Test Blu-ray / Langue étrangère, réalisé par Claire Burger

LANGUE ÉTRANGÈRE réalisé par Claire Burger, disponible en DVD & Blu-ray le 21 janvier 2025 chez Ad Vitam.

Acteurs : Lilith Grasmug, Josefa Heinsius, Nina Hoss, Chiara Mastroianni, Jalal Altawil, Yuri Völsch, Jakob Diehl, Hermann Beyer…

Scénario : Claire Burger & Léa Mysius

Photographie : Julien Poupard

Musique : Julia Lanoë

Durée : 1h41

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Fanny a dix-sept ans et elle se cherche encore. Timide et sensible, elle peine à se faire des amis de son âge. Lorsqu’elle part en Allemagne pour un séjour linguistique, elle rencontre sa correspondante Lena, une adolescente qui rêve de s’engager politiquement. Fanny est troublée. Pour plaire à Lena, elle est prête à tout.

En 2014 sort sur les écrans Party Girl (Caméra d’Or à Cannes), signé par trois réalisateurs. Claire Burger, Marie Amachoukeli et Samuel Theis, anciens étudiants de la Fémis. Party Girl était le portrait d’une femme qui a voulu toute sa vie préserver son indépendance et refuser de se laisser enfermer, en aimant ses enfants du mieux qu’elle le pouvait et en se laissant aimer par des conquêtes d’un soir, lors de fiestas bien arrosées dans une des boîtes de nuit du coin. Cette comme qui dirait relecture de Stella femme libre (1955) par Michael Cacoyannis avec Melina Mercouri dans le rôle principal, qui racontait l’histoire d’une chanteuse de cabaret, femme fatale qui électrisait chaque soir le public et qui ne sacrifiait rien à sa liberté, ni sa vie, ni ses amours imposait immédiatement un univers particulier, une griffe originale. Depuis, Claire Burger vole de ses propres ailes. Après Ç’est ça l’amour, prix du Meilleur Film aux Venice Days, avec le bouleversant Bouli Laners, la réalisatrice revient avec un troisième long-métrage tout aussi réussi, Langue étrangère, projet qu’elle envisageait depuis de longues années. Un titre ô combien malin, qui évoque bien sûr le séjour linguistique de Fanny, mais qui contient aussi un double sens plus sensuel, car forcément lié aux premiers émois du personnage principal, au bouleversement hormonal et donc physique qui en découlent. Remarquablement mis en scène, Langue étrangère confirme la singularité d’une cinéaste précieuse et révèle deux jeunes comédiennes, deux astres, extraordinaires, magnétiques, Lilithe Grasmug et Josefa Heinsius, que l’on devrait en toute logique revoir et compter dans le panorama cinématographique hexagonal.

On a peur de tout quand on a 17 ans. Peut-être encore plus de nos jours. Les combats à mener sont sans doute plus nombreux que jadis. Les adolescents craignent le futur, de s’engager, des fascistes, de Poutine, de la guerre, du changement climatique, de vieillir, de devenir encore plus lâches, de ne jamais rien changer…et de tomber amoureux comme c’est le cas pour Fanny et Lena. Qui se ressemble, s’assemble. Si les deux jeunes sont opposées physiquement, entre la brune et la blonde, la réservée et la plus téméraire, la vie les réunit et le bouleversement va être total. Arrivées à l’un des premiers carrefours de leur existence, Fanny et Lena vont tout d’abord se « renifler », s’observer, en communiquant peu, mais en se comprenant pourtant immédiatement. Peu importe le pays dans lequel on se trouve, tout le monde est logé à la même enseigne et l’être humain doit apprendre à se développer, à grandir, à mûrir, dans un environnement hostile, où tout le monde essaye de faire en sorte que tout aille pour le mieux. Arrivée à Leipzig, Fanny se retrouve face à Lena, sa correspondante, qui ne souhaitait pas sa venue et qui lui dit ouvertement d’entrée de jeu. Malgré cette apparente hostilité, Fanny est troublée par Lena, qui ne pense qu’à battre le bitume pour protester contre tout ce qui ne va pas. Autrement dit, tout. De son côté, pour conquérir Léna, Fanny, qui pense sûrement être peu intéressante, surtout quand elle se rend compte du feu qui anime Lena, s’invente une vie. L’engrenage est activé.

Langue étrangère est un superbe objet de cinéma. La photographie pastel signée Julien Poupard (Les Amandiers, Bâtiment 5, L’Innocent, Le Prix du succès) est un émerveillement de tous les instants et apporte au récit un aspect intemporel, onirique aussi, qui reflète l’état d’esprit de Fanny, son désir, ses rêves, ses fantasmes. Le scénario de Claire Burger et Léa Mysius (Les Cinq diables, Emilia Pérez, Stars at Noon, Ava) rappelle cette hyper-sensibilité déjà rentrée chez Céline Sciamma, Rebecca Zlotowski, Katell Quillévéré, Mia Hansen-Løve, Alice Winocour, Lucie Borleteau, pour ne citer que ces réalisatrices, une même génération dont l’oeuvre demeure parcourue par le même spleen.

Langue étrangère est indéniablement inspirée par les souvenirs de Claire Burger, (qui possède la double nationalité franco-allemande) qui en profite aussi pour dresser le portrait de la jeunesse d’aujourd’hui, qui ont connu le confinement et subissent la montée des extrêmes, qui tente aussi de se faire entendre dans tout ce marasme, quand bien même les vétérans en politique font la sourde oreille et que leurs parents (comme la mère de Nina, incarnée par la grande Nina Hoss) sont trop occupés à régler leurs problèmes personnels.

On ressort conquis de Langue étrangère, chronique à fleur de peau, sensuelle, délicate, sauvage, étourdissante à plus d’un titre, à laquelle on repense encore bien après. Une très belle et grande réussite.

LE BLU-RAY

Après Party Girl (chez Pyramide Vidéo) et C’est ça l’amour (Blaq Out), le troisième long-métrage de Claire Burger apparaît dans les bacs en DVD et Blu-ray chez Ad Vitam. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur propose la bande-annonce du film, un clip musical (Die Welt in Stücke de Rebeka Warrior, du groupe Kompromat), ainsi qu’une interview croisée de Claire Burger, Lilithe Grasmug et Josefa Heinsius (21’). L’occasion d’en savoir plus sur la genèse de Langue étrangère, sur le casting, les conditions de tournage, les thèmes explorés, la psychologie des personnages, les partis-pris esthétiques…

Le dossier de presse complet est aussi présenté en partie ROM.

L’Image et le son

Le pressage numérique s’en sort avec tous les honneurs. La palette chromatique spécifique est chatoyante tout du long (les bleus sont splendides) et les gros plans ne manquent pas de précision. Les contrastes sont beaux et denses, la luminosité plaisante, les noirs concis et le master immaculé. Très belle photo encore une fois du talentueux chef opérateur Julien Poupard (Party Girl, Voie rapide). Un très beau master, au piqué acéré.

Le confort acoustique est largement assuré grâce au mixage DTS-HD Master Audio 5.1. La musique bénéficie d’une très belle spatialisation, les dialogues solidement plantés sur la centrale et la balance frontale fluide et limpide. Les plages de silence sont impressionnantes, les ambiances naturelles ne sont pas oubliées et les effets annexes sont omniprésents. La piste stéréo est également de fort bon acabit et contentera largement ceux qui ne seraient pas équipés sur les enceintes latérales. L’éditeur joint aussi une piste Stéréo, une autre en audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Les Films de Pierre / Ad Vitam / Captures Blu-ray: Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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