LE FORT DE LA DERNIÈRE CHANCE (The Guns of Fort Petticoat) réalisé par George Marshall, disponible en combo Blu-ray+DVD le 15 septembre 2020 chez Sidonis Calysta.
Acteurs : Audie Murphy, Kathryn Grant, Hope Emerson, Jeff Donnell, Jeanette Nolan, Sean McClory, Ernestine Wade, Peggy Maley…
Scénario : Walter Doniger d’après une idée originale de C. William Harrison
Photographie : Ray Rennahan
Musique : Mischa Bakaleinikoff
Durée : 1h22
Date de sortie initiale : 1957
LE FILM
Afin d’alerter les habitants d’une ville d’une attaque imminente de Comanches, le Lieutenant Frank Hewitt déserte l’armée nordiste. Il réussit à convaincre la population (composée uniquement de femmes) de se réfugier dans une ancienne mine. Pour affronter le chef des Indiens, qui est un blanc renégat, Hewitt entraîne les femmes à se défendre.
Sur Homepopcorn.fr, nous avons souvent parlé du comédien Audie Murphy, avec nos critiques de Sierra d’Alfred E. Green, de Kansas en feu de Ray Enright, de Duel sans merci de Don Siegel, d’A feu et à sang de Budd Boetticher, d’Une balle signée X de Jack Arnold et de 40 fusils manquent à l’appel de William Witney. Nous invitons donc celles et ceux qui voudraient en savoir plus sur le destin hors-normes d’Audie Leon Murphy (1925-1971), qui fut l’un des soldats américains les plus décorés de la Seconde Guerre mondiale, à se rendre sur nos précédents articles qui lui sont consacrés à lui et à ses films. En 1957, l’acteur désormais très bankable, retrouve le réalisateur George Marshall, avec lequel il avait collaboré trois ans plus tôt dans Le Nettoyeur – Destry, remake de Femme ou Démon – Destry Rides Again du même metteur en scène, sorti en 1939, avec Marlène Dietrich et James Stewart. Ce dernier affrontera d’ailleurs Audie Murphy dans Le Survivant des monts lointains – Night Passage de James Neilson. Cette deuxième association Marshall/Murphy s’intitule Le Fort de la dernière chance – The Guns of Fort Petticoat, qui s’avère une très bonne surprise puisqu’il s’agit ni plus ni moins d’un western féministe, dans lequel le comédien semble prendre beaucoup de plaisir à donner la réplique à ses partenaires en jupon. Rétrospectivement, on a même rarement vu Audie Murphy aussi détendu et naturel à l’écran, comme si le fait de se retrouver le seul homme (quasiment) en piste face à ses demoiselles et à ces femmes d’un âge respectable, lui permettait d’exprimer une nouvelle sensibilité et une autre facette de son personnage souvent dramatique et animé de pulsions violentes.
Le Lieutenant Frank Hewitt déserte l’armée nordiste pour alerter la population de l’attaque imminente de comanches en réponse à un massacre perpétré par l’armée. Il convainc une population composée exclusivement de femmes de se réfugier dans une ancienne mission. Hewitt les entraîne à se défendre coûte que coûte face aux indiens dont le chef est un blanc renégat. Encerclés et à 1 contre 10, ils se préparent pour l’assaut final.
Réalisateur prolifique à qui l’on doit près de 200 films, courts, longs métrages et épisodes de séries télévisées mis en scène de 1916 à 1972, George Marshall (1891-1975) a fait ses classes durant le cinéma muet, principalement dans le domaine du western. Egalement auteur de comédies, genre dans lequel il dirigera les plus grands acteurs comme WC Fields, Laurel & Hardy, Jerry Lewis, Bob Hope, George Marshall reste aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands artisans du cinéma hollywoodien. Son western The Guns of Fort Petticoat est un exemple du travail bien fait du cinéaste, qui allie merveilleusement humour, scènes d’action (le film est très généreux en gunfights), émotion et message féministe fin et intelligent, loin des interventions extrémistes contemporaines. Si Audie Murphy est donc impeccable et très classe dans son uniforme de Nordiste qui prend la poussière, ce sont bien les actrices qui se taillent la part du lion dans Le Fort de la dernière chance, parmi lesquelles Hope Emerson. Avec son mètre 88, la comédienne vue dans La Proie (1948) de Robert Siodmak, La Maison des étrangers (1949) de Joseph L. Mankiewicz, Femmes en cage (1950) de John Cromwell et Convoi de femmes (1951) de William A. Wellman crève à l’écran et vole la vedette à chaque apparition dans le rôle de Hannah Lacey, la meneuse « naturelle » du groupe. La belle Kathryn Grant et toutes les femmes qui prennent la pétoire pour affronter les indiens aux côtés d’Audie Murphy sont toutes exceptionnelles dans Le Fort de la dernière chance, qu’elles soient fanatiques religieuses, chanteuses de bastringue, mères ou prostituées. Chacune va apprendre que l’entraide et l’écoute de l’autre est nécessaire pour s’en sortir et faire face à l’ennemi. La longue séquence où le Lt. Frank Hewitt entraîne ses soldats improvisés est un des grands moments de ce film très sympathique.
Le Fort de la dernière chance est un film court (1h20 montre en main), au montage vif, excellemment mis en scène, ponctué par quelques séquences brutales et à la violence étonnamment sèche chez le réalisateur, qui signe à n’en pas douter l’une de ses meilleures œuvres.
LE BLU-RAY
Déjà sorti en DVD chez l’éditeur il y a dix ans, Le Fort de la dernière chance fait son retour chez Sidonis Calysta, cette fois en Haute-Définition dans la collection Silver, en combo Blu-ray+DVD. Le menu principal est animé et musical.
Point de nouveaux suppléments à l’horizon pour cette promotion HD, l’éditeur ayant tout simplement repris les mêmes suppléments réalisés en 2010, à savoir une présentation de Patrick Brion (8’) et une autre de Bertrand Tavernier (28’). Forcément, les propos du second valent plus le déplacement que ceux du premier. Bertrand Tavernier s’exprime franchement sur ce film, qui « s’avère une très agréable et plaisante surprise de la part de George Marshall, dont l’oeuvre n’est pas habituellement pas follement excitante ». Il revient sur une partie de sa longue et prolifique carrière en citant quelques-uns de ses films, souvent placés sous le signe de la comédie, y compris dans les westerns, « George Marshall ayant une fâcheuse tendance à mettre de l’humour partout […] des gags assez lourdingues dont j’ai des souvenirs assez accablés ! ». On ne saurait être plus cash. Néanmoins, Bertrand Tavernier loue la réussite de divers films (Les Piliers du ciel – Pillars of the Sky en 1956), y compris celle du Fort de la dernière chance, qu’il aborde longuement dans une deuxième partie, du casting en passant par le fond historique, les personnages, le scénario « intéressant », la mise en scène, la « légèreté assez gracieuse », la bonne utilisation des décors, la photo peu reluisante, la violence et l’interprétation d’Audie Murphy « un acteur étrange, qui n’avait pas un registre phénoménal, mais qui avait quelque chose d’indéfinissable ». A ce sujet, Bertrand Tavernier se souvient d’un entretien avec John Milius, qui avait justement indiqué qu’il s’agissait « du seul acteur arrivé au vedettariat en tuant », faisant évidemment référence à son tableau de chasse, puisqu’Audie Murphy est resté un des soldats les plus décorés de la Seconde guerre Mondiale après avoir tué un nombre impressionnant d’allemands sur le front.
De son côté, Patrick Brion se focalise surtout sur Audie Murphy, dont il a souvent loué le talent d’acteur (« un des plus grands noms du western »), ainsi que sur ses partenaires dans le film de George Marshall. Ce dernier n’est pas oublié, puisque Patrick Brion expose brièvement les œuvres de ce vétéran.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce française du film
L’Image et le son
A l’instar du DVD sorti en 2010, le premier carton et la scène inaugurale font peur avec des couleurs fanées, très jaunâtres. Il en sera de même sur tous les fondus enchaînés, tout au long du film. Heureusement, tout s’arrange immédiatement avec une palette chromatique rafraîchie (le point fort de cette édition HD), une meilleure stabilité (hormis des plans de nuit qui fourmillement), une texture argentique bien gérée et un piqué agréable. La copie est propre, malgré quelques tâches et pétouilles diverses qui subsistent. Le Blu-ray est au format 1080p.
Que votre choix se porte sur la version originale (avec sous-titres français non imposés) ou la version française, la restauration est également fort satisfaisante. Aucun souffle constaté sur les deux pistes, l’écoute est frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise, plus étouffée, mais le confort acoustique est assuré sur les deux options. Le changement de langue est verrouillé à la volée.