Test Blu-ray / Nightmare Concert, réalisé par Lucio Fulci

NIGHTMARE CONCERT (Un gatto nel cervello) réalisé par Lucio Fulci, disponible en Blu-ray chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Lucio Fulci, Jeoffrey Kennedy, Malisa Longo, Paola Cozzo, Robert Egon, David L. Thompson, Shilett Angel…

Scénario : Lucio Fulci, Giovanni Simonelli & Antonio Tentori

Photographie : Alessandro Grossi

Musique : Fabio Frizzi

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1990

LE FILM

Réalisateur de films d’horreur, Lucio Fulci vit un véritable cauchemar. Poursuivi par les personnages de ses films et transporté dans les scènes les plus horribles, il croit devenir fou ! Conscient de ses obsessions, il consulte un psychiatre qui pratique l’hypnose. Mais une succession de meurtres bien réels sont alors commis et il devient de plus en plus difficile de distinguer la fiction de la réalité…

Nightmare Concert, ou Un gatto nel cervello, ou littéralement Un chat dans le cerveau est l’un des derniers longs-métrages de Lucio Fulci (1927-1996). En réalité, il s’agit d’un patchwork, d’un opus composé de scènes tirées de téléfilms supervisés ou adoubés plutôt par le maître de l’horreur dans le cadre de son anthologie Lucio Fulci presenta. Ainsi outre des extraits des Fantômes de SodomeIl fantasma di Sodoma et de Soupçons de mort Quando Alice ruppe lo specchio, sortis en 1988, on reconnaît des images tirées de Bloody Psycho de Leandro Lucchetti (1989), de Hansel e Gretel de Giovanni Simonelli (1990), de Massacre d’Andrea Bianchi (1989), de Blood Moon/Death Escape d’Enzo Milioni et de The Murder SecretNon Avere Paura Della Zia Martade Mario Bianchi (1988). Là-dessus, Lucio Fulci himself sert de fil rouge, à travers une histoire « méta », où le cinéaste se retrouve à la merci de visions cauchemardesques, qui lui font perdre le sens des réalités. Le cinéaste a une vraie gueule de cinéma et s’en tire bien dans le « rôle » de Lucio Fulci et d’entrée de jeu, celui-ci est montré à l’oeuvre, en train d’écrire, d’imaginer comment une femme peut passer de vie à trépas. Tous les moyens sont bons, à coups de hache, étranglée, pendue, coupée en morceaux avec une tronçonneuse, noyée dans l’eau bouillante, égorgée par un chat sauvage, brûlée vive, enterrée vivante, torturée, les yeux percés, poignardée, sciée en deux, crucifiée, décapitée…voilà ce qui triture les méninges de Lucio Fulci, son cerveau ne le laissant pas en paix, comme si un chat lui lacérait ou lui rongeait la matière grise, ce que le générique nous dévoile d’ailleurs littéralement. Si Nightmare Concert comporte évidemment de nombreux défauts, cette plongée dans les méandres de l’esprit du cinéaste est un petit bonus sympathique pour ses très nombreux admirateurs et ce voyage n’est franchement pas déplaisant.

Lucio Fulci termine le tournage de son dernier film. Il quitte les studios de Cinecittà pour aller déjeuner au restaurant du coin. Le serveur le reconnaît et lui suggère son plat habituel. Fulci ne peut regarder les assiettes de viande sans avoir des flashbacks de la scène de cannibalisme qu’il filmait plus tôt. Secoué, dégoûté, il quitte le restaurant sans commander. Plus tard, alors qu’il vérifie les effets spéciaux d’un autre film, Fulci, irrité, s’adresse à un technicien pour qu’il lui retire une assiette comprenant des yeux d’animaux. De retour chez lui, dans sa maison mitoyenne de la vieille banlieue de Rome, le réalisateur, perturbé, tente de dormir, mais le bruit de la tronçonneuse d’un bricoleur à l’extérieur le tient éveillé et lui rappelle le massacre qu’il vient de filmer. Furieux. Fulci consulte un psychiatre, le professeur Egon Schwarz et lui confie ses récents problèmes. Ce qu’il ignore, c’est que le spécialiste en question est un serial killer qui va manipuler Lucio Fulci sous hypnose, pour lui faire endosser la responsabilité de ses meurtres, en lui faisant croire qu’il les a commis lui-même.

Du début à la fin, Nightmare Concert sent le rafistolage, les coutures se voient comme le nez au milieu de la figure, la texture de l’image change d’un segment à l’autre, la production quelque peu chaotique se fait ressentir. Lucio Fulci est on ne peut plus convaincant dans les scènes dites dramatiques et le film vaut essentiellement, pour ne pas dire uniquement pour lui. Alors que le mal ne fait qu’empirer et que les meurtres se multiplient autour de lui, le metteur en scène vacille de plus en plus, ses hallucinations violentes l’assaillent sans arrêt. Mais the show must go on et les prises de vues de son nouveau film reprennent malgré tout.

Lucio Fulci en profite pour dénoncer la théorie selon laquelle les films d’épouvante rendraient les individus violents, ou contribueraient à faire de certains des assassins. Alors bien sûr, l’âge d’or du cinéaste est déjà loin derrière et il ne reste rien ou pas grand-chose de celui qui nous a livré L’Enfer des zombies, L’Au-delà, L’Éventreur de New York, Les Quatre de l’apocalypse, L’Emmurée vivante, La Longue nuit de l’exorcisme et bien d’autres…La télévision a pris beaucoup de place en Italie et les budgets se sont réduits comme peau de chagrin. Lucio Fulci a subi de plein fouet le royaume mis en place par Silvio Berlusconi et même celles et ceux qu’il dirige dans la dernière partie de sa carrière n’ont jamais pu rivaliser avec les anciennes distributions dont il bénéficiait. On notera tout de même l’apparition de Malisa Longo (California, Elsa Fräulein SS, Helga, la louve de Stilberg), ce qui fera plaisir aux amateurs de Bis. Comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, il a donc accepté de tenir le premier rôle de Nightmare Concert, ce qui a contribué à la renommée de ce petit bricolage cinématographique tourné en 16mm, au gore bien décomplexé (certaines scènes, comme la décapitation d’un gamin, sont franchement déconseillées aux âmes sensibles) qui laisse place à quelques généreuses poitrines dévoilées et ce de façon purement gratuite, dont l’ironie est aussi mordante que le chat qui bouffe le steak tartare qui sert au réalisateur de matrice créative.

En dépit d’un rythme en dents de scie, de nombreuses longueurs (tout ce qui concerne le tournage des orgies nazies…), d’un montage nawak (on ne compte plus les faux raccords) et d’un final complètement aux pâquerettes, il se dégage un charme naïf de cette entreprise brinquebalante.

LE BLU-RAY

Après une première édition il y a déjà plus de vingt ans chez One Plus One, Nightmare Concert fait peau neuve chez Le Chat (dans le cerveau) qui fume. La jaquette, glissée dans un boîter Scanavo, arbore une photographie de Lucio Fulci, tandis que fourreau cartonné reprend le très célèbre visuel de l’affiche signé Enzo Sciotti. Le menu principal est animé et musical. Version intégrale.

Aux côtés de la bande-annonce, nous ne trouvons qu’une seule intervention, celle d’Antonio Tentori (28’), assistant à la réalisation de Lucio Fulci sur Demonia, mais aussi et avant tout scénariste sur Nightmare Concert et même du Dracula de Dario Argento. Celui-ci se souvient de la genèse du projet (issu de plusieurs téléfilms réalisés pour une anthologie d’horreur, « parrainée » par Lucio Fulci). Antonio Tentori indique qu’il s’est principalement chargé de modifications demandées par le cinéaste, en insérant l’histoire autour du personnage du psychiatre, ce qui a conduit le réalisateur à interpréter son double fictif à l’écran, ce qui ne l’enchantait guère dans un premier temps. Les conditions de tournage, la notoriété du film à l’étranger (« à voir comme un manifeste du cinéma de Lucio Fulci, un Huit et demi fulcien, avec ses défauts évidents, mais aussi du charme »), les différents titres d’exploitation, le casting, la fin originale (heureusement restituée), la distribution limitée en Italie à sa sortie, la critique plutôt négative (euphémisme), le succès de Nightmare Concert en VHS, sont ensuite les sujets abordés un à un.

L’Image et le son

Hum…Ça sent le collage, le rafistolage, la glu, tout ce que vous voulez, mais ça sent bon tout de même, comme le pot de colle Cléopâtre qu’on sniffait à l’école primaire vous voyez ? Nightmare Concert est issu de bouts de téléfilms divers et variés, autrement des stockshots, auxquels ont été ajoutés des scènes (avec Lucio Fulci) tournées pour souder l’ensemble. Le master HD présenté par Le Chat qui fume rend compte de cet aspect bricolé, mais n’en reste pas moins une réussite dans le genre « grindhouse ». Les flous ne sont pas rares, le piqué est aléatoire, tout comme la gestion des contrastes, de la luminosité et le rendu des matières. Nous ne sommes pas ici pour la netteté des détails, surtout lorsque l’hémoglobine emplit l’écran. C’est malgré tout « frais » dans le sens où la palette chromatique est dans l’ensemble froide, ce qui convient parfaitement à l’histoire. La texture argentique est heureusement préservée et bien gérée, le tout restant par ailleurs très propre.

Le mixage sonore DTS-HD MA 1.0 ne fait pas d’esbroufe inutile, mais instaure un confort acoustique indéniable. L’essentiel repose sur les dialogues, ainsi que sur la musique quelque peu frénétique de Fabio Frizzi, qui se recycle d’ailleurs lui-même. Les effets sonores en font des tonnes dans le genre dégueulasse, mais cela s’avère amusant.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Minerva / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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