Test 4K UHD / Joker: Folie à deux, réalisé par Todd Phillips

JOKER: FOLIE À DEUX réalisé par Todd Phillips, disponible en DVD, Blu-ray & 4K UHD le 12 février 2025 chez Warner Bros.

Acteurs : Joaquin Phoenix, Lady Gaga, Brendan Gleeson, Catherine Keener, Zazie Beetz, Ken Leung, Harry Lawtey, Steve Coogan…

Scénario : Todd Phillips & Scott Silver

Photographie : Lawrence Sher

Musique : Hildur Guðnadóttir

Durée : 2h18

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

À quelques jours de son procès pour les crimes commis sous les traits du Joker, Arthur Fleck rencontre le grand amour et se trouve entraîné dans une folie à deux.

«Joker est un film indépendant, autonome, qui se suffit à lui-même ». C’est ce qu’on avait entendu à sa sortie en 2019…Seulement voilà, Joker a rapporté plus d’un milliard de dollars, le Lion d’Or à Venise, tandis que Joaquin Phoenix repartait lui avec le Golden Globe, le Screen Actors Guild Awards, le British Academy Film Awards, sans oublier l’Oscar du meilleur acteur. Cinq ans plus tard, voilà que débarque dans les salles Joker : Folie à deux, du même Todd Phillips, avec évidemment le même comédien en tête d’affiche. Et c’est un cas d’étude. Pourquoi ? Parce que cette séquelle (le mot est tellement approprié) est fondamentalement anti-commerciale, quand bien même celui-ci a coûté quatre fois plus que le précédent, soit environ 200 millions de dollars. Comme si Todd Phillips avait été lui-même dépassé par le triomphe et l’événement rencontrés par Joker premier du nom, le metteur en scène décide purement et simplement de régler ses comptes, notamment à l’encontre de celles et ceux qui « encensaient » les actes du personnage et qui ne s’intéressaient pas forcément à ses troubles psychiques, un peu comme les midinettes qui défendaient Joe Goldberg dans la série You, sous prétexte qu’il était beau gosse. Joker : Folie à deux n’est pas une antithèse du premier, pas même une suite, mais un épilogue de 140 minutes de Joker. AUCUNE scène spectaculaire ne se démarque ici, puisque Todd Phillips se contente essentiellement d’être dans la tête dérangée d’Arthur Fleck, alors que son procès se déroule devant les caméras et donc devant les yeux du monde entier. C’est alors qu’apparaît Lee Quinzel, qui va tout faire pour que Joker « réapparaisse »…Joker : Folie à deux ne méritait absolument pas la volée de bois vert qui l’a accompagné aussi bien du côté de la critique que du public. Maintenant, on peut comprendre que tout le monde a pu être décontenancé et sans doute déçu, surtout que le tandem Joaquin Phoenix-Lady Gaga promettait du lourd. Mais les intentions et les partis-pris de Todd Phillips ont laissé tout le monde sur le bas-côté et le film n’a même pas pu rembourser son budget colossal. Il faudra du temps pour apprécier Joker : Folie à deux à sa juste valeur, œuvre qui ne saurait être vue « seule ». En y pensant, il faut désormais envisager Joker et Joker : Folie à deux comme un seul et même long-métrage de 4h30. Sans doute la meilleure façon d’appréhender ce faux diptyque.

Trois ans plus tard…Arthur se trouve désormais en détention dans le sombre hôpital psychiatrique Arkham à Gotham City, où il est assommé de médicaments et maltraité par les gardes, en attendant son procès. Son avocate, Maryanne Stewart, prévoit de faire valoir qu’il est atteint d’un trouble dissociatif de l’identité et que le personnage de Joker est responsable des crimes commis. En musicothérapie, Fleck rencontre une autre patiente, Lee Quinzel, qui lui révèle avoir été internée après avoir incendié l’appartement de ses parents et lui dévoile son admiration pour ses actes en tant que Joker. Le substitut du procureur Harvey Dent annonce à la télévision que l’accusé a été déclaré apte au procès et demande alors la peine de mort pour lui, ce qui n’effraie pas ce dernier. Lors d’une projection de film en présence d’Arthur, Lee et du garde abusif Jackie Sullivan, celle-ci allume un feu au fond de la salle. Au milieu du chaos, Fleck et Quinzel tentent de s’échapper mais se font attraper lorsqu’ils escaladent le portail, alors que des journalistes se trouvent de l’autre côté. Arthur est ensuite placé à l’isolement, où Lee lui rend visite pour lui dire qu’elle est renvoyée chez elle à cause de sa mauvaise influence, même si elle promet d’assister à son procès, tandis qu’il lui révèle ne plus prendre ses médicaments. En route pour le palais de justice, Arthur constate la présence de nombreux partisans aux abords ainsi que des médias, ce qui le galvanise. Au premier jour du procès, Dent commence à appeler des témoins qui rejettent les allégations concernant sa folie. Après avoir attendu dehors, Lee finit par entrer dans le tribunal. Lors d’une pause, Maryanne révèle à Fleck que cette dernière s’est faite volontairement internée, n’a pas incendié l’immeuble de ses parents et a fait des études de psychologie, soutenant ainsi qu’elle le manipule…

Il faut d’abord saluer l’introduction cartoon confiée à Sylvain Chomet (Les Triplettes de Belleville, L’Illusionniste), qui reprend le style des Merrie Melodies et reflète la psyché perturbée d’Arthur Fleck, en lutte contre l’ombre du Joker, qui voudrait prendre le dessus et « libérer » Arthur de son mal-être. La réalité est déjà perturbée et reprend ses droits, quand le personnage animé se retrouve passé à tabac par les forces de police. Et c’est là qu’apparaît Arthur Fleck, encore plus amaigri que dans Joker, fumant clope sur clope, marchant comme un pantin, anesthésié par les médicaments. Joker : Folie à deux ne sortira quasiment pas de l’enceinte d’Arkham durant la première heure, puis du tribunal durant la seconde. On en vient à se demander où a pu passer le budget conséquent de 200 millions de dollars, d’autant plus que les numéros musicaux tant décriés n’ont rien d’exceptionnel, surtout pas dans les décors colorés certes, mais peu imaginatifs. Pourtant, il se dégage un charme quasi-désuet de cette entreprise.

Joaquin Phoenix impressionne toujours autant et le tandem qu’il forme avec Lady Gaga (décidément une grande actrice) fonctionne à plein régime. Cependant, ils n’ont pas grand-chose à défendre, l’émotion ne prend pas comme elle le devrait (à part lors de la reprise en anglais de Ne me quitte pas de Jacques Brel), comme si tout restait en surface, feutré, pudique. Nous sommes ici dans les méandres d’un esprit malade (on peut même dire qu’il y en a deux désormais), qui lutte pour retrouver une humanité. Un côté méta s’installe, comme lorsque Arthur reprend le dessus et rejette Joker, qui est ensuite abandonné par ses défenseurs et admirateurs, dont Lee, qui se laisse progressivement « envahir » par Harley Quinn. Comme les spectateurs qui ont déserté les salles en découvrant que Joker devenait alors un second rôle, laissant ce pauvre type rachitique en lutte permanente avec ses problèmes et arrivé au bout du rouleau.

Rien de sexy donc, même si Arthur Feck reste un personnage fascinant à disséquer. Il est on ne peut plus complexe d’émettre un avis sur Joker : Folie à deux, drame psychologique audacieux (pour ne pas dire suicidaire) et fausse comédie musicale « de super héros », film malade (dans tous les sens du terme), honteusement nommé aux Razzie Awards (dans sept catégories…), qui mérite indéniablement plusieurs visionnages (de la même façon que le mal-aimé Glass de M. Night Shyamalan, auquel on peut aisément le comparer), ne serait-ce que pour se rendre compte que le véritable Joker, celui que tout le monde connaît à travers les comics, n’est pas celui que l’on croit, mais pourrait bien être celui qui se taillade les lèvres dans l’ultime (arrière) plan du film, de façon floutée, tandis qu’Arthur paraît apaisé pour la première fois de sa vie. Autrement dit la dernière seconde de son existence.

LE 4K UHD

Échec monstrueux dans les salles mondiales, Joker : Folie à deux a tout de même réussi à franchir la barre du million d’entrées en France, un des « meilleurs » scores enregistrés par le film. Warner Bros. s’occupe évidemment du service après-vente en proposant l’oeuvre de Todd Phillips en DVD, Blu-ray, 4K UHD et 4K Ultra HD + Blu-ray – Boîtier SteelBook limité. Le menu principal pour chaque édition est fixe et musical.

En ce qui concerne les suppléments, nous trouvons un peu d’1h10 de bonus en vidéo.

Le gros morceau (44’) est par ailleurs divisé en plusieurs chapitres et s’avère un making of bien complet, qui s’étend du premier au 81e et dernier jour de tournage. L’ensemble est composé d’images de tournage, d’interviews diverses et variées (Todd Phillips, les comédiens, les producteurs, le directeur de la photographie…) qui n’évitent pas le côté redondant de l’exercice promotionnel. Cependant, les propos sont sincères, puisque tout le monde s’accorde en déclarant que Joker : Folie à deux n’est certainement pas la suite à laquelle les spectateurs peuvent s’attendre.

Les autres modules présents, d’une durée de 5’, 6’, 7 et 8’, se focalisent sur les conditions de prises de vues des numéros chantés (en direct, sans playback), la création des décors, l’utilisation et la signification des couleurs au fil du récit et donc de l’évolution du personnage d’Arthur Fleck, sans oublier la participation de Sylvain Chomet, qui s’est vu confier le dessins-animé qui ouvre Joker : Folie à deux, grâce à une connaissance à la Cinémathèque Française de Todd Phillips.

L’Image et le son

Warner Bros. semble repousser une fois de plus les limites de l’UHD avec cette magnifique édition 4K – HDR Dolby Vision de Joker : Folie à deux. Todd Phillips et son chef opérateur Lawrence Sher (Black Adam, Godzilla : Roi des monstres) ont privilégié une patine délicate et léchée durant 2h20, des partis-pris merveilleusement rendus. C’est un sans-faute technique : relief, colorimétrie volontairement atténuée et basée sur des teintes grisâtres et sombres (des costumes en passant par les décors), piqué (chirurgical), contrastes (ébouriffants), densité des noirs, on en prend plein les yeux. Les teintes froides s’allient avec les gammes chatoyantes des séquences oniriques (sans oublier l’explosion de couleurs de la scène d’exposition créée par Sylvain Chomet), et chaque détail aux quatre coins de l’écran est aussi saisissant qu’étourdissant. Ce transfert immaculé soutenu par une compression solide comme un roc laisse pantois d’admiration. Un disque UHD de démonstration. Notons que le ratio tend à changer sur certaines séquences pensées pour l’IMAX. Édition 4H UHD – HDR10 et Dolby Vision.

Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise et française Dolby Atmos est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances fusent de tous les côtés, mais cela retombe dès l’ouverture du rideau sur le « monde réel », autrement dit le véritable quotidien d’Arthur Fleck. Il faut attendre les digressions musicales pour réveiller la casbah (et le spectateur aussi peut-être), chaque morceau bénéficiant heureusement d’une large ouverture, plongeant instantanément le spectateur dans l’ambiance, ou plutôt dans la folie des deux personnages principaux. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale tandis que les effets interviennent à bon escient. Le caisson de basses se manifeste à quelques reprises, notamment lors de l’explosion inattendue.

Crédits images : © Warner Bros. / DC Comics / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.