Test DVD / Soeurs, réalisé par Yamina Benguigui

SOEURS réalisé par Yamina Benguigui, disponible en DVD le 9 février 2022 chez Studiocanal.

Acteurs : Isabelle Adjani, Rachida Brakni, Maïwenn Le Besco, Hafsia Herzi, Rachid Djaidani, Faïza Guene, Fattouma Ousliha Bouamari, Manel Belkhelfa…

Scénario : Yamina Benguigui, Abdel Raouf Dafri, Farah Benguigui, Maxime Saada & Jonathan Palumbo

Photographie : Antoine Roch

Musique : Amin Bouhafa

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 2021

LE FILM

Depuis trente ans, trois sœurs franco-algériennes, Zorah, Nohra et Djamila vivent dans l’espoir de retrouver leur frère Rheda, enlevé par leur père et caché en Algérie. Alors qu’elles apprennent que ce père est mourant, elles décident de partir toutes les trois le retrouver en Algérie dans l’espoir qu’il leur révèle où est leur frère. Commence alors pour Zorah et ses sœurs une course contre la montre dans une Algérie où se lève le vent de la révolution.

Réalisatrice de nombreux documentaires, tels que Femmes d’Islam (1994), sur la condition des femmes musulmanes en France, au Mali, en Indonésie, au Yémen, en Algérie, en Égypte et en Iran, Mémoires d’immigrés, l’héritage maghrébin (1997), sur l’histoire de l’immigration maghrébine en France, ou bien encore Le Jardin parfumé (2000) sur la sexualité dans la société arabo-musulmane, Yamina Benguigui avait signé jusqu’à présent une seule œuvre de fiction, Inch’Allah dimanche. Presque vingt ans plus tard, l’ancienne Ministre déléguée à la Francophonie et Adjointe au maire de Paris revient au cinéma avec Soeurs, porté par trois comédiennes exceptionnelles, Isabelle Adjani, Rachida Brakni et Maïwenn (qui chose amusante, jouait le personnage enfant de la première dans L’Été meurtrier), toutes issues de l’immigration algérienne, interprétant respectivement Zorah, l’aînée, Djamila et Norah. Comme son titre sobre l’indique, les trois personnages féminins principaux sont sœurs, chacune ayant un caractère bien trempé, étant diamétralement opposées, qui ne se sont jamais perdues de vue et qui gravitent autour du noyau familial représenté par leur mère, Leïla, formidablement campée par Fattouma Ousliha Bouamari, vue dans le génial Discount de Louis-Julien Petit. Liées par un passé violent, qui les a traumatisé à vie, les trois sœurs apprennent que leur père, qu’elles n’ont pas revu depuis trente ans, a été victime d’un AVC. Il est temps pour elles d’aller affronter celui dont le fantôme a toujours envahi leur quotidien, pour enfin avoir des réponses à leurs questions. Une surtout. Qu’est devenu leur petit frère, kidnappé (légalement) par leur père et disparu par la suite en Algérie ? Yamina Benguigui s’est probablement inspiré de ses propres souvenirs pour nourrir le scénario de Soeurs. S’il y a indéniablement quelques égarements et même certains clichés liés à l’inspiration de l’artiste, qui puise dans ce qui le hante pour pouvoir exorciser ses propres démons et pour y trouver là aussi des explications sur des événements qui ont eu des répercussions sur le présent, Soeurs est un beau film sur l’amour de trois frangines, sur le non-dit, sur l’incommunicabilité des êtres, sur la quête de soi, le pardon et l’espoir.

L’une est dramaturge, la seconde maire d’une petite ville de province, la troisième est paumée. Nées en France de parents algériens, elles se sont toutes les trois intégrées. Quelques années les séparent, mais la plus jeune a déjà quarante piges (comme elle le dit lors d’un affrontement mémorable dans un ascenseur) et toutes ont tenté d’avancer, de garder la tête droite, bien qu’elles vivent chaque jour avec un souvenir douloureux, celui de n’avoir jamais su ce qu’était devenu leur petit frère, avec lequel leur père est rentré en Algérie, pour ne plus donner signe de vie. Zorah (Isabelle Adjani, qui semble avoir recours au même chirurgien plastique que la réalisatrice), auteure et metteuse en scène, s’inspire de la vie de sa famille, sans avoir demandé l’accord à celle-ci, pour monter sa nouvelle pièce de théâtre. Une façon pour elle non seulement de mettre en forme ses pensées les plus sombres et ses réminiscences les plus tenaces, mais aussi sans doute pour mieux s’y replonger, en espérant peut-être lutter une dernière fois contre eux.

Soeurs pâtit de certains partis-pris à ce niveau-là, quand les pensées de Zorah se mêlent à sa pièce, pour laquelle elle a engagé sa fille Farah (Hafsia Herzi, 35 ans, qui n’a pas changé depuis La Graine et le Mulet), pour interpréter sa mère. L’excellent Rachid Djaidani, réalisateur de Rengaine et de Tour de France, complète le casting, ici dans la peau d’Hassan, le comédien qui interprète Ahmed, le père, sur scène, mais dont le visage se mêle aussi aux souvenirs de Zorah. Une mise en abyme quelque peu brinquebalante, attendue aussi, mais heureusement le film s’en écarte finalement rapidement, quand les sœurs entreprennent leur visite en Algérie, afin de se rendre au chevet de leur père, victime d’une attaque cérébrale. Djamila et Norah, qui démarrent au quart de tour à la moindre allusion de l’une quant à son mode de vie, suivent Zorah, sans rechigner, même si les tripes se serrent en foulant le sol de ceux qui leur ont donné la vie.

Les trois femmes, indépendantes, actives, naviguent entre deux sols, deux identités, deux cultures, n’appartiennent ni au Nord de la Méditerranée, ni au Sud, trop typées d’un côté, trop « intégrées » en France de l’autre. Zorah, Nohra et Djamila suivent le chemin qu’elles sont parvenues à tracer et même si leur existence a bifurqué, elles se retrouvent désormais toutes les trois à un carrefour où toutes les zones d’ombre pourraient enfin être éclairées. Drame, mais jamais pathos ni dénué d’humour, Soeurs vaut essentiellement pour la force de ses actrices.

LE DVD

Un petit peu plus de 41.000 spectateurs seront allés voir Soeurs au cinéma au début de l’été 2021, période de l’année qui a évidemment plus profité à Pierre Lapin 2 qu’au deuxième long-métrage de Yamina Benguigui. Studiocanal s’occupe du service après-vente de Soeurs et propose le film uniquement en DVD. Le menu principal est fixe et muet.

Outre la bande-annonce, l’éditeur joint un microscopique making of de 97 secondes exactement, qui donne un subliminal aperçu du tournage…

L’Image et le son

Pas d’édition Haute-Définition pour Soeurs, mais ce n’est pas une surprise. Toutefois, ce DVD s’en sort avec tous les honneurs. Les intérieurs feutrés bénéficient de très beaux contrastes, les séquences tournées en extérieur sont lumineuses, le piqué est acéré. Le cadre large offre son lot de détails, surtout sur les nombreux gros plans. La colorimétrie est chatoyante, le relief appréciable.

La piste française est proposée en Dolby Digital 5.1. Disons le, le soutien des latérales est anecdotique pour un film de cet acabit. Les enceintes arrière servent essentiellement à spatialiser la musique d’Amin Bouhafa (Amin de Philippe Faucon, Gagarine de Fanny Liatard) et quelques ambiances naturelles dans la rue. Les dialogues et la balance frontale jouissent d’une large ouverture, et parviennent à instaurer un confort acoustique suffisant. Une piste Stéréo est également au programme, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, sans oublier une piste Audiodescription.

Crédits images : © Studiocanal / BANDITS – ELEMIAH / Marcel Hartmann / Bandits Vision / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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