
HERE – LES PLUS BELLES ANNÉES DE NOTRE VIE (Here) réalisé par Robert Zemeckis, disponible en DVD & Blu-ray le 12 mars 2025 chez M6 Vidéo.
Acteurs : Tom Hanks, Robin Wright, Paul Bettany, Kelly Reilly, Michelle Dockery, Ophelia Lovibond, Beau Gadsdon, Nikki Amuka-Bird…
Scénario : Eric Roth & Robert Zemeckis, d’après le roman graphique de Richard McGuire
Photographie : Don Burgess
Musique : Alan Silvestri
Durée : 1h44
Date de sortie initiale : 2024
LE FILM
À travers les âges et les époques, hommes et femmes défilent dans un lieu unique, sur trois générations. En défiant le temps, ce lieu sera le témoin unique de l’évolution de l’humanité et deviendra le théâtre de vies entremêlées, d’histoires d’amour, de conflits et de découvertes…

C’est un fait, le succès échappe à Robert Zemeckis depuis Flight, sorti aux Etats-Unis en 2012, qui avait récolté plus de 160 millions dans le monde pour un budget étonnamment « dérisoire » de trente millions. Malgré leurs immenses qualités, The Walk : Rêver plus haut, Alliés et Bienvenue à Marwen se sont tous les trois plantés au box-office. Les mal-aimés (à juste titre cette fois) Sacrées sorcières – The Witches et Pinocchio (adaptation live du long-métrage d’animation Disney) ont connu une exploitation limitée, dans les salles pour le premier ou sur la plateforme de Mickey pour le second et l’on attendait patiemment de revoir un film de Robert Zemeckis dans les salles. Une fois ce retour annoncé, quelle ne fut pas notre impatience de retrouver toute l’équipe de Forrest Gump (devant et derrière la caméra) réunie pour une nouvelle expérience de cinéma, propre à son auteur. La déception est de mise et Here – Les Plus belles années de notre vie ne peut rivaliser avec l’ampleur des opus précédents du cinéaste…en ce qui concerne le fond du moins, car force est de constater le 22e long-métrage de Robert Zemeckis possède là encore une bonne longueur d’avance sur ses camarades. Le metteur en scène tant acclamé jadis pour sa trilogie Retour vers le futur et Qui veut la peau de Roger Rabbit, a toujours été à la pointe des effets visuels, à l’instar de la capture de mouvements initiée il y a plus de vingt ans avec Le Pôle express –The Polar Express. Toujours à la recherche de nouveaux outils pour raconter ses histoires, Robert Zemeckis bénéficie ici de l’intelligence artificielle, une technologie baptisée Metaphysic Live, utilisée pour rajeunir ses comédiens (en temps réel sur le plateau), dont les personnages sont suivis de l’enfance à la vieillesse. L’occasion de redécouvrir Tom Hanks et Robin Wright comme si le premier venait de tourner Big et la seconde Princess Bride. Le résultat est bluffant et Here interpelle, passionne par son côté technique, qui laisse pantois d’admiration. Cependant, le bât blesse au niveau du récit, les protagonistes ne sont guère attachants et finalement noyés dans les effets spéciaux (omniprésents), d’autant plus que Here reste en caméra fixe durant près de 100 minutes. En fait, le film ressemble à une attraction qui aurait pu tout aussi bien avoir sa place dans un parc à thèmes (après tout, le cinéma est né dans les foires), à l’instar du Visionarium, longtemps disponible à Disneyland Paris, qui utilisait la technique Circle-Vision 360°, qui parlait aussi du thème du voyage dans le temps. C’est ce même sujet que traite Robert Zemeckis, en prenant comme point de vue celui d’une maison, d’une terre même, de la météorite responsable de l’extinction des dinosaures (si si) à l’hiver d’une poignée de personnages qui vont habiter la majeure partie de leur existence dans une bâtisse, dont le cinéaste va disséquer la mémoire des murs. Dommage que l’émotion manque à l’appel donc. Il faudra sans doute beaucoup de temps pour apprécier pleinement Here (qui nous rappelle A Ghost Story de David Lowery), qui pendant longtemps risque de demeurer un fascinant objet d’étude estimé à 50 millions de dollars (hors promo), qui n’aura rapporté que 16 millions dans le monde et attiré seulement 60.000 spectateurs en France.


Difficile de résumer un kaléidoscope comme Here. On y voit des dinosaures errer dans une région, jusqu’à leur extinction et l’arrivée de l’ère glaciaire. Les lieux abritent un peuple amérindien et l’intrigue suit un homme et une femme, leur relation, leur famille, et finalement la mort de la femme. L’homme aperçoit un colibri, aperçu périodiquement tout au long du film (un écho à la plume de Forrest Gump ?), après l’enterrement de sa femme. La région fait alors partie du domaine de William Franklin, fils illégitime de Benjamin Franklin. Au tournant du XXe siècle, la maison qui devient le cœur de la majeure partie de l’action du film est construite. Ses premiers locataires sont John Harter et sa femme, Pauline. M. Harter, passionné d’aviation, décède plus tard de la grippe espagnole. Parmi les occupants ultérieurs de la maison figurent dans les années 1940, le couple bohème Lee, un inventeur, et Stella Beekman, une pin-up. La famille Young, initialement dirigée par Al et Rose, achète la maison en 1945, après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les Young y élèvent trois enfants : Richard, Elizabeth et Jimmy. Après que Richard, alors âgé de 18 ans, ait mis enceinte sa petite amie Margaret, ils se marient et élèvent leur fille Vanessa dans la maison. Al décide plus tard de céder la maison à Richard et Margaret, au grand dam de cette dernière. Et ainsi de suite.


Here n’a donc pas d’intrigue linéaire, les allers-retours entre le passé et le présent se succèdent, s’interpénètrent au moyen d’écrans scindés, d’incrustations, de collages. Une scène finalement coupée au montage montrait même ce que la maison « devenait » après une apocalypse. Mais Robert Zemeckis a préféré s’arrêter au présent, à 2024, le Covid étant même intégré dans le dernier tiers du récit. Le réalisateur adapte le roman graphique éponyme de 2014 de Richard McGuire, lauréat du Fauve d’or au Festival d’Angoulême 2016, et tente d’en restituer la moelle, mais n’y parvient qu’à de rares moments, vers la fin de son long-métrage, quand le dispositif commence à « s’apaiser », en laissant aux protagonistes le temps de respirer, de prendre chair enfin.


Les images, magnifiquement photographiées par Don Burgess (Aquaman, Source Code), rappellent des poupées russes, où le(s) décor(s) se superpose(nt). Les générations se passent le relais, les joies, les peines, ce qui donne à la vie son caractère précieux sont les sujets traités par Robert Zemeckis, qui à plus de 70 ans maintenant et voyant sa position à Hollywood être sérieusement ébranlée par de multiples échecs successifs, semble accorder une nouvelle importance aux liens affectifs de ses héros, auxquels Tom Hanks, Robin Wright, Paul Bettany et Kelly Reilly essayent de donner corps. Ceux-ci se déplacent désormais dans un cadre restreint, limité, balisé, insufflant son rythme languissant à une comédie-dramatique qui reste indubitablement statique, figée sur place…pendant que le temps passe inexorablement.


LE BLU-RAY
Après un rapide passage dans les salles hexagonales, Here – Les plus belles années de notre vie débarque en DVD et Blu-ray chez M6 Vidéo. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est fixe et musical.

Le premier supplément est une succession de scènes ou de plans coupés au montage (11’). Quelques découvertes étonnantes, à l’instar d’un mammouth se déplaçant dans la glace ou bien cette apocalypse (?) qui devait sans doute terminer le film à l’origine et qui dévoilait la destruction de la maison après un tsunami gigantesque. Quelques fondations de la demeure historique subsistaient ensuite dans un paysage devenu un marais immense.






Le plus intéressant est incontestablement le making of (20’). Sans surprise, Robert Zemeckis, les comédiens, le directeur de la photographie, les responsables des effets spéciaux, le coscénariste abordent le travail avec l’intelligence artificielle, ayant rendu possible le rajeunissement en temps réel, pendant les prises. La réalisation du décor principal, le roman graphique de Richard McGuire, les intentions techniques (« les émotions devaient se refléter dans le regard de la distribution rajeunie »), la création des costumes, des maquillages et des accessoires sont aussi les points abordés.











L’Image et le son
Comme d’habitude, M6 Vidéo soigne son master HD qui se révèle exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, y compris sur séquences tamisées, avec une image sans cesse affûtée. La clarté demeure frappante, le piqué est acéré, les gros plans riches, les contrastes denses et la colorimétrie reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre et la copie restitue les volontés artistiques du chef opérateur Don Burgess. Ce Blu-ray offre de fabuleuses conditions pour découvrir le film de Robert Zemeckis et profiter de la superbe photographie. L’apport HD sur ce titre est évidemment indispensable.

Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1 est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances fusent de tous les côtés, la musique d’Alan Silvestri bénéficie d’un traitement de faveur avec une large ouverture, plongeant instantanément le spectateur dans l’ambiance. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale tandis que les effets ne cessent d’être balancés de gauche à droite, et des enceintes avant vers les arrières.


Crédits images : © M6 Vidéo / SND / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr