Test Blu-ray / Le Bagarreur, réalisé par Walter Hill

LE BAGARREUR (Hard Times) réalisé par Walter Hill, disponible en DVD et Blu-ray le 22 mai 2020 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Charles Bronson, James Coburn, Jill Ireland, Strother Martin, Margaret Blye, Michael McGuire, Felice Orlandi, Edward Walsh…

Scénario : Walter Hill, Bryan Gindoff, Bruce Henstell

Photographie : Philip H. Lathrop

Musique : Barry De Vorzon

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

L’Amérique de la dépression. Chaney traîne dans les docks d’un port proche de La Nouvelle-Orléans. Au hasard de ses déambulations, il découvre que des combats de boxe clandestins sont organisés par un certain Speed. Ce dernier engage Chaney pour remplacer son poulain. Chaney devient bientôt un champion…

Alors qu’il cartonne en Europe et dans le reste du monde, Charles Bronson ne possède pas le même statut aux Etats-Unis où on le connaît surtout en tant que second rôle grâce aux Sept MercenairesThe Magnificent Seven (1960) et La Grande ÉvasionThe Great Escape (1963) de John Sturges, ou bien encore Les Douze SalopardsThe Dirty Dozen (1967) de Robert Aldrich. En 1974, Un justicier dans la villeDeath Wish de Michael Winner change la donne. Le comédien accède enfin au rang de star hollywoodienne et les films sont désormais montés sur son nom sur le sol de l’Oncle Sam. Tourné après le succulent Mister Majestyk de l’immense Richard Fleischer, Le BagarreurHard Times, ou bien encore The Street fighter, est l’un des premiers longs métrages mettant en Charles Bronson en vedette par les studios. Qui plus est, il s’agit aussi du premier film mis en scène par Walter Hill. En 1968, ce dernier commence sa carrière en tant que réalisateur de seconde équipe sur L’Affaire Thomas Crown de Norman Jewison puis sur le non-moins mythique Bullitt de Peter Yates. Quatre ans plus tard il signe le scénario de Guet-Apens de Sam Peckinpah, d’après le roman de Jim Thompson, qui témoigne de son attrait pour la représentation de la violence sans fioritures. Il passe naturellement derrière la caméra avec ce Bagarreur, film devenu culte et qui a largement contribué au mythe Bronson dans les années 1970.

L’Amérique des années 30, à l’époque de la Grande Dépression. Chaney arrive dans une ville du sud des Etats Unis avec l’intention de chercher du travail. Il assiste à un combat de boxe clandestin, à mains nues. Violent et courageux, il va combattre le champion en titre et se révèle le meilleur. A la recherche d’un nouveau poulain, Speed, manager sans scrupules, le prend sous son aile. Dans les bas quartiers de la Nouvelle-Orléans, ses poings valent de l’or, mais dans ce monde corrompu, Chaney est vite l’objet de sombres magouilles.

En toute honnêteté, Charles Bronson ne fait pas grand-chose dans Le Bagarreur, à part bien sûr jouer des poings et de ce point de vue-là l’acteur assure du haut de ses 54 ans. Mais il est vrai aussi que le comédien a essentiellement bâti sa carrière sur ce genre de personnage quasi-mutique, visage fermé, les yeux plissés passant ses adversaires aux rayons X, léger rictus, capable de se déplacer comme un félin en une demi-seconde. Monstre de charisme, Charles Bronson se fond parfaitement dans le paysage de la Nouvelle-Orléans en 1933. Pour son premier long métrage en tant que réalisateur, Walter Hill soigne sa reconstitution et son film est avant tout très beau à regarder, des costumes aux décors, ainsi que par la superbe photographiée signée Philip H. Lathrop, habituellement chef opérateur attitré de Blake Edwards. La Grande Dépression est omniprésente, sans être appuyée, les conditions économiques et sociales sont représentées à travers les personnages et le thème des combats de boxe clandestins, où tous les coups sont permis pour s’en sortir. Le Bagarreur est certes un film d’action (comme l’indique le titre français), mais pas que. Comme l’indique aussi le titre en version originale, il s’agit aussi et surtout d’un drame sur les plus démunis et les laissés pour compte de l’American Dream. Si Charles Bronson est impeccable dans le rôle-titre, il se fait néanmoins souvent voler la vedette par son ami et complice James Coburn, irrésistible dans le rôle de Speed, manager douteux aux relations dangereuses. Les deux personnages sont représentatifs du cinéma à venir de Walter Hill : un duo mal assorti réuni par le destin, deux hommes qui apprendront à se connaître et à s’estimer après moult péripéties et aventures. Le buddy-movie à son commencement, le tout joliment mis en musique par Barry De Vorzon (Dillinger de John Milius).

Si le rythme est un peu lent, on ne s’ennuie pas devant Le Bagarreur, qui vaut essentiellement aujourd’hui pour le talent et la classe de ses acteurs, ainsi que pour la sèche brutalité de ses combats à mains nues (montage de Roger Spottiswoode) qui inspireront entre autres plus tard Jean-Claude Van Damme pour quelques-uns de ses films. Le réalisateur en profite aussi pour y incorporer déjà quelques éléments propres au western, son genre préféré, à l’instar de la descente du personnage de Charles Bronson dans le bar qui s’apparente alors à un vrai saloon. Autant dire que tout le cinéma de Walter Hill est présent dans ce coup d’essai.

LE BLU-RAY

Il y a vingt ans, Le Bagarreur avait bénéficié d’une sortie en DVD chez Sony Pictures, sans aucun bonus, rien du tout. Depuis, silence radio. Et voilà que débarque le film de Walter Hill en DVD et Blu-ray chez Sidonis Calysta en version intégrale restaurée ! La collection Charles Bronson s’agrandit chez l’éditeur où l’on peut désormais trouver Le Messager de la mort, Un justicier dans la ville 1, 2 et bientôt Le Justicier de New York (que nous avons déjà chroniqué), Le Cercle noir, Les Baroudeurs, sans compter les westerns disponibles comme Le Bison blanc, C’est arrivé entre midi et trois heures, Chino, Les Collines de la terreur, Pancho Villa et Bronco Apache. De quoi se faire plaisir !

Les deux premiers suppléments de cette édition s’avèrent deux entretiens avec Walter Hill. Le premier a été enregistré dans le cadre de la sortie du Bagarreur en Blu-ray en 2017 (21’), l’autre provenant d’un enregistrement réalisé lors de l’invitation de Walter Hill au National Film Theatre de Londres en 1984 (31’35). Les deux interviews se complètent bien, sans véritable redondance. Le réalisateur aborde ses débuts au cinéma en tant qu’assistant, ses références (Raoul Walsh, Howard Hawks, George Cukor, John Ford), sa rencontre avec le producteur Lawrence Gordon, la genèse du Bagarreur, la production du film, ses partis pris, le travail avec le directeur de la photographie Philip H. Lathrop, le casting (au départ, Walter Hill n’était pas d’accord pour confier le rôle principal à Charles Bronson et trouvait James Coburn trop élégant pour son personnage), les conditions de tournage et la sortie du film. Dans la seconde interview, Walter Hill s’exprime également sur les différences entre le tournage en studio et celui en extérieur, le système des studios, et revient sur quelques-uns de ses films comme Le Gang des frères James et 48 heures, tout en répondant à quelques questions posées par le public.

Place au producteur Lawrence Gordon (né en 1936), qui revient à son tour sur son travail avec Walter Hill, sur la genèse du Bagarreur et le succès du film (14’). Les deux hommes et amis feront d’ailleurs sept longs métrages ensemble. Lawrence Gordon, qui venait de faire ses débuts en tant que producteur avec Dillinger (1973), premier long métrage de John Milius, explique comment il a su convaincre Walter Hill, alors réalisateur de seconde équipe sur L’Affaire Thomas Crown et Bullitt, ainsi que scénariste de Guet-apens de Sam Peckinpah, de mettre en scène son premier film. Le casting est aussi évoqué.

Enfin, l’éditeur joint une rencontre avec le compositeur Barry De Vorzon (né en 1934), déjà à l’oeuvre sur Dillinger de John Milius, conseillé à Walter Hill par Lawrence Gordon. Le musicien revient surtout sur sa rencontre avec le réalisateur, avec lequel il collaborera à nouveau en 1979 pour Les Guerriers de la nuit.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Restauration 4K pour Le Bagarreur qui fait désormais peau neuve en Blu-ray. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce lifting lui sied à ravir. Tout d’abord, la copie affiche une propreté incontestable, aucune scorie n’a survécu à l’attention des restaurateurs, la clarté HD et la colorimétrie pimpante, chaude et sépia flattent les rétines. Dès le générique d’ouverture, les contrastes trouvent une fermeté inédite, le piqué est renforcé et les noirs plus denses, les détails sur les décors et les costumes abondent. Le grain argentique est préservé et par ailleurs très bien géré. Certes, quelques plans peuvent paraître plus doux en terme de définition, mais le constat est formel, jamais le film de Walter Hill n’avait bénéficié d’un tel traitement de faveur.

La célèbre bande-originale de Barry De Vorzon est mise en valeur grâce à la piste anglaise DTS-HD Master Audio 5.1. Si les latérales manquent de mordant, quelques ambiances naturelles parviennent à percer, notamment sur les séquences en extérieur, les voix sont claires sur la centrale et la balance frontale dynamique à souhait. Le mixage est propre, fluide, naturel, et même quelques basses parviennent à poindre. Néanmoins, la piste 2.0. devrait contenter les puristes. La version française (au doublage excellent) bénéficie d’un écrin 2.0 plutôt percutant, même si les dialogues sont souvent mis trop en avant.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Columbia / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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