CHIEN réalisé par Samuel Benchetrit, disponible en DVD le 18 juillet 2018 chez M6 Vidéo
Acteurs : Vincent Macaigne, Vanessa Paradis, Bouli Lanners, Olivier Bisback, Tom Canivet, Thibaut Pira Van Overeem…
Scénario : Samuel Benchetrit, Gabor Rassov d’après le roman Chien de Samuel Benchetrit
Photographie : Guillaume Deffontaines
Musique : Raphaël Haroche
Durée : 1h28
Année de sortie : 2018
LE FILM
Jacques Blanchot perd sa femme, son travail et son logement. Devenu rapidement étranger au monde qui l’entoure, il est recueilli par Max, patron d’une animalerie. Ce dernier, sadique et humiliant, dresse Jacques qui devient littéralement son chien…
Chien est le sixième long métrage de l’écrivain Samuel Benchetrit. Après deux courts-métrages, Janis et John sort sur les écrans en 2003. Malgré ce succès d’estime, il attendra cinq ans pour repasser derrière la caméra avec l’excellent film à sketches, J’ai toujours rêvé d’être un gangster. Ses opus suivants, Chez Gino (2011), Un voyage (2014) et Asphalte (2015) n’ont connu aucun succès dans les salles. Pour Chien, Samuel Benchetrit s’inspire de son propre roman sorti en 2015 et signe son meilleur film depuis dix ans. Si La Métamorphose de Franz Kafka n’est jamais bien loin, le réalisateur se penche sur l’incommunicabilité entre les êtres, ou plutôt l’absence de communication, mais aussi sur le besoin de tendresse et d’amour. Et qui de mieux que Vincent Macaigne pour incarner un « homme-chien » sans…cabotiner ?!
Le roman Chien reflétait toutes les névroses de l’écrivain à un moment difficile de sa vie, alors que la dépression le guettait après une rupture sentimentale, avec le sentiment de ne plus appartenir à la société. Ou comment relier l’homme à l’animal. Exutoire, livre cathartique, Chien a permis à Samuel Benchetrit de se sortir de ses maux, en imaginant jusqu’où un être qui a tout perdu est prêt à se rabaisser pour obtenir quelques marques d’affection, une caresse, quelques signes d’amour. Loin d’être une version mélancolique de Didier d’Alain Chabat (1997), Chien est un film singulier, quasi-inclassable, tourné avec les moyens du bord dans des décors froids, dépouillés, faits de béton, mais imprégné d’une infinie tendresse. Pourtant, le film peut rebuter par certaines séquences assez violentes, d’ordre physique mais également psychologique, surtout durant la seconde partie, moins percutante et attachante que la première, mais qui ne manque pas d’attraits.
Le premier acte est consacré à la chute du personnage. Après s’être fait larguer de la pire façon que ce soit par sa compagne, interprétée par une Vanessa Paradis blafarde, famélique et foncièrement antipathique, qui prétexte être devenue allergique à compagnon en étant à son contact, Jacques est ensuite victime de la loi des séries. Il perd le chien qu’il venait tout juste d’acheter pour son fils dans une animalerie, est viré de son hôtel, son patron le renvoie, les rapports avec son enfant se glacent. Comme lien social, Jacques n’a plus que le propriétaire de l’animalerie. Progressivement, ce dernier va prendre Jacques sous son aile…mais en tant que chien. Pour survivre, Jacques va accepter de faire et d’être tout naturellement ce qu’on attend de lui.
S’il traîne ses airs de Droopy dégingandé depuis sa découverte dans le superbe Un monde sans femmes de Guillaume Brac (2011), Vincent Macaigne, pourtant déjà gâté au cinéma chez Sébastien Betbeder, Justine Triet, Antonin Peretjatko ou encore dernièrement chez Éric Toledano et Olivier Nakache, trouve ici l’un de ses meilleurs rôles. Sans jamais rendre son personnage pathétique, le comédien parvient à en restituer toute la tristesse. Rarement, Vincent Macaigne aura été aussi bouleversant. La seconde partie se focalise sur l’étrange relation qui s’instaure entre Jacques et Max, interprété par le monstre Bouli Lanners, ce dernier trouvant ici l’occasion de laisser libre cours à ses désirs d’autorité et de pouvoir. Plus démonstratif, peut-être plus mécanique également, ce deuxième acte manque parfois de rythme et aurait mérité d’être plus resserré. Toutefois, cela contribue au malaise distillé jusqu’au dénouement où Jacques devra choisir la condition dans laquelle il se sent finalement le mieux.
Chien est une œuvre absurde, drôle, émouvante, une fable subversive, dérangeante et intelligente qui mérite l’attention du spectateur. De loin le film le plus abouti de son auteur.
LE DVD
Le test du DVD de Chien, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Très mauvais point à l’éditeur qui a préféré miser sur un visuel hideux centré sur les trois vedettes, plutôt que de reprendre l’excellente affiche d’exploitation, pourtant bien plus représentative et attractive.
Si vous avez aimé Chien ou même si le film vous a laissé perplexe ou rebuté, n’hésitez pas à le revoir avec les commentaires audio de Samuel Benchetrit. Sans aucun temps mort et du début à la fin, le réalisateur revient sur chaque aspect de son film en abordant la psychologie des personnages, les partis pris, ses intentions. Il met en parallèle son roman et son adaptation, les conditions de tournage en Belgique. Nous apprenons également que Jean-Claude Van Damme a failli interpréter le rôle finalement tenu par Bouli Lanners, JCVD n’ayant visiblement pas vraiment compris où Samuel Benchetrit voulait en venir avec ce personnage, que l’acteur belge voulait plus « héroïque ». Ce commentaire intimiste et passionnant revient également sur l’échec cinglant du film dans les salles, le cinéaste essayant de comprendre ce qui a pu rebuter les spectateurs.
L’interactivité se poursuit avec une interview de Samuel Benchetrit divisée en trois segments, La genèse – Du livre au film (10’), Les acteurs (14’) et Du tournage à la sortie (7’). Si vous venez d’écouter le commentaire audio, cet entretien vous paraîtra redondant puisque tous les propos tenus ici font écho avec ce qui a déjà été entendu précédemment.
Cette section se clôt sur 4 teasers et la bande-annonce.
L’Image et le son
Cette édition DVD de Chien s’avère plutôt soignée. La propreté de la copie est assurée, les couleurs blanchâtres reflètent un tournage hivernal et même les visages paraissent blafards tout du long. Le piqué est aléatoire, mais s’en tire honorablement. La gestion des contrastes est solide, même si nous pouvions attendre plus de détails sur le cadre large. Les rares séquences tournées en extérieur sont très belles et lumineuses.
Chien repose essentiellement sur les dialogues. La piste Dolby Digital 5.1 distille les voix des comédiens avec efficacité, tandis que les latérales s’occupent de l’accompagnement musical et des ambiances naturelles en extérieur. Une spatialisation discrète, mais intelligente. L’éditeur joint également une piste Stéréo, dynamique et riche. Signalons l’absence de sous-titres français destinés au public sourd et malentendant. Pas de piste Audiodescription non plus.
Crédits images : © Paradis Films / M6 Vidéo / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr
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