
LA TOUR DU DIABLE (Tower of Evil) réalisé par Jim O’Connolly, disponible en Édition Blu-ray + DVD + Livret le 6 juin 2025 chez Rimini Éditions.
Acteurs : Bryant Haliday, Jill Haworth, Mark Edwards, Jack Watson, Anna Palk, Derek Fowlds, Dennis Price, Anthony Valentine, Gary Hamilton…
Scénario : Jim O’Connolly, d’après une histoire originale de George Baxt
Photographie : Desmond Dickinson
Musique : Kenneth V. Jones
Durée : 1h27
Date de sortie initiale : 1972
LE FILM
Deux pêcheurs accostent sur la petite île de Snape Island, où se dresse un phare isolé. Sur place, ils découvrent les cadavres de trois adolescents, ainsi qu’une survivante. Visiblement terrorisée, la malheureuse est conduite dans un hôpital psychiatrique. L’une des victimes, retrouvée empalée par une lance en or phénicienne, provoque la curiosité d’un groupe d’archéologues, qui décident de monter une expédition sur l’île…

La Tour du Diable ou Tower of Evil. Tout est dit dès le titre et le public sait à quoi s’attendre avec cet opus d’épouvante sorti en 1972 et réalisé par un certain Jim O’Connolly (1926-1986), dont il s’agit du seul film édité en DVD-Blu-ray dans nos contrées. À son palmarès, figurent de multiples productions, sa fonction principale, mais aussi les scénarios de quelques épisodes de la série Le Saint avec Roger Moore, sans oublier la mise en scène du Cercle de sang – Berserk! (1967), thriller d’horreur avec Joan Crawford dans un de ses derniers rôles au cinéma, ainsi que de La Vallée de Gwangi – The Valley of Gwangi (1969), production Ray Harryhausen (également à la tête des effets visuels) qui mêle le western et le film de monstres . Il se retrouve à la barre de La Tour du Diable, qui sort alors que l’épouvante made in England est en cours de mutation. En 1972, sortent Dracula 73 d’Alan Gibson avec Christopher Lee, Le Cirque des vampires – Vampire Circus de Robert Young, Capitaine Kronos, tueur de vampires de Brian Clemens, Sueur froide dans la nuit – Fear In The Night de Jimmy Sangster, Straight on Till Morning de Peter Collinson, tous estampillés du sceau de la Hammer Films, tandis que la Amicus présente Histoires d’outre-tombe – Tales from the Crypt de Freddie Francis et Asylum de Roy Ward Baker. Autant dire que La Tour du Diable apparaît déjà désuet à sa sortie et fleure bon le divertissement de genre qui pullulait dans les salles la décennie précédente. Avec ses décors apparents et son « monstre » nawak, Tower of Evil contentera les amateurs, risque de faire sourire les autres spectateurs, mais dans les deux cas le spectacle reste assuré et le charme demeure.


Sur la petite île de Snape Island, perdue au large de l’Écosse et où se dresse un unique phare, deux pêcheurs accostent et découvre le spectacle macabre de trois jeunes adolescents sauvagement assassinés. Seule survivante, Penny, dans un état second, tue un des deux pêcheurs avant d’être maîtrisée et incarcérée dans un institut spécialisé. Son récit des évènements relate des faits de sorcellerie, d’envoûtement et de rituels macabres qui se sont déroulés sur l’île. Intrigués par une lance phénicienne très ancienne trouvée empalée dans le corps d’un des adolescents, une équipe de scientifiques, accompagnée du détective Evan Brent chargé de prouver l’innocence de Penny, décide de se rendre sur place à la recherche d’un trésor dédié à la divinité Baal. Mais ils ignorent qu’un mystérieux tueur rôde sur l’île…


Les comédiens ne sont guère connus chez nous, mais l’expert pourra reconnaître Bryant Haliday (La Poupée diabolique – Devil Doll de Lindsay Shonteff), Jill Haworth (Mutations de Jack Cardiff, Les Mystères de Paris d’André Hunebelle), Mark Edwards (La Momie sanglante – Blood from the Mummy’s Tomb de Seth Holt), Jack Watson (Le Voyeur – Peeping Tom de Michael Powell, Les Loups de haute mer – North Sea Hijack et Les Oies sauvages – The Wild Geese d’Andrew V. McLaglen), Derek Fowlds (Frankenstein créa la femme – Frankenstein Created Woman de Terence Fisher), Dennis Price (Les Expériences érotiques de Frankenstein – La Maldición de Frankenstein de Jess Franco, Horror Hospital – La Griffe de Frankenstein de Antony Balch), pour ne citer que ceux-ci.


Jim O’Connolly plonge ses personnages dans son île de carton pâte, théâtre restreint où les meurtres s’accumulent de façon atroce. Pourtant, ce n’est pas comme s’ils n’étaient pas au courant que ce lieu a toujours été maudit, qu’une précédente « boucherie » s’y est déroulée il y a peu, que les mouettes refusent de s’y poser, bref que Snape Island a toujours synonyme de malheur. Mais que voulez-vous, l’appât du gain est plus fort que tout, alors quand il se trouve que l’île dissimulerait en fait un trésor phénicien lié au dieu de la fertilité Baal, anciennement célébré lors d’orgies rituelles, on oublie facilement l’hémoglobine qui a pu couler. Seulement voilà, Baal est aussi symbole du mal chez les chrétiens et associé au diable. Autant dire que leur visite « en touriste » va mal se dérouler.


Si l’intrigue écrite par George Baxt (Le Cirque des vampires, Le Spectre du chat), par ailleurs bien (pour ne pas dire totalement) remaniée par le réalisateur, se déroule de façon on ne peut plus classique, La Tour du Diable contient son lot de scènes marquantes, à l’instar des scènes d’hypnose, représentées à travers des couleurs psychédéliques et stroboscopiques, ainsi qu’un montage percutant (signé Henry Richardson, Runaway Train, Octopussy, Comtesse Dracula) qui pourraient être déconseillés aux épileptiques. Jim O’Connolly est à son affaire, dirige solidement ses comédiens, la photographie de Desmond Dickinson (Hamlet de Laurence Olivier, L’Homme de Berlin de Carol Reed, Horror Hotel de John Llewellyn Moxey) crée une ambiance inquiétante et suffisamment anxiogène et la musique de Kenneth V. Jones (Phantasm, Tout près de Satan, L’Enfer des tropiques) fait son effet, tout en renforçant un aspect inquiétant qui peut souvent faire défaut au film en raison d’un évident manque de moyens.


Quelques plans boobs gratuits et dans l’ère du temps sont disséminés ici et là, les assassinats sont brutaux (décapitation, corps empalés, crânes fracassés, bref, c’est du slasher avant l’heure), l’humour vient à point nommé pour dire que tout ceci n’est pas aussi sérieux que cela puisse paraître (du genre « on se sépare pour être plus en sécurité ») et le spectacle fonctionne au bout du compte.


LE COMBO BLU-RAY + DVD + LIVRET
Rimini Éditions ne nous laisse aucun répit ! À peine venons-nous de parler de La Nuit des maléfices, que l’éditeur nous envoie le dernier opus en date de sa collection Angoisse, à savoir La Tour du Diable. Le titre était sorti chez Artus Films, en DVD, neuf ans auparavant. Le film de Jim O’Connolly apparaît désormais dans cette précieuse anthologie auxcouleurs rouge sang, les deux disques étant solidement harnachés dans un boîtier Digipack à trois volets (glissé dans un fourreau cartonné), où apparaît également un livret de 24 pages écrit par Marc Toullec. D’ailleurs, en visionnant le supplément d’Éric Peretti, on se rend compte que l’auteur y a puisé l’essentiel de ses arguments, en reprenant certains propos au mot près. La genèse difficile de Tower of Evil, la carrière du réalisateur Jim O’Connolly, le casting, les conditions de tournage et la sortie au cinéma sont entre autres les sujets abordés.


En guise de bonus vidéo, Rimini reprend donc l’excellente et complète présentation de La Tour du Diable par Eric Peretti (25’), déjà disponible sur l’édition Artus. Enregistrée au château médiéval d’Oricourt, situé en Bourgogne-Franche-Comté, en 2016, cette intervention du programmateur au Lausanne Underground Film et Music Festival, ainsi qu’aux Hallucinations collectives de Lyon, revient sur tous les aspects de Tower of Evil et répond à toutes les questions que vous pouviez vous poser sur ce classique du genre. Comme nous le disions plus haut, tout ce qui est dit ici est intégralement repris par Marc Toullec dans son livret. Quitte à choisir, privilégiez le supplément avec Eric Peretti (et ce malgré quelques hésitations), que nous avons toujours beaucoup aimé chez Homepopcorn.

L’Image et le son
Des poussières, des griffures et des points blancs subsistent. Cependant, l’ensemble du master demeure très plaisant pour les mirettes. Les couleurs semblent ravivées (le rouge surtout), la clarté est souvent éloquente, le patine argentique élégante et heureusement préservée. Belle gestion des contrastes, y compris sur les scènes sombres. Le piqué est aussi étonnant sur les gros plans, très détaillés.

Le film est disponible en version originale ainsi qu’en version française DTS HD Master Audio 2.0. Et une fois n’est pas coutume, c’est la langue de Molière qui s’en tire étonnamment le mieux, la VO étant marquée par un léger souffle et manquant singulièrement d’ardeur. Du point de vue homogénéité entre les voix des comédiens, la musique et les effets sonores, la piste française tire son épingle du jeu.


Crédits images : © Rimini Éditions / Grenadier Films / MGM / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr