EMANUELLE ET LES DERNIERS CANNIBALES (Emanuelle e gli ultimi cannibali) réalisé par Joe d’Amato, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 7 juillet 2020 chez Artus Films.
Acteurs : Laura Gemser, Gabriele Tinti, Nieves Navarro, Donald O’Brien, Percy Hogan, Mónica Zanchi, Annamaria Clementi, Geoffrey Copleston…
Scénario : Romano Scandariato, Joe D’Amato
Photographie : Joe D’Amato
Musique : Nico Fidenco
Durée : 1h29
Année de sortie : 1977
LE FILM
Travaillant dans un hôpital psychiatrique, Emanuelle découvre un étrange signe tribal tatoué sur le ventre d’une jeune fille. Cette dernière pourrait bien avoir été en contact avec une tribu de mangeurs d’hommes, pourtant supposés disparus de la région. Intriguée, Emanuelle décide de se rendre dans la forêt amazonienne pour y percer le mystère. Elle va y découvrir que les cannibales sévissent toujours, avides de chair fraîche et de boyaux fumants…
Aaaaah Emanuelle, à ne pas confondre avec Emmanuelle (avec deux M donc) puisqu’il fallait faire attention au copyright, mais bel et bien Emanuelle ou plus précisément Black Emanuelle pour ceux qui auront entre autres connu, comme l’auteur de ces mots, la troisième partie de soirée du dimanche sur M6 dans les années 1980-1990. Petits coquins. Suite au triomphe international d’Emmanuelle en 1974, réalisé par Just Jaeckin, avec huit millions d’entrées rien qu’en France où le film restera plus de douze ans à l’affiche, certains producteurs ont de la suite dans les idées. Evidemment, le pays que ce succès affole est l’Italie. Si Erika Blanc avait été la première à interpréter le personnage dans Moi, Emmanuelle – Io, Emmanuelle (1969), la comédienne l’ayant véritablement immortalisé, au point de devenir une icône érotique, demeure la sublimissime Laura Gemser. L’actrice et costumière – même si on la connaît mieux dévêtue – italienne d’origine indonésienne incarnait déjà une masseuse dans Emmanuelle l’antivierge (ou Emmanuelle 2), avant de se voir confier le rôle-titre la même année, 1975 donc, dans Black Emanuelle – Emanuelle nera, ou Black Emanuelle en Afrique, de Bitto Albertini. C’est une explosion. Désormais, Mae Jordan, dite Emanuelle, reporter-photographe devient aussi célèbre que son modèle néerlandais Sylvia Kristel. Née en 1950, Laura Gemser interprétera Emanuelle dans une dizaine de longs-métrages, dont Black Emanuelle en Amérique – Emanuelle in America, Black Emanuelle autour du monde – Emanuelle, Perché violenza alle donne ? et Viol sous les tropiques – Emanuelle e gli ultimi cannibali, tous les trois réalisés en 1977 par Joe D’Amato. Ce dernier est sans nul doute l’un des épisodes les plus ahurissants, inclassables et étonnants de la saga Black Emanuelle. Mélange d’érotisme, forcément, et de gore avec des séquences bien dégueulasses, Emanuelle et les derniers cannibales reste une grande référence pour les amateurs de cinéma Bis, mais aussi pour certains réalisateurs comme Eli Roth qui n’a cessé de l’évoquer lors de la promotion de son génial Green Inferno (2013).
Emanuelle, une jeune journaliste, mène une enquête dans un hôpital psychiatrique où elle se fait passer pour une patiente. Lors d’un incident violent, une jeune malade mord une infirmière. Emmanuelle remarque, sur le ventre de la patiente, un étrange signe tribal. Elle est persuadée que la jeune fille a été en contact avec une tribu de mangeurs d’hommes, même si les autorités affirment qu’ils ont disparu de la région. Emmanuelle décide alors de mener elle-même son enquête au coeur de la forêt amazonienne et de percer ce mystère. Accompagnée entre autres de l’éminent anthropologue Marl Lester, mais aussi d’une nonne et d’une jeune fille de seize ans, elle découvre un monde parfaitement terrifiant peuplé de cannibales avides de sang et de chair humaine…
« Ceci est une histoire vraie rapporté par Jennifer O’Sullivan… »
Emanuelle chez les cannibales, ou bien encore Viol sous les tropiques, Emanuelle and the Last Cannibals pour son exploitation internationale, bref Emanuelle et les derniers cannibales est encore une fois un film de cinglé signé du prolifique Joe d’Amato, l’un des multiples pseudonymes (on lui en prête une bonne cinquantaine) du cinéaste, directeur de la photographie, cadreur et scénariste italien Aristide Massaccesi (1936-1999). Près de deux cents films en 27 ans de carrière (de l’horreur, du porno, du western…), un vrai record, pour un réalisateur qui parvenait parfois à mettre en scène 20 longs métrages en une année. Déjà dans Emmanuelle et Françoise (1975), Joe d’Amato abordait le thème du cannibalisme au cours d’une séquence mythique de boustifaille pas très catholique, même si évidemment gratuite, qui illustrait la psyché chamboulée par la drogue d’un personnage qui perdait alors complètement les pédales. Emanuelle et les derniers cannibales est bien sûr un film réservé à un public savamment averti, devant lequel il n’est pas interdit de prendre son pied devant « l’hénaurmité » de la chose. Joe D’Amato ne recule devant aucune faute de (mauvais) goût pour satisfaire une audience venue voir le film pour cette raison, même si l’érotisme, très élégant, l’emporte sur les scènes sanglantes, pour le coup particulièrement savoureuses.
Ce que l’on pourra essentiellement regretter dans cet épisode, c’est la présence finalement discrète de Laura Gemser dans la deuxième partie du film, la comédienne étant quelque perdue au milieu de ses partenaires qui deviennent pour ainsi dire les personnages principaux. Emanuelle ne fait qu’observer les paysages et ceux qui l’entourent, l’oeil rivé derrière son appareil-photo, tandis que la sexualité s’éveille autour d’elle. Heureusement, le récit se clôt sur une scène nawak qui nous permet de l’admirer sous tous les angles.
Egalement directeur de la photographie, Joe d’Amato soigne la forme de son film avec les moyens mis à sa disposition. Avec son co-scénariste Romano Scandariato, le réalisateur se fait plaisir et connaît suffisamment son boulot pour contenter les spectateurs avides de chair, qu’elle soit exhibée ou mangée crue. Dans les deux cas, la mission est largement remplie.
A Céline Trinci.
LE MEDIABOOK
A peine avions-nous eu le temps de refermer l’édition de Vij ou le diable, que nous nous jetions sur le Mediabook d’Emanuelle et les derniers cannibales ! Une édition Livre+Blu-ray+DVD absolument somptueuse, au visuel clinquant, doux au toucher comme la peau de Laura Gemser…bref, suprêmement élégant. Outre le DVD et le Blu-ray, Artus Films propose cette fois un livret de 64 pages, magnifiquement illustré et surtout passionnant, intitulé Emanuelle au pays du sexe…et du sang, écrit par l’éminent David Didelot, grand complice de l’éditeur. Tel un anthropophage, vous allez dévorer cet ouvrage qui revient pêle-mêle sur Joe d’Amato et quelques-uns de ses films les plus emblématiques, sur Laura Gemser (on sent l’auteur encore très épris de la comédienne), la saga Emmanuelle et donc Black Emanuelle, l’évolution de la franchise italienne et le détour vers le film gore avec entre autres le film qui nous intéresse aujourd’hui. Le livret se clôt sur quelques clichés affriolants…Quant au menu principal des deux disques, il est fixe et musical.
Nous retrouvons monsieur David Didelot pour une présentation en vidéo (21’) du réalisateur Joe d’Amato. Evidemment, le cinéaste comptant à son actif plus de 200 films réalisés en trente ans, le fondateur du fanzine Videotopsie ne peut pas passer toute sa filmographie en revue, mais propose plutôt un large tour d’horizon des genres, des tendances, des motifs récurrents, des expériences filmiques – mêlant très souvent le sexe et le sang – propres au réalisateur. Par ailleurs, rappelons qu’il existe le livre de référence Joe D’Amato : Le réalisateur fantôme, écrit par Sébastien Gayraud, édité par Artus Films si vous désirez en savoir encore plus sur ce grand nom du cinéma Bis. Pour résumer, David Didelot, une fois de plus passionnant, concocte un savoureux portrait de Joe d’Amato, « roi du cinéma d’exploitation à l’italienne », tout en donnant un bel aperçu de sa filmographie labyrinthique et en concluant ce supplément en indiquant « On n’est pas prêt de voir Emanuelle et les derniers cannibales sur Netflix ! ».
L’interactivité se clôt sur un Diaporama et la bande-annonce.
L’Image et le son
Joe D’Amato était avant tout directeur de la photographie. Et mine de rien, comme très souvent chez le réalisateur, Emanuelle et les derniers cannibales est un film qui adopte de beaux partis pris. Artus Films respecte les volontés artistiques originales à travers un master HD restauré 2K correct. La propreté est évidemment au rendez-vous, tout comme la stabilité, même si des poussières diverses et variées, des griffures et des rayures verticales sont visibles ici et là tout du long. L’aspect est souvent sensiblement voilé, l’éclairage luminescent (gros point fort ici), tandis que certaines scènes paraissent légèrement grisâtres ou moins définies avec des visages blafards et une photo plus blanchâtre. Les plans flous sont d’origine. Les stock-shots se voient immédiatement avec une texture argentique beaucoup plus grumeleuse.
En italien (aux sous-titres non imposés) comme en français, le confort acoustique est conséquent avec une excellente restitution des dialogues et de la musique. Pas de souffle constaté, c’est fluide et dynamique, surtout en version originale. Mais offrez-vous tout de même une séance en français, histoire de profiter du doublage bien gratiné.
3 réflexions sur « Test Blu-ray / Emanuelle et les derniers cannibales, réalisé par Joe d’Amato »