans le cultissime Ni vu, ni connu, réalisé par Yves Robert en 1958 et adapté de L’Affaire Blaireau d’Alphonse Allais.

Le plus beau rôle masculin du film, même si bourré de clichés, reste celui campé par un François Berléand étonnant, qui apporte cette fois une belle dose d’émotions à son éternel personnage de bougon. Mais celle qui tire son épingle du jeu est incontestablement Valérie Karsenti, connue depuis dix ans par les téléspectateurs grâce à la série Scènes de ménages, dans laquelle elle campe Liliane, la femme de José. Si ses apparitions au cinéma sont rares, on a pu la voir chez Bertrand Blier dans Combien tu m’aimes ? (2005) ou Tellement proches de Olivier Nakache et Éric Toledano (2009), elle illumine le film de Nicolas Vanier à chaque apparition. N’oublions pas les amusantes participations de Laurent Gerra et Urbain Cancelier en gendarmes tout droit sortis d’un sketch avec moustache passée à la brillantine et mains sur la bedaine.

Si le récit est somme toute classique, pour ne pas dire archi-rabattu, la sincérité et la sensibilité du réalisateur transparaissent à chaque plan. Le cadre est soigné, la photo très belle, le rythme soutenu, l’authenticité préservée (avec de véritables solognots en guise de figurants) et les apartés sur les animaux environnants ne font pas « pièces rapportées » ou éléments de décor placés pour faire joli. Nicolas Vanier prend soin de dévoiler toute la beauté de la région naturelle forestière de la Sologne, même si le film se termine sur une note ambiguë en faisant la part belle à la chasse. Toutefois, Nicolas Vanier s’en défend en ajoutant que les chasseurs de l’époque respectaient la nature.

Certains spectateurs, une minorité, seront forcément énervés par le côté « C’était mieux avant » qui n’est pas sans rappeler une pub pour le jambon Herta, les autres verront un beau film, tendre, élégant, sensible et honnête pour toute la famille.

LE BLU-RAY

L’École buissonnière est disponible en DVD et Blu-ray chez Studiocanal. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, lui-même glissé dans un surétui cartonné, reprend celui de l’affiche du film. Le menu principal est animé et musical.

Les amateurs de bonus seront un peu déçus par cette interactivité peu chargée.

Le montage animalier (6’) contentera peut-être les amoureux de la nature. Il s’agit d’un montage de plans non gardés, où l’on peut admirer plus attentivement certains de nos amis des eaux et de la forêt.

Si L’École buissonnière dure déjà près de deux heures, Nicolas Vanier avait déjà supprimé quelques scènes, présentées ici (17’). Ces séquences prolongeaient l’arrivée de Paul en Sologne, montrait la première fois qu’il apercevait Totoche, et sa confrontation avec les gamins du village. S’ensuit une partie de pêche traditionnelle.

Cette section se clôt sur un bêtisier (3’), qui s’apparente surtout à un montage réalisé pour fêter la fin du tournage, ainsi qu’un clip promotionnel de trente secondes pour la région Centre-Val de Loire. Envie de partir en Touraine, à Chartres ou au Zoo-Parc de Beauval ?

L’Image et le son

Ma-gni-fi-que ! Ce sublime master HD s’avère l’un des plus beaux de l’année 2018. La photographie d’Éric Guichard (Himalaya – l’enfance d’un chef, Les Saisons) est restituée dans ses moindres partis pris, les scènes diurnes sont éclatantes, le piqué affûté comme une lame de rasoir, les couleurs d’une richesse inégalée. Le cadre large regorge de détails, chaque feuille, chaque brin d’herbe se détache naturellement, les noirs sont denses. Edition Haute-Définition indispensable.

La piste française DTS-HD Master Audio 5.1 instaure un confort acoustique dynamique, dense et souvent percutant, avec des voix délicatement posées sur le canal central. La spatialisation musicale est systématique, toutes les scènes en extérieur sortent du lot avec des ambiances naturelles qui vous transportent au coeur de la forêt, tandis que les scènes plus intimistes baignent dans un silence de marbre. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Radar Films/ Jean-Michel Turpin / StudioCanal /Eric TraversCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Incidents de parcours, réalisé par George A. Romero

INCIDENTS DE PARCOURS (Monkey Shines) réalisé par George A. Romero, disponible en DVD et combo Blu-ray+DVD le 7 août 2018 chez ESC Editions

Acteurs :  Jason Beghe, John Pankow, Kate McNeil, Joyce Van Patten, Christine Forrest, Stephen Root, Stanley Tucci, Patricia Tallman…

Scénario : George A. Romero d’après le roman Monkey Shines de Michael Stewart

Photographie : James A. Contner

Musique : David Shire

Durée : 1h53

Année de sortie : 1988

LE FILM

Allan, jeune homme à l’avenir prometteur, est un jour victime d’un accident qui le paralyse totalement. Grâce à Ella, un singe capucin que lui a donné son ami Geoffrey, Allan reprend goût à la vie. Seulement Geoffrey est un génie de la recherche scientifique. Sa dernière trouvaille : augmenter l’intelligence des primates en leur injectant un sérum constitué de tissus du cerveau humain. Bien entendu, Ella n’a pas échappé à ses expériences.

Non, l’immense George A. Romero (1940-2017) n’est pas « que » le réalisateur de films de zombies. Incidents de parcours (1988), titre français idiot de Monkey Shines, est le dixième long métrage du cinéaste. Certes, les cinéphiles retiennent essentiellement La Nuit des morts-vivantsThe Night of the Living Dead (1968), Zombie (1978), Creepshow (1982) ou bien encore Le Jour des morts-vivantsDay of the Dead (1985), mais résumer la carrière du metteur en scène par ces films emblématiques serait – comme on le dit dans Last Action hero – une monumentale erreur. Incidents de parcours, réalisé trois ans après Le Jour des morts-vivants, est l’adaptation du roman de Michael Stewart, Monkey Shines. Comme il le fera en 1992 pour La Part des ténèbres, tiré du roman éponyme de Richard Bachman alias Stephen King, le réalisateur s’approprie le matériel original pour aborder les thèmes qui lui sont chers (ou « chairs » devrait-on dire), entre autres la part d’animalité présente en chaque être humain, les dérives de la science avec l’homme qui se prend pour Dieu. Méconnu en dehors du cercle de ses admirateurs, comme Knightriders (1981), Incidents de parcours mérite pourtant d’être reconsidéré et reste un sacré tour de force de George A. Romero.

Allan Mann est un brillant étudiant en droit. Il est jeune, sportif, le monde semble s’ouvrir à lui jusqu’au jour où, victime d’un accident, il devient tétraplégique. Son monde s’écroule et bientôt Allan ne voit plus que le suicide comme porte de sortie. Pour le sortir de sa dépression, Geoffrey, un ami chercheur, lui offre alors un petit singe capucin du nom d’Ella. Elle est dressée pour accompagner et aider les handicapés dans leurs vies quotidiennes. Ella se révèle extrêmement brillante et ingénieuse et bientôt une relation fusionnelle s’instaure entre elle et son maître. Relation qui devient exclusive, Ella ne supportant pas la présence de Mélanie, la kinésithérapeute d’Allan et plus généralement toute personne s’interposant entre elle et son maître.

Trente ans après sa discrète sortie dans les salles, Incidents de parcours demeure une vraie petite leçon de mise en scène. Le rythme est lent, mais toujours maîtrisé et le récit repose sur un montage percutant qui ne laisse aucun moment de répit au spectateur. Le cinéaste est en pleine possession de ses moyens et démontre son art du storytelling. Monkey Shines se déguste comme un roman que l’on dévorerait page après page. Par ailleurs, le film n’est certainement pas à classer dans le genre épouvante, mais se révèle être un drame intimiste parasité par l’incursion du fantastique et du thriller. On pense alors à David Cronenberg ou plus spécialement à Stephen King, ami du cinéaste. Un temps pressenti pour réaliser Les Vampires de Salem à la fin des années 1970, George A. Romero avait ensuite collaboré avec l’écrivain sur Creepshow, avant de travailler sur l’adaptation de Simetierre, qui ne verra finalement pas le jour. Les deux hommes se distinguent par leur capacité à rendre le surnaturel réaliste, qui s’immisce dans le quotidien le plus banal. C’est le cas dans Incidents de parcours, qui repose également sur un excellent casting de têtes méconnues, ce qui renforce l’empathie pour les personnages.

Jason Beghe, vu dans la série Californication, qui en dehors de sa barbe postiche digne d’un hérisson mort, parvient à rendre son personnage toujours attachant malgré son ambiguïté. A ses côtés, quelques têtes plus « reconnaissables » à inscrire dans la catégorie «On ne sait jamais comment ils s’appellent », comme celle de John Pankow (Police fédérale, Los Angeles) ou bien celle désormais plus célèbre de l’excellent Stanley Tucci dans une de ses premières apparitions au cinéma. Sans oublier le charme de Kate McNeil. Mais l’un des personnages principaux s’avère le capucin, seule « star » visible sur l’affiche du film. On imagine volontiers la patience nécessaire de la part de l’équipe pour obtenir les réactions désirées, surtout pour le dernier acte, énorme morceau de bravoure où les rebondissements s’enchaînent pendant près de vingt minutes, quand l’homme doit faire face à ses instincts primaires. L’ombre d’Alfred Hitchcock plane également sur Monkey Shines, et plus particulièrement de Psychose auquel on ne peut s’empêcher de penser pour la sous-intrigue avec la mère du personnage principal, qu’il appelle plusieurs fois « Mother ».

Produit et distribué par la société Orion Pictures (Terminator, RoboCop, Platoon, Le Silence des agneaux), Incidents de parcours fait partie de ce genre de films que l’on redécouvre avec un plaisir non dissimulé. D’une part en raison de la nostalgie que l’on peut avoir pour ce genre de productions typiques des années 80, d’autre part parce qu’il s’agit d’un vrai bon film, en dehors de son happy-end convenu imposé à Romero par le studio, que l’on déterre comme une pépite en ayant la conviction qu’il mériterait une audience bien plus large.

LE BLU-RAY

Jusqu’ici indisponible en France, Incident de parcours arrive dans les bacs en DVD et combo Blu-ray+DVD+livret exclusif (24 pages) écrit par Marc Toullec, en édition limitée, sous les couleurs de ESC Editions. Le menu principal est animé et musical.

En plus des bandes-annonces d’Incidents de parcours, de Jeu d’enfant et de Street Trash, ne manquez pas l’intervention de l’excellent Julien Sévéon (22’). L’auteur de l’ouvrage George A. Romero : Révolutions, Zombies et Chevalerie (Popcorn, 2017), propose une brillante et passionnante analyse du film qui nous intéresse ici. Monkey Shines est également replacé dans la filmographie du cinéaste, tout comme les thèmes abordés sont croisés avec ceux déjà présents dans les autres opus de George A. Romero. Le journaliste aborde les conditions de tournage d’Incidents de parcours (notamment avec les capucins), indique les différences avec le roman original (inédit en France) de Michael Stewart et comment le réalisateur a su s’approprier l’histoire originale pour y mettre ses propres obsessions, en dépit d’une fin optimiste imposée par le studio. Notons également que deux courts extraits d’interviews de George A. Romero se greffent à cet entretien.

L’Image et le son

Pour son trentième anniversaire, Incidents de parcours arrive dans un nouveau master Haute-Définition et nous ne sommes pas déçus ! Avec son format respecté 1.85 et une solide compression AVC, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir le film de George A. Romero dans de très bonnes conditions techniques. La copie est très propre, stable et lumineuse, la restauration impressionnante, les contrastes bien équilibrés. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front d’Allan), les couleurs retrouvent un éclat inespéré. Le grain argentique est également bien géré, même si plus épais sur les séquences sombres.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage DTS HD Master Audio 2.0. Le confort acoustique est assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle suffisant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste anglaise. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © ESC Editions / ESC Distribution / MGMCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Call Me by Your Name, réalisé par Luca Guadagnino

CALL ME BY YOUR NAME réalisé par Luca Guadagnino, disponible en DVD et Blu-ray le 4 juillet 2018 chez Sony Pictures

Acteurs :  Armie Hammer, Timothée Chalamet, Michael Stuhlbarg, Amira Casar, Esther Garrel, Victoire du Bois, Elena Bucci, Peter Spears …

Scénario : James Ivory d’après le roman d’André Aciman

Photographie : Sayombhu Mukdeeprom

Musique : Sufjan Stevens

Durée : 2h12

Année de sortie : 2018

LE FILM

Été 1983. Elio Perlman, dix-sept ans, passe ses vacances dans la villa du XVIIe siècle que possède sa famille en Italie, à jouer de la musique classique, à lire et à flirter avec son amie Marzia. Son père, éminent professeur spécialiste de la culture gréco-romaine, et sa mère, traductrice, lui ont donné une excellente éducation, et il est proche de ses parents. Sa sophistication et ses talents intellectuels font d’Elio un jeune homme mûr pour son âge, mais il conserve aussi une certaine innocence, en particulier pour ce qui touche à l’amour. Un jour, Oliver, un séduisant Américain qui prépare son doctorat, vient travailler auprès du père d’Elio. Elio et Oliver vont bientôt découvrir l’éveil du désir, au cours d’un été ensoleillé dans la campagne italienne qui changera leur vie à jamais.

Quel chef d’oeuvre ! Oui nous préférons le dire d’emblée car nous ne savons jamais jusqu’où les critiques sont lues, donc plutôt que de chercher un peu plus loin quel est notre avis, sachez que Call Me by Your Name est d’ores et déjà l’un des plus grands films de 2018. Ecrit par James Ivory, un temps envisagé à la mise en scène (les noms de Gabriele Muccino, Ferzan Ozpetek et Sam Taylor-Johnson ont également circulé), d’après le roman d’André Aciman paru en 2007 et traduit en France sous le titre Plus tard ou jamais, Call Me by Your Name est finalement réalisé par le cinéaste italien Luca Guadagnino, après dix années passées à trouver les financements. Alors que les cinéphiles ont les yeux tournés vers son remake de Suspiria de Dario Argento, le réalisateur du superbe Amore (2009) et A Bigger Splash (2015), formidable remake de La Piscine de Jacques Deray, clôt ici une trilogie consacrée au désir. Tourné intégralement dans les fabuleux décors naturels de la Lombardie en Italie du nord, ce merveilleux drame convoque à la fois L’Education sentimentale de Gustave Flaubert (on peut également penser à Proust) et Maurice d’Edward Morgan Forster qui avait d’ailleurs été transposé au cinéma en 1987 par…James Ivory. La boucle est bouclée.

Drame romantique, sensuel, psychologique, délicat, Call Me by Your Name est un film riche, malgré son budget restreint de 3,5 millions de dollars, qui privilégie les non-dits, les regards, les gestes esquissés. C’est le soleil ardent qui tombe sur des arbres fruitiers, qui fait mûrir trop vite les pêches et les abricots, qui fait aussi dorer la peau de ses protagonistes. Luca Guadagnino convoque un magnifique casting international, de Michael Stuhlbarg à Amira Casar, en passant par Armie Hammer (quel plaisir de le voir en dehors de ses superproductions habituelles), Esther Garrel et surtout Timothée Chalamet, l’immense révélation de Call Me by Your Name. Quasiment de tous les plans, le jeune comédien foudroie par sa maturité, son charisme et sa sensibilité.

Les langues française, italienne et anglaise se confrontent comme les corps qui se cherchent et qui s’attirent. Peu importent la culture, l’éducation, l’âge, le premier amour est universel et marque à jamais. On suit donc cette histoire sentimentale entre Elio, italo-américain de 17 ans et le doctorant américain de son père, Oliver, durant l’été moite et radieux de 1983. Alors que le livre épousait uniquement le point de vue du personnage principal, le film de Luca Guadagnino observe Elio. Le cinéaste n’hésite pas à avoir recours aux silences, observe son protagoniste lui-même en train de regarder l’objet de son affection, pris au doute alors qu’il entame une petite liaison avec Marzia (Esther Garrel) et découvre avec elle l’acte sexuel. En fait, Call Me by Your Name peut se voir comme les réminiscences du personnage principal, ce qui est d’ailleurs le cas dans le roman original. L’action se déroulant en 1983, avec quelques notes musicales replaçant le spectateur à cette époque comme le Words de F.R. David, Luca Guadagnino parvient à faire ressentir le vent dans les arbres, les odeurs d’un petit-déjeuner pris sur la terrasse, la fraîcheur d’un limoncello, la sueur qui perle sur les corps.

Profondément mélancolique, cette idylle de jeunesse s’adresse à tous les spectateurs et parvient à restituer l’authenticité de la première passion amoureuse. Parallèlement, Luca Guadagnino rend également un hommage à ses « pères » de cinéma, Eric Rohmer, Jacques Rivette, Bernardo Bertolucci et Jean Renoir, en ayant d’ailleurs recours à un tournage en 35 mm et un seul objectif. Un défi technique relevé par le virtuose directeur de la photographie Sayombhu Mukdeeprom, collaborateur d’Apichatpong Weerasethakul. L’ultime séquence du film s’imprime déjà dans toutes les mémoires, ainsi que les chansons Mystery of Love et Visions of Gideon de Sufjan Stevens, qui résonnent et obsèdent encore longtemps bien après. Il en est de même pour le poignant discours final de M. Perlman à son fils Elio, probablement l’une des plus grandes prestations de Michael Stuhlbarg. Absolument bouleversant.

Porté par une critique quasi-unanime à sa sortie, Call Me by Your Name obtient également un très beau succès commercial (près de 350.000 entrées en France, 18 millions de dollars de recette aux Etats-Unis), trois nominations aux Golden Globes, quatre aux BAFTA et aux Oscars. Si Timothée Chalamet est lui-même nommé pour celle du meilleur acteur, c’est James Ivory qui remporte la statuette convoitée pour le meilleur scénario adapté.

LE BLU-RAY

Call Me by Your Name arrive dans les bacs en DVD et Blu-ray chez Sony Pictures. La galette bleue (zones A, B et C) repose dans un boîtier classique, glissé dans un surétui cartonné. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation et le menu principal est fixe et musical.

Concernant les suppléments, n’hésitez pas à revoir le film avec les commentaires audio (vostf) des comédiens Michael Stuhlbarg et Timothée Chalamet. Visiblement complices, les deux comédiens reviennent calmement sur tous les aspects du tournage, sur le scénario, sur le livre d’André Aciman, sur la mise en scène et la direction d’acteurs de Luca Guadagnino, sur les partis pris et les intentions, sur l’évolution des personnages, les conditions de tournage. On apprend par exemple que le premier montage durait 4h15 et que les prises de vue ont été réalisées presque intégralement dans l’ordre chronologique de l’histoire. Un très bon moment où l’on regrettera juste l’absence du cinéaste.

Le making of (11’) compile quelques propos de l’équipe avec des photos du tournage. C’est le bonus le plus anecdotique, puisque ce qui est dit rapidement ici lors des interviews promotionnelles est plus étayé dans le segment suivant.

On retrouve donc Luca Guadagnino, Armie Hammer, Timothée Chalamet et Michael Stuhlbarg, invités à répondre aux questions d’un journaliste après la projection de Call Me by Your Name (25’). Les questions sont pertinentes, ainsi que les réponses apportées par l’équipe. Chacun intervient et défend ce film qui leur tient visiblement tous à coeur. De plus, ce module parvient à compléter le commentaire audio, en évitant la redite.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et surtout le clip Mystery of Love par Sufjan Stevens.

L’Image et le son

Sony Pictures livre un superbe master HD de Call me By Your Name. Tourné intégralement en 35mm avec un seul objectif, le film de Luca Guadagnino voit ses partis pris entièrement respectés avec un grain argentique visible. La copie est lumineuse, le piqué affûté sur les séquences diurnes, les couleurs fraîches et estivales. Quelques scènes sombres restent marquées par un très léger fourmillement et des noirs plus spongieux, mais dans l’ensemble l’image est de fort belle facture. Quant aux quelques plans flous, ils sont évidemment volontaires et d’origine.

Oublions la piste française qui, malgré une balance frontales-latérales équilibrée, demeure totalement anecdotique. N’hésitez pas à sélectionner directement la piste « multilangues » originale DTS-HD Master Audio 5.1 qui offre un réel confort acoustique, précis (les grillons, le vent, l’eau qui coule) et enveloppant (voir la scène de la danse d’Oliver), délivrant les dialogues avec éclat et des effets concrets. N’oublions pas l’apport musical avec surtout les titres magnifiques de Sufjan Stevens.

Crédits images : © Sony PicturesCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Le 15h17 pour Paris, réalisé par Clint Eastwood

LE 15H17 POUR PARIS (The 15:17 to Paris) réalisé par Clint Eastwood, disponible en DVD et Blu-ray le 13 juin 2018 chez Warner Bros.

Acteurs :  Spencer Stone, Anthony Sadler, Alek Skarlatos, Jenna Fischer, Judy Greer, P.J. Byrne, Tony Hale, Thomas Lennon…

Scénario : Dorothy Blyskal d’après le livre d’Anthony Sadler, Alek Skarlatos, Spencer Stone, Jeffrey E. Stern

Photographie : Tom Stern

Musique : Christian Jacob

Durée : 1h33

Année de sortie : 2018

LE FILM

Dans la soirée du 21 août 2015, le monde, sidéré, apprend qu’un attentat a été déjoué à bord du Thalys 9364 à destination de Paris. Une attaque évitée de justesse grâce à trois Américains qui voyageaient en Europe. Le film s’attache à leur parcours et revient sur la série d’événements improbables qui les ont amenés à se retrouver à bord de ce train. Tout au long de cette terrible épreuve, leur amitié est restée inébranlable. Une amitié d’une force inouïe qui leur a permis de sauver la vie des 500 passagers…

Bon…voilà…Clint Eastwood a réalisé son plus mauvais film à ce jour. Ça c’est dit. D’ailleurs, la plupart des critiques françaises, à quelques exceptions près, étaient quasi-unanimes sur ce point. Le 15h17 pour ParisThe 15:17 to Paris n’avait tout simplement pas la matière nécessaire pour évoquer sur 1h30 l’attentat déjoué à bord du Thalys, grâce à l’intervention d’Anthony Sadler (étudiant universitaire), Alek Skarlatos (membre de la Garde Nationale de l’Oregon) et Spencer Stone (infirmier de l’armée de l’air). Comme si Clint Eastwood lui-même ne savait pas quoi faire de son sujet, son film, sa 36e mise en scène, s’apparente à un épisode en version longue, pour ne pas dire interminable, de La Nuit des héros, émission culte d’Antenne 2 (pas encore France 2) au début des années 1990.

Etait-il nécessaire d’aborder l’enfance des trois protagonistes et amis, pour finalement reconstituer l’affrontement avec le terroriste djihadiste armé de sa kalachnikov et muni de neuf chargeurs pleins, qui représente en tout et pour tout dix minutes du long métrage ? Quel intérêt de les montrer en virée – et en flashbacks – à Amsterdam boire une binouse, à Venise sur un vaporetto, à Rome pour les voir hésiter entre tel et tel parfum de gelato ? Après American Sniper, consacré à Chris Kyle, son plus grand succès en tant que réalisateur sur le sol américain, et le génial Sully, Clint Eastwood clôt sa trilogie consacrée aux héros – patriotes – américains de façon consternante, en ayant recours aux trois véritables Anthony Sadler, Alek Skarlatos et Spencer Stone, dans leurs propres rôles. Le problème, c’est que l’on ne s’improvise pas comédien et que les trois compères ne dégagent absolument rien à l’écran, si ce n’est un charisme de bulot avec l’air de se demander constamment comment ils sont arrivés là.

Peu aidé par un scénario scolaire et faisant la part belle à un discours prêchi-prêcha sur le « tout est déjà écrit », Clint Eastwood alterne les scènes de reconstitution (le film a été tourné en France) dans le Thalys, avec des séquences sans intérêt, de la fascination des gamins pour les armes à feu, jusqu’à leur désir de servir la patrie. Plus le métrage avance, moins les personnages ont des choses à faire. On les regarde faire des selfies dans quelques villes européennes, draguer, picoler, prendre du bon temps. En fait, Le 15h17 pour Paris s’apparente plus à un film sur le phénomène du selfie que sur un attentat déjoué. Le réalisateur illustre platement un script de court-métrage et l’étend jusqu’à l’ennui.

Après avoir sauvé la vie de 500 passagers et empêché un véritable carnage, l’étudiant Anthony Sadler et les deux militaires Alek Skarlatos et Spencer Stone sont évidemment acclamés en héros dans le monde entier, reçus et décorés par la Légion d’honneur par le Président de la République François Hollande. C’est notre Patrick Braoudé national qui avait été choisi pour interpréter l’ancien chef de l’état, pour la troisième fois de sa carrière, puisqu’il l’avait déjà excellemment incarné dans le téléfilm La Dernière Campagne de Bernard Stora (2013) et dans Ils sont partout de Yvan Attal (2016). Dommage pour lui, son apparition se résume à une demi-seconde de profil au détour d’un plan, le reste du temps de dos, puisque Clint Eastwood a préféré avoir recours aux images d’archives, ainsi qu’au discours original dans son intégralité.

Le 15h17 pour Paris est un drame biographique raté du début à la fin, une illustration de la page Wikipédia de l’événement, mis en scène par un réalisateur fatigué, probablement endormi derrière sa caméra, et interprété par des pantins sans charisme qui se croient dans une télé-réalité. A fuir.

LE DVD

Le 15h17 pour Paris est disponible en DVD et en Blu-ray chez Warner bros. Le DVD repose dans un boîtier « économique » (moins de plastique donc, de couleur noire. Le menu principal est fixe et musical.

Un seul supplément sur cette édition. Il s’agit d’un making of promotionnel (12’) constitué d’interviews de Clint Eastwood, des acteurs principaux et des producteurs. Ce segment, illustré par des photos et des images de tournage, se focalise surtout sur la reconstitution des événements et l’emploi des véritables protagonistes pour interpréter leurs propres rôles à l’écran.

L’Image et le son

Un DVD solide avec un piqué aussi pointu qu’il est possible d’avoir en édition standard, des contrastes denses et une palette chromatique riche et bigarrée, notamment lors du voyage touristique des trois amis, plus froide et tranchante pour les scènes dans le Thalys. Le cadre large est bien exploité, les détails éloquents.

Les pistes anglaise et française sont disponibles en Dolby Digital 5.1. Evidemment, le rendu acoustique ne vaut pas une bonne DTS-HD Master Audio, mais les deux mixages font ce qu’ils peuvent pour instaurer un confort certain. Le rendu est beaucoup plus saisissant et immersif en version originale. Evitez évidemment la piste française au doublage français totalement inapproprié.

Crédits images : © Copyright 2017 Warner Bros. Entertainment Inc., Village Roadshow Films North America Inc. and RatPac-Dune Entertainment LLC – – U.S., Canada, Bahamas & BermudaCaptures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Une histoire simple, réalisé par Claude Sautet

UNE HISTOIRE SIMPLE réalisé par Claude Sautet, disponible en combo DVD/Blu-ray le 13 juin 2018 chez Pathé

Acteurs :  Romy Schneider, Bruno Cremer, Claude Brasseur, Arlette Bonnard, Roger Pigaut, Francine Bergé, Sophie Daumier, Éva Darlan…

Scénario : Claude Sautet, Jean-Loup Dabadie

Photographie : Jean Boffety

Musique : Philippe Sarde

Durée : 1h48

Année de sortie : 1978

LE FILM

Serge et Marie forment un couple ordinaire. Déjà mère d’un adolescent, Marie décide d’avorter de l’enfant qu’elle attend de Serge et de quitter ce dernier. Elle finit par se rapprocher de George, son ex-mari alors que parallèlement à ces soucis, les amis de Marie ont également des ennuis similaires.

En 1969, La Piscine de Jacques Deray est un tournant dans la carrière de Romy Schneider. Au revoir Sissi, les bluettes en costume aux titres explicites du style Jeunes filles en uniforme, La Belle et l’empereur, Katia, Christine et consorts. Dans les années 60, la comédienne aborde une nouvelle étape en passant devant la caméra de Luchino Visconti, Alain Cavalier, Orson Welles et Otto Preminger. Romy Schneider devient une véritable actrice et démontre une envie de s’éloigner à tout prix du rôle qui a fait d’elle une star. L’année 1970 est aussi et surtout le début d’une longue et fructueuse collaboration, sans doute la plus importante de sa vie. Elle rencontre le cinéaste Claude Sautet (1924-2000), avec qui elle tournera cinq films en huit ans, Les Choses de la vie (1970), Max et les ferrailleurs (1971), César et Rosalie (1972), Mado (1976) et Une histoire simple (1978). Ce dernier est comme qui dirait la résultante des précédents. Comme Claude Sautet disait à propos de Romy Schneider « Elle est la somme de toutes les femmes », le personnage de Marie dans Une histoire simple est un mélange d’Hélène (celle des Choses de la vie et de Mado) , de Lily, de Rosalie, mais c’est aussi et avant tout un portrait en filigrane de Romy Schneider elle-même. Si Une histoire simple n’est sans doute pas un chef d’oeuvre ou un sommet de la filmographie de Claude Sautet, le film n’en demeure pas moins fascinant sur de nombreux points.

Marie élève seule son fils de 16 ans, Martin, depuis qu’elle s’est séparée de Georges, son mari. Elle entretient avec Serge, son amant, de bons rapports, assez distants pour n’être pas encombrants. Elle profite d’une de ses absences pour se faire avorter d’un enfant qu’elle attend de lui. A son retour, elle lui apprend à la fois l’interruption de grossesse et leur rupture. Serge se rebelle un peu, suffisamment pour préserver sa dignité, mais point trop. En fait, il s’intéresse depuis quelque temps à Anna, une collègue de Marie. Celle-ci revoit Georges. Elle lui demande d’aider Jérôme, le mari de son amie Gabrielle, à garder son travail. Georges promet.

Projet initié à la demande de Romy Schneider elle-même, Une histoire simple peut à la fois se voir comme un portrait sur les quadras de la fin des années 1970, comme un drame social (on y parle de licenciements et de crise économique), comme un documentaire sur Romy Schneider, ses engagements et ses positions, ses combats, ses relations, sa liberté d’être et de penser. La première scène donne le ton avec la caméra centrée sur le visage de la comédienne, qui s’entretient avec une femme médecin sur sa demande d’avortement (Romy Schneider avait ouvertement milité pour ce droit et la loi Veil était encore récente), sur sa détermination, sur son choix. Puis on la retrouve très vite sur la table d’opération, avant de la voir rentrer chez elle où elle accueille son fils adolescent. Une histoire simple adopte la forme d’une chronique, une succession de tranches de vie. Celle d’une femme ordinaire, libérée de toutes contraintes, qui a décidé de vivre pour elle, comme elle l’entend.

La caméra s’attache au personnage de Marie, s’accroche à elle, la suit dans son travail, avec ses amis, au café, avec son fils, à la campagne, dans le lit avec son ex-mari. Visage fermé, Marie reprend son existence en main et décide de conduire sa vie selon des principes d’indépendance. De son regard déterminé quand elle apprend à Serge – via une lettre qu’elle lui a écrite – qu’elle vient d’avorter et qu’elle décide de rompre avec lui, jusqu’à son sourire qui renaît et enfin l’apaisement final au soleil, Une histoire simple est un récit initiatique. Les prénoms de Marie et de Romy s’imbriquent quasiment. Claude Sautet, toujours aussi fasciné par sa comédienne, et Jean-Loup Dabadie lui écrivent une dernière ode, un film presque testamentaire.

Avec tout cela on en oublierait presque d’évoquer les « monstres » qui entourent Romy Schneider. Claude Brasseur et Bruno Cremer campent des hommes rattrapés par les années qui ont passé et qui se trouvent souvent désarmés devant le mode de vie de Marie. Les hommes sont ici souvent les plus fragiles (certains se battent, se saoulent, tentent de se suicider), emportés par le tourbillon de la vie sans avoir réellement d’emprise sur elle, désemparés quand les femmes les quittent. A leurs côtés, les amis gravitent, interprétés par d’autres pointures comme Sophie Daumier, Eva Darlan, Arlette Bonnard, des femmes d’aujourd’hui, des femmes fortes.

Il y a du Bergman et du Antonioni chez Sautet, ou quand L’Attente des femmes (1952) rencontre Femmes entre elles (1957). En 1979, Romy Schneider obtient son second César de la meilleure actrice pour Une histoire simple.

LE BLU-RAY

Les deux disques de ce combo Pathé reposent dans un Digipack à deux volets, glissé dans un surétui cartonné au visuel très élégant. Le menu principal est animé sur la musique de Philippe Sarde.

Le seul supplément disponible sur cette édition est un entretien croisé (26’) entre Serge Bromberg, producteur et réalisateur avec Ruxandra Medrea, du long métrage L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot, et la comédienne Eva Darlan. Le premier replace Une histoire simple dans la carrière de Claude Sautet et de Romy Schneider, détaille le casting, l’origine et l’écriture du scénario, la collaboration Sautet-Dabadie. La seconde, qui faisait alors ses débuts au cinéma, partage de nombreuses anecdotes liées au tournage, mais aussi sur Romy Schneider et Claude Sautet.

L’Image et le son

Il serait difficile de faire mieux que ce Blu-ray (Encodage MPEG 4 / AVC – Format du film respecté 1.66, 1080p) qui respecte les volontés artistiques originales dont le grain original, parfois très prononcé, tout en tirant intelligemment profit de l’élévation HD. La clarté est fort appréciable, notamment sur toutes les séquences en extérieur (voir la scène du repas à la campagne), la propreté du master est irréprochable, ainsi que la stabilité, le relief, la gestion des couleurs, contrastes et le piqué qui demeure souvent agréable. Les séquences sombres et nocturnes sont également excellemment conduites avec des noirs denses. Une histoire simple a été numérisé en 4K, puis restauré en 2K par les Laboratoires Eclair en 2017.

Ce mixage DTS-HD Master Audio Mono est de fort bon acabit et instaure un confort acoustique probant et solide. Les dialogues sont délivrés avec ardeur et clarté, mais sont également et volontairement mis en retrait parfois, la propreté est de mise et les silences sont denses. L’éditeur joint également les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Pathé / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Chasseuse de géants, réalisé par Anders Walter

CHASSEUSE DE GÉANTS (I Kill Giants) réalisé par Anders Walter, disponible en DVD et Blu-ray le 6 juin 2018 chez Lonesome Bear

Acteurs :  Zoe Saldana, Imogen Poots, Jennifer Ehle, Noel Clarke, Madison Wolfe, Rory Jackson, Ciara O’Callaghan, Sydney Wade, Aideen Wylde…

Scénario : Joe Kelly

Photographie : Rasmus Heise

Musique : Laurent Perez Del Mar

Durée : 1h46

Année de sortie : 2017

LE FILM

Barbara est une adolescente solitaire différente des autres, et en conflit permanent avec son entourage. Ses journées au collège sont rythmées par les allers-retours entre le bureau du proviseur et la psychologue. Aux sources de l’inquiétude des adultes qui veillent sur elle, il y a son obsession pour les Géants, des créatures fantastiques venues d’un autre monde pour semer le chaos. Armée de son marteau légendaire, Barbara s’embarque dans un combat épique pour les empêcher d’envahir le monde…

En l’espace d’un an et demi, trois films traitant peu ou prou du même sujet, le deuil vu à travers le regard d’un enfant, sont sortis à quelques mois d’intervalle. Il y a eu tout d’abord A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, réalisé par J.A. Bayona, qui a connu une exploitation dans les salles. Echec totalement injustifié, mais laissons le temps faire son office. Bien que datant de 2016, il aura fallu attendre plus d’un an pour découvrir également La Neuvième Vie de Louis DraxThe 9th Life of Louis Drax d’Alexandre Aja. Merveille visuelle, expérience sensorielle qui n’a absolument rien à envier à l’oeuvre de Bayona, ce drame à la frontière du fantastique interprété par Jamie Dorman et Sarah Gadon n’a été exploité qu’en DVD et Blu-ray en France. Pas de surprise donc pour Chasseuse de géants, qui arrive également dans les bacs, sans passer par la case cinéma.

Il s’agit de l’adaptation cinématographique du roman graphique (édité chez Image Comics) I Kill Giants de Ken Niimura et Joe Kelly, ce dernier s’occupant seul de la transposition. Chasseuse de géants est une production belgo-britannico-américano-chinoise, financée par Chris Colombus (un temps envisagé à la mise en scène) via sa société 1492 Pictures. C’est aussi le premier long métrage du réalisateur danois Anders Walter, lui-même ancien dessinateur de comics, remarqué en 2014 avec son magnifique court-métrage Helium, récompensé par un Oscar. Par ailleurs, Helium, ainsi que son précédent court métrage 9 meter (2012) étaient déjà très proches de Chasseuse de géants dans ses intentions. Ce film revenait donc « de droit » à Anders Walter, qui signe un drame à la photographie très soignée, formidablement interprété et à la mise en scène élégante. Ce qui est dommage, c’est que Chasseuse de géants arrive « après la bataille » et l’on ne peut s’empêcher de faire des comparaisons avec les œuvres de Bayona et d’Aja. Surtout qu’il partage beaucoup de points communs du point de vue visuel avec A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, notamment en ce qui concerne la représentation du monde intérieur de l’enfant. Anders Walter utilise également l’animation en images de synthèse pour évoquer l’origine de ses monstres. Des ressemblances particulièrement troublantes, mais on ne peut en aucun cas parler de plagiat puisque tous ces films ont été produits et mis en scène quasi-simultanément.

S’il ne possède pas la poésie de A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, ni la virtuosité de La Neuvième Vie de Louis Drax, on ne pourra pas reprocher à Chasseuse de géants son manque de rigueur (malgré une production particulièrement chaotique), sa belle réussite technique et surtout son irréprochable direction d’acteurs. La jeune Madison Wolfe campe un personnage attachant et s’acquitte admirablement de la double facette de Barbara. On comprend très vite que la jeune fille préfère se réfugier dans son imaginaire, plutôt que d’affronter un drame qui semble toucher toute sa famille, dont s’occupe Karen, incarnée par la lumineuse Imogen Poots. Le casting compte également dans ses rangs la sublime Zoe Saldana, parfaite en psychologue qui essaye de percer la carapace de Barbara.

L’affiche peut être trompeuse. Voir cette petite fille armée, qui fait face à une créature surdimensionnée, avec pour accroche « Par les producteurs de la saga Harry Potter » annonce un film de fantasy, ce qui n’est absolument pas le cas. Chasseuse de géants est un drame intimiste et psychologique, centré sur le déni d’une adolescente, qui préfère oublier le drame qui se joue dans sa famille en ayant recours au rêve. Ou comment se raccrocher au monde de l’enfance, en l’occurrence le jeu, en essayant de repousser le plus longtemps possible l’entrée dans le monde adulte, constitué entre autres de la maladie et de la mort. La peur d’affronter ses démons, au sens propre comme au figuré.

Chasseuse de géants n’est donc pas destiné au jeune public, du moins aux spectateurs dans l’attente d’un film de science-fiction. Mais le deuil est un événement personnel et chaque spectateur est invité à projeter son propre vécu et à réaliser sa propre interprétation de ce très beau premier long métrage finalement universel et prometteur.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Chasseuse de géants, disponible chez Lonesome Bear, a été réalisé à partir d’un check-disc. Comme nous le mentionnons dans la critique, le visuel de la jaquette est comme qui dirait une arnaque puisque l’ensemble est conçu pour faire croire aux spectateurs que le film d’Anders Walter est un blockbuster à la Jack et le chasseur de géants ! Veillez à bien vous renseigner sur le long métrage avant l’achat. Le menu principal est animé et musical.

Excellente initiative de la part de l’éditeur de nous faire profiter des deux superbes courts-métrages réalisés par Anders Walter, 9 meter (17’-2012) et Helium (23’-2013), dont les thèmes (la maladie, le deuil, l’imaginaire comme échappatoire) s’avèrent très proches de Chasseuse de géants, surtout le second, récompensé par l’Oscar du meilleur court métrage de fiction en 2014.

Le reste de l’interactivité est plus anecdotique avec d’un côté un clip d’une minute consacré à la création des monstres en images de synthèse, et de l’autre un mini-making of (5’) centré sur le tournage (en Belgique) de l’affrontement de Barbara avec le titan.

L’Image et le son

Tourné grâce aux caméras numériques Arri Alexa XT, Chasseuse de géants doit être découvert en Haute définition. Les quelques effets numériques sont très beaux, le piqué est affûté, les couleurs impressionnantes, les contrastes léchés, les noirs denses et la profondeur de champ omniprésente. Les détails sont légion à l’avant comme à l’arrière-plan, de jour comme de nuit, le relief ne cesse d’étonner et le rendu des textures est subjuguant. Le nec plus ultra pour apprécier toute la richesse de la photographie du chef opérateur Rasmus Heise. Quant aux diverses séquences réalisées en animation, elles sont tout simplement sublimes.

Les versions française et anglaise sont proposées en DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, les dialogues y sont remarquablement exsudés par la centrale, les frontales sont saisissantes, les effets et ambiances riches, les enceintes arrière instaurent constamment un environnement musical, tout comme le caisson de basses qui se mêle habilement à l’ensemble, notamment quand le géant se déplace. Un grand spectacle acoustique !

Crédits images : © The Jokers / Lonesome Bear / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Gauguin – Voyage de Tahiti, réalisé par Edouard Deluc

GAUGUIN – VOYAGE DE TAHITI réalisé par Edouard Deluc, disponible en DVD et Blu-ray le 23 janvier 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  Vincent Cassel, Tuheï Adams, Malik Zidi, Pua-Taï Hikutini, Pernille Bergendorff, Marc Barbé, Paul Jeanson, Cédric Eeckhout, Samuel Jouy…

Scénario :  Edouard Deluc, Etienne Comar, Thomas Lilti, Sarah Kaminsky d’après le livre de Paul Gauguin « Noa Noa, Voyage de Tahiti »

Photographie : Pierre Cottereau

Musique : Warren Ellis

Durée : 1h40

Année de sortie : 2017

LE FILM

1891. Gauguin s’exile à Tahiti en laissant derrière lui femme et enfants. Il veut trouver sa peinture, en homme libre, en sauvage, loin des codes moraux, politiques et esthétiques de l’Europe civilisée. Il s’enfonce dans la jungle, bravant la solitude, la pauvreté, la maladie. Il y rencontrera Tehura, qui deviendra sa femme, et le sujet de ses plus grandes toiles.

Gauguin – Voyage de Tahiti est le second long métrage du réalisateur Edouard Deluc, remarqué en 2008 avec le court-métrage ¿ Dónde está Kim Basinger ?, qui allait servir de base pour son excellent premier film, Mariage à Mendoza avec Philippe Rebbot et Nicolas Duvauchelle. Coloré, énergique, drôle, émouvant, tendre, ce premier long métrage imposait d’emblée un style et un humour percutants. Edouard Deluc est enfin de retour derrière la caméra et opère un virage radical avec Gauguin – Voyage de Tahiti, libre adaptation de Noa Noa, carnet de voyages écrit par Paul Gauguin (1848-1903) après son premier séjour à Tahiti en 1893. Merveilleusement mis en scène, le film offre également à Vincent Cassel l’un des plus beaux rôles de sa carrière.

Gauguin – Voyage de Tahiti est né d’un coup de foudre d’Edouard Deluc pour le récit du peintre : « C’est un objet littéraire d’une grande poésie, un récit d’aventures, entre autres, d’un souffle romanesque assez fou. C’est une sorte de journal intime, d’une grande humanité, sur son expérience Tahitienne, qui mêle récit, impressions, pensées, questionnements politiques, questionnements artistiques, croquis, dessins et aquarelles. C’est enfin et surtout une sorte de somptueuse déclaration d’amour à Tahiti, aux Tahitiens, à son Êve Tahitienne. Je l’ai découvert lors de mes études aux Beaux-Arts, le texte est toujours resté dans ma bibliothèque comme le fantôme d’un film possible ». Après Mariage à Mendoza, le cinéaste replonge dans Noa Noa et dans les autres écrits de Paul Gauguin, ainsi que sa correspondance intime. Bouleversé par la pensée visionnaire et l’oeuvre moderne du peintre, Edouard Deluc, entreprend alors son second long métrage, coécrit avec le talentueux Thomas Lilti (Les Yeux bandés, Hippocrate, Médecin de campagne), déjà scénariste sur Mariage à Mendoza.

A l’instar d’un rêve d’artiste, Gauguin – Voyage de Tahiti doit être vu comme une libre adaptation de Noa Noa, puisque les scénaristes ont évidemment eu recours à la fiction pour combler certains éléments réels restés en pointillés, tout en évitant le côté sulfureux de l’artiste, notamment sa vie sexuelle débridée voire polémique puisqu’il couchait avec des jeunes filles de 13 ans, tout en étant atteint de syphilis. L’oeuvre d’Edouard Deluc n’est pas un biopic, mais se focalise sur une période bien précise de la vie de son personnage principal, sur des événements et des protagonistes qui ont eu lieu et qui ont existé. Gauguin – Voyage de Tahiti est la réinterprétation de faits réels déjà « réinterprétés » dans son ouvrage par celui qui les a connus. Dans cette optique, le réalisateur a confié le rôle principal à Vincent Cassel. Alors âgé de 50 ans, le comédien n’en finit pas d’étonner depuis Mon roi de Maïwenn (2015) et sa prestation bouleversante dans Juste la Fin du Monde de Xavier Dolan (2016). Jouant désormais avec ses yeux marqués, son visage tordu et taillé à la serpe, ses cheveux et sa barbe hirsute poivre et sel, il est ici exceptionnel et de tous les plans. Métamorphosé, vouté, la démarche vacillante, l’acteur est aussi bluffant qu’impressionnant.

Véritable expérience sensorielle, Gauguin – Voyage de Tahiti peut également compter sur la sublime photographie de Pierre Cottereau (Rosalie Blum, Le Voyage de Fanny) qui capture la beauté des paysages naturels comme Gauguin celle des habitants, sans oublier la musique de l’australien Warren Ellis (Wind River, Comancheria, Des hommes sans loi), qui nimbe l’ensemble d’une aura quasi-éthérée, comme un véritable western contemplatif, genre qui a d’ailleurs souvent inspiré le metteur en scène. Edouard Deluc nous invite donc à entrer en communion avec les désirs, les doutes, les amours (avec la sublime Tuheï Adams) et les douleurs d’un immense artiste.

LE BLU-RAY

Gauguin – Voyage de Tahiti est disponible en DVD et Blu-ray chez Studiocanal. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend celui de l’affiche du film. Même chose pour le menu principal, fixe et musical.

L’interactivité contient tout d’abord trois courtes featurettes (4’, 5’ et 2’30), centrées sur la prestation de Vincent Cassel, sa préparation, les intentions du réalisateur, les partis pris, le tournage à Tahiti. Le tout illustré par des images de tournage et les propos de l’équipe.

Le dernier module est un entretien avec Stéphane Guégan, conseiller scientifique auprès de la Présidence du musée d’Orsay (14’), qui revient notamment sur l’ouvrage Noa Noa, tout en donnant de nombreuses indications sur les véritables événements vécus par Gauguin. A la fin de cette interview, Edouard Delluc intervient également rapidement.

L’Image et le son

Magnifique ! Contrastes exemplaires, densité impressionnante, piqué tranchant comme un scalpel, scènes sombres aussi ciselées que les séquences diurnes, tout est resplendissant. La profondeur de champ est sensationnelle, les scènes en forêt sublimes, les détails abondent (voir le visage et la barbe de Vincent Cassel), le cadre large est idéalement exploité et la colorimétrie subjugue du début à la fin. La Haute-Définition est optimale et ce master restitue avec une suprême élégance les partis pris de la photographie signée Pierre Cottereau.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 instaure un confort acoustique dynamique, dense et souvent percutant. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et la spatialisation musicale systématique. Toutes les séquences en extérieur sortent du lot avec une ample exploitation des latérales, la pluie qui environne les spectateurs, les grillons omniprésents, les chutes d’eau fracassantes, tout comme les percussions des musiques polynésiennes. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / The Age of Shadows, réalisé par Kim Jee-woon

THE AGE OF SHADOWS réalisé par Kim Jee-woon, disponible en DVD et Blu-ray le 23 janvier 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  Lee Byung-hun, Song Kang-ho, Gong Yoo, Han Ji-min, Park Hee-soon, Shingo Tsurumi…

Scénario : Kim Jee-woon, Lee Ji-min, Park Jong-dae

Photographie : Kim Ji-yong

Musique : Mowg

Durée : 2h20

Année de sortie : 2016

LE FILM

Les années 1920, pendant la période d’occupation de la Corée par le Japon. Lee Jung-chool, ancien résistant devenu capitaine de police coréen travaillant pour la police japonaise, doit démanteler un réseau de la résistance coréenne dont il réussit à approcher l’un des leaders, Kim Woo-jin. Les deux hommes que tout oppose – mais qui connaissent chacun la véritable identité de l’autre – vont être amenés à se rapprocher, tout en continuant à dissimuler l’un à l’autre leurs propres desseins. Kim Woo-jin va alors tenter de convaincre Lee Jung-chool de revenir du côté de la résistance et lui demander de les aider à faire passer des explosifs jusqu’à Séoul.

Attention ! Kim Jee-woon est de retour et le moins que l’on puisse dire, c’est que le réalisateur de Deux sœurs (2003), A Bittersweet Life (2005), Le Bon, La Brute et le Cinglé (2008), J’ai rencontré le Diable (2010) et Le Dernier Rempart (2013), escapade hollywoodienne dans laquelle il dirigeait Arnold Schwarzenegger, Johnny Knoxville et Jaimie Alexander, a décidé de voir grand. The Age of Shadows combine à la fois le film d’espionnage, le drame historique et le thriller, le tout dans des décors sublimes et une esthétique à se damner. Prenez place, car vous allez assister à 140 minutes d’images sensationnelles, qui s’imposent d’ores et déjà parmi les plus incroyables à découvrir en 2018, même si le film aura mis près de deux ans à nous parvenir.

Soyons honnêtes, nous ne pouvons pas tout comprendre les enjeux de The Age of Shadows. Toutefois, le cinéaste en est pleinement conscient et parvient à happer l’attention du spectateur dès l’extraordinaire séquence d’ouverture, pour ne plus le lâcher durant 2h20. Le cinéma sud-coréen est décidément très inspiré, pour ne pas dire le meilleur du monde aujourd’hui, et The Age of Shadows ne déroge pas à la règle.

Le film de Kim Jee-woon est une véritable bombe, qui ne cesse de flatter les sens, qui foudroie les yeux par sa beauté plastique, par celle des costumes, du cadre large, des interprètes tous formidables. Doté d’un budget conséquent de près de 10 millions de dollars, financé et distribué pour la première fois en Corée du Sud par la Warner Bros, The Age of Shadows s’adresse aux cinéphiles, mais également au plus grand nombre car Kim Jee-woon n’oublie jamais la portée populaire et divertissante de son film. Si certains pourraient se sentir quelque peu largués par l’aspect politique du récit, le réalisateur parvient systématiquement à rattraper celles et ceux qui auraient pu être laissés sur le bas-côté.

The Age of Shadows est une succession de séquences incroyables, toutes destinées à devenir cultes. Des morceaux de bravoure qui laissent pantois d’admiration, que ce soit le prologue, ou la très longue scène du train reliant Shanghaï à Séoul, durant laquelle s’affrontent tous les personnages dans une sorte de relecture d’Agatha Christie. Mais le huitième long métrage de Kim Jee-woon ne se résume évidemment pas seulement à cela. Les personnages sont riches et ambigus à souhait. Chaque comédien et donc chaque personnage joue sa propre partition dans un opéra savamment orchestré de main de maître. Pas un seul moment de répit n’est laissé aux spectateurs, embarqués dans un véritable train fou, tendu, nerveux et virtuose, un jeu du chat et de la souris toujours haletant, parfois violent (les tortures sont montrées frontalement), une multitude de faux-semblants et du double-jeu en pagaille.

Projeté hors compétition à la Mostra de Venise en 2016 et représentant la Corée du Sud aux Oscars pour le meilleur film en langue étrangère en 2017, The Age of Shadows n’a malheureusement pas connu les honneurs d’une sortie dans les salles françaises. Espérons que son exploitation en DVD et Blu-ray fasse connaître ce chef d’oeuvre à une très large audience !

LE BLU-RAY

The Age of Shadows est disponible en DVD et Blu-ray chez Studiocanal. L’édition HD est présentée sous la forme d’un boîtier bleu traditionnel. Le visuel de la jaquette est élégant. Le menu principal est fixe et muet.

Edition minimaliste, ce Blu-ray ne contient aucun supplément.

L’Image et le son

Heureusement, l’éditeur se rattrape du côté technique. On ne saurait faire mieux. Le cinéaste Kim Jee-woon collabore une fois de plus avec le chef opérateur Kim Ji-yong (A Bittersweet Life, Le Dernier Rempart). Les partis pris esthétiques originaux sont magnifiquement rendus à travers ce Blu-ray d’une folle élégance. Le piqué est affûté, les contrastes fabuleusement riches, les détails sont abondants aux quatre coins du cadre large, tandis que le codec AVC consolide l’ensemble avec fermeté, y compris sur les très nombreuses scènes se déroulant dans la pénombre ou en intérieur.

Les pistes française et coréenne DTS-HD Master Audio 5.1, logées à la même enseigne, instaurent d’excellentes conditions acoustiques et font surtout la part belle à la musique, très présente pendant plus de deux heures. Les basses ont souvent l’occasion de briller, les ambiances naturelles sont bien présentes, les effets sont toujours saisissants (les quelques fusillades et poursuites) et le rendu des voix est sans failles. De quoi bien décrasser les frontales et les latérales. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr