Test Blu-ray / La Vengeance de Siegfried, réalisé par Harald Reinl

LA VENGEANCE DE SIEGFRIED (Die Nibelungen) réalisé par Harald Reinl, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 5 janvier 2021 chez Artus Films.

Acteurs : Uwe Beyer, Karin Dor, Rolf Henniger, Siegfried Wischnewski, Maria Marlow, Hans von Borsody, Terence Hill, Herbert Lom, Fred Williams, Dieter Eppler…

Scénario : Harald G. Petersson, Harald Reinl & Ladislas Fodor

Photographie : Ernst W. Kalinke

Musique : Rolf A. Wilhelm

Durée : 2h42

Année de sortie : 1966

LE FILM

Terminant son initiation chez le nain Mime, Siegfried se forge une épée, et va tuer le dragon Fafnir, se baignant alors dans son sang pour acquérir l’invincibilité. Mais une feuille de frêne se colle sur son dos, lui laissant une partie vulnérable. Il se rend ensuite à la cour des Nibelungen, chez le roi Gunther, où il va tomber amoureux de la belle Krimhilde, la sœur du roi. Ce dernier devant repousser une attaque des Saxons, Siegfried va lui prêter main forte. Ses exploits l’amèneront au statut immortel de héros.

Certains cinéphiles pointus connaissent le diptyque de Fritz Lang réalisé en 1924, La Mort de Siegfried, suivi de La Vengeance de Kriemhilde, inspiré par le mythe allemand des Nibelungen. Une fresque de six heures qui demeure la grande référence sur le sujet. Néanmoins, dans les années 1960, le cinéma allemand décide de revenir à cette légende, la légendaire Chanson des Nibelungen, épopée médiévale composée au XIIIe siècle, narrant entre autres la construction de l’Allemagne. Sur une durée de près de trois heures, pensé en deux actes bien distincts, La Vengeance de Siegfried Die Nibelungen est pour ainsi dire un véritable blockbuster, magistralement réalisé par Harald Reinl (1908-1986), réalisateur mythique, prolifique et éclectique (tous les genres et sous-genres sont représentés dans sa filmographie), passé à la postérité avec Le Retour du docteur MabuseIm Stahlnetz des Dr. Mabuse (1961) et L’Invisible docteur MabuseDie unsichtbaren Krallen des Dr. Mabuse (1962), ainsi que la célèbre série des Winnetou avec Pierre Brice dont il réalisera cinq épisodes, y compris les trois premiers qui populariseront la franchise qui sera constituée au final de douze longs-métrages, une série et un téléfilm. Également l’un des fondateurs du Krimi, autrement dit du polar allemand qui commençait à fleurir dans les salles, Harald Reinl se voit confier cette énorme coproduction germano-yougo-hispano-islandaise, La Vengeance de Siegfried, Première partie : La Mort de Siegfried – Die Nibelungen, Teil 1: Siegfried et La Vengeance de Siegfried, Deuxième partie : La Vengeance de Kriemhild – Die Nibelungen, Teil 2: Kriemhilds Rache. Immense spectacle, bourré de magie, de combats, d’émotions, de conspirations, La Vengeance de Siegfried n’a pas pris de rides et reste toujours aussi efficace et très beau à regarder.

À Worms, capitale du royaume de Burgondie, Ruediger von Bechlarn, margrave de Bavière, arrive en ambassade avec Blo-edin, frère du roi Etzel (Attila en français, à qui Herbert Lom prête ses traits) afin de demander la main de Kriemhild pour le roi mais elle refuse ainsi que le roi Gunther et ses frères, Gernot et Giselher. Cependant Giselher et la fille du margrave Ruediger tombent amoureux, Ruediger consent avec joie à ce mariage. Par la suite, le ménestrel Volker von Alzey, chante les exploits du héros Siegfried de Xanten. Le fils du roi Siegmund de Xanten, termine son apprentissage chez le nain Mime et forge une magnifique épée. Le jeune homme s’apprête à partir. Il apprend que le dragon Fáfnir terrorise la région et décide d’aller le défier dans sa caverne. Il le tue puis suit les conseils d’un oiseau et se baigne dans le sang du dragon qui le rend invulnérable à l’exception d’un endroit de son dos où s’est posée une feuille de frêne. Il s’aventure sur le territoire des Nibelungen et s’empare du trésor volé aux filles du Rhin par le roi des Nains, Alberich, ainsi que du heaume magique qui lui permet de se rendre invisible en prononçant la formule magique. Siegfried se rend ensuite en Islande où il secoure la reine du pays, Brunhild, prisonnière dans un palais rendu inaccessible par le volcan. Elle tombe sous son charme et il lui promet de revenir. Siegfried arrive chez les Burgondes et tombe amoureux de Kriemhild, sœur du roi Gunther. Cependant il aide le roi Gunther à repousser une invasion du roi de Saxe qu’il fait prisonnier, Gunther ne peut alors plus refuser la main de Kriemhild à Siegfried. Un de ses vassaux, Hagen von Tronje, un homme en noir au casque de fer orné de plumes de corbeau fait une proposition, Siegfried épousera Kriemhild s’il aide Gunther à gagner la main de Brunhild, qui impose des épreuves à ses prétendants. Grâce à sa force et à son heaume magique, Siegfried aide Gunther à remporter les épreuves. Défaite, Brunhild est ramenée à Worms, mais résiste la nuit de noces. Là encore, Siegfried, aidé de son heaume, la maîtrise et lui enlève sa ceinture. Siegfried a épousé Kriemhild. Entre elle et Brunhild, qui veut la considérer comme sa vassale, les choses se passent mal. Kriemhild révèle à la nouvelle reine des Burgondes le rôle joué par Siegfried. Outragée, Brunhild réclame à Gunther la mort de Siegfried.

L’épopée de Harald Reinl raconte donc les exploits de Siegfried, prince détenteur du trésor des Nibelungen, pour aider le roi burgonde Gunther à conquérir la main de Brunehilde, puis son mariage avec Kriemhild, la sœur de Gunther. Son assassinat par Hagen initie une longue vengeance menée par Kriemhild et dont l’issue est le massacre des Burgondes sur les rives du Danube. Si la Chanson des Nibelungen s’empare de personnages historiques, il s’agit ici purement et simplement d’un divertissement qui n’a pas la prétention de s’en tenir aux faits réels, mais qui respecte avant tout le folklore, la poétisation, la tradition, la fable et la mystification. Cela passe évidemment par la mise en scène épique sophistiquée d’Harald Reinl, par ses magnifiques décors reconstitués ou naturels (une partie du film a été tourné en Islande), sa somptueuse photographie signée Ernst W. Kalinke, collaborateur attitré de Harald Reinl depuis les années 1950 (La Grenouille attaque Scotland Yard, La Fée du Bodensee, U 47 – Kapitänleutnant Prien, Le Trésor du lac d’argent) et l’élégante composition de Rolf A. Wilhelm. Mais il y a aussi le casting avec tout d’abord l’étonnant Uwe Beyer, athlète allemand spécialisé dans le lancer du marteau, qui peut faire sourire avec ses cheveux blonds permanentés qui ont tendance à changer d’un plan à l’autre, mais qui s’en tire honorablement dans la peau du héros vertueux et téméraire, et qui porte la première partie essentiellement sur ses larges épaules.

Mais celle que l’on retient de La Vengeance de Siegfried c’est Kätherose Derr, dite Karin Dor (1938-2017), impériale et à la beauté foudroyante dans la peau de Brunhild d’Islande. Épouse du réalisateur, la comédienne demeure dans la mémoire des spectateurs pour avoir incarné la sulfureuse Helga Brandt face à Sean Connery dans l’opus de James Bond, On ne vit que deux foisYou Only Live Twice (1967) de Lewis Gilbert. Également apparue dans Caroline Chérie de Denys de la Patellière (1968) et L’ÉtauTopaz (1969) d’Alfred Hitchcock, elle marque La Vengeance de Siegfried de sa présence de façon indélébile. Outre Rolf Henniger, impeccable dans le rôle du roi Gunther de Burgondie et Siegfried Wischnewski, perfide Hagen von Tronje qui assassinera Siegfried, la plupart des spectateurs reconnaîtront sans mal un blond aux yeux bleus, celui qui interprète Giselher, l’un des frères de Gunther. Il s’agit de Mario Girotti, alias Terence Hill, acteur bilingue (fils d’un père italien et d’une mère allemande) qui allait adopter le pseudonyme qui le rendra célèbre dans le monde entier juste après ce film. Dans certains pays, les distributeurs n’hésiteront pas à miser uniquement sur le visage du comédien, surtout après l’explosion de sa popularité grâce à Dieu pardonne… moi pas ! Dio perdona… Io no! de Giuseppe Colizzi, qui sort la même année que le film de Harald Reinl.

Sur un montage vif et soigné, La Vengeance de Siegfried enchaîne les morceaux de bravoure, développe intelligemment ses multiples personnages sans en laisser un de côté et sans aucun temps mort. Malgré sa durée totale de près de trois heures, on ne s’ennuie pas une seconde et on se laisse porter par ces aventures qui par certains côtés peuvent faire penser à un Game of Thrones avant l’heure.

LE MEDIABOOK

Artus Films est l’un des derniers grands guerriers de l’édition française de DVD-Blu-ray à proposer encore et toujours des trésors insoupçonnés ou oubliés, dans de magnifiques objets de collection. C’est encore le cas pour La Vengeance de Siergfried, qui arrive dans une édition limitée Livre + Blu-ray + DVD. Visuel magnifique, estampillé du blason Histoire et légendes d’Europe. Le livret de 80 pages, magnifiquement illustré et intitulé Le Trésor des Nibelungen se compose d’un long et passionnant retour historique (avec quelques cartes à l’appui) écrit par Laurent Schang (Du Ve siècle à aujourd’hui : le long voyage des Burgondes) et d’un portrait du réalisateur Harald Reinl par l’indéboulonnable Alain Petit (Harald Reinl, artisan du cinéma populaire). Dans la première moitié du livret, Laurent Schang aborde les faits historiques liés aux Burgondes, la légende médiévale, la genèse des Nibelungen, la figure héroïque de Siegfried, le sujet abordé au cinéma ou décliné à travers les arts. La seconde moitié du recueil permet à Alain Petit de rendre hommage à Harald Reinl, à travers une bio-filmographie détaillée et qui donne envie de découvrir certaines pépites encore inédites en DVD dans nos contrées. Le menu principal est fixe, muet, et le film présenté dans sa version intégrale.

Pas de supplément en vidéo en revanche…à part un Diaporama d’affiches et de photos.

L’Image et le son

La Vengeance de Siegfried est proposé dans un master restauré 2K. Ce Blu-ray au format 1080p ne déçoit pas et permet de découvrir la fresque d’Harald Reinl dans les meilleures conditions techniques. Le grain est là, la texture argentique se ressent à chaque plan. La propreté est quasi-irréprochable, la stabilité est de mise, c’est superbe sur les séquences diurnes avec une clarté insoupçonnée, un relief des textures et des matières jusqu’alors inédit. Les contrastes affichent une densité remarquable avec des noirs impeccables et les couleurs comme le bleu du ciel et de la mer sont souvent resplendissantes. Les quelques plans flous semblent d’origine. La qualité des gros plans est évidente avec moult détails et un piqué étonnant. Sublime cadre large.

La version originale allemande, dynamique, claire et propre, s’en sort bien mieux que la piste française, plus sourde, incomplète, chuintante, marquée par un souffle chronique, même si quelques cadors du doublage font entendre leur voix mythique comme Michel Le Royer, Lily Baron, Michel Gatineau et Claude Bertrand. Les deux options acoustiques sont proposées en DTS HD Master Audio 2.0.

Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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