Test DVD / Histoire d’aimer, réalisé par Marcello Fondato

HISTOIRE D’AIMER (A mezzanotte va la ronda del piacere) réalisé par Marcello Fondato, disponible en DVD le 27 juin 2017 chez ESC Editions

Acteurs : Claudia Cardinale, Vittorio Gassman, Monica Vitti, Giancarlo Giannini, Antonella Dogan, Renato Pozzetto, Giovanna Gentile, Paola Maiolini

Scénario : Marcello Fondato, Francesco Scardamaglia

Photographie : Pasqualino De Santis

Musique : Guido De Angelis, Maurizio De Angelis

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Gabriella Sansoni est une femme au caractère effacé, menant une vie monotone. Son mari, Andrea, ne lui prête aucune attention, totalement accaparé par son travail. Ce rythme est rompu par la convocation de Gabriella comme jurée. Elle doit siéger au procès d’une jeune femme, Tina, accusée d’avoir tué son mari, Gino. L’accusée est en prison depuis trois ans…

Dans les années 1970, une dizaine de grands noms font les beaux jours du cinéma italien avec les comédies de Dino Risi, Luigi Comencini, Ettore Scola, Mario Monicelli et consorts. Souvent, il n’est pas rare de retrouver le même acteur ou la même actrice à l’affiche de plusieurs films la même année. Mais l’une des spécialités italiennes était également d’associer plusieurs comédiens afin de mieux attirer l’audience dans les salles. C’est le cas d’Histoire d’aimer, titre français d’A mezzanotte va la ronda del piacere, réalisé par Marcello Fondato (1924-2008) en 1975, qui réunit à l’écran Monica Vitti, Claudia Cardinale, Giancarlo Giannini et Vittorio Gassman ! Une sacrée belle affiche pour un film somme toute banal et qui ne vaut vraiment que pour ses acteurs.

Pour Andrea (Vittorio Gassman), brillant ingénieur, le couple parfait est un homme qui décide et une femme qui exécute docilement. Mais bientôt sa femme Gabriella (Claudia Cardinale) est requise comme jurée au procès d’une jeune femme, Tina (Monica Vitti), accusée du meurtre de son mari Gino (Giancarlo Giannini) après qu’une de leurs disputes quotidiennes ait cette fois mal tourné. Il faut dire que Gino, quasi-clochard et obsédé sexuel, saute sur tout ce qui bouge et n’hésite pas à mettre quelques claques à Tina si celle-ci fait part de son mécontentement. Même s’ils ont de drôles de manières de se le dire, Tina et Gino s’aiment. Seule femme dans le jury, Gabriella croit en l’innocence de Tina. Parallèlement, elle prend conscience de sa position au sein de son propre couple, ce qui éveille en elle le désir de s’émanciper et de tenir tête à Andrea, qui se sert d’elle pour de basses besognes, comme répondeur téléphonique afin de filtrer les appels d’organismes à qui il doit beaucoup d’argent.

En plein âge d’or, le cinéma italien enchaîne les tournages. Soyons honnêtes, le film ne bénéficierait pas d’un tel casting, Histoire d’aimer serait probablement tombé dans le tout-venant avec son intrigue qui fait du sur-place, ainsi que son manque de rythme et de surprises qui a souvent raison de notre patience. L’exceptionnel quatuor de stars assure évidemment le spectacle, notamment Monica Vitti, qui présente sa défense du début à la fin et dont le témoignage s’imbrique à travers quelques flashbacks. Ainsi, plongé dans son passé, le personnage s’adresse parfois directement à la caméra comme si Tina regardait le juge au moment où elle relate ces faits. Le gros problème d’Histoire d’aimer est surtout sa mise en scène très paresseuse. On ne peut pas dire que Marcello Fondato ait vraiment marqué le cinéma italien, même s’il avait démarré sa carrière aux côtés de Luigi Comencini et de Mario Bava et si ses films avaient un grand succès à l’instar de Nini Tirebouchon avec Monica Vitti (dont les caprices n’ont eu de cesse de pousser à bout le cinéaste au fil de leurs tournages successifs) ou Attention, on va s’fâcher ! avec le duo mythique Terence Hill et Bud Spencer. Marcello Fondato passera le reste de sa carrière à écrire quelques Bud Spencer movies aux titres amusants, Mon nom est Bulldozer, Le Shérif et les Extra-Terrestres, Faut pas pousser, Capitaine Malabar dit La Bombe.

Même si Histoire d’aimer se penche parfois sur les violences conjugales (Monica Vitti se prend des dizaines de baffes, mais c’est supposé faire rire), le ton est trop léger et le récit répétitif. Cette comédie vaut donc pour le cabotinage de Vittorio Gassman et de Giancarlo Giannini, la beauté et la sensibilité de Monica Vitti et de Claudia Cardinale, ainsi que pour le génie de ces quatre monstres du cinéma.

LE DVD

Le DVD d’Histoire d’aimer est disponible chez ESC Editions, dans la collection intitulée Edizione Maestro, consacrée aux grands maîtres du cinéma italien, dont certains films inédits sont même proposés en Haute-Définition ! La jaquette centrée sur Giancarlo Giannini et Monica Vitti est très attractive et le verso montre tous les titres déjà ou bientôt disponibles dans cette superbe collection ! Le menu principal est fixe et muet. Aucun chapitrage. La jaquette indique que le film n’est jamais sorti en France, ce qui est faux. Histoire d’aimer a bien été exploité dans les salles hexagonales et sorti le 6 avril 1977.

Nous rappelons que cette collection sortira dans les bacs en trois vagues. La première, celle déjà chroniquée dans nos colonnes, est sortie le 28 mars 2017 : Le Prophète de Dino Risi (Blu-ray et DVD), Brancaleone s’en va-t-aux Croisades de Mario Monicelli (Blu-ray et DVD), Moi, moi, moi… et les autres d’Alessandro Blasetti (DVD) et Bluff – Histoire d’escroqueries et d’impostures de Sergio Corbucci (DVD). La seconde vague, celle que nous explorons ici, est sortie au mois de juin et nous trouvons les titres suivants : Les nuits facétieuses d’Armando Crispino et Luciano Lucignani (Blu-ray et DVD), Le Canard à l’orange de Luciano Salce (Blu-ray et DVD), Les russes ne boiront pas de Coca Cola de Luigi Comencini (DVD) et Histoire d’aimer de Marcello Fondato (DVD). Il faudra attendre le mois de septembre pour compléter sa collection avec Il Gaucho de Dino Risi (Blu-ray et DVD), Belfagor le magnifique d’Ettore Scola (DVD), Sais-tu ce que Staline faisait aux femmes ? de Maurizio Liverani (DVD) et Tant qu’il y a de la guerre, il y a de l’espoir d’Alberto Sordi (DVD).

Le fidèle Stéphane Roux présente une fois de plus le film qui nous intéresse (9’). Grand spécialiste du cinéma italien, l’historien ne manque pas d’informations concernant la production d’Histoire d’aimer et raconte entre autres le calvaire enduré par le réalisateur Marcello Fondato en raison des caprices de Monica Vitti. Si cette dernière était très amie avec Claudia Cardinale, cela n’empêchait visiblement pas la comédienne de vouloir tirer la couverture, se renseignant par exemple sur le costume de sa partenaire, afin de mieux choisir le sien pour attirer les regards. Stéphane Roux évoque quelques situations houleuses, notamment Vittorio Gassman, pour qui le rôle de Gino avait été écrit, qui a tout simplement refusé de donner la réplique à Monica Vitti suite à un précédent tournage qui s’était avéré désastreux. Les rôles ont donc été inversés avec son partenaire Giancarlo Giannini.

L’interactivité se clôt sur une succession de bandes-annonces des douze films que comptera la collection Edizione Maestro.

L’Image et le son

Aïe, aïe, aïe…Alors…si la copie s’avère propre et stable, ce master s’avère complètement usé du point de vue des contrastes et des couleurs. La copie demeure terne du début à la fin, l’image est bien trop sombre, la définition ne trouve jamais d’équilibre, les flous ne sont pas rares, la gestion du grain est aléatoire et le piqué est sans cesse émoussé. En 2005, Histoire d’aimer avait été édité en DVD chez Seven7 Editions, mais ne proposait le film qu’en version française. Si nous pouvons enfin bénéficier de la piste italienne, force est de constater que le master semble avoir été dégoté dans un tréfonds de catalogue. Seules les poussières ont été éradiquées et rien ne nous permet d’apprécier les partis pris du grand chef opérateur Pasqualino De Santis, illustre directeur de la photographie à qui l’on doit les images inoubliables de Mort à Venise, Les Damnés, Une journée particulière ou bien encore L’Innocent. Quant au reste, le cinéphile devra faire preuve de beaucoup d’indulgence.

En italien comme en français, les pistes mono 2.0 s’avèrent plutôt bien nettoyées et offrent des conditions acoustiques suffisantes. Notons l’absence de souffle intempestif, mais la musique apparaît vacillante, les voix demeurent un peu sourdes et les saturations inévitables sur les dialogues plus poussés. Bien que le doublage soit assez réussi (Dominique Paturel prête sa voix à Vittorio Gassman), rien ne remplace le timbre original et si particulier de Monica Vitti. Signalons également un problème récurrent chez l’éditeur concernant les sous-titres. Tous les mots comprenant les lettres « œ » ne semblent pas être pris en compte. Ainsi « soeur » apparaît « sur », « coeur » devient « cur », etc…Enfin, la traduction laisse à désirer puisque les sous-titres suivent la version française, qui prend souvent de grandes libertés avec le récit, et non pas les dialogues originaux !

Crédits images : © R.T.I. S.P.A. / ESC Editions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Dans la forêt, réalisé par Gilles Marchand

DANS LA FORÊT réalisé par Gilles Marchand, disponible en DVD le 20 juin 2017 chez Pyramide Vidéo

Acteurs : Jérémie Elkaïm, Timothé Vom Dorp, Théo Van de Voorde, Mika Zimmerman, Sophie Quinton, Mireille Perrier

Scénario : Gilles Marchand, Dominik Moll

Photographie : Jeanne Lapoirie

Musique : Philippe Schoeller

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Tom et son grand frère Benjamin partent en Suède retrouver leur père pour les vacances d’été. Tom appréhende les retrouvailles avec cet homme étrange et solitaire. Le père, lui, semble convaincu que Tom a le don de voir des choses que les autres ne voient pas. Quand il leur propose d’aller vers le Nord pour passer quelques jours dans une cabane au bord d’un lac, les enfants sont ravis. Mais l’endroit est très isolé, au milieu d’une immense forêt qui exacerbe les peurs de Tom. Et plus les jours passent, moins le père semble envisager leur retour…

Gilles Marchand est avant tout scénariste. Il y a vingt ans, il signe Les Sanguinaires et Ressources humaines (1999) de Laurent Cantet. En 2000, il fait aussi une rencontre déterminante avec le réalisateur Dominik Moll pour lequel il écrit le scénario de Harry, un ami qui vous veut du bien, grand succès public et critique dans le monde entier. Tout en continuant sa collaboration avec divers metteurs en scène, tels que Jean-Paul Rappeneau pour Bon voyage et Cédric Kahn pour Feux rouges, Gilles Marchand passe lui-même derrière la caméra pour son premier long métrage, Qui a tué Bambi ? (2003), avec Laurent Lucas et Sophie Quinton. Il faudra attendre 2010 pour découvrir son deuxième film, L’Autre monde, très bon thriller à la frontière du fantastique, coécrit avec Dominik Moll, avec au casting Louise Bourgoin, Melvil Poupaud, Grégoire Leprince-Ringuet et Pauline Etienne. Malheureusement, même si très réussi, L’Autre monde ne remporte aucun succès dans les salles. Coauteur de Main dans la main et de Marguerite et Julien de Valérie Donzelli, Gilles Marchand revient avec son troisième long métrage, Dans la forêt, coproduit par la réalisatrice de La Guerre est déclarée et par Jérémie Elkaïm, tandis que Dominik Moll coécrit le scénario une fois de plus.

Tom, 8 ans, sent une présence maléfique. Son frère Benjamin, 11 ans, ne le croit pas. Ensemble, ils doivent rejoindre en Suède leur père qu’ils n’ont pas beaucoup vu depuis qu’il a divorcé de leur mère. Insomniaque, celui-ci leur propose de partir en excursion en forêt. Il veut se rendre dans une maison perdue dans les bois. D’emblée, les enfants ne se sentent pas bien et sont de plus en plus effrayés par le comportement étrange de leur père. Quand ils lui demandent de s’en aller, celui-ci voit rouge et jette au feu le téléphone de Benjamin. Il sait que Tom a un don et qu’il perçoit des choses invisibles pour le commun des mortels.

C’est une claque comme il en arrive rarement dans le film de genre français. Dans la forêt joue avec les peurs liées à l’enfance, celles du croquemitaine, comme une version moderne du Petit Poucet, mais pas seulement. Film à la croisée de genres, drame psychologique imprégné d’une aura fantastique, Dans la forêt ne cesse de faire perdre ses repères aux spectateurs, comme à ses jeunes personnages, afin de mieux les plonger dans un univers étouffant et angoissant, à l’instar de cette forêt pourtant sublime qui se referme progressivement sur ses protagonistes de façon angoissante. Inspiré des propres souvenirs d’enfance du cinéaste, liés à de nombreux voyages faits avec son frère pour rejoindre leur père dans un pays étranger, Dans la forêt peut également se lire comme une relecture de La Nuit du chasseur et surtout de Shining avec ce petit garçon – Timothé Vom Dorp vu dans Le Fils de Jean de Philippe Lioret et Ce sentiment de l’été de Mikhaël Hers, incroyable de justesse – qui aurait un don de médium. Comme il l’indique à un psy pour enfants, Tom a « peur de comment ça va se passer » chez son père en Suède. Et il s’agit plus d’un pressentiment que d’une appréhension. Le récit se déroule ensuite lentement, à hauteur d’enfant, où chaque plan, chaque cadre ne cesse d’engloutir le spectateur, sans oublier la beauté de la photographie de Jeanne Lapoirie (8 femmes, Michael Kohlhaas) et la composition de Philippe Schoeller. De plus, Gilles Marchand offre son meilleur rôle à Jérémie Elkaïm. Habituellement monocorde et peu expressif, le comédien est ici incroyablement inquiétant, impressionnant et ambigu. Chaque regard noir ou chaque réplique glaciale font ici l’effet d’une guillotine, tandis qu’une menace semble se rapprocher des enfants et de Tom en particulier. Mais d’ailleurs d’où vient-elle ? Et quel est ce monstre étrange que seul Tom semble apercevoir ? Est-ce juste le fruit de son imagination ? Que veut réellement le père ?

Des questions, on s’en pose beaucoup tout au long du film. Félicitons Gilles Marchand, metteur en scène décidément trop rare, de ne pas y répondre et surtout de laisser son audience se faire sa propre interprétation. Dans la forêt est une œuvre à connaître absolument et gageons qu’un excellent bouche-à-oreille entre cinéphiles lui offrira une seconde vie. Ce qu’il mérite amplement.

LE DVD

Le test du DVD de Dans la forêt, disponible chez Pyramide Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical et le visuel de la jaquette reprend celui de l’affiche du film.

Dommage de ne pas trouver de making of dans la section des suppléments, tout comme de commentaire audio. Car l’interview scindée en quatre chapitres (42’ au total) de Jérémie Elkaïm et de Gilles Marchand s’avère absolument riche et passionnante. L’acteur et producteur d’un côté (du canapé), le scénariste et metteur en scène de l’autre, reviennent sur la genèse de Dans la forêt, l’écriture du scénario avec Dominik Moll, les thèmes, la part de mystère dans le film, le point de vue des enfants, le casting, les repérages et les lieux de tournage, le travail avec la directrice de la photo Jeanne Lapoirie, la création du monstre et enfin le rapport avec le spectateur. Si comme nous, vous avez adoré Dans la forêt, ne manquez pas cet entretien, également illustré par des photos de tournage et des images provenant des essais en vidéo des deux jeunes comédiens.

La bande-annonce du film est également au programme.

L’Image et le son

Compte tenu de son inadmissible échec dans les salles, Dans la forêt ne dispose pas d’une édition HD. Heureusement le DVD est de fort bonne qualité et permet d’admirer le travail de la directrice de la photographie, Jeanne Lapoirie, avec sa belle luminosité, des couleurs superbes et ses contrastes duveteux toujours plaisants sur toutes les scènes en forêt. Si les séquences sombres dénotent par rapport au reste avec un léger fléchissement de la définition, des noirs tirant sur le bleu et un piqué plus émoussé, les scènes diurnes sont agréables avec des détails plus ciselés sur le cadre large, une profondeur de champ appréciable, un léger grain et des visages plus précis.

Le mixage Dolby Digital 5.1 est très souvent bluffant. Le spectateur est happé dans cette étrange forêt aux côtés des personnages, grâce au soutien constant des enceintes latérales qui environnent l’audience avec de multiples ambiances naturelles. Les voix sont solidement ancrées sur la centrale, la balance frontale est dynamique. D’une précision sans faille, dense, dynamique, le confort acoustique est largement assuré. La Stéréo est par définition frontale, mais de fort bon acabit. Les sous-titres français pour les spectateurs sourds et malentendants sont également disponibles.

Crédits images : © Pyramide Distribution / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Le Canard à l’orange, réalisé par Luciano Salce

LE CANARD À L’ORANGE (L’anatra all’arancia) réalisé par Luciano Salce, disponible en Blu-ray et DVD le 27 juin 2017 chez ESC Editions

Acteurs : Ugo Tognazzi, Monica Vitti, Barbara Bouchet, John Richardson, Sabina De Guida, Antonio Allocca

Scénario : Marc-Gilbert Sauvajon, Bernardino Zapponi d’après la pièce de William-Douglas Home

Photographie : Franco Di Giacomo

Musique : Armando Trovajoli

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Mariés depuis 10 ans, Lisa et Livio, riches et célèbres, s’aiment et habitent une belle villa au bord de la mer. Au cours d’une conversation, Livio apprend par hasard que Lisa l’aurait trompé avec un playboy milliardaire et cette nouvelle le frappe de plein fouet. Livio désire cependant passer pour un mari moderne et libéré et invite son rival à passer un week-end chez eux. Pour susciter la jalousie de Lisa, il propose à sa jolie secrétaire de se joindre à eux…

L’immense Monica Vitti a eu une autre carrière à côté des films, pour ne pas dire chefs d’oeuvres de Michelangelo Antonioni, L’Avventura (1960), La Nuit (1961), L’Eclipse (1962) et Le Désert rouge (1964). Si elle demeure très célèbre auprès des cinéphiles pour cette association, la comédienne a également fait les beaux jours de la comédie en Italie dès la fin des années 1960. Citons pêle-mêle La Femme écarlate de Jean Valère, Drame de la jalousie d’Ettore Scola, Super témoin de Franco Giraldi, ou bien encore Moi, la femme de Dino Risi dans lequel elle interprète une douzaine de personnages différents dans autant de sketches. Le Canard à l’orangeL’Anatra all’arancia, pour lequel l’actrice a reçu le David di Donatello de la meilleure actrice ainsi que le Ruban d’argent, est réalisé en 1975 par Luciano Salce (1922-1989). Cinéaste aujourd’hui oublié par la critique et les spectateurs, ses comédies ont pourtant attiré un large public pendant près de 35 ans. Luciano Salce a surtout oeuvré avec son grand ami Ugo Tognazzi pour Mission ultra-secrète, Elle est terrible et Les Heures de l’amour, pour ne citer que trois de leurs collaborations, bien que ces films n’aient guère laissé de souvenirs. En revanche, Le Canard à l’orange reste un film culte.

Le long métrage de Luciano Salce est l’adaptation de la pièce de théâtre originale de William Douglas Home, The Secretary Bird, créée en 1967 et très vite transposée dans le monde entier, y compris en France où elle fut jouée par Jean Poiret à la fin des années 1970, sous la direction de Pierre Mondy. Véritable vaudeville, Le Canard à l’orange est du pain béni pour les deux monstres du cinéma transalpin, Monica Vitti et Ugo Tognazzi. Vraisemblablement en parfaite osmose, le couple se renvoie la balle avec virtuosité pendant 1h45, ne laissant pas un moment au spectateur pour souffler. Par ailleurs, s’il n’a jamais brillé pour son sens de la mise en scène, Luciano Salce est bien obligé de suivre le rythme infernal des réparties lancées par son duo vedette, véritables typhons humains, qui non seulement amusent les spectateurs du début à la fin, mais prennent également un évident et contagieux plaisir à jouer cette partition.

Livio Stefani, riche publiciste d’une quarantaine d’années, vit depuis dix ans un bonheur parfait avec sa femme Lisa, même si cela ne l’empêche pas d’avoir quelques aventures à droite à gauche. Cependant, quand il apprend que Lisa en fait de même de son côté et se serait même entiché d’un français plein aux as, Livio voit rouge, mais tente de se contenir. Alors que Lisa annonce partir en weekend avec « Jean-Claude », Livio réplique en disant qu’il vit la même chose avec sa secrétaire Lisa, qui ne brille guère par son intelligence, mais qui a « les plus belles fesses qu’il a pu voir dans sa vie ». C’est alors que Livio propose à Lisa d’inviter leurs amants respectifs afin de passer un bon week-end. Ceux-ci ne tardent pas à arriver.

Evidemment, Le Canard à l’orange est un vrai marivaudage, fait de portes qu’on ouvre et que l’on ferme, de répliques vachardes aux sous-entendus grivois. Le film montre un couple qui s’aime et qui continue de s’aimer, mais qui a peut-être oublié la façon de se le dire ou de le faire comprendre. Ils se prêtent alors à un jeu qui peut paraître dangereux, mais on comprend très vite que la flamme est bel et bien encore présente et que tout est fait pour rendre l’autre jaloux. La maîtresse, Patty, est interprétée par la sculpturale Barbara Bouchet, une fois de plus peu avare de ses charmes qu’elle expose à de nombreuses reprises. La séquence de la piqûre d’abeille est l’une des plus drôles du film et on ne se lasse pas de regarder Monica Vitti passer de la crème hydratante sur les fesses de l’actrice, après que cette dernière se soit fait martyriser avec une pince à épiler. Le playboy français est quant à lui incarné par John Richardson, vu dans Le masque du démon de Mario Bava et Torso de Sergio Martino.

Ce quatuor s’en donne à coeur joie. Le Canard à l’orange est une grande comédie, simple, mais redoutablement efficace, que l’on regarde autant pour passer un très bon moment et que pour admirer le talent de ses comédiens.

LE DVD

Le DVD du Canard à l’orange est disponible chez ESC Editions, dans la collection intitulée Edizione Maestro, consacrée aux grands maîtres du cinéma italien, dont certains films inédits sont même proposés en Haute-Définition ! La jaquette centrée sur la divine Monica Vitti est très attractive et le verso montre tous les titres déjà ou bientôt disponibles dans cette superbe collection ! Le menu principal est fixe et muet.

Pour information, cette collection sortira dans les bacs en trois vagues. La première, celle déjà chroniquée dans nos colonnes, est sortie le 28 mars 2017 : Le Prophète de Dino Risi (Blu-ray et DVD), Brancaleone s’en va-t-aux Croisades de Mario Monicelli (Blu-ray et DVD), Moi, moi, moi… et les autres d’Alessandro Blasetti (DVD) et Bluff – Histoire d’escroqueries et d’impostures de Sergio Corbucci (DVD). La seconde vague, celle que nous explorons ici, est sortie au mois de juin et nous trouvons les titres suivants : Les nuits facétieuses d’Armando Crispino et Luciano Lucignani (Blu-ray et DVD), Le Canard à l’orange de Luciano Salce (Blu-ray et DVD), Les russes ne boiront pas de Coca Cola de Luigi Comencini (DVD) et Histoire d’aimer de Marcello Fondato (DVD). Il faudra attendre le mois de septembre pour compléter sa collection avec Il Gaucho de Dino Risi (Blu-ray et DVD), Belfagor le magnifique d’Ettore Scola (DVD), Sais-tu ce que Staline faisait aux femmes ? de Maurizio Liverani (DVD) et Tant qu’il y a de la guerre, il y a de l’espoir d’Alberto Sordi (DVD).

A l’instar des autres titres de la collection, ESC Editions propose une présentation du Canard à l’orange par Stéphane Roux, historien du cinéma (10’). Notre interlocuteur s’intéresse surtout à la pièce de théâtre à l’origine du film, mais aussi et surtout au réalisateur et à ses comédiens. On y apprend entre autres que Dino Risi a longtemps été attaché au projet avec les comédiens George Segal et Monica Vitti dans les rôles principaux, avant que le cinéaste abandonne finalement le projet. Seule la comédienne est restée à bord. Stéphane Roux défend également Luciano Salce, metteur en scène méconnu, touche à tout, qui a rencontré de grands succès dans le registre de la comédie populaire. Plus amusant, l’historien du cinéma ne peut cacher son admiration pour la sublime Barbara Bouchet et prend son temps d’évoquer sa carrière.

L’interactivité se clôt sur une succession de bandes-annonces des douze films que comptera la collection Edizione Maestro.

L’Image et le son

Jusqu’alors inédit en DVD, Le Canard à l’orange bénéficie d’une image médiocre, comme si le master avait été sauvé à temps. Ce sont surtout les premières séquences qui font peur avec un générique marqué par des griffures, des couleurs ternes, des tâches et points. Heureusement, la plupart de ces défauts tendent à se faire plus discrets, à moins que nos yeux s’y habituent, mais l’image demeure tout de même aléatoire. La clarté est évidente, mais les visages tirent parfois sur le rose-orangé. Quelques moirages s’invitent à la partie, un bruit vidéo reste présent et la définition peine à trouver un équilibre. Le grain original est présent, mais les contrastes manquent de densité. Il faut donc faire preuve de beaucoup d’indulgence, car ESC Editions a sûrement fait son possible pour nous proposer cette comédie aussi rare que très réussie, afin de satisfaire au mieux les cinéphiles.

La bande-son et les dialogues du Canard à l’orange, proposés en Dolby Digital 2.0, manquent parfois de naturel. Les effets sonores sont discrets et l’ensemble de ce mixage repose avant toute chose sur les très nombreux dialogues du film. Une petite résonance se fait entendre tout comme de légères saturations. En revanche, ce mixage ne manque pas d’ardeur et les quelques accrocs constatés ont tendance à s’amenuiser au fil du film. Les voix y sont beaucoup plus posées et claires, tandis que la musique (qui connaît quelques fluctuations) est bien mise en valeur par de belles envolées. Notons que les sous-titres s’avèrent verrouillés sur un lecteur de salon, mais pas sur un PC. Signalons également que ces sous-titres sont placés trop hauts et que la police épaisse gâche souvent le visionnage.

Crédits images : © R.T.I. S.P.A. / ESC Editions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Indignation, réalisé par James Schamus

INDIGNATION réalisé par James Schamus, disponible en DVD le 15 juin 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Logan Lerman, Sarah Gadon, Tracy Letts, Ben Rosenfield, Melanie Blake Roth, Tijuana Ricks, Pico Alexander, Noah Robbins

Scénario : James Schamus d’après le roman Indignation de Philip Roth

Photographie : Christopher Blauvelt

Musique : Jay Wadley

Durée : 1h46

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Alors que la guerre de Corée fait rage à l’autre bout du monde, le jeune Marcus Messner compte parmi les heureux élus qui ne doivent pas accomplir leur service militaire. Avec la bénédiction de son père, boucher, et une bourse de sa synagogue en poche, il quitte son New Jersey natal pour une université conservatrice de l’Ohio. De nature timide et marginale, l’intégration à la faculté du jeune homme se passe moyennement. En cause : le refus de Marcus de rejoindre la seule association d’étudiants juifs du campus et d’y rechercher activement de nouveaux amis. Il préfère se consacrer corps et âme à ses cours, jusqu’au jour où il tombe sous le charme de l’énigmatique Olivia Hutton. Celle-ci, dès leur premier rendez-vous, s’adonne à un acte sexuel qui n’en finit pas de troubler Marcus.

Indignation est le premier long métrage de James Schamus, célèbre producteur et scénariste, qui a notamment collaboré avec Ang Lee sur tous ses films depuis 1992, entre autres Tigre et Dragon, Raison et sentiments, The Ice Storm, Le Secret de Brokeback Mountain et même le mal-aimé Hulk. Présenté en section parallèle à la Berlinale en 2016, Indignation est l’adaptation du roman éponyme de Philip Roth, paru en 2008. 28e livre de l’écrivain, Indignation est le second volume du cycle romanesque intitulé Nemesis, comprenant également Un homme (2007), Le Rabaissement (2011) et Némésis (2012). L’action se déroule en 1951. Un jeune américain d’origine juive, Marcus Messner, quitte son environnement familial à Newark, dans la banlieue de New York, pour aller étudier dans l’Ohio au Winesburg College. Enfant sage et étudiant modèle, Marcus Messner voit sa vie basculer lorsqu’il se retrouve confronté aux angoisses irrationnelles de son père, au conservatisme moral et religieux en vigueur à l’université et à sa propre passion amoureuse pour une jeune fille charmante et intelligente mais au comportement sexuel instable. Et si instable voulait tout simplement dire éveillé ?

Récit initiatique et d’émancipation, histoire d’amour troublée et troublante, éveil sexuel, défense du libre-arbitre, critique d’une société antisémite, Indignation brasse de nombreux thèmes. Il y a de très belles choses dans ce film. Tout d’abord les comédiens. Bien qu’âgé de 25 ans, Logan Lerman a déjà plus de quinze ans de carrière. Vu dans Ce que veulent les femmes de Nancy Meyers et The Patriot de Roland Emmerich en 2000, le jeune acteur s’est ensuite illustré dans Le Nombre 23 de Joel Schumacher et 3 h 10 pour Yuma de James Mangold en 2007, avant de se voir confier le rôle-titre des deux opus de la franchise Percy Jackson. Devenu très demandé par les cinéastes, dernièrement chez Darren Aronofsky dans Noé et David Ayer dans Fury, Logan Lerman est non seulement la vedette d’Indignation, mais également le producteur. A ses côtés, la délicieuse Sarah Gadon, révélée au cinéma par David Cronenberg dans A Dangerous Method (2011) et revue chez le même cinéaste dans Cosmopolis (2012) et Maps to the Stars (2014). Dernièrement à l’affiche de La 9ème vie de Louis Drax d’Alexandre Aja et aux côtés de James Franco dans 22.11.63, la minisérie adaptée du chef d’oeuvre de Stephen King, Sarah Gadon illumine Indignation de sa beauté diaphane. L’alchimie entre les deux comédiens et leur immense sensibilité ne peuvent laisser le spectateur indifférent.

Cependant, Indignation demeure un film très bavard, pour ne pas dire trop écrit. Si la séquence de la confrontation entre Marcus et le doyen de l’Université s’avère percutante, certains échanges sonnent faux et manquent de spontanéité. Les personnages sont attachants, mais la mise en scène peine à donner du rythme. Qu’importent si certaines questions restent en suspens, comme ce qui arrive réellement à Olivia, cela ne fait que renforcer l’émotion de ces amours contrariées et complexes, mais James Schamus se contente trop souvent de poser sa caméra et d’observer ses protagonistes. Ainsi, la séquence dont nous parlions entre Marcus et le proviseur n’est filmée qu’en champs-contrechamps, le montage adoptant le rythme des répliques envoyées de part et d’autre.

Rien à redire sur la direction d’acteurs et la reconstitution des années 1950 est aussi discrète que réussie. On est souvent ému par cette histoire grâce au talent des comédiens, mais le spectateur peut décrocher quand le film s’éloigne du couple principal pour évoquer les relents d’antisémitisme et la question de la religion au sein du campus. Certes, Indignation n’évite pas le côté mélodramatique, linéaire et académique du « film indé américain », malgré tout l’histoire ne tombe jamais dans le pathos. En dépit de quelques points faibles, Indignation ne manque pas d’élégance et laisse un beau souvenir.

LE DVD

Disponible chez M6 Vidéo et arrivant directement dans les bacs sans passer par la case cinéma, Indignation n’est guère mis en valeur par l’éditeur avec une jaquette trop sobre et peu attractive. L’éditeur aurait peut-être gagné à mettre en avant Logan Lerman, connu des jeunes spectateurs, alors que les deux comédiens apparaissent dissimulés derrière une vitre embuée. Le menu principal est dans le même ton, animé, musical, un peu triste.

Pour cette sortie technique, l’éditeur joint deux petites featurettes de 6 minutes chacune, composée des propos de Logan Lerman, Sarah Gadon, Tracy Letts, du réalisateur James Schamus et de la chef costumière Amy Roth. Aucune image de tournage à se mettre sous la dent ici, les propos des intervenants se contentent de présenter les personnages, les thèmes du film, l’adaptation du roman de Philip Roth et la reconstitution des années 1950.

L’Image et le son

Pas d’édition Blu-ray pour Indignation, qui doit se contenter d’une sortie basique en DVD, heureusement de bon acabit. Mais il est dommage de ne pas profiter de la très belle photographie du chef opérateur Christopher Blauvelt (The Bling Ring, Night Moves) en Haute-Définition. Le piqué n’est jamais pris en défaut, les contrastes sont très beaux (beaucoup de couleurs sombres et boisées), la profondeur de champ appréciable et la colorimétrie très classe. Le seul bémol provient de certaines séquences sombres et tamisées. La définition flanche quelque peu, les détails sont moins conséquents et la gestion des noirs est un poil plus déséquilibrée.

Indignation n’est pas vraiment le film avec lequel vous pourrez épater la galerie et faire une démonstration de gros son. Les versions française et anglaise sont certes proposées en Dolby Digital 5.1, mais les latérales ne servent réellement qu’à instaurer quelques ambiances naturelles et à spatialiser la musique du compositeur Jay Wadley. Deux pistes Stéréo, très dynamiques, sont également disponibles.

Crédits images : © M6 Vidéo / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / L’Enfer au-dessous de zéro, réalisé par Mark Robson

L’ENFER AU-DESSOUS DE ZÉRO (Hell Below Zero) réalisé par Mark Robson, disponible en DVD le 23 mai 2017 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Alan Ladd, Joan Tetzel, Basil Sydney, Stanley Baker, Joseph Tomelty, Niall MacGinnis

Scénario : Alec Coppel, Max Trell, Richard Maibaum d’après le roman de Hammond Innes

Photographie : John Wilcox

Musique : Clifton Parker

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1954

LE FILM

Lorsque son père capitaine est porté disparu en Antarctique, sa fille Judie Nordhall part immédiatement à sa recherche. En chemin, elle rencontre un ancien officier de la Navy, Duncan Craig. Ce dernier, qui tombe immédiatement sous le charme de la jeune femme, s’engage comme matelot sur le baleinier qui doit effectuer les recherches.

Entre Les Bérets rouges de Terence Young et La Brigade héroïque de Raoul Walsh, Alan Ladd trouve le temps de tourner un petit film d’aventures bien connu des cinéphiles, L’Enfer au-dessous de zéroHell Below Zero, produit par Albert R. Broccoli, bien avant qu’il ne lance la saga James Bond. Au sommet de sa carrière, le comédien sort du triomphe du western L’Homme des vallées perduesShane de George Stevens. En dehors de ses deux collaborations avec le cinéaste Delmer Daves sur L’Aigle solitaire (1954) et L’Or du Hollandais (1958), Alan Ladd ne parviendra jamais à retrouver les faveurs du public. Il sombre progressivement dans l’alcool et les médicaments jusqu’à sa mort prématurée en 1964 à l’âge de 50 ans.

L’Enfer au-dessous de zéro est un divertissement désuet réalisé par le canadien Mark Robson (1913-1978), ancien monteur de Jacques Tourneur sur La Féline et Vaudou, mais aussi d’Orson Welles sur La Splendeur des Amberson. Eclectique, mais aussi inégal, on lui doit Le Champion avec Kirk Douglas (1949), Le Procès avec Glenn Ford (1955), Plus dure sera la chute avec Humphrey Bogart (1956), ainsi que deux films de guerre très célèbres, L’Express du colonel Von Ryan avec Frank Sinatra (1965) et Les Centurions avec Anthony Quinn et Alain Delon (1966). L’un de ses derniers films, Tremblement de terre (1974) demeure l’un des fleurons du genre catastrophe. Bon technicien, Mark Robson s’en tire honorablement derrière la caméra sur L’Enfer au-dessous de zéro, même s’il n’est pas aidé par des transparences omniprésentes et surtout très mal fichues, ainsi que par l’utilisation de maquettes visibles et rudimentaires, sans oublier des décors en carton-pâte supposés représenter l’Antarctique. Tout est fait pour nous faire croire qu’Alan Ladd déambule sur le pont d’un baleinier, mais malgré les efforts de l’équipe des effets spéciaux, cela ne fonctionne pas. Mark Robson incruste des images très impressionnantes, pour ne pas dire horribles, provenant d’un documentaire sur la chasse à la baleine, qui pourraient encore heurter les défenseurs de la cause animale et les spectateurs les plus sensibles.

L’histoire ne manque pas d’attraits. Le Baker, un navire de Bland Nordhal Whaling company signale la disparition en mer de son capitaine, Bernd Nordhah, qui se serait suicidé. Aussitôt informés, Judie, la fille du disparu et son associé John Bland s’envolent pour l’Antarctique dans l’espoir de retrouver sa trace. Sur le chemin Judie fait la connaissance de Duncan Craig, un ancien officier de la Navy à qui elle confie sa crainte que son père ait pu être assassiné. Séduit, Duncan se fait embaucher comme premier matelot sur le baleinier où Judie embarque. Le médecin du bord, que l’ivresse rend bavard, lui raconte que Nordhal a très certainement été victime de son associé et ancien fiancé de Judie. La magie du Technicolor opère, mais L’Enfer au-dessous de zéro vaut essentiellement pour la prestation d’Alan Ladd, élégant, sourire en coin, regard de velours, qui n’hésite pas à donner du poing et qui s’en sort d’ailleurs pas mal dans les bagarres. A ses côtés, l’actrice Joan Tetzel, vue dans Le Procès Paradine d’Alfred Hitchcock, qui a peu tourné pour le cinéma, se révèle charmante et l’alchimie fonctionne avec son partenaire. Le badguy, c’est le vénéneux Stanley Baker avec sa trogne taillée à la serpe, qui tient la dragée haute à Alan Ladd et qui s’avère parfait en salaud de service.

L’Enfer au-dessous de zéro reste un spectacle agréable, qui se laisse agréablement suivre grâce au talent de ses comédiens, à ses nombreuses péripéties sur les eaux glacées de l’Antarctique et à son petit souffle romanesque.

LE DVD

Le DVD de L’Enfer au-dessous de zéro, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Comme pour ses titres western et polars, l’éditeur a confié la présentation de L’Enfer au-dessous de zéro à l’imminent Patrick Brion (7’). L’historien du cinéma évoque le tournage du film en Angleterre et ne cache pas son plaisir d’avoir revu Alan Ladd à l’écran en avouant que cela faisait longtemps qu’il n’avait pas visionné un long métrage avec le comédien. Brion revient rapidement sur le statut de star de l’acteur, tout en donnant quelques indications sur le réalisateur Mark Robson et l’usage des stockshots.

Sidonis nous gratifie ensuite d’un documentaire rétrospectif sur Alan Ladd réalisé en 1998 et intitulé Le Véritable homme tranquille (57’). Constitué d’archives personnelles, de photos, de films de famille, d’extraits, de bandes-annonces d’époque, ce module croise également les interventions – doublées par une voix-off française – de quelques acteurs (Lizabeth Scott , Mona Freeman, Peter Hansen, Paricia Medina), réalisateurs (Edward Dmytryk), d’historiens du cinéma et de proches (David Ladd, le fils du comédien). La réalisation est classique, comme une illustration en images de la fiche Wikipédia d’Alan Ladd (on y brasse son enfance, le trauma avec le suicide de sa mère devant ses yeux, ses débuts, ses premiers succès, ses problèmes avec l’alcool et les médicaments, sa vie de famille, son rapport avec les femmes), mais l’ensemble est suffisamment intéressant et n’est pas avare en images rares voire inédites.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos et d’affiches d’exploitation.

L’Image et le son

Si L’Enfer au-dessous de zéro a un temps été annoncé en Haute-Définition par Sidonis Calysta, force est de constater que l’éditeur a dû revoir ses ambitions puisqu’il ne propose le film de Mark Robson qu’en DVD. Vu l’état de la copie, cela semble plus raisonnable. Non pas que le master 1.33 (16/9) soit « ultra » mauvais, mais en raison de l’étalonnage des couleurs qui laisse parfois vraiment à désirer, tout comme le lissage vraiment trop important du grain original ! A tel point que les transparences, déjà mauvaises à la base, donnent à l’ensemble un côté artificiel assez laid. La gestion des contrastes est elle aussi aléatoire, parfois pendant une même séquence. Un effet de pompage n’a pu être équilibré, quelques scories demeurent, tâches, points, fils en bord de cadre et rayures verticales, les stockshots sont tout de suite visibles (ou moins, puisqu’ils sont souvent flous), bref, ce n’est pas très reluisant tout ça.

Que votre choix se porte sur la version originale (avec sous-titres français imposés) ou la version française, la restauration est en revanche fort satisfaisante ici. Aucun souffle constaté sur les deux pistes, l’écoute est claire, frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes et la musique sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise, mais le confort acoustique est assuré sur les deux options. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.

Crédits images : © Columbia / Sidonis Calysta / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / La Famille Fang, réalisé par Jason Bateman

LA FAMILLE FANG (The Family Fang) réalisé par Jason Bateman, disponible en DVD le 22 juin 2017 chez Metropolian Vidéo

Acteurs : Nicole Kidman, Jason Bateman, Christopher Walken, Kathryn Hahn, Marin Ireland, Michael Chernus, Harris Yulin, Alexandra Wentworth

Scénario : David Lindsay-Abaire d’après le roman de Kevin Wilson

Photographie : Ken Seng

Musique : Carter Burwell

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2015

LE FILM

De retour dans la maison familiale, Baxter et Annie soignent les cicatrices d’une éducation qui échappe aux conventions. Lorsque leurs parents, des artistes célèbres pour élaborer des canulars en public, disparaissent dans des circonstances troublantes, le frère et la soeur mènent l’enquête, indécis quant à la raison de cette disparition : est-ce un jeu stupide ou une ruse élaborée ? Rien ne pouvait les préparer à ce qu’ils vont finir par découvrir.

Comédien aussi talentueux qu’attachant, Jason Bateman demeure pourtant méconnu dans nos contrées. Les spectateurs français l’ont néanmoins vu dans de nombreuses comédies à succès, Dodgeball – Même pas mal !, Starsky et Hutch, La Rupture, Juno, Paul, Hancock, les deux Comment tuer son boss ?, sans toutefois parvenir à retenir son nom, pourtant facile à mémoriser. Ayant commencé sa carrière quand il avait une dizaine d’années, notamment dans La Petite maison dans la prairie dans le rôle de James Cooper Ingalls, Jason Bateman n’a jamais arrêté de tourner pour le cinéma et la télévision. Parallèlement à sa carrière d’acteur, il a également fait ses premiers pas derrière la caméra en réalisant quelques épisodes des séries Valerie, La Vie de famille, Un frère sur les bras, Les Jumelles s’en mêlent, avant de mettre en scène son premier long métrage pour le cinéma avec Bad Words, sorti directement en DVD et Blu-ray en France en 2014. En 2015, il signe son deuxième film La Famille Fang, toujours inédit en France, adaptation du roman éponyme de Kevin Wilson.

Caleb (Christopher Walken) et Camille Fang (Maryann Plunkett) sont des artistes qui ont dédié leur vie à la performance et aux happenings. Annie (Nicole Kidman) et Buster (Jason Bateman), leurs deux enfants, ont toujours fait partie – parfois contre leur gré – de leurs œuvres filmées à l’insu des passants choqués. Pas facile de grandir avec des parents pareils. Une fois adultes, ils s’aperçoivent que le chaos de leur enfance les a rendus quelque peu inadaptés à la société. Annie est une comédienne qui enchaîne les mauvais films, qui doit se résoudre à tourner topless pour relancer sa carrière, tandis que Buster est un écrivain raté en manque d’inspiration. Le poids des parents pèse sur ces deux quadras. Alors quand Baxter a un petit accident de pomme de terre – lancée dans la figure par un patator – et qu’il apprend que son père et sa mère débarquent pour le soutenir, les souvenirs d’une enfance marquée par l’excentricité de leurs parents artistes, qui les utilisaient comme cobayes et complices malgré eux de leurs performances, reviennent vite à la surface. La Famille Fang est un film délicat et amer sur l’héritage et les relations familiales. Formidablement interprétée, notamment par Jason Bateman lui-même et Nicole Kidman (productrice et qui a acquis les droits du livre pour le cinéma), capable d’illuminer le moindre petit film de sa présence malgré son visage quelque peu figé en raison de chirurgie plastique, cette comédie-dramatique est typique du cinéma indépendant américain.

On connaît la musique, mais La Famille Fang fonctionne grâce à son approche mélancolique et à la complexité des personnages. Jusqu’où des artistes peuvent-ils aller pour l’amour de leur art et pour faire bouger les consciences ? Doivent-ils mettre en péril leur propre famille ? Et comment les enfants peuvent-ils accepter de passer au second plan dans la vie de leurs parents ? La Famille Fang passe du passé au présent, montrant les parents et leurs rejetons dans leurs performances, entre amusement pour le « bien-être personnel » et la « révolution » pour inciter les témoins de leurs happenings à réfléchir sur la condition humaine. Le malaise s’installe quand les parents organisent un nouveau coup fourré en obligeant A et B (surnoms des gamins en raison de la première lettre de leurs prénoms respectifs, encore une blague) à jouer Roméo et Juliette, où les deux ados doivent alors s’embrasser sur scène.

Sur un scénario écrit par David Lindsay-Abaire (l’excellent Rabbit Hole de John Cameron Mitchell, avec Nicole Kidman), La Famille Fang ne joue pas sur l’empathie immédiate et montre les fêlures de ses personnages, qui se dévoilent par strates. C’est là toute la réussite du film difficile à cerner de Jason Bateman, qui mérite vraiment d’être découvert.

LE DVD

Le test du DVD – pas d’édition HD pour ce titre – de La Famille Fang, disponible chez Metropolitan, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces de titres disponibles chez l’éditeur.

L’Image et le son

Pour son second long-métrage, Jason Bateman jouit d’un atout de taille en la personne de Ken Seng, directeur de la photographie de Deadpool, Projet X et Disconnect. Le master SD concocté par Metropolitan restitue joliment la colorimétrie originale, même si les contrastes auraient gagné à être plus renforcés. Un très léger grain se fait ressentir, les scènes diurnes sont claires mais le piqué n’est pas aussi ciselé qu’espéré. Signalons quelques artefacts de compression visibles durant les scènes se déroulant en intérieur, sans toutefois que les conditions de visionnage s’en trouvent affectées. La définition n’est certes pas optimale, mais solide et largement suffisante pour découvrir ce film singulier.

En anglais comme en français, les pistes Dolby Digital 5.1 remplissent aisément leur office et même, plongent le spectateur dans une ambiance musicale inattendue. D’entrée de jeu, les effets naturels se font entendre sur l’ensemble des enceintes et bénéficient d’une belle ouverture frontale et latérale. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et le confort acoustique est assuré du début à la fin.

Crédits images : © Metropolitan Vidéo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Doomwatch, réalisé par Peter Sasdy

DOOMWATCH réalisé par Peter Sasdy, disponible en DVD le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Ian Bannen, Judy Geeson, John Paul, Simon Oates, Jean Trend, Joby Blanshard, George Sanders

Scénario : Clive Exton d’après la série « Doomwatch »

Photographie : Kenneth Talbot

Musique : John Scott

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Doomwatch, un laboratoire scientifique anglais repère des anomalies biologiques sur la côte ouest du pays. le laboratoire décide alors d’envoyer Del Shaw sur l’île de Balfe, afin que celui-ci enquête. Le scientifique récolte des algues qu’il envoie à Doomwatch. Après les avoir analysées le laboratoire conclue qu’il s’agit d’une contamination chimique. Mais bientôt Del découvre le corps d’un enfant mort enterré dans la forêt.

D’origine hongroise, Peter Sasdy (né en 1935) est un des réalisateurs emblématiques de la célèbre Hammer Film Productions. On lui doit notamment Une messe pour Dracula (1970), Comtesse Dracula (1971), trois épisodes cultes de la série La Maison de tous les cauchemars (1980) et La Fille de Jack l’Eventreur (1971). Spécialisé dans le film d’horreur, il signe Doomwatch en 1972, qui s’inspire de la série télévisée éponyme de la BBC, 38 épisodes tournés entre 1970 et 1972. Dans cette adaptation cinématographique, trois des comédiens de la série font une apparition, John Paul, Simon Oates et Joby Blanshard. Les médecins interprétés par les deux premiers et la spécialiste en informatique incarnée par la troisième laissent la place à un acteur plus chevronné, l’écossais Ian Bannen, vu dans La colline des hommes perdus et The Offence de Sidney Lumet, Le Vol du Phénix et Trop tard pour les héros de Robert Aldrich. Doomwatch s’inscrit dans le genre science-fiction et d’horreur, mais « réaliste ».

Ian Bannen est le docteur Del Shaw est chargé par l’organisation Doomwatch d’analyser les effets d’une marée noire survenue un an auparavant sur la côte de la petite île de Balfe dans les Cornouailles. Alors qu’il commence ses relevés océanographes, il y découvre une population isolée et hostile, qui voit d’un mauvais œil l’arrivée de ce nouveau venu et semble dissimuler un secret. Étonné par leurs comportements, puis par une macabre révélation, Shaw commence à enquêter sur les autochtones, assisté par la jeune institutrice du village, Victoria Brown (Juddy Geeson). Il semble que les villageois soient frappés les uns après les autres d’une maladie mystérieuse, qui déforme leur apparence physique, tout en les rendant extrêmement agressifs. Shaw réalise que les déchets chimiques rejetés dans la mer par un laboratoire travaillant sur de dangereuses expériences, seraient à l’origine de cette étrange malédiction. Mais il se heurte à l’obstination de la population, qui refuse de quitter ses terres, et à l’hypocrisie du laboratoire en question.

Doomwatch démontre l’habileté du réalisateur à rendre inquiétant l’ordinaire, grâce à son sens du cadre et en créant une atmosphère trouble avec des décors en apparence banale. Peter Sasdy bénéficie du travail du chef opérateur Kenneth Talbot, un de ses fidèles collaborateurs, également connu pour avoir éclairé Charley-le-borgne et Solo pour une blonde. Le spectateur plonge dans le brouillard aux côtés du Dr Del Shaw, dans une enquête anxiogène durant laquelle les menaces se multiplient autour du personnage principal. Si Peter Sasdy repousse la révélation jusqu’au dernier acte, le suspense est maintenu, les protagonistes inquiétants et les rebondissements bien menés. Seul faux pas de ce scénario, rendre finalement peu inquiétant, pour ne pas dire inoffensif, le fait que l’armée déverse dans la mer des dizaines de fûts de produits chimiques, puisque les autres, ceux contenant les fameuses hormones de croissance sont les seuls responsables de la mutation de la faune et des habitants !

Doomwatch s’ouvre comme un film de la Hammer, le corps d’une petite fille est transporté dans les bois pour y être enterré en cachette, et se clôt comme une enquête d’Hercule Poirot, pour laquelle Agatha Christie aurait conviée Stephen King à sa table. Autant dire que cette petite série B britannique originale vaut bien d’être découverte en France où elle n’a jamais connu d’exploitation.

LE DVD

Le DVD de Doomwatch, disponible chez Movinside, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. La jaquette est très élégante et attractive. Cette collection « Trésors du fantastique », est dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

Si vous êtes fidèles au rendez-vous, vous savez que chaque titre de cette collection est présenté par l’excellent Marc Toullec. C’est évidemment encore le cas pour Doomwatch (13’). Durant cette intervention dynamique et riche en anecdotes de production, Marc Toullec évoque la série originale, inédite en France et passe en revue le casting, les thèmes du film et le célèbre producteur Tony Tenser, jusqu’alors spécialisé dans le cinéma coquin, qui avait décidé d’ajouter une corde à son arc au milieu des années 1960 en finançant des films d’horreur à petit budget. Parmi ceux-ci, Repulsion réalisé par un certain Roman Polanski…

L’Image et le son

Nous ne sommes pas déçus ! C’est avec un plaisir immense que nous découvrons ce film de Peter Sasby dans de pareilles conditions ! D’emblée, la colorimétrie s’impose, le relief est très appréciable et le piqué est souvent tranchant. Le chef-opérateur Kenneth Talbot voit sa photo ouatée merveilleusement restituée et offre un lot de détails conséquents. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise, les contrastes probants, la copie stable, le grain bien géré et les noirs denses. N’oublions pas non plus la vertueuse restauration et la propreté de la copie, débarrassée de toutes les scories possibles et imaginables.

Comme Doomwatch n’a pas connu de sortie dans les salles françaises, le film est uniquement disponible en version originale aux sous-titres français non imposés. Le mixage anglais Dolby Digital 2.0 Mono instaure un confort acoustique total. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches, sans aucun souffle.

Crédits images : © Tigon British Film Productions. All Rights Reserved / Movinside / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Mes trésors, réalisé par Pascal Bourdiaux

MES TRÉSORS réalisé par Pascal Bourdiaux, disponible en DVD le 24 mai 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Jean Reno, Reem Kherici, Camille Chamoux, Bruno Sanches, Pascal Demolon, Jean Reynès, Natalia Verbeke, Alexis Michalik

Scénario : Juliette Sales, Fabien Suarez, Carole Giacobbi, Michèle Giacobbi

Photographie : Vincent Gallot

Musique : Sinclair

Durée : 1h27

LE FILM

Carole est une informaticienne introvertie qui vit encore chez sa mère.
Caroline est une pickpocket rebelle qui écume les grands hôtels de la côte d’Azur.
Les deux jeunes femmes ne se connaissent pas et n’ont rien en commun. Rien, sinon leur père, envolé avant leur naissance et qu’elles n’ont jamais vu.
Jusqu’au jour où… Patrick ressurgit !
Ce voleur international recherché par toutes les polices a frôlé la mort, et décide de rattraper le temps perdu en réunissant ses deux filles autour d’un but commun : le casse d’un Stradivarius à 15 millions d’euros…
Entre les bourdes, l’amateurisme et les chamailleries de ses deux filles, Patrick comprend vite que ce braquage ne va pas être une promenade de santé…

L’année 2017 n’a pas été simple pour le réalisateur Pascal Bourdiaux ! Deux échecs commerciaux et critiques très importants avec Mes trésors en janvier et Boule & Bill 2 en avril ! Avant de mettre en scène son premier long métrage en 2010, Le Mac, 1,5 millions d’entrées, Pascal Bourdiaux a d’abord fait ses classes sur la shortcom Un gars, une fille en réalisant près de 500 épisodes ! Il était aussi l’un des premiers à offrir à Kev Adams la tête d’affiche d’un film avec Fiston, dans lequel le jeune comédien donnait la réplique à Franck Dubosc. Porté par une critique positive et un bon bouche à oreille, près de deux millions de spectateurs avaient accueilli favorablement cette très bonne comédie. Pour Mes trésors, c’est une autre affaire.

S’il pouvait être judicieux d’associer les deux actrices au tempérament volcanique Reem Kherici (Fatal, Paris à tout prix) et Camille Chamoux (Les Gazelles, Maman a tort) avec le vieux briscard Jean Reno, on déchante rapidement. D’une part parce que ce dernier, qui n’a jamais brillé par son jeu d’acteur, apparaît ici comme dans le dernier Visiteurs, très fatigué, figé, pouvant à peine marcher et essoufflé à la moindre réplique, d’autre part en raison du manque d’alchimie entre les comédiennes. Si Reem Kharici s’avère plutôt bonne (on parle de sa performance hein, même s’il est indéniable que…), Camille Chamoux énerve à maintes reprises et en fait des tonnes dans le rôle de la nana coincée. Ne pouvant s’empêcher de grimacer, sa prestation a rapidement raison de notre patience. De plus, il faut bien l’avouer, le scénario un rien paresseux ne fait rien pour arranger les choses. Autant le dire, rien ne fonctionne dans cette comédie sur fond de casse voulue rocambolesque.

Le scénariste de Stars 80 (bah oui) tente d’insuffler un rythme nécessaire à ce genre de comédie, mais rien n’y fait. A part une introduction chic et sympathique qui faire penser à un Mission : Impossible franchouillard, dans laquelle Jean Reno usurpe l’identité d’un violoniste virtuose grâce à un masque caractéristique de la série américaine pour mieux lui dérober son précieux instrument, Mes trésors se met ensuite en mode pilotage automatique. Les scènes s’enchaînent à la va-comme-je-te-pousse, en cumulant les gags mous, les dialogues au rabais, l’action de pacotille et une mise en scène fonctionnelle sur un score pourtant inspiré de Sinclair. On pense alors au Ca$h d’Eric Besnard, sorti en 2008, dans lequel Jean Dujardin affrontait…Jean Reno. De là à croire que Pascal Bourdiaux ait voulu jouer sur une impression de déjà-vu…

Au milieu de tout ce marasme, Bruno Sanches (le comparse d’Alex Lutz dans Catherine et Liliane) et l’excellent Pascal Demolon parviennent à tirer leur épingle du jeu, le premier dans le rôle de l’amoureux timide, le second, toujours classe, dans celui de l’adversaire de Jean Reno, qui tombe sous le charme du personnage joué par Camille Chamoux. Certes, Mes trésors n’a aucune autre prétention que de divertir les spectateurs, mais le film est si poussif que rien ou presque ne fait rire. Et ce n’est pas de voir Jean Reno se trémousser sur Treasure de Bruno Mars qui arrange les choses.

LE DVD

Le DVD de Mes trésors, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé, sobre et musical. Pour cette sortie dans les bacs, le visuel a été repensé par rapport à l’affiche originale, en jouant notamment sur un côté OSS 117 qui n’a aucune raison d’être, et en y rajoutant Pascal Demolon et Bruno Sanches.

Suite à ses 140.000 spectateurs, l’éditeur a jugé bon de ne pas sortir Mes trésors en Blu-ray. Pour accompagner cette sortie en DVD, M6 Vidéo livre quelques entretiens croisés de Camille Chamoux, Reem Kharici et de Jean Reno (11’). En pleine promo, les trois comédiens expliquent ce qui les a séduit dans le scénario, le travail avec le réalisateur et la bonne ambiance sur le plateau.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Le piqué est aléatoire et la gestion des contrastes parfois légère. Les quelques séquences sombres manquent de définition et les détails font cruellement défaut. Heureusement, ça se rattrape un peu sur les scènes diurnes au relief certain, à la luminosité plaisante. La colorimétrie est à l’avenant et le cadre large retrouve enfin une profondeur de champ inespérée. Notons néanmoins quelques légers fourmillements et des noirs inégaux.

Ne vous attendez pas à un déluge d’effets surround si votre choix s’est portée sur la Dolby Digital 5.1, mais la spatialisation est plus que convenable avec de belles ambiances naturelles et un environnement musical fort plaisant. Mes trésors ne se prêtant évidemment pas aux exubérances sonores, le principal de l’action se trouve canalisé sur les frontales où les dialogues ne manquent pas d’intelligibilité. De son côté, la stéréo s’avère ardente et dynamique. Un parfait confort acoustique. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste en Audiodescription.

Crédits images : © Eric TRAVERS – Radar Films / SND / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Rocco, réalisé par Thierry Demaizière et Alban Teurlai

ROCCO réalisé par Thierry Demaizière et Alban Teurlai, disponible en combo DVD-Blu-ray le 4 avril 2017 chez TF1 Vidéo

Acteurs : Rocco Siffredi, Rozsa Tano, Gabriele Galetta, Kelly Stafford, Mark Spiegler, Abella Danger, John Stagliano

Photographie : Alban Teurlai

Musique : Pierre Aviat

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

En trente ans de carrière, Rocco Siffredi reste la plus grand star masculine du cinéma pornographique. Ses amis disent qu’il a deux vies, celle de père de famille et celle de propriétaire d’un titre, d’un mythe. Lui-même dit avoir payé le prix fort dans sa vie personnelle. A 50 ans, il décide de mettre un terme à sa carrière avec un dernier long métrage. Alors que le film se prépare, le hardeur dévoile les raisons qui l’ont poussé à arrêter, les difficultés de sa vie de famille et le rôle ambigu que la nymphomanie a joué dans sa vie…

Né le 4 mai 1964 dans les Abruzzes, Rocco Tano alias Rocco Siffredi, pseudo venant du personnage incarné par Alain Delon dans Borsalino, est l’homme de tous les records dans le domaine de la pornographie. Depuis ses débuts en 1986, on lui prête plus de 5000 partenaires à l’écran et plus de 1500 films. Quant à la taille de, vous savez, cela oscille entre 23 à 25 cm, probablement en raison de la météo, et cela a largement contribué à sa réputation. Réalisateur, producteur et surtout acteur de films pornographiques, Rocco Siffredi est devenu une marque de fabrique. Spécialisé dans le style gonzo, qui inclut des scènes violentes avec gifles et même crachats à la tête de celle qui passe entre ses griffes, Rocco Siffredi est à la pornographie ce que Mike Tyson est à la boxe : une légende vivante. Sa mère aurait voulu qu’il soit curé, il est devenu acteur porno avec sa bénédiction, consacrant sa vie à un seul dieu : le Désir. En trente ans de métier, Rocco Siffredi aura visité tous les fantasmes de l’âme humaine et se sera prêté à toutes les transgressions. Hardeur au destin exceptionnel, Rocco plonge dans les abîmes de son addiction au sexe et affronte ses démons dans ce documentaire en forme d’introspection. Le moment est aussi venu, pour le monstre sacré du sexe, de raccrocher les gants. Pour tourner la dernière scène de sa carrière, Rocco a choisi ce documentaire. Une galerie de personnages – famille, amis, partenaires et professionnels du porno – l’accompagne jusqu’à cette sortie de scène spectaculaire. Des repas de famille à Budapest aux tournages de films pornographiques à Los Angeles, des ruelles italiennes d’Ortona aux villas américaines de la Porn Valley, le film déroule l’histoire d’une vie hantée par le désir et révèle en filigrane les coulisses du X, derrière le scandale et l’apparente obscénité. À l’heure où la pornographie sort de la clandestinité, envahit le cinéma traditionnel, la mode et l’art contemporain, c’est un univers à part entière, filmé au plus près, qui se dévoile à travers le parcours de Rocco Siffredi.

Après avoir tourné Relève : histoire d’une création, un documentaire sur le danseur et chorégraphe Benjamin Millepied, les réalisateurs Thierry Demaizière et Alban Teurlai se voient proposer un film sur la pornographie américaine. D’abord perplexes, les deux collaborateurs acceptent et prennent comme partis pris de se focaliser sur Rocco Siffredi et de suivre l’acteur porno pendant deux ans, avec son accord, dans sa vie privée, auprès de son épouse et de ses deux fils, mais également sur le plateau avec ses partenaires, sans oublier les moments où Siffredi se retrouve seul, face à lui-même. Si on l’a souvent vu à poil, c’est bien la première qu’il se met à nu. De son propre aveu, l’acteur traversait la pire période de sa vie, ce qui se reflète sur son visage émacié, usé, vieilli. C’est de là que proviennent la grande surprise et l’intérêt de ce documentaire. Il n’y a rien d’excitant dans Rocco, mais ce portrait dressé (nous parlons bien du portrait) ne brosse pas l’acteur dans le sens du poil et le montre dans ses contradictions. Fier de ce qu’il est devenu, confortablement installé en Hongrie, Rocco Siffredi est aussi un homme devenu esclave du monstre qu’il a créé (« ma sexualité est mon démon »), un super hardeur, un mâle alpha dominateur, un produit demandé aux quatre coins du monde, un phénomène de foire, un trépied que les jeunes actrices, fascinées par sa taille (1m85) et sa taille en centimètres, désirent monter pour l’inscrire sur leur C.V.

Parallèlement, on suit également son cousin Gabriele, qui a fait sa carrière, pour ne pas dire sa vie sur le vit de Rocco Siffredi en tant que caméraman et réalisateur. Parfaitement conscient de cette dépendance (« Qu’aurait été notre vie, si son sexe ne s’était pas dressé ? »), Gabriele se montre jaloux quand il « disparaît » derrière l’objectif pour filmer les ébats. Ce personnage quasi-tragique et pathétique interpelle, surtout lorsqu’il souhaiterait donner une touche un peu plus artistique à sa mise en scène, mais qui doit chaque fois revoir ses ambitions puisque Rocco lui indique que le porno implique d’aller directement à l’essentiel sans effusions techniques. Une vraie commedia dell’arte. En plus de ce double intérêt, Rocco donne la parole aux femmes. Celle qui partage la vie de Rocco, mais aussi toutes ses partenaires. On voit un Rocco attentionné, qui prend le temps de les connaître un peu mieux avant de passer à l’acte, leur demandant ce qu’elles aiment dans le sexe, jusqu’où elles peuvent aller et jusqu’où lui puisse se permettre d’aller avec elles. Rocco n’est pas moins un film sur l’industrie contemporaine de la pornographie que sur un acteur qui a dédié toute sa vie à son « art », au point de devenir prisonnier de son personnage. Mais le doute l’habite.

Au-delà du documentaire, Rocco peut se voir comme un vrai drame intimiste sur un homme d’une extrême complexité, touchant (avec les fantômes omniprésents de son frère et de sa mère décédés), parfois sombre et torturé, partagé entre le désir d’arrêter sa carrière quand il se rend compte que ses partenaires ont souvent l’âge de ses deux fils, mais frustré, malheureux et souffrant véritablement quand il admet que la pornographie fait partie de lui et qu’il ne pourra pas s’en passer. Très bien réalisé et photographié, sans plan « choc » et ni scènes de pénétration, pouvant parfois rendre mal à l’aise, loin des clichés et des idées reçues, c’est donc à la fois plusieurs portraits qui s’entrecroisent autour du thème du sexe dans ce documentaire. Celui de Rocco Siffredi donc, qui se livre corps et âme devant la caméra et qui se prépare à tourner sa dernière scène, de son cousin Gabriele et de toutes ces femmes, qui s’expriment librement sur leurs désirs et leur sexualité, notamment l’alter ego féminin de Rocco, Kelly Stafford, qui considère sa condition de star du porno comme un acte féministe.

Thierry Demaizière et Alban Teurlai se focalisent sur les mains, les visages usés, les crampes, les muscles, les ecchymoses, les corps avant et après « la bataille », tandis que les acteurs se remercient en se serrant la main, avant d’aller sous la douche. Des gladiateurs et lutteuses qui s’affrontent dans une guerre charnelle et de liquide séminal, mais dont la descente d’orgasme renvoie souvent à leur propre solitude. Rocco, captivant et fascinant documentaire existentiel ? Assurément.

LE DVD

Le test du DVD de Rocco, disponible chez TF1 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Si vous avez aimé le documentaire, alors n’hésitez pas à prolonger le programme avec les interviews proposées en bonus. Pendant une vingtaine de minutes, Rocco Siffredi s’exprime (en français) sur la genèse du projet, sur l’évolution du milieu pornographique, sur sa rencontre avec Thierry Demaizière et Alban Teurlai et ce qui l’a poussé à se dévoiler devant leur caméra. L’acteur évoque également ses dernières années en tant qu’acteur porno, sa dépression (« ils m’ont filmé au pire moment de ma vie »), sa dépendance au sexe et avoue avoir été très mal à l’aise en découvrant le film pour la première fois. Il clôt cette excellente interview en parlant de la sexualité des jeunes d’aujourd’hui et de son lien avec l’accès à la pornographie via internet.

C’est ensuite au tour de Thierry Demaizière et d’Alban Teurlai (12’) de s’exprimer sur la mise en route du projet (à l’origine une commande pour un documentaire sur la pornographie américaine) et leur rencontre avec Rocco Siffredi. Leurs propos prolongent leur travail, notamment quand les réalisateurs parlent de la personnalité complexe de leur protagoniste, « un personnage dense et intense », « Non pas le roi du porno confortablement installé sur son trône, mais un être tragique, sombre et tourmenté ». Les partis pris (« ni juger ni encenser le personnage »), leur collaboration avec Rocco Siffredi, mais aussi les femmes présentes dans le documentaire, sans oublier l’approche visuelle et sonore, Thierry Demaizière et d’Alban Teurlai mentionnent tous ces sujets passionnants en déclarant également que le film plaît – contre toute attente – plus aux femmes qu’aux hommes.

L’Image et le son

Tourné en numérique, Rocco bénéficie d’une très belle édition SD, qui rend justice aux images souvent stylisées des deux documentaristes et de leur chef opérateur Alban Teurlai, restituées avec une précision d’orfèvre. Le cadre est superbe, la colorimétrie élégante, entre couleur et N&B et le relief omniprésent. L’encodage consolide l’ensemble avec fermeté, le piqué est merveilleusement acéré, les noirs compacts et les contrastes denses.

La piste multilangue (osons le mot ici) 5.1 sous-titrée en français demeure au point mort pendant près de deux heures et il faut attendre l’accompagnement musical pour que les enceintes arrière se réveillent sensiblement. Les séquences demeurent essentiellement axées sur les frontales, les latérales se contentant d’un écho très lointain. Pour cause de tournage brut, l’enregistrement sonore varie selon les conditions des prises de vues et de la distance des documentaristes avec leur(s) sujet(s) filmé(s). Pour une meilleure homogénéité, la stéréo se révèle parfaite, percutante à souhait, cette piste donne finalement plus de corps à l’ensemble.

Crédits images : © Emmanuel Guionet / Mars Films / TF1 Vidéo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / La Plage sanglante, réalisé par Jeffrey Bloom

LA PLAGE SANGLANTE (Blood Beach) réalisé par Jeffrey Bloom, disponible en DVD chez Zylo

Acteurs : David Huffman, Marianna Hill, Burt Young, Otis Young, Lena Pousette, John Saxon, Darrell Fetty, Stefan Gierasch

Scénario : Jeffrey Bloom

Photographie : Steven Poster

Musique : Gil Melle

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

En Californie, une femme disparaît mystérieusement en se promenant sur la plage. Le capitaine Pearson et Harry Caulder veulent résoudre cette énigme, d’autant qu’on retrouve sur la plage le corps sans tête du chien de la disparue. Les phénomènes étranges se multiplient comme une adolescente qui a les jambes lacérées. Une enquête est alors ouverte.

Cette fois-ci, le danger ne vient pas de la mer…

Quelle petite pépite que cette Plage sanglante ! Réalisé par Jeffrey Bloom en 1980, Blood Beach est un modèle du genre horreur Bis et tient toutes ses promesses, à savoir offrir quelques savoureux moments d’épouvante, de jolies nanas bronzées sous le soleil californien, des kékés habillés en fluo dans un coin et un humour décalé qui indique que tout ceci n’est pas à prendre au sérieux. Jeffrey Bloom est avant tout scénariste. On lui doit entre autres un étonnant (ou improbable c’est selon) 28 Secondes pour un hold-up de George Englund, interprété par Jean-Claude Killy, notre skieur national et médaillé d’or aux Jeux Olympiques, dans sa seule incursion au cinéma. La Plage sanglante arrive cinq ans après que Steven Spielberg ait fichu la trouille au monde entier, tout en faisant déserter les plages à cause de son requin affamé. Le film de Jeffrey Bloom s’engouffre dans la brèche, mais propose un divertissement intelligent puisque la menace est non seulement invisible et ne provient pas d’un squale ou d’un piranha.

N’attendez pas une débauche d’hémoglobine et les spectateurs avides de sang risquent de trouver le temps long puisque le réalisateur joue avant tout sur la tension et les effets inattendus, tout en ajoutant une petite pincée sexy. Les effets spéciaux sont très réussis et les effets d’aspiration des victimes dans le sable font encore leur effet aujourd’hui. De plus, Jeffrey Bloom use de la présence du comédien Burt Young, bien connu des cinéphiles pour son rôle de Paulie dans la saga Rocky, qui avec son galurin vissé sur la tête donne un côté film-noir parasité par un élément d’horreur. Un peu comme si le détective d’un polar des années 1940 se retrouvait catapulté en plein cinéma d’exploitation. Au-delà de son aspect divertissant, La Plage sanglante repose également sur une très bonne mise en scène. Le cinéaste parvient à rendre son décor inquiétant et angoissant.

Le film vaut également pour la très belle photo luminescente signée Steven Poster, chef opérateur qui faisait ici ses débuts au cinéma et qui allait par la suite collaborer avec Ridley Scott (Traquée), Richard Kelly (Donnie Darko et Southland Tales)…et Patrice Leconte (1 chance sur 2). En ce qui concerne l’interprétation, David Huffman incarne le héros du film, qui ne fait pas grand-chose certes, mais qui attire la sympathie avec son personnage qui semble plus intéressé par une ancienne conquête que par ce qui se passe sur la plage dont il a la garde. Après quelques apparitions dans F.I.S.T. de Norman Jewison et Firefox, l’arme absolue de Clint Eastwood, le comédien est malheureusement assassiné en 1985 à l’âge de 39 ans. N’oublions pas la tronche de l’excellent John Saxon, aujourd’hui toujours en activité à plus de 80 ans et 200 films à son actif, qui a connu son heure de gloire auprès de Bruce Lee dans Opération Dragon (Roper, c’était lui !) et vu plus tard dans Les Griffes de la nuit de Wes Craven (encore un rôle de flic) puis Une nuit en enfer de Robert Rodriguez dans le rôle de l’agent Stanley Chase.

Alors venez planter votre parasol sur cette plage Bis infiniment sympathique et maligne, en aucun cas un nanar, et qui mérite vraiment d’être reconsidéré dans nos contrées où La Plage sanglante est malheureusement et injustement méconnue.

LE DVD

La Plage sanglante bénéficie d’un tout petit tirage très limité à 500 exemplaires grâce à Zylo. Le DVD est entre autres disponible sur Ulule, ainsi que chez les vendeurs spécialisés suivants : Sin’Art, Metaluna store, Ciel Rouge, Cine-matouvu, sans oublier leurs sites internet correspondants. Le DVD repose dans un boîtier Amaray classique et le menu principal est quant à lui fixe et musical. La jaquette reprend le visuel de l’affiche originale, particulièrement efficace.

Dans la section Interactivité, nous trouvons la bande-annonce originale, un spot TV, un diaporama de photos et d’affiches, ainsi qu’une scène coupée. Un carton en introduction indique que cette séquence « Visite à la police » se situait dans le film juste après la disparition de Hoagy et approfondissait le travail entre Harry Caulder et le Lieutenant Piantadosi (2′).

L’Image et le son

Ce master repris du DVD allemand (voir le titre pendant le générique), comporte encore des raccords de montage, des tâches, des points, des rayures et certaines séquences s’avèrent plus altérées. Néanmoins, la copie proposée ne démérite pas et ne manque pas d’élégance. La stabilité est de mise, tout comme la gestion du grain original. Même si La Plage sanglante est proposée dans un format 1.33 (le film a été tourné en 1.85…), le « confort » de visionnage est assuré, la clarté est évidente. L’image trouve un équilibre convenable. L’éditeur indique que le montage proposé est la version dite « européenne ».

Les versions anglaise, française et espagnole sont disponibles. Elles disposent toutes d’un mixage Dolby Digital Mono 2.0 relativement efficace, sans souffle, même si certains échanges résonnent quelque peu et s’avèrent quelque peu métalliques. Les conditions sont remplies pour apprécier pleinement le film et ses dialogues, dynamiques et propres, ainsi que la composition de Gil Melle (Le Mystère Andromède). La piste anglaise est évidemment la plus naturelle et la plus aérée du lot.

Crédits images : © Zylo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr