
MOTHER LAND (Never Let Go) réalisé par Alexandre Aja, disponible en DVD & Blu-ray le 13 février 2025 chez Metropolitan Film & Video.
Acteurs : Halle Berry, Anthony B. Jenkins, Stephanie Lavigne, William Catlett, Percy Daggs IV, Matthew Kevin Anderson, Christin Park, Mila Morgan, Georges Gracieuse, Cadence Compton…
Scénario : Kevin Coughlin & Ryan Grassby
Photographie : Maxime Alexandre
Musique : Robin Coudert
Durée : 1h42
Date de sortie initiale : 2024
LE FILM
Depuis la fin du monde, June protège ses fils Samuel et Nolan, en les confinant dans une maison isolée. Ils chassent et cherchent de quoi survivre dans la forêt voisine, constamment reliés à leur maison par une corde que leur mère leur demande de ne surtout « jamais lâcher. » Car, si l’on en croit June, la vieille cabane est le seul endroit où la famille est à l’abri du « Mal » qui règne sur la Terre. Mais un jour, la corde est rompue, et ils n’ont d’autre choix que de s’engager dans une lutte terrifiante pour leur propre survie…

Après Oxygène, survival dans l’espace destiné à Netflix, avec l’insupportable Mélanie Laurent (encore plus irritante quand elle s’exprime en anglais, c’est dire la performance), Alexandre Aja (né en 1978) repasse par la case cinéma pour son dixième long-métrage (déjà), Mother Land, titre français de Never Let Go. Il remplace au pied levé son confrère Mark Romanek (Photo Obsession – One Hour Photo), reprend le scénario coécrit par Kevin Coughlin et Ryan Grassby, et livre une fois de plus une belle expérience cinématographique. Coproduit et interprété par Halle Berry, Mother Land, titre explicite une fois qu’on a compris où le réalisateur voulait nous embarquer, vaut étonnamment plus pour sa mise en scène, magistrale, que pour son histoire relativement classique, quand bien même le récit tente de nous faire croire le contraire en essayant de perdre le spectateur sur ce qui est réel ou pas. Car, sans trop révéler l’intrigue, Mother Land n’est pas un opus d’épouvante comme les autres ou du moins comme on essaye de nous le vendre. C’est aussi et avant tout le portrait d’une mère surprotectrice, qui (sur)vit avec ses deux fils au milieu de nulle part, comme s’ils étaient les seuls rescapés de la (récente) fin du monde. Menacés par le Mal (avec un grand M), qui prend l’apparence qu’il veut et apparaît à la mère de famille, les trois protagonistes sont en sécurité tant qu’ils peuvent toucher ou être ceinturés par une corde reliée aux fondations de leur demeure en bois. Difficile d’aller plus en avant dans l’analyse de Mother Land, sans spoiler, ce que nous nous refusons de faire depuis toujours. Nous tenterons donc d’aborder les points essentiels, afin de vous laisser le maximum de surprises, puisque Never Let Go est comme le reste de la filmographie du cinéaste, à découvrir absolument.


June et ses deux jeunes fils Nolan et Samuel vivent dans une cabane dans une grande forêt. Selon la mère, une force surnaturelle, « Le Mal », s’est répandue à travers le monde, faisant d’eux les derniers survivants. June est assiégée par des visions que ses fils ne peuvent pas voir, mais n’ont aucune raison de penser qu’elles ne sont pas réelles. La famille passe ses journées à chercher de la nourriture et à chasser pour se nourrir. Pour empêcher le Mal de les toucher, selon June, la famille doit se saisir de cordes attachées à la maison quand ils s’en éloignent.. Les garçons doivent également réciter une prière quotidienne en hommage à la maison, pour la remercier de les protéger du Mal. Un jour, alors qu’ils cherchaient de quoi se nourrir, les frères se disputent jusqu’à ce que Nolan marche intentionnellement sur la corde de Samuel, faisant tomber ce dernier, privé de son lien. Nolan se détache pour tenter de sauver Samuel. Les garçons sont sauvés par June, qui rencontre le Mal, alors sous la forme de sa mère. Alors que Samuel se remet de sa chute, Nolan, commence à douter des affirmations de June. Un hiver brutal oblige la famille à épuiser une grande quantité de nourriture stockée, tout en l’empêchant de cultiver ou de chercher de nouveaux aliments. Pendant ce temps, les visions de la mère s’intensifient. Sentant le mécontentement de ses fils, elle leur raconte son ancienne vie…


Il faut s’armer de patience, car Mother Land prend un peu trop son temps durant la première heure, au point où l’ennuie peut souvent se faire ressentir. Mais Alexandre Aja relance systématiquement la mécanique grâce à sa réalisation virtuose, ainsi qu’à l’investissement de ses trois comédiens principaux. À ce titre, Halle Berry n’a sans doute jamais été aussi crédible et prendre de la bouteille (même si cela se voit à peine physiquement alors que la comédienne approche la soixantaine) a conduit à une maturité de jeu que l’on n’imaginait pas. Sa prestation, difficile, est assez dingue et rarement l’actrice aura été à ce point aussi ambiguë voire glaciale à l’écran. Ses jeunes partenaires, Percy Daggs (Nolan) et Anthony B. Jenkins (Samuel) impressionnent par leur naturel confondant, leur charisme et leur talent, d’autant plus qu’ils tiennent une grande partie du film sur leurs jeunes épaules. Mais malgré tout, LA star de Mother Land est et demeure Alexandre Aja. Sa science du cadre, alliée à la superbe photographie signée Maxime Alexandre, chef opérateur surdoué (The Haunting of Bly Manor) et fidèle collaborateur du cinéaste depuis Haute tension, sans compter un montage au cordeau d’Elliot Greenberg (Smile, Crawl) et de sublimes décors, font du film un objet passionnant à analyser, disséquer et ce en dépit de dialogues à la limite du prêchi-prêcha et d’un rythme un poil poussif dans la première partie.


Un bémol aussi en ce qui concerne les pseudo-twists (dont un qui rappelle furieusement celui d’un film de M. Night Shyamalan, auquel on pense d’ailleurs tout du long), prévisibles pour celles et ceux déjà bien habitués à ce genre particulier où le fantastique s’immisce dans le quotidien. Il faut donc attendre un peu (trop ?) pour que Mother Land prenne enfin son envol et nous emmène sur un terrain angoissant, où le spectateur perd ses repères, en se demandant si ce qui arrive aux personnages est bien réel ou pas. La fin risque d’en laisser plus d’un sur le bas-côté et un nouveau visionnage ne sera pas de trop pour comprendre les enjeux, mais aussi les intentions du réalisateur, qui s’est depuis senti obligé de donner quelques explications sur le dénouement de Never Let Go et de donner les clés sur certains symboles difficiles à interpréter pour certains, à l’instar de la fameuse corde à laquelle les protagonistes sont rattachés tout du long.


On en a déjà trop dit en fait, donc arrêtons-nous là, car Mother Land, thriller paranoïaque et horrifique, mérite qu’on s’y attarde, même s’il ne s’agit pas du meilleur film d’Alexandre Aja, qui on l’espère reviendra à un sujet plus personnel et dont il serait surtout l’initiateur.


LE BLU-RAY
Après le carton de Crawl (près de cent millions de dollars de recette et donc le plus gros succès du réalisateur) revient avec Mother Land, qui n’a guère attiré les foules en dehors des États-Unis où il a tout de même engrangé plus de dix millions de dollars. Metropolitan se charge de la sortie de Never Let Go en DVD et Blu-ray dans nos contrées, où le film n’a intéressé que 114.000 spectateurs. L’éditeur reprend le visuel de l’affiche française d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

Commençons les suppléments par le gros morceau exclusif à cette édition française de Mother Land, à savoir une interview d’Alexandre Aja (46’). Rondement mené et passionnant du début à la fin, cet entretien du réalisateur possède un côté intimiste, puisque celui-ci se livre sur son amour toujours transi pour le cinéma de genre. Pendant plus de trois quarts d’heure, le cinéaste revient longuement sur son arrivée et sa reprise en main de Mother Land, sur ses intentions et ses partis-pris, le casting (ainsi que la grande implication d’Halle Berry, également productrice), les décors, le montage (« un des plus gros challenges du film »), la musique, le tout largement illustré par des images de plateau et du tournage. Attention aux nombreux spoilers, mais celles et ceux qui attendaient des explications sur le pourquoi du comment des scènes centrales de Mother Land pourront obtenir ici de nombreuses clés. Un moment chaleureux et même indispensable pour les amateurs.






La section des bonus présente ensuite une poignée de featurettes promotionnelles (25’ au total), constituées d’images de tournage et de propos de l’équipe (réalisateur, producteurs, acteurs, chef décorateur, directeur de la photographie…), où tout le monde aborde la psychologie des personnages, la construction du décor principal, les conditions de prises de vue, les effets spéciaux, les cascades…




















Ne manquez pas les scènes coupées (6’50), dont certaines avaient déjà été annoncées par Alexandre Aja dans son entretien, qui abordait entre autres la raison de leur éviction au montage. Certaines présentent des effets spéciaux non finalisés et étaient centrées sur les apparitions autour de June.







L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.
L’Image et le son
Fidèle à sa réputation, Metropolitan livre un master HD de toute beauté. La photo du chef opérateur Maxime Alexandre est magnifiquement restituée, les contrastes sont affirmés et tous les partis-pris esthétiques respectés, y compris sur les nombreuses séquences sombres. Le piqué est acéré, les détails abondent aux quatre coins du cadre (très) large (2.11), on en prend plein les yeux (les scènes en forêt de jour sont même assez dingues) et c’est tant mieux ! Une réussite éditoriale remarquable.

Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes DTS-HD Master Audio 5.1, et ce pour les deux pistes proposées, est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances sont efficaces (le grincement du bois, les craquements du parquet) et bénéficient d’un traitement de faveur avec une large ouverture, plongeant constamment le spectateur dans l’atmosphère, avec des silences angoissants dynamités ensuite par une ribambelle d’effets excellemment balancés de gauche à droite et des enceintes avant vers les arrières quand le Mal apparaît. N’oublions pas le caisson de basses, qui se mêle ardemment à ce spectacle acoustique aux effets souvent étonnants sur les séquences opportunes, à l’instar de la confrontation finale dans la maison en feu. Totalement immersif. L’éditeur fournit aussi une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.




Crédits images : © Metropolitan FilmExport / Lionsgate / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr