FORT MASSACRE réalisé par Joseph M. Newman, disponible en DVD et Combo Blu-ray + DVD le 6 janvier 2022 chez Sidonis Calysta.
Acteurs : Joel McCrea, Forrest Tucker, John Russell, Susan Cabot, George N. Neise, Anthony Caruso, Robert Osterloh, Denver Pyle.…
Scénario : Martin Goldsmith
Photographie : Carl E. Guthrie
Musique : Marlin Skiles
Durée : 1h20
Date de sortie initiale: 1958
LE FILM
La mission du Sergent Vinson est de ramener au fort les survivants d’une colonne de cavalerie qui fut attaquée et décimée par les Indiens. Vinson perd le sens de ses responsabilités et cherche avant tout à satisfaire une vengeance personnelle.
Spécialiste du western de série B, Joseph M. Newman (1909-2006) s’est très souvent démarqué de ses confrères par le caractère insolite de ses œuvres, dont le réalisme étonnant est tout droit hérité de son passé dans le domaine du documentaire. S’il n’est pas, et ne sera jamais, le plus célèbre des réalisateurs, il aura donné au cinéma américain quelques beaux et jolis fleurons de l’entertainment au sens noble à l’instar des Bannis de la Sierra (1952), Dans les bas-fonds de Chicago (1954), Les Survivants de l’infini (1955) et Tonnerre apache (1961) avec une nette prédilection pour le film noir, puis les aventures se déroulant dans le grand Ouest, avant de se tourner vers la science-fiction puisqu’il signera quelques épisodes de La Quatrième dimension dans les années 1960. A l’instar du Shérif aux mains rouges – The Gunfight at Dodge City (1959), pour lequel Joseph M. Newman retrouvera le comédien Joel McCrea, ou La Dernière flèche – Pony Soldier (1952), dans lequel Tyrone Power abordait la dernière partie de sa carrière, avant de disparaître à l’âge prématuré de 44 ans en 1958, Fort Massacre se suit avec un immense plaisir. Le metteur en scène signe probablement l’un de ses chefs d’oeuvre, qui n’a eu de cesse d’être redécouvert et réhabilité par la critique et les cinéphiles. Carré, sec, particulièrement violent et oppressant, Fort Massacre est un western pur et dur qui plaira aux éternels aficionados du genre.
Une unité de cavalerie décimée par les Indiens apaches voit son commandement repris par le sergent Vinson, dernier officier survivant. Hanté par la mort de sa femme et de ses enfants massacrés par les Indiens, et malgré son sous-effectif, Vinson prend le risque d’attaquer un groupe d’indiens puis de s’enfoncer dans leur territoire, causant de lourdes pertes parmi ses hommes.
Sur une durée ramassée, une unité de lieu, de temps et d’action, Joseph M. Newman plonge son audience au milieu d’une poignée de personnages au bout du rouleau, usés, paumés, blessés à la fin de la Guerre de Sécession. On comprend que des officiers ont été tués par des Apaches. Parmi les rescapés, le plus haut gradé est désormais le sergent Vinson (Joel McCrea), qui prend naturellement le commandement des survivants d’une colonne de cavalerie. Son objectif : rapatrier ses hommes et atteindre Fort Crane situé en plein territoire hostile. À cours d’eau, sous la menace constante d’une nouvelle attaque, traqués, Vinson ne souhaite pas vraiment se replier. Traumatisé par la mort de sa femme et de ses enfants, que son épouse a préféré tuer afin que ceux-ci ne soient pas capturés vivants par les Indiens, Vinson perd peu à peu le sens des responsabilités et ses priorités pour mieux assouvir une vendetta personnelle. Désormais, pour ses hommes, le danger ne vient plus des indiens, mais plutôt de leur chef, qui n’a pas l’air de se soucier de les mener à leur perte.
Fort Massacre repose sur un scénario de Martin Goldsmith, l’auteur du légendaire Détour d’Edgar G. Ulmer, Blind Sport de Robert Gordon, Reportage fatal de Joseph Pevney, L’Enigme du Chicago Express de Richard Fleischer, dont on retrouve le style concis et la profondeur psychologique des personnages. Si l’on pense immédiatement à La Patrouille perdue – The Lost patrol (1934) de John Ford, le récit bifurque très vite vers une complexité inattendue pour un western aussi modeste, en outre le portrait d’un homme à qui la guerre a tout pris, son avenir, sa raison d’être, son équilibre mental. Tout en étant probablement conscient de son état, Vinson, véritablement suicidaire, ne peut pas s’empêcher de prendre des décisions inconsidérées et d’envoyer sa troupe au casse-pipe. Parmi ceux-ci, le soldat McGurney, excellement interprété par Forrest Tucker, vu dans Le Cavalier du désert – The Westerner de William Wyler et Les Rôdeurs de l’aube – Rage at Dawn de Tim Whelan, se rend compte que quelque chose cloche chez son supérieur et, s’il est prêt à le concevoir, perçoit aussi le danger que cela représente, au fur et à mesure de leur voyage. De son côté, Vinson récupère les montres sur les cadavres qui jonchent sa route, comme si la multiplication du mécanisme de chaque objet appuyait le compte à rebours final de sa propre existence, la mort étant inéluctable.
Solidement charpenté, aussi convaincant dans les scènes intimistes que durant les séquences d’assauts brutaux, superbement photographié par Carl E. Guthrie (All I Desire de Douglas Sirk, La Nuit de tous les mystères de William Castle), cette production Walter Mirisch (Les Sept Mercenaires, L’Homme de l’Ouest, Deux sur la balançoire, La Grande évasion) exploite à merveille un postulat de départ original, tire profit d’un casting impliqué et charismatique, ainsi que de la beauté sauvage des décors naturels de l’Arizona, de l’Utah et du Nouveau-Mexique, pour marquer indubitablement la mémoire des cinéphiles.
LE BLU-RAY
Dix ans après une première édition en DVD, Sidonis remet en avant Fort Massacre, à la fois en édition Standard, ainsi qu’en combo Blu-ray + DVD, dans la collection Silver. Très beau visuel. Le menu principal est animé et musical.
Pour cette nouvelle édition, Sidonis Calysta reprend la présentation de Bertrand Tavernier. En un quart d’heure, tout y est disséqué. Le fond, la forme, le jeu des comédiens, la direction d’acteurs, les partis-pris esthétiques, l’emploi des décors naturels. Notre Tatav, qui nous manque chaque jour un peu plus, revenait avec une passion contagieuse sur ce qu’il considérait comme étant le meilleur film de Joseph M. Newman. Le réalisateur et historien du cinéma y louait l’originalité du sujet, la qualité du scénario et du dialogue (« très cinglant, laconique, rapide et économe »), replaçait Fort Massacre dans la filmographie du metteur en scène, tout en analysant la psychologie des personnages, notamment celui interprété par John McCrae. Bertrand Tavernier indique aussi que Fort Massacre anticipait alors Fureur Apache de Robert Aldrich.
Même chose, l’éditeur récupère la présentation de Patrick Brion (10’). Ce dernier se penche un peu plus sur la carrière de Joseph M. Newman, en passant en revue quelques-uns de ses opus les plus célèbres, particulièrement des séries B. L’historien du cinéma évoque à son tour les thèmes de Fort Massacre, « sa volonté de réalisme et de naturalisme », en parlant aussi de l’utilisation des décors naturels sauvages, ainsi que du fétichisme du personnage incarné par Joel McCrea pour les montres récoltées sur les victimes.
C’est devenu une habitude, Sidonis a demandé au fidèle Jean-François Giré de présenter Fort Massacre à son tour (13’). Cependant, et c’est là aussi devenu récurrent, ce module n’apporte rien par rapport à ce qui a été entendu précédemment et tout y est même redondant. Jean-François Giré défend ce western avec les mêmes arguments que Bertrand Tavernier et Patrick Brion.
A noter que ces trois bonus sont à visionner absolument si vous connaissez le film, étant donné que la fin y est dévoilée.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Le Blu-ray est au format 1080p. Mais le master HD MGM présenté ici affiche vraisemblablement quelques heures de vol, comme l’attestent les poussières, griffures et points encore présents. C’est plus qu’acceptable, mais il ne faut pas s’attendre non plus à des miracles. Les couleurs manquent d’éclat, les gros plans de détails, la texture argentique d’équilibre et l’ensemble de définition. Franchement, si vous possédez déjà Fort Massacre en DVD, inutile de repasser à la caisse si vous êtes fans du film de Joseph M. Newman. A l’instar du bilan du commissaire Bialès à l’école de police de Nice, ce Blu-ray « est bien, mais pas top ».
Deux pistes DTS-HD Master Audio 2.0 présentées, en anglais et en français. Sans surprise, la première s’avère plus fluide et dynamique que la seconde, plus naturelle aussi bien sûr, avec une belle restitution des dialogues et des effets annexes. La piste française apparaît beaucoup plus couverte et lointaine par moments. Celle-ci manque particulièrement d’ardeur durant les séquences d’affrontements et le confort acoustique y est limité. Les sous-titres ne sont pas imposés.
Bonjour. Presque parfaite votre présentation. Il aurait toutefois fallu évoquer les différences de durée entre les versions DVD et Blu-ray (3 minutes en plus pour ce dernier). Même l’éditeur n’en parle pas dans sa présentation. Et ne comptons pas sur le soporifique P. Brion pour percer le mystère.
Bonjour Alain. C’est normal, la durée d’un film est toujours différente sur un DVD et un Blu-ray 😉 Le DVD est en 25 images par secondes alors que le bluray est au format cinéma 24 images/secondes. Merci pour votre message 🙂