LES ALGUES VERTES réalisé par Pierre Jolivet, disponible en DVD et Blu-ray (exclusivité FNAC) le 21 novembre 2023 chez Blaq Out.
Acteurs : Céline Sallette, Nina Meurisse, Julie Ferrier, Jonathan Lambert, Pasquale D’Inca, Adrien Jolivet, Clémentine Poidatz, Françoise Comacle…
Scénario : Pierre Jolivet & Inès Léraud, d’après la bande dessinée « Algues vertes, l’histoire interdite » d’Inès Léraud & Pierre Van Hove
Photographie : Olivier Boonjing
Musique : Adrien Jolivet
Durée : 1h47
Année de sortie : 2023
LE FILM
À la suite de morts suspectes, Inès Léraud, jeune journaliste, décide de s’installer en Bretagne pour enquêter sur le phénomène des algues vertes. À travers ses rencontres, elle découvre la fabrique du silence qui entoure ce désastre écologique et social. Face aux pressions, parviendra-t-elle à faire triompher la vérité ?
France 3 Bretagne présente…
Une petite intro pour taquiner, car il est vrai que Les Algues vertes fait rudement penser à un reportage tourné pour la télévision publique, avec les moyens du bord. Dommage d’ailleurs, car l’histoire qui est racontée est somme toute aussi passionnante que troublante, mais cela fait bien longtemps que Pierre Jolivet a renoncé à insuffler une âme ou un style à ses films. Les Algues vertes ne fait pas exception et malgré son sujet grave, ennuie par son didactisme outré, ses dialogues pauvres qui semblent improvisés et son manque de rythme. Pourtant, on parvient à aller jusqu’au bout grâce au charisme magnétique de Céline Sallette (dans un rôle proche de celui qu’elle campait dans l’excellent Rouge de Farid Bentoumi), toujours aussi formidable et qui bénéficie enfin d’un succès personnel au box-office, plus de quinze ans après sa première apparition au cinéma dans Meurtrières de Patrick Grandperret. Les Algues vertes est-il d’utilité publique ? Assurément. Amateur, non, scolaire oui. Un bon film ? Sans doute pas.
Pas moins de 3 hommes et 40 animaux ont été retrouvés morts sur les plages bretonnes. L’identité du tueur est un secret de polichinelle : les algues vertes. Inès Léraud est encore une toute jeune journaliste, quand, animée par une conscience écologique, elle décide d’aller s’installer en Bretagne pour enquêter sur ce phénomène. Au gré de ses rencontres avec des lanceurs d’alerte, des scientifiques, des agriculteurs et des politiques, elle élucide non sans difficultés un demi-siècle de fabrique du silence : des échantillons qui disparaissent dans les laboratoires, des corps enterrés avant d’être autopsiés, des jeux d’influence, des pressions…La vérité vaincra-t-elle ?
Cela ne se passe pas en Corse ou en Sicile, mais l’omerta est de mise en Bretagne quand on évoque les algues vertes. Pierre Jolivet s’en est rendu compte au moment du tournage compliqué dans les Côtes d’Armor, où il a dû avoir recours à la caméra à l’épaule pour filmer sur le moment, pour aller contre les interdictions de prises de vue. Les intérêts de l’industrie agroalimentaire sont très forts dans cette région et Inès Léraud, impeccablement campée par Céline Sallette, devra s’appuyer sur des personnes engagées sur ce combat en local pour le faire reconnaître au niveau national par ses reportages radio. Forcément convaincu que le cinéma peut servir de vecteur ultime pour alerter les consciences, Pierre Jolivet a néanmoins pris le parti de s’adresser aux spectateurs comme à des enfants, en utilisant des dialogues poussifs, sur-explicatifs, redondants, qui donnent souvent l’impression d’être récités, qui sonnent faux et peu spontanés. Le message passe, rien à redire là-dessus, c’est juste que l’ensemble est si platement filmé, figé, neurasthénique, que les mauvais points prennent rapidement le pas sur le reste.
Le très demandé directeur de la photographie Olivier Boonjing (Tout le monde aime Jeanne, Rien à foutre, Lola vers la mer) met la Bretagne en valeur, les couleurs sont belles, les paysages naturels forcément mis en évidence, mais rien ne distingue vraiment formellement Les Algues vertes d’un épisode d’Inspecteur Barnaby ou de Camping Paradis. La musique d’Adrien Jolivet, également présent au casting et qui passe son temps à faire l’aller-retour entre les films de son père et ceux de Robert Guédiguian, paraît aussi en décalage avec ce qui est narré, comme si le compositeur désirait épater la galerie, avec un résultat inapproprié. Outre Céline Sallette, Nina Meurisse, qui incarne la compagne d’Inès, s’en tire bien une fois de plus, Julie Ferrier et Jonathan Lambert étonnent tous les deux dans un rôle à contre-emploi et le reste de la distribution a bien été choisi pour incarner les « gueules » du cru.
En dépit de sa facture télévisuelle, Les Algues vertes a bien entendu fait réagir, à l’instar de Loïg Chesnais-Girard, président du conseil régional, qui a tout simplement refusé que le film soit projeté au conseil régional de Bretagne, malgré la participation de la région au financement du long-métrage de Pierre Jolivet. Alors oui Les Algues vertes n’arrive pas à la cheville des films dossiers du style Dark Waters de Todd Haynes, Eric Brockovich, seule contre tous de Steven Soderbergh, ou même Préjudice de Steven Zaillian, La Fille de Brest d’Emmanuelle Bercot ou du récent et passionnant Goliath de Frédéric Tellier. Le réalisateur n’a pas les mêmes moyens (à peine 4 millions d’euros), mais l’ambition est similaire, ce qui est tout en son honneur car Les Algues vertes aura trouvé son public et contribué à faire bouger les choses, comme la BD d’Inès Léraud et Pierre Van Hove, Algues vertes, l’histoire interdite (publiée en 2019) avait déjà pu le faire.
LE BLU-RAY
Jolie succès dans les salles pour Les Algues vertes, qui a su attirer 400.000 spectateurs, dont un bon tiers rien qu’en Bretagne ! Pierre Jolivet n’avait pas été à pareille fête depuis Je crois que je l’aime il y a une quinzaine d’années. Blaq Out propose donc logiquement ce film en DVD, mais aussi en Haute-Définition (en exclusivité dans les FNAC). Le disque repose dans un boîtier classique de couleur bleue, lui-même glissé dans un sur-étui cartonné. La jaquette reprend le visuel de l’affiche d’exploitation, tout comme le menu principal, fixe et musical.
Étrange choix éditorial de ne proposer qu’un court-métrage, celui de Clode Hingant, intitulé Mona Lisier (12’, 2004). Excellemment interprété par Bernard Farcy et Clémentine Célarié, ce film raconte l’histoire d’un éleveur de porcs, bien décidé à agrandir son élevage mais qui tente de dissimuler son excédent de lisier en le déversant de manière illégale dans un trou. Le réalisateur indique « J’habite dans la région de Brest. J’ai presque toujours vécu à la campagne. Je connais les effluves de fumier, de champignons, voire de charognes ou de végétaux en décomposition, aussi entêtantes soient elles. Au pire, on peut toujours s’en s’éloigner. Mais les campagnes ont bien changé, la production de merde s’est industrialisée sous mes narines. La plupart de mes voisins font dans l’élevage de porcs ou de volailles hors sol. ». Comme pour Algues vertes, Mona Lisier avait suscité la polémique avant même d’avoir été tourné.
Et c’est tout ! Aucun supplément directement lié aux Algues vertes, pas une interview, pas de making of…Dommage…
L’Image et le son
La définition est quasi-optimale et fait la part belle à une magnifique colorimétrie. Ce transfert HD des Algues vertes ne cesse de flatter les mirettes avec un piqué incisif. Les séquences extérieures sont les mieux loties, les contrastes sont denses y compris en intérieur, les détails foisonnent sur le cadre large. Blu-ray au format 1080p.
La piste DTS-HD Master audio 5.1 met en avant de nombreuses ambiances naturelles, qui pointent évidemment sur toutes les séquences en extérieur. Les dialogues sont solidement positionnés sur la centrale, la balance frontale est riche et dynamique. L’éditeur joint également les sous-titres destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste audiodescription et une autre en Stéréo.
Une réflexion sur « Test Blu-ray / Les Algues vertes, réalisé par Pierre Jolivet »