Test Blu-ray / Paprika, réalisé par Tinto Brass

PAPRIKA réalisé par Tinto Brass, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD le 4 novembre 2025 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Debora Caprioglio, Stéphane Ferrara, Martine Brochard, Stéphane Bonnet, Rossana Gavinel, Renzo Rinaldi, Conte Bastiano…

Scénario : Tinto Brass & Bernardino Zapponi, d’après le roman Fanny Hill de John Cleland

Photographie : Silvano Ippoliti

Musique : Riz Ortolani

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 1991

LE FILM

Belle à croquer et encore jeunette, Mimma aime follement Nino, au point qu’elle vend son corps pour ses beaux yeux. Devenue, sous le nom de Paprika, la pensionnaire la plus populaire de la maison close de Mme Colette, la jeune femme oublie vite son premier amour pour se consoler dans les bras d’un beau marin. D’un établissement de plaisir à l’autre, de la France à l’Italie, où prêtres et politiciens se bousculent à sa porte, Paprika fait tourner les têtes et valser les caleçons.

Aaaah Paprika…c’est tout un poème comme le chantait Yves Montand. Assurément l’une des plus grandes héroïnes de Tinto Brass, Mimma, surnommée Paprika en raison de sa nature caliente, fait partie des « meneuses » dans le cheptel de son auteur. Incarnée par l’impressionnante Debora Caprioglio, excessivement généreuse, plantureuse (euphémisme) créature, Paprika marque le retour du maestro à un érotisme encore plus exacerbé. Superbe portrait de femme libre, qui fait ce qu’elle veut de son cul (qu’elle a comme une mandoline) et qui ne s’en prive pas, Paprika se double cette fois d’un « hommage » aux maisons closes, que le sieur Brass a toujours fréquenté dans sa vie. D’où une vision fantasmée, idéalisée, rêvée et donc mise en scène de façon stylisée à travers des décors que l’on imagine tout droit sortis d’un rêve (mouillé). Rétrospectivement, Paprika, sorti en 1991, est l’un des plus beaux longs-métrages du Maestro del Culo, un des plus passionnants aussi, comme un mix entre Salon Kitty et Miranda. Inoubliable.

En 1958, la jeune Mimma décide de travailler dans un bordel pour une courte période, selon elle une quinzaine de jours, afin d’arrondir ses fins de mois et pour aider son fiancé Nino. Elle décide de se faire appeler Paprika après avoir goûté un goulash. Quand elle découvre que Nino veut juste l’exploiter, elle continue cependant son travail et fréquente plusieurs bordels, tant en Italie qu’à l’étranger, rencontrant plusieurs personnes, certains bienveillants, d’autres sordides, juste avant la promulgation de la loi Merlin ordonnant la fermeture de tous les lupanars. Elle s’installe chez le comte Bastiano, un riche client âgé, avec qui elle se marie.

« La vie est courte, mais la chatte est éternelle ! »

Elle est comme cela Paprika, Mimma pour les intimes, elle va où son proéminent fessier la mène, sans se préoccuper du lendemain, du moment qu’elle prend suffisamment de plaisir en chemin. Car la pauvre ne peut s’empêcher de jouir avec certains clients, ce qui n’est pas très bien vu dans un métier où il faut souvent simuler. Mais que voulez-vous, Mimma apprend son (blow) job et elle n’est qu’en phase d’apprentissage. Cependant, elle apprend vite et devient encore plus rapidement celle vers qui les clients du bordel se dirigent, aussi bien attirés par ses formes voluptueuses que par son regard de biche. Paprika vivra quelques aventures inattendues, qui la mèneront partout, jusqu’à épouser un vieux comte, encore vert, qui la présente comme une bête de somme trouvée au salon de l’agriculture. Le destin n’a de cesse de sourire à Mimma, puisque pendant la nuit de noces, son mari a le palpitant qui finit par lâcher. La veuve devenue riche continue de chercher le grand amour qu’elle trouve finalement auprès d’un marin. Mais elle n’a pas oublié ses amies du bordel, avec qui elle fait la fête.

À la base de Paprika, il y a un roman de John Cleland, auteur du légendaire Mémoires d’une jeune fille de joieMemoirs of a Woman of Pleasure, ou bien encore Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, grand classique de la littérature érotique, publié au XVIIIe siècle. Si le livre avait déjà inspiré d’autres réalisateurs avant lui (comme Russ Meyer en 1964), Tinto Brass se l’accapare, se l’approprie et y place ses propres obsessions, ses souvenirs aussi sans doute, ses fantasmes, vé-culs ou qui n’ont eu de cesse de lui faire vibrer l’hypothalamus. Nous sommes ici en plein conte, en pleine fable, l’ouverture à l’iris indiquant comme d’habitude que Tinto Brass va nous prendre par le bout de la queue pour nous raconter une histoire à la « Il était une fois… ».

Outre la pulpeuse, affolante et envoûtante Debora Caprioglio, alors en couple avec Klaus Kinski (de 42 ans son néné) et ancienne finaliste d’un concours de beauté qui lui a ouvert les portes du cinéma, Tinto Brass fait honneur à la gent féminine avec les apparitions de la belle Martine Brochard (Une femme à sa fenêtre, Chats rouges dans un labyrinthe de verre), géniale en mère maquerelle qui n’hésite pas à goûter aux filles qu’elle dirige d’une main de maître. Comme très souvent, la photo, signée Silvano Ippoliti (Caligula, Miranda, Attention les dégâts, Navajo Joe), est un ravissement de tous les instants, tandis que la partition du fidèle Riz Ortolani (Zeder – Les voix de l’au-delà, La Maison au fond du parc, Comment tuer un juge), souligne chaque scène comme s’il s’agissait d’un fumetti coquin. Car le sexe chez Tinto Brass est toujours à la limite de la comédie burlesque et même du splastick, où les acteurs arborent d’ailleurs des phallus en érection factices et disproportionnés.

Il fallait bien cela, y compris la sensibilité du coscénariste Bernardino Zapponi, grand collaborateur de Federico Fellini (La Cité des femmes, Fellini Roma, Fellini Satyricon) et de Dino Risi (Valse d’amour, Fantôme d’amour, Âmes perdues, La Carrière d’une femme de chambre), pour évoquer les maisons closes et la fameuse Loi Merlin de 1958, qui devait abolir la réglementation de la prostitution, faire fermer les maisons closes et introduire les délits de proxénétisme, de racolage et de facilitation de la prostitution. Comme si pour Tinto Brass, on retirait les bonbons en libre-accès sur certains étalages. Aucune raison de se priver et même de se gaver devant Paprika donc !

LE BLU-RAY

Mine de rien, Sidonis Calysta a constitué l’une de ses plus importantes collections avec les titres de Tinto Brass ! Ainsi, depuis août 2023, les titres du maestro sont venus garnir le catalogue de l’éditeur avec Monamour, Fallo !, Transgression, Monella – Lola la frivole, Le Voyeur, Miranda, La Clé, Salon KittyPaprika et All Ladies Do It débarquent à leur tour. Penchons-nous aujourd’hui sur Paprika. Superbe visuel concocté pour ce Blu-ray. Le menu principal est animé et musical. Notons que Paprika était déjà sorti en DVD, chez Tiffany (dès 2007), puis chez Bach Films (en 2013).

Jean-François Rauger est une fois de plus au rendez-vous, pour nous présenter Paprika (20’30). Ce dernier donne toutes les informations sur la genèse du film de Tinto Brass, l’adaptation du livre Fanny Hill de John Cleland, le thème de la maison close (lieu que fréquentait l’ami Tinto), sa représentation « fantasmée et mythifiée » dans le film, le casting, l’écriture du scénario avec Bernardino Zapponi. On apprend que pour la première fois de sa carrière, Tinto Brass devait tomber follement amoureux de son actrice Debora Caprioglio, avec laquelle il allait vivre une liaison rapide, entamée sur le tournage. La mise en scène du corps féminin, la dimension comico-grotesque des scènes de sexe (« Tinto Brass est un peu le Sergio Leone du cul » dit Rauger) et les ennuis que le réalisateur allait rencontrer avec les féministes sont les derniers points abordés de ce module.

L’éditeur nous gratifie d’une interview de Tinto Brass, remontant sans doute à 2013 (26’). En français dans le texte, le cinéaste partage son premier souvenir érotique, lié à la découverte au cinéma de Docteur Jekyll et Mister Hyde (1920), réalisé par John S. Robertson, dans lequel une actrice apparaissait en robe de nuit, quelque peu transparente. Vision qui allait exciter le sieur Brass, au point d’éjaculer sur son siège. S’ensuit une ode au »culo », qu’il déclame en italien, avec toute la poésie qu’on lui connaît (dommage que les propos n’aient pas été traduits), puis Tinto Brass s’exprime sur son envie de donner des orgasmes aux spectateurs par le biais des images. Enfin, le réalisateur fait le lien, selon-lui étroit, entre le cinéma et les maisons closes.

Dommage que Sidonis n’ait pas pu reprendre l’entretien avec Christophe Bier, anciennement disponible sur l’édition Bach Films.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Paprika apparaît en édition Standard et en Blu-ray. Le master HD présenté ici propose des couleurs affirmées, une clarté évidente, une stabilité ainsi qu’un relief appréciable. La propreté de la copie est indéniable et la définition fort appréciable. Aucun fourmillement, le piqué est ferme, surtout sur les scènes extérieures. La carnation est naturelle et cette copie récemment restaurée permet d’apprécier les éclairages stylisés que dans nos souvenirs, du chef opérateur Silvano Ippoliti (Big Guns, Le Sourire de la hyène, Un homme est mort, Le Grand silence).

Paprika est proposé en français et en italien. La première piste dispose d’un doublage plutôt réussi, même si misant aussi trop souvent sur le report des voix au détriment des effets annexes. Au jeu des comparaisons, la version italienne s’en sort mieux. Fluide et dynamique, le confort acoustique est impeccable.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Paramount Pictures / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.