Test DVD / Les Trois Lumières, réalisé par Fritz Lang

LES TROIS LUMIÈRES (Der Müde Tod) réalisé par Fritz Lang, disponible en DVD depuis le 9 septembre 2019 chez Films sans Frontières.

Acteurs : Lil Dagover, Walter Janssen, Bernhard Goetzke, Hans Sternberg, Eduard von Winterstein, Rudolf Klein-Rogge, Karl Huszar, Paul Biensfeldt, Lewis Brody…

Scénario : Fritz Lang & Thea von Harbou

Photographie : Bruno Mondi, Erich Nitzschmann, Herrmann Saalfrank, Bruno Timm & Fritz Arno Wagner

Musique : Giuseppe Becce, Karl-Eernst Sasse & Peter Schirmann

Durée : 1h36

Date de sortie initiale: 1921

LE FILM

Un jeune couple fait halte dans une auberge. Un mystérieux voyageur, dont on murmure qu’il possède un terrain entouré d’un mur, aux abords d’un cimetière, emmène le jeune homme. Sa compagne désespérée tente de le suivre à l’intérieur de cet étrange enclos, mais ne peut y trouver une ouverture. La Mort lui apparaît alors et lui promet de lui rendre son fiancé si, transportée avec lui dans trois époques différentes, elle parvient à lui sauver la vie une fois. Voilà la jeune femme projetée à Bagdad, puis à Venise sous la Renaissance et enfin en Chine, dans le palais de l’Empereur. Mais la Mort est toujours victorieuse. La Faucheuse propose alors un second marché…

Fritz Lang (1890-1976) est considéré, à juste titre, comme l’un des plus grands cinéastes. De 1919 à 1960, il tourne en Allemagne, en France et aux États-Unis. Sa filmographie s’étend du muet jusqu’au cinéma parlant. Dès ses débuts, il introduit dans ses films un style, des techniques nouvelles et une esthétique particulière qui appartient à l’expressionnisme, courant artistique figuratif très présent en Allemagne. Surnommé le « Maître des ténèbres », il est connu pour avoir réalisé M le mauditM, Eine Stadt sucht einen Mörder, Metropolis ou encore Le Testament du Dr. Mabuse – Das Testament des Dr. Mabuse. Fritz Lang a trente ans lorsqu’il met en scène son huitième film intitulé Les Trois LumièresDer Müde Tod qui traite un des thèmes récurrents de sa carrière : la mort. Il s’agit de son premier grand succès critique.

Ce long-métrage muet en noir et blanc se présente comme un chant folklorique allemand en six strophes. Dès les premières minutes, une ambiance étrange s’installe. Un homme, entièrement vêtu de noir avec un large chapeau, arrête une diligence dans laquelle se trouve un jeune couple. Ce voyageur ténébreux et au visage patibulaire monte et le voyage se poursuit. Le film entre rapidement dans l’action principale. Arrivés à destination, cet homme qui s’avère être La Mort emmène avec lui le jeune fiancé à travers un mur qui longe un cimetière. L’épouse supplie qu’on lui rende son fiancé. La Mort lui propose alors un pacte.

Les Trois Lumières est esthétiquement beau et bien qu’un siècle se soit écoulé, le film a gardé un impact visuel impressionnant. Par exemple, il y a cette scène avec des cierges qui représentent les vies sur Terre, se consumant jusqu’à l’inévitable extinction. Le film utilise des trucages inventés par Georges Méliès et qui arrivent toujours à surprendre comme la surimpression : deux images sont superposées dans la scène où des personnes traversent un mur, symbole du passage de la vie vers la mort. Il y a également l’arrêt de la caméra afin de faire apparaître soudainement un personnage dans un décor. Le montage créé un rythme qui n’a pas vieilli et la réalisation est efficacement maîtrisée.

Ce film fantastique et dramatique aborde des sujets comme le destin et la mort, qui sont indissociables. Le destin est impossible à modifier. Le personnage féminin tente inlassablement par trois fois de changer le cours de la vie et d’empêcher la mort de s’abattre. C’est une vision pessimiste qui correspond entièrement à la période dans laquelle le film a été mis en scène, durant la République de Weimar, régime politique mis en place en Allemagne à la fin de la Première Guerre mondiale jusque 1933. Les tensions et les conflits de ce contexte ont impacté la population. Ce film montre parfaitement l’inquiétude qui a marqué cette génération.

En 1921, il était difficile pour la population de voyager facilement, les moyens de transport n’étaient pas aussi évolués que maintenant. Le cinéma permettait d’admirer des pays lointains tout en restant assis sur son siège. Les Trois Lumières, à travers ses magnifiques décors, nous emmènent à Bagdad, à Venise et enfin en Chine dans des époques différentes. Dans le premier pays, nous découvrons un palais splendide. Dans le second, nous nous retrouvons en plein carnaval. Mais le plus spectaculaire est sans aucun doute le dernier tableau de ce conte, la Chine. Des personnages sont sur un tapis volant, des soldats miniatures sortent d’une boîte, une grande armée sur des chevaux et des animaux exotiques comme des éléphants et un tigre sont visibles à l’écran. Ces trois histoires sont autant de registres différents, de la tragédie à la bouffonnerie.

Bernhard Goetzke, qui interprète La Mort, a une présence extraordinaire à l’écran. Son visage est terrifiant et rappelle celui du Diable. Malheureusement, lorsque le cinéma parlant est apparu, le comédien s’est vu relégué à des rôles secondaires. Le personnage féminin est joué par Lil Dagover, qui a traversé six décennies de cinéma. Il s’agit du deuxième film de Walter Janssen qui joue le personnage masculin. Il a par la suite continué sa carrière jusque dans les années 1970 et a même réalisé quelques longs-métrages.

Les Trois Lumières est sans doute l’un des films les plus marquants de la période muette du cinéma de Fritz Lang. Il continue encore aujourd’hui à impressionner par son style visuel hors du commun et sa poésie atypique. Ce long-métrage a influencé une génération de cinéastes comme Luis Buñuel ou Alfred Hitchcock.

LE DVD

Le DVD du film Les Trois Lumières est disponible depuis septembre 2019 chez Films sans Frontières. Le visuel de la jaquette est simple, reprenant l’affiche du film. Le menu est fixe avec une photo du long-métrage et muet.

Cette édition ne comporte aucun bonus. Il n’y a pas de chapitrage. Le menu se contente de nous proposer de lancer le film en version originale avec des sous-titres en français ou en version originale. Ce DVD n’est donc pas très interactif. Cependant, derrière la jaquette, vous trouverez des extraits de textes écrits par Arte, aVoir-aLire et Télérama qui analysent ce film.

L’image et le son

Les Trois Lumières a maintenant cent ans. Restaurer ce film afin d’avoir une image parfaite relevait du miracle. Les traces du temps qui a passé sont visibles : des traits d’usure, quelques poussières, des petits sauts d’images, des millisecondes manquantes et une luminosité instable. Malgré tout, le travail de restauration est à féliciter. A partir d’une copie en 35 mm et de fragments conservés dans plusieurs cinémathèques, le film a pu être remis à neuf. Certains passages sont impressionnants par leur netteté remarquable. En plus du noir et blanc, les images sont parfois teintées de plusieurs couleurs : bleu, rose, jaune et orange, ce qui est surprenant. Les noirs sont profonds. Le format 4/3 est respectueux de l’image.

Pour accompagner ce film muet, une musique a été composée pour sa restauration par Cornelius Scherhr et interprétée par l’Orchestre symphonique de Berlin. Elle est présente durant toute la durée du long-métrage et correspond à l’atmosphère métaphysique du film. Son intensité est parfaite pour plonger intégralement dans ce film. Des sous-titres en français non imposés traduisant les intertitres sont disponibles.

Crédits images : © Films Sans Frantières/ Critique du film et chronique du DVD réalisées par Jérémy Joly / Captures : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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