Kobe, 1941. Yusaku et sa femme Satoko vivent comme un couple moderne et épanoui, loin de la tension grandissante entre le Japon et l’Occident. Mais après un voyage en Mandchourie, Yusaku commence à agir étrangement… Au point d’attirer les soupçons de sa femme et des autorités. Que leur cache-t-il ? Et jusqu’où Satoko est-elle prête à aller pour le savoir ?
Quand Kiyoshi Kurosawa (Au bout du monde, Cure, Kaïro, Avant que nous disparaissions, Le Secret de la chambre noire, Vers l’autre rive, Shokuzai, Tokyo Sonata…) rencontre Ryusuke Hamaguchi (Drive My Car, Asako I & II, Senses). A l’écran tout du moins, puisque le second (tout comme le coscénariste Tadashi Nohara) aura été l’étudiant du premier à l’Université des Arts de Tokyo. Les deux maîtres du cinéma japonais se trouvent réunis sur la même affiche pour Les Amants sacrifiés, mis en scène par le prolifique Kiyoshi Kurosawa, dont la filmographie avoisine la soixantaine d’oeuvres (courts/longs-métrages et séries) et écrit par Ryusuke Hamaguchi, qui signe pour la première fois un scénario réalisé par un autre cinéaste. Cette association donne naissance à un sommet d’émotions, de sensibilité à fleur de peau et de délicatesse, une élégance racée aussi bien sur le fond comme sur la forme, qui convoque à la fois le cinéma britannique et américain des années 1940-50, avec une rigueur nippone, tout en s’inscrivant parfaitement à travers ses thèmes dans la filmographie de Kiyoshi Kurosawa, où le couple, les relations entre les hommes et les femmes sont la clé de voûte. Outre ses qualités exceptionnelles, Les Amants sacrifiés a été filmé en 8K. Pour vous donner une idée de la définition de l’image, le nombre de pixels est multiplié par 4 en comparaison de l’UHD dite traditionnelle, format souhaité, pour ne pas dire imposé par la NHK, l’unique groupe audiovisuel public au Japon, qui cherchait à financer la production d’un film tourné dans la ville de Kobe, en utilisant une caméra 8K comme médium. Si le procédé a tout d’abord fait peur au réalisateur, qui craignait une image lisse artificielle, diamétralement opposée à la texture attendue pour un film d’époque, par ailleurs son premier opus historique, Kiyoshi Kurosawa a été très vite rassuré en apprenant qu’il pouvait la retravailler en post-production. Si l’on peut déplorer quelques problèmes de rythme, sans doute trop languissant, Les Amants sacrifiés hypnotise et happe le spectateur pour l’emporter dans un tourbillon de sentiments du début à la fin, jusqu’au dernier plan, absolument bouleversant. Du grand art.
TU MÉRITES UN AMOUR réalisé par Hafsia Herzi, disponible en DVD le 15 janvier 2020 chez Arte Editions
Acteurs : Hafsia Herzi, Djanis Bouzyani, Jérémie Laheurte, Anthony Bajon, Sylvie Verheyde, Karim Ait M’Hand, Myriam Djeljeli, Alexander Ferrario…
Scénario : Hafsia Herzi
Photographie : Jérémie Attard
Musique : Nousdeuxtheband
Durée : 1h42
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
Suite à l’infidélité de Rémi, Lila qui l’aimait plus que tout vit difficilement la rupture. Un jour, il lui annonce qu’il part seul en Bolivie pour se retrouver face à lui-même et essayer de comprendre ses erreurs. Là-bas, il lui laisse entendre que leur histoire n’est pas finie… Entre discussions, réconforts et encouragement à la folie amoureuse, Lila s’égare…
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Hafsia Herzi a fait un sacré bout de chemin depuis sa découverte explosive en 2007 dans La Graine et le Mulet d’Abdellatif Kechiche, dans lequel elle ensorcelait le spectateur avec entre autres une danse du ventre inoubliable. Un rôle qui lui a valu de multiples récompenses, dont le César du meilleur espoir féminin, ainsi que le Prix Marcello-Mastroianni à la Mostra de Venise. Née à Manosque en 1987, la comédienne a depuis enchaîné les tournages et donné la réplique à Jean-Paul Belmondo dans Un homme et son chien (2009) de Francis Huster, collaboré avec Alain Guiraudie (Le Roi de l’évasion), Raja Amari (Les Secrets), Teddy Lussi-Modeste (Jimmy Rivière), Radu Mihaileani (La Source des femmes), Bertrand Bonello (L’Apolonnide : Souvenirs de la maison close), prêté sa voix à Zlabya dans Le Chat du rabbin de Joann Sfar et Antoine Delesvaux, bref Hafsia Herzi n’a cessé de tourner, parfois trois à quatre films par an. Pas étonnant de la retrouver derrière (et devant) la caméra pour Tu mérites un amour, son premier long métrage en tant que réalisatrice, présenté à la Semaine Internationale de la Critique au Festival de Cannes 2019. Cette fois encore, Hafsia Herzi a su frapper le coeur des spectateurs, puisque son film a reçu de nombreux prix dans quelques festivals du film, à Angoulême, en passant par Moulins, Stockholm, La Baule et Bruxelles. Tu mérites un amour est un vrai petit coup de maître. Un drame sentimental représentatif de son auteure, à la fois sensuel, drôle, lumineux, délicat et d’une sensibilité à fleur de peau. Un film fort et pourtant fragile comme du cristal.
TOUTANKHAMON, LE TRÉSOR REDÉCOUVERT réalisé par Frédéric Wilner, disponible le 19 mars 2019 en DVD chez Arte Editions
Scénario : Frédéric Wilner
Photographie : Valerio Carignano
Musique : Olivier Depardon
Durée : 1h32
Année de sortie : 2018
LE DOCUMENTAIRE
Lorsque, en 1930, Howard Carter achève l’exploration de la tombe de Toutankhamon, que deviennent les objets qui s’y trouvaient depuis 3200 ans ? Les plus précieux d’entre eux sont exposés au Musée du Caire. Mais une grande majorité a, dès l’origine, été conservée à l’abri des regards. Quatre-vingt-dix ans plus tard, et pour la première fois, l’ensemble de ces objets va être rassemblé dans l’enceinte du nouveau Grand Musée de Guizèh. Certains d’entre eux vont prendre le chemin des Etats-Unis, puis de Paris, où ils seront exposés à la Cité des Sciences et de l’Industrie à l’automne 2018, puis à Londres, Berlin, Tokyo et Sidney. Ce film est le récit de la redécouverte de ce trésor, dont nous ne connaissons qu’une partie des artefacts. C’est aussi une enquête, dont ces objets seront autant de pièces à conviction. Que nous apprennent ces objets sur le roi et sur son époque ? Et dans quelles circonstances ont-ils été découverts et retirés de la tombe du pharaon ? Tels seront les éléments du récit de ce film documentaire.
Quels secrets peuvent encore nous révéler les trésors de la tombe de Toutankhamon ? Les objets de son tombeau lui étaient-ils réellement destinés ? Que peut-on connaître de son état de santé ? Que s’est-il réellement passé lors de la découverte de son tombeau par Howard Carter en 1922 ?
Autant de questions auxquelles le film réalisé par Frédéric Wilner apporte des réponses, en présentant les dernières découvertes liées aux études réalisées sur différents objets du trésor, à l’occasion notamment de la future ouverture du musée du Caire, entièrement dédié à l’un des plus célèbres pharaons de l’Egypte antique qu’était Toutankhamon. Actuellement en chantier, le musée, situé près des pyramides de Gizeh, regroupera tous les objets du tombeau et accueillera les visiteurs à partir de 2022. Jusqu’à cette date, une exposition itinérante permet de voir quelques objets dont certains sortent pour la première fois (et la dernière) d’Egypte. Elle est actuellement en cours à la Villette à Paris.
Dès l’introduction du
documentaire, le spectateur est plongé dans la magnificence du
trésor de la tombe de Toutankhamon, par les images du sarcophage du
jeune pharaon, principalement en gros plan. « Le trésor de
Toutankhamon est véritablement faramineux. C’est plus de cinq
mille objets dont deux mille objets d’orfèvrerie et de bijouterie
», nous explique l’égyptologue Dimitri Laboury, de l’université
de Liège, que le spectateur suivra en Egypte au cours du
documentaire. Dix kilos d’or rien que pour le masque, et cent dix
pour le cercueil interne, nous rappelle-t-il. Le décor est planté…
Le documentaire, dont la lecture est fluide et dynamique, aborde principalement trois questions majeures et détaille comment les archéologues sont parvenus, par l’étude des objets, à apporter des éléments de réponse probants, permettant ainsi un nouveau regard sur le court règne du jeune pharaon.
Le premier point abordé concerne un certain « personnage oublié » évoqué par l’égyptologue Marc Gabolde, de l’université de Montpellier. Il semble en effet que la majorité des objets, et certainement même le masque funéraire, n’étaient pas destinés à l’origine à Toutankhamon. Mais alors à qui ? Marc Gabolde nous montre que sur plusieurs objets, sous le nom de Toutankhamon se trouve un autre cartouche minutieusement effacé, ainsi que d’autres modifications. Ceux qui ont eu la chance de visiter l’exposition actuellement en cours à Paris se sont sans doute posé une question en regardant la statue censée représenter Toutankhamon sur une panthère noire. N’est-ce pas là un physique plutôt féminin… ? Pourquoi le pharaon serait représenté avec une poitrine ? Et s’il ne s’agissait pas de lui ? La réponse à cette question se trouve dans ce film, preuves à l’appui.
Le documentaire revient également sur les circonstances de la première ouverture de la chambre funéraire par Howard Carter, avec la présence de Lord Carnarvon et sa fille Lady Evelyn. Selon les indices collectés (car il s’agit d‘une véritable enquête), les deux hommes auraient prélevé des objets de la chambre funéraire, avant la première entrée officielle. L’égyptologue Marc Gabolde s’efforce aujourd’hui de les retrouver et de les inventorier.
Enfin, est abordée la question de la santé du jeune pharaon. Là encore, les objets et certaines représentations laissent de nombreux indices sur la fragilité physique de Toutankhamon. Les nouvelles technologies du laboratoire ont permis de confirmer certaines hypothèses ainsi soulevées, notamment l’étude fascinante des sous-vêtements du pharaon. Ou comment faire parler une pièce de tissu vieille de plus de trois mille ans… Absolument passionnant !
Tout au long de ces enquêtes, nous suivons les égyptologues au plus près des objets (notamment une des chapelles funéraires, dont la taille est véritablement impressionnante), et également dans les tombeaux de la Vallée des Rois, tout en oscillant entre trois époques.
Toutankhamon a fasciné le monde entier dès la découverte de son tombeau, dont les objets sont exceptionnellement bien conservés. Le documentaire propose un regard nouveau sur les événements historiques de l’époque du pharaon et sur sa découverte par Howard Carter. Il permet aussi de montrer le minutieux et colossal travail que représente l’étude du trésor, et également sa conservation et sa restauration.
Mais le documentaire va aussi plus loin et il est en cela extrêmement intéressant : il soulève d’autres questions, suggérant le long travail d’enquête qui attend encore les égyptologues, et espérons-le, d’autres documentaires à venir. Par exemple, pourquoi le tombeau du pharaon est-il considérablement plus petit que ceux d’autres pharaons ? Ou encore, pourquoi a-t-il été créé et décoré dans la précipitation, comme l’indiquent certains éléments décrits dans le documentaire ?
Si le sujet vous intéresse, nous vous conseillons de regarder ce documentaire pour le côté scientifique et historique, d’aller visiter l’exposition au parc de la Villette pour l’émotion unique de se trouver à proximité de tels objets, et d’ouvrir un des nombreux romans sur l’Egypte antique pour prolonger la part de rêve.
LE DVD
Toutankhamon, le trésor redécouvert est disponible chez Arte Editions. Le DVD est placé dans un boîtier classique Amaray, lui-même glissé dans un sur-étui cartonné. Pas de menu principal, mais uniquement le choix des langues. Signalons que le montage britannique ne dure que 52 minutes, soit 40 minutes de moins que les moutures allemande et française !
Aucun supplément.
L’Image et le son
Tourné en numérique, Toutankhamon, le trésor redécouvert bénéficie d’une édition SD, qui convient à merveille aux images du documentariste Frédéric Wilner et qui parvient à restituer les volontés artistiques de son auteur avec une précision d’orfèvre. Le cadre est très beau, la colorimétrie scintillante et le relief omniprésent. L’encodage consolide l’ensemble avec fermeté, le piqué est merveilleusement acéré, les noirs compacts, les ambiances chaudes et les contrastes denses.
Trois versions au choix, allemande, française et anglaise. Les pistes Stéréo font le boulot, sans se forcer, mais avec une efficacité jamais démentie. Les propos sont dynamiques et la très belle musique d’Olivier Depardon est bien mise en avant. L’éditeur joint également les sous-titres destinés aux spectateurs sourds et malentendants.
LA PLANÈTE SAUVAGE réalisépar René Laloux,disponible en DVD et Blu-ray le 7 juin 2017 chez ARTE Editions
Acteurs : Jennifer Drake, Sylvie Lenoir, Jean Topart, Jean Valmont, Michèle Chahant, Yves Barsacq, Gérard Hernandez, Claude Joseph…
Scénario : Roland Topor, René Laloux d’après le roman Oms en série de Stefan Wul
Photographie : Boris Baromykin, Lubomir Rejthar
Musique : Alain Goraguer
Durée : 1h12
Date de sortie initiale : 1973
LE FILM
Sur la planète Ygam, vivent des androïdes géants appelés les Draags. Ils élèvent de minuscules êtres humains qu’ils surnomment Oms. Mais un jour, l’Om de la jeune Tiwa se révèle plus intelligent et va déclencher une révolte…
La Planète sauvage est un film culte, un chef d’oeuvre de l’animation qui marque une étape primordiale dans le cinéma y compris dans le genre de la science-fiction. Librement inspiré du roman Oms en série de Stefan Wul publié en 1957, La Planète sauvage est l’aboutissement de la rencontre et du travail en commun du réalisateur, dessinateur, peintre et sculpteur René Laloux (1929-2004) et de Roland Topor (1938-1997), illustrateur, peintre, dessinateur, poète, écrivain, chansonnier, cinéaste, acteur, metteur en scène et scénariste. Les deux amis et collaborateurs signent l’histoire en commun, tandis que Roland Topor s’occupe seul des dessins et des illustrations. Prix spécial du jury à Cannes en 1973 et Prix Saint-Michel à Bruxelles en 1974, immense succès critique et public (plus de 800.000 entrées en France), La Planète sauvage est l’un des rares longs métrages d’animation français (pour adulte) à obtenir une reconnaissance internationale.
Réalisé à partir de 1969 dans les studios d’animation Jiří Trnka de Krátký Film à Prague – mais interrompu de 1968 à 1971 en raison du printemps de Prague – pour des questions de budget et de technique, à partir de la technique dite du papier découpé, le film de Laloux/Topor demeure un véritable OVNI près de 45 ans après sa conception, de par son récit, mais également par ses images insolites. Les Draags, êtres humanoïdes bleus et aux yeux rouges mesurant douze mètres de haut, vivent sur une planète étrange, Ygam, à l’extravagante végétation. Leur existence s’écoule lentement, tout entière tournée vers la méditation. Ils ont recueilli le minuscule peuple des Oms, qu’une catastrophe a chassé de la lointaine planète dévastée Terra. Les adolescents Draags privilégiés ont le droit d’élever des Oms comme de minuscules animaux domestiques, qu’ils tentent d’élever et de promener en laisse. C’est ainsi que Tina chérit sa petite mascotte, Terr, et le laisse profiter des leçons que lui dispensent ses écouteurs. Terr devient ainsi fort savant. Les dirigeants des Draags s’aperçoivent tardivement de l’intelligence des Oms et constatent leur rigoureuse organisation. Pressentant une menace, ils décident d’en finir une bonne fois pour toutes avec leurs petits hôtes désormais considérés comme nuisibles. Mais rien ne va se passer comme prévu et Terr, devenu adolescent et bientôt un véritable adulte, parvient à s’évader puis, nourri de la connaissance des Draags, va devenir le leader de la révolution des Oms sauvages contre le peuple Draag.
Laloux et Topor mettent tous leurs sujets de prédilection dans La Planète sauvage, le film étant ainsi nourri d’une forte croyance en l’homme, mais redoutablement pessimiste comme l’avait déjà démontré leur premier court-métrage Les Temps morts réalisé en 1964. Merveille visuelle, La Planète sauvage agit comme une véritable séance d’hypnose avec ses images uniques, inquiétantes et même cauchemardesques (le prologue en aura traumatisé plus d’un) qui rappelle Les Escargots, réalisé par le duo en 1965, son ton inclassable, la beauté incommensurable des décors (et de la faune) et de la musique pop électro expérimentale d’Alain Goraguer.
Viscéralement poétique et philosophique, mais aussi trip psychédélique, le film de Laloux/Topor fait appel à tous les sens des spectateurs, en flattant à la fois leurs yeux et leur pensée avec une réflexion aussi virtuose qu’insondable et foisonnante sur la nature humaine, la société, l’émancipation par la connaissance, le libre-arbitre, les régimes totalitaires, la tolérance, l’esprit critique et le droit à la différence. Ambitieux, fascinant et envoûtant.
LE BLU-RAY
Le Blu-ray de La Planète sauvage, disponible chez Arte Editions, ainsi que le livret de 12 pages René Laloux l’extra-terrestre écrit par Fabrice Blin, reposent dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui cartonné. Le menu principal est sobre, animé sur la superbe musique planante d’Alain Goraguer.
Hormis les extraits des longs-métrages Les Maîtres du temps et Gandahar, cette nouvelle édition HD reprend les mêmes suppléments déjà disponibles sur le DVD sorti en 2001 et le premier Blu-ray édité en 2009. A l’occasion de cette ressortie restaurée 2K, Arte Editions nous propose également un entretien inédit avec Laurent Valière, journaliste, auteur de Cinéma d’animation, la French Touch (Editions de La Martinière), qui revient sur la genèse de La Planète sauvage, sur l’évolution de l’animation en France à la fin des années 1960, sur les thèmes du film, sur le travail de René Laloux avec Roland Topor, sur l’adaptation du roman de Stefan Wul, sur la réalisation dans les studios de Prague, sa réception avec l’engouement de la critique et la récompense au Festival de Cannes en 1973.
Ne manquez pas la rencontre avec René Laloux réalisée en 2001 (26’), durant laquelle le réalisateur, dessinateur, peintre et sculpteur revient sur ses débuts, sur la genèse et la conception des Dents du singe, Les Temps morts, Les Escargots et bien sûr de La Planète sauvage et de Gandahar avec quelques extraits à l’appui. Avec son célèbre franc-parler, René Laloux est visiblement très heureux de partager ses souvenirs liés à sa collaboration avec Roland Topor. Parallèlement, le producteur André Vallio-Cavaglione intervient aussi sur les conditions de tournage des Escargots et de La Planète sauvage.
Véritables trésors à part entière, les trois magnifiques courts-métrages de René Laloux, Les Dents du singe, Les Temps morts et Les Escargots sont également disponibles sur cette édition.
Les Dents du singe (13’, 1960) : C’est l’histoire d’un homme qui va chez le dentiste pour se faire arracher une dent mais qui ignore que le dentiste vole les dents des pauvres pour les donner aux riches. Réalisé pour Les Films Paul Grimault, Les Dents du singe est le premier film professionnel de René Laloux, animé en papier découpé sur une histoire écrite par les patients de la clinique psychiatrique de La Borde à Cour-Cheverny, où il exerce alors l’art thérapie depuis 1956 à travers des ateliers de peinture, de marionnettes et d’ombres chinoises.
Les Temps morts (10’, 1964) : Suite de séquences en prise de vue réelles ou en animation accompagnées d’un texte de Jacques Sternberg dit par Roland Dubillard. Ce film pessimiste et très sombre, réalisé en N&B, première collaboration entre René Laloux et Roland Topor, avec Alain Goraguer à la musique, dénonce l’appétit de mort de l’humanité et le cercle vicieux de la violence, qui mène de la brutalité à la guerre et au crime, pour finir par la peine de mort. Certaines images, notamment de véritables décapitations, peuvent heurter la sensibilité de certains spectateurs.
Les Escargots (10’, 1965) : Alors qu’un paysan vient enfin de trouver un remède contre la sécheresse pour faire pousser ses salades, un pays est progressivement envahi par des escargots géants. En apparence inoffensifs, ils se révèlent carnivores et particulièrement sournois. Rien ne semble pouvoir leur résister. Extraordinaire court-métrage fantastique, réalisé par René Laloux sur des dessins de Roland Topor, Les Escargots est reconnu dans le monde entier comme un des meilleurs films d’animation de tous les temps, largement récompensé, notamment par le Grand Prix du Festival d’animation de Mamaia, le Grand Prix des rencontres cinématographiques de Prades, le Prix spécial du jury du Festival de Carcovie et le Prix spécial du jury du film de science-fiction de Trieste.
L’interactivité se clôt sur une galerie de dessins originaux, préparatoires et concepts rejetés de Roland Topor réalisés pour La Planète sauvage, ainsi qu’une galerie de peintures de René Laloux.
L’Image et le son
Déjà disponible en Haute-Définition depuis 2009, La Planète sauvage revient une fois de plus chez ARTE Editions, mais cette fois dans une version restaurée 2K par Eclair/Groupe Ymagis en 2016, à partir du négatif original et de l’interpositif pour certaines séquences. Cette nouvelle version du film de René Laloux est sans aucun doute l’édition définitive de ce chef d’oeuvre. Les couleurs pastel possèdent un nouvel éclat, les poussières qui pouvaient subsister ont ici disparu, la stabilité est de mise, le trait est affiné et le film retrouve une nouvelle jeunesse pour ainsi être découvert par une nouvelle génération de spectateurs, tout en offrant aux cinéphiles un confort de visionnage inédit. Si le DVD et le premier Blu-ray n’étaient franchement pas honteux, ce Blu-ray au format 1080p en met discrètement plein la vue et surpasse les précédents travaux d’ARTE Editions, tout en respectant les partis pris originaux dont le grain argentique et les quelques défauts liés aux conditions de tournage.
Rien à redire concernant l’unique piste audio DTS HD Master Audio Stéréo, d’une fluidité et d’une propreté absolues, sans saturation ni craquements et encore moins de souffle intempestif. La musique d’Alain Goraguen est ici délivrée avec ardeur, tout comme les bruitages et la narration. Les sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants sont disponibles.