Test Blu-ray / Sois belle et tais-toi!, réalisé par Marc Allégret

SOIS BELLE ET TAIS-TOI! réalisé par Marc Allégret, disponible en DVD & Blu-ray le 17 mai 2024 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Mylène Demongeot, Henri Vidal, Jean-Paul Belmondo, Robert Dalban, Alain Delon, Roger Hanin, Darry Cowl…

Scénario : Marc Allégret, Gabriel Arout, William Benjamin, Odette Joyeux & Jean Marsan Roger Vadim

Photographie : Armand Thirard

Musique : Jean Wiener

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Virginie a 20 ans et une langue bien pendue. Elle est belle et en est à sa troisième évasion d’une Maison d’Éducation. Jean est un jeune inspecteur de Police, actuellement à la recherche de gangsters ayant attaqué une bijouterie de la place Vendôme. Mais le malheur fait qu’au cours de son enquête, Jean prend Virginie pour une complice de la bande, tandis que Virginie prend Jean pour un de ces prestigieux seigneurs du milieu. Et voilà la jolie délinquante éprise d’un flic.

C’est ce qui s’appelle avoir du pif. Parce-que pour réunir Mylène Demongeot, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo dans un même film alors que ceux-ci n’avaient pas fait grand-chose, on peut dire que Marc Allégret a senti que ces trois jeunes comédiens âgés d’une vingtaine d’années étaient non seulement charismatiques, mais aussi prometteurs. Sois belle et tais-toi ! (ne vous énervez pas, il s’agit du titre) est une charmante comédie-policière qui aurait peut-être disparu des radars, si Bebel et Delon n’avaient pas été associés pour la première fois au cinéma. S’ils n’ont pas de rôles majeurs dans cette histoire, on ne peut s’empêcher d’admirer leur naturel, leur bagou, leur énergie contagieuse. Mais la « star » est ici Mylène Demongeot, que le réalisateur avait déjà fait tourner trois ans plus tôt dans Futures vedettes, dans lequel elle ne faisait d’ailleurs qu’une apparition et était même créditée Marielle Demongeot au générique. Sortant du succès des Sorcières de Salem de Raymond Rouleau, où elle était parvenue à s’imposer face à Yves Montand et Simone Signoret, l’actrice passe la vitesse supérieure et se retrouve au générique de Bonjour tristesse d’Otto Preminger et en tête d’affiche de Sois belle et tais-toi !. Si elle n’a jamais brillé par son jeu et son phrasé quelque peu monocorde, on ne pourra pas reprocher à Mylène Demongeot de crever l’écran de sa beauté diaphane dans le film de Marc Allégret, où le couple qu’elle forme avec Henri Vidal fonctionne bien, malgré leur différence d’âge. Un spectacle « gentillet », complètement inoffensif et désuet, sympathique et divertissant.

Confiée à l’Assistance Publique à l’âge de douze ans, Virginie ne compte plus ses évasions. La dernière l’a ramenée dans une maison de redressement, mais sa haine des « flics » n’en a fait que s’accroître. Une nouvelle aventure l’a mise en rapport avec une bande de jeunes dévoyés. Par la suite, Virginie s’est trouvée dans les mailles du filet tressé par un jeune inspecteur, Morel, dont les idées neuves inquiètent un peu ses supérieurs. Morel a eu, lui aussi, une jeunesse orageuse. C’est pour cela sans doute qu’il comprend Virginie. Pour la sauver d’elle-même, il lui propose de l’épouser. La jeune fille accepte, bien résolue à s’enfuir dès qu’elle sera mariée. Mais les circonstances l’en empêchent et elle doit bien avouer que Morel, quoique policier, ne lui déplaît pas. Hélas, elle n’a pas rompu assez tôt avec ses anciens amis. Le bonheur qu’elle entrevoyait va-t-il s’effondrer à peine né ?

Dans l’introduction on oubliait de mentionner un atout de taille en la présence de Darry Cowl, qui emmène le film ailleurs, dans son univers, alors que le comédien sortait du triomphe du Triporteur de Jacques Pinoteau. Finalement, c’est lui la star de Sois belle et tais-toi !, puisque comptant les succès personnels de L’Ami de la famille et L’Amour descend du ciel, il traverse le film en pointillés, en déclenchant systématiquement les rires, comme si ses scènes appartenaient à une autre histoire. Virtuose quand il jongle avec les mots, sans cesse lunaire, poétique, Darry Cowl est constamment en décalage et relance chaque fois le récit quand il commence à patiner. C’est ce qui arrive à plusieurs reprises, sans doute parce qu’ils se sont mis à six pour l’écrire, dont Roger Vadim qui le destinait à Brigitte Bardot.

C’est aussi l’une des dernières apparitions au cinéma d’Henri Vidal, qui allait mourir l’année suivante à 40 ans, des suites d’une crise cardiaque, consécutive à une addiction aux stupéfiants qui « aidaient » le comédien à surmonter de gros passages dépressifs. Il est impeccable dans Sois belle et tais-toi !, où il enlace une fois de plus une belle poupée comme il en avait l’habitude à l’écran. Ainsi, après Brigitte Bardot, Dany Carrel, Marina Vlady, Françoise Arnoul, Romy Schneider, Michèle Morgan (dont il est l’époux à la ville), Henri Vidal retrouve sa partenaire d’Une manche et la belle d’Henri Verneuil, avec laquelle la complicité est évidente. Mention spéciale à Roger Hanin, habitué des rôles de gangsters (comme précédemment dans l’excellent Gas-oil de Gilles Grangier), qui campe ici le voleur de bijoux surnommé Charlemagne, à qui on ne la fait pas et auquel il ne faut pas raconter de salamalecs.

Du beau monde donc devant la caméra de Marc Allégret (y compris la délicieuse Béatrice Altariba, compagne de Darry Cowl), épaulé par le talent de son chef opérateur Armand Thirard (Le Salaire de la peur, La Vérité, Les Diaboliques), qui peinera par la suite à renouer avec le même succès que celui rencontré par Sois belle et tais-toi ! (également le titre d’un documentaire sur le féminisme signé Delphine Seyrig) avec ses quasi-deux millions d’entrées.

LE BLU-RAY

Après Une robe noire pour un tueur, nous explorons à nouveau la dernière vague à ce jour de Blu-ray Coin de Mire Cinéma, avec la sortie en Haute-Définition de Sois belle et tais-toi ! de Marc Allégret, disponible jusqu’alors chez René Chateau et dans la collection Belmondo vendue chez les marchands de journaux. La galette bleue repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné liseré bleu, mettant en avant le visage de la belle Mylène Demongeot. Le menu principal est fixe et musical.

Ceux qui nous connaissent sont très largement au fait de la collection La Séance propre à l’éditeur et nous commençons donc cette interactivité en allant voir ce qui se passait dans le monde via le journal des actualités diffusé avant le film dans les salles (10’20) en cette 19è semaine de l’année 1958. Il y a du pain sur la planche, avec entre autres un petit détour par le Festival de Cannes, où l’on aperçoit notamment Jeanne Moreau, l’écrivain Marcel Achard (président du jury), Grace Kelly, Danielle Darrieux et Sophia Loren. Pêle-mêle, on y découvre aussi l’inauguration du pavillon des constructeurs français de matériel électrique à la foire de Hanovre, la lutte pour l’indépendance du Maghreb, l’arrivée en grandes pompes à Moscou du président Nasser (chef de la République arabe unifiée), le 15è anniversaire du soulèvement du ghetto à Varsovie, un avion pneumatique (« signe particulier : craint la crevaison »), un essai de saut en parachute d’un chien à Buenos Aires organisé par l’Association des propriétaires de bergers allemands, ainsi que la première intervention chirurgicale sous-marine réalisée sur un mérou de 250 kilos qui présentait une tumeur maligne (en fin de compte une grosse boule de plomb). Enfin, gros plan sur le site du réacteur nucléaire expérimental français Proserpine, construit au centre CEA de Saclay, ainsi que sur une rétrospective Modigliani à la galerie Charpentier.

On laisse la place aux réclames publicitaires (8’). Les caramels Valentin (« Ce sont des connaisseurs ! »), la collection Pellet (« pour hommes, pour femmes et pour les jeunes ! »), les vêtements « riches en tissu garanti Boussac » pour madame Satisfaite, Total, les chaussettes Stemm (« In…trou…ables »), les assurances Simca, la Dramamine « contre les maux du voyage » (mais rien ne vaut une clope dans le train apparemment) et le pot-au-feu Maggi sont au programme !

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

Le film de Marc Allégret a été restauré en 4K à partir du négatif original. Superbe master proposé par Coin de Mire Cinéma, en partenariat avec le SND (groupe M6) et le CNC. Ce Blu-ray de Sois belle et tais-toi! subjugue du début à la fin. La restauration est impressionnante et d’autant plus visible sur les séquences sombres et nocturnes, sur lesquelles aucun point blanc ou d’autres poussières ne font leur apparition. Les contrastes sont d’une densité jamais démentie, les gros plans regorgent de détails, le piqué ne cesse de laisser pantois et la texture argentique est aussi préservée que solidement gérée. Hormis de légers fourmillements, la copie est stable, lumineuse, magnifique.

La piste mono restaurée bénéficie d’un encodage en DTS HD-Master Audio. L’écoute se révèle fluide, équilibrée, limpide. Aucun craquement intempestif ne vient perturber l’oreille des spectateurs, les ambiances sont précises et les dialogues clairs. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : © Coin de Mire Cinéma / SND (Groupe M6) / Raymond Voinquel / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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