Test Blu-ray / Nuits de cauchemar, réalisé par Kevin Connor

NUITS DE CAUCHEMAR (Motel Hell) réalisé par Kevin Connor, disponible en DVD et Blu-ray le 28 février 2017 chez Movinside

Acteurs : Rory Calhoun, Paul Linke, Nancy Parsons, Nina Axelrod, Wolfman Jack, Elaine Joyce

Scénario : Robert Jaffe, Steven-Charles Jaffe

Photographie : Thomas Del Ruth

Musique : Lance Rubin

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

Bienvenue dans ce petit motel accueillant, un peu à l’écart des grandes artères routières, tenu par un couple des plus folkloriques, Vincent et Ida Smith. Ici on offre tout pour attirer le client en manque de tranquillité et de dépaysement. En prime, la maison fabrique un superbe saucisson, dont la qualité est reconnue dans toute la région environnante. Mais les paisibles tenanciers ont une drôle de recette secrète pour obtenir avec amour et dévouement le plus succulent des produits régionaux !

Un souvenir d’enfance revenait souvent dans la tête de l’auteur de ces mots. Agé de dix ans, je passe devant la télévision où passait un film étrange. Les images montraient des personnes enterrées dans une sorte de jardin, où ne dépassaient que leurs têtes. A cela s’ajoutaient les râles et grognements, comme si ces personnes, visiblement prisonnières, ne pouvaient plus parler. Ces images sont restées très longtemps dans ma mémoire et m’avaient valu quelques mauvais rêves. Quelques années plus tard, au fil de recherches grâce aux débuts d’internet, j’avais pu enfin mettre un titre sur ce film. Mais il aura fallu attendre 2017 pour que je puisse enfin voir ce long métrage d’horreur qui s’intitule Nuits de cauchemar ou Motel Hell en version originale. Moi qui croyais que Nuits de cauchemar était un film d’épouvante, je suis finalement tombé sur une vraie comédie d’horreur, réalisée par le cinéaste, producteur et scénariste britannique Kevin Connor, né en 1937, dont le premier film Frissons d’outre-tombeFrom Beyond the Grave démontrait déjà son goût pour le cinéma de genre. Metteur en scène touche-à-tout, capable de passer d’un film d’horreur à la série télévisée L’Amour en héritage, Kevin Connor est appelé pour réaliser Nuits de cauchemar, après que les producteurs aient un temps envisagé de faire appel à Tobe Hooper. Le cinéaste accepte à condition que le scénario très premier degré soit revu et surtout que de l’humour soit injecté. Les studios United Artists acceptent. Pour le meilleur et pour le rire.

Vincent Smith et sa sœur Ida sont des fermiers qui tiennent par ailleurs un motel, attenant à leur ferme. Vincent propose en outre à la vente de la viande fumée très réputée. Mais l’origine de sa viande est inhabituelle, car il s’agit en fait de viande humaine qu’il arrive à se procurer en kidnappant puis en tuant des touristes de son motel. Vincent, c’est Rory Calhoun (1922-1999), mythique comédien de westerns de séries B vu dans Le Gaucho de Jacques Tourneur, Crépuscule sanglant de Jack Arnold, Vengeance à l’aube de George Sherman, et deux fois aux côtés de Marilyn Monroe dans Comment épouser un millionnaire et La Rivière sans retour. S’il s’est fait plus rare dans les années 1970, le comédien trouve dans Nuits de cauchemar ce qui est considéré par certains cinéphiles comme étant son plus grand rôle. Il faut dire qu’il est excellent, brillant, charismatique en diable avec son sourire chevalin inquiétant et qu’il a l’air de prendre un malin plaisir à jouer ce redneck, accueillant au premier abord, qui se révèle être un psychopathe et tueur en série. On le voit kidnapper les clients de son motel (le fantôme de Norman Bates n’est pas loin), les endormir, leur couper les cordes vocales et les planter comme des carottes dans son potager pour ensuite les gaver comme des oies, afin de les dépecer ensuite avec l’aide de sa sœur Ida (démente Nancy Parsons), pour transformer les corps en viande fumée, particulièrement appréciée dans toute la région.

Rapidement devenu un film culte, Nuits de cauchemar a profité des belles heures de la VHS. Plus de 35 ans après la sortie du film, l’humour noir et sarcastique fonctionne encore à plein régime, la photo de Thomas Del Ruth (Breakfast Club, Running Man) est très riche et participe, comme la musique de Lance Rubin, à la plongée du spectateur dans ce coin paumé et glauque de l’Amérique profonde. Motel Hell est un film qui ne se prend pas au sérieux, mais qui n’est en rien bâclé malgré son manque évident de moyens. On rit tout autant qu’on frissonne et l’affrontement final à la tronçonneuse dans l’abattoir peut autant faire glousser que donner la chair (fumée) de poule quand on voit le fermer péter littéralement les plombs – alors qu’il pensait avoir trouvé la solution pour lutter contre la surpopulation et le manque de nourriture – et arborer une tête de porc en poussant un rire machiavélique.

Le film de Kevin Connor tient une place à part dans le coeur des cinéphiles, d’autant plus qu’il traverse les années sans prendre de rides et qu’il peut être vu encore différemment à l’heure où les Etats-Unis viennent de commencer un nouveau et angoissant chapitre.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Nuits de cauchemar, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique de couleur bleue, contrairement au visuel qui montre un boîtier noir. L’élégante jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des nombreux fans du film de Kevin Connor, et des autres, puisqu’elle reprend le visuel de l’affiche originale. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.

Un seul supplément au programme, une présentation du film par le journaliste Marc Toullec. L’ancien co-rédacteur en chef de Mad Movies passe en revue l’histoire de Nuits de cauchemar, les références à Massacre à la tronçonneuse et à Psychose, la genèse du film, le fait que Tobe Hooper ait été un temps pressenti pour le réaliser, le choix de Kevin Connor pour le remplacer, la révision du scénario par celui-ci, qu’il trouvait trop déviant (la sœur couchait avec un porc et un dindon) et l’ajout d’humour noir, sans oublier le casting (Harry Dean Stanton a été envisagé) et les conditions de tournage. Ne visionnez pas ce bonus si vous n’avez jamais vu Nuits de cauchemar puisque Marc Toullec évoque de nombreuses séquences y compris le dénouement de l’intrigue.

L’Image et le son

Cette édition HD redonne un petit coup de jeune à Motel Hell, tout en respectant son caractère vintage. La restauration de ce master au format 1080p – AVC, 1.85 compatible 16/9, semble dater et quelques tâches et points subsistent, surtout lors du générique en ouverture. Le grain est heureusement conservé, la plupart du temps bien géré, sauf sur divers plans, plus grumeleux, en particulier lors des séquences plus sombres. Nuits de cauchemar est un film essentiellement nocturne, mais les couleurs froides signées Thomas Del Ruth, à tendance verdâtre et jaune, sont bien restituées, à l’instar de l’éclairage spécifique du potager. La stabilité est de mise, les noirs profonds, l’ensemble est plus que correct, comme les contrastes, même s’il ne faut pas non plus demander des miracles pour un film tourné avec peu de moyens et doté d’une image déjà « sale » à l’origine. Mais le confort de visionnage est indéniable.

Les versions française et originale sont proposées en DTS-HD Dual Mono. Comme pour l’image, l’écoute rappelle les séances en VHS avec un son plutôt étouffé pour la piste française, qui bénéficie d’un doublage très réussi et amusant. La version anglaise s’en sort mieux et s’avère plus riche dans ses effets, la délivrance de la musique et des grognements contestataires de nos pauvres touristes enterrés. Les sous-titres français sont imposés sur la piste anglaise et le changement de langue est verrouillé à la volée.

Crédits images : © Movinside – MGM / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Chien des Baskerville, réalisé par Terence Fisher

LE CHIEN DES BASKERVILLE (The Hound of the Baskervilles) réalisé par Terence Fisher, disponible en DVD et Blu-ray le 6 décembre 2016 chez The Corporation

Acteurs : Peter Cushing, André Morell, Christopher Lee, Maria Landi, David Oxley

Scénario : Peter Bryan d’après le roman de Sir Arthur Conan Doyle

Photographie : Jack Asher

Musique : James Bernard

Durée : 1h27

Date de sortie initiale : 1959

LE FILM

S’élevant dans les brouillards de Darmootor, Baskerville Hall se dresse fièrement dans les ténèbres. Son occupant, Charles Baskerville est retrouvé mort sur la lande sauvage dans de mystérieuses circonstances. Sir Charles aurait pu être la victime de la soi-disant « malédiction des Baskerville » selon laquelle une bête mortelle erre dans la campagne environnante. Imperturbable face à cette légende, l’héritier Sir Henry Baskerville décide d’accepter la succession de la famille, sous l’égide du célèbre détective Sherlock Holmes et de son associé le Dr Watson…

Apparu en 1887 dans le roman Une étude en rouge, le personnage de Sherlock Holmes a été le héros de 4 romans et 56 nouvelles signés Sir Arthur Conan Doyle (1859-1930). Ce dernier a également mis en scène son héros dans 3 pièces de théâtre et 2 textes parodiques.

Le Chien des Baskerville est un roman publié dans le Strand Magazine en 1901 et 1902. Pourtant, Sherlock Holmes était mort dix ans plus tôt dans la nouvelle Le Dernier problème (recueil Les Mémoires de Sherlock Holmes). Mais Sir Arthur Conan Doyle cédera aux pressions de ses lecteurs et lui rendra la vie avec cette enquête, devenue la plus célèbre qu’il ait écrite.

Le roman ne s’inscrit pas dans la chronologie des aventures de Holmes, et ne fait aucune référence à la mort supposée du détective. Les lecteurs devront attendre 1903 et la parution de la nouvelle La Maison vide (recueil Le Retour de Sherlock Holmes) pour avoir l’explication de la fausse mort de leur héros.

Le Chien des Baskerville est sans doute l’aventure de Sherlock Holmes qui a connu le plus grand nombre d’adaptations, 9 pour le cinéma (entre 1914 et 1978), 13 pour la télévision (entre 1955 et 2011), sans compter celles réalisées pour la radio, les bandes dessinées et les pièces de théâtre ! L’adaptation qui nous intéresse est mise en scène par le célèbre réalisateur Britannique Terence Fisher (1904-1980), grande figure de la Hammer Film Productions, qui venait de signer Frankenstein s’est échappé (1957), Le Cauchemar de Dracula (1958) et La Revanche de Frankenstein (1958). Après avoir remis au goût du jour (et en couleur) ces quelques monstres qui ont fait les belles heures des Studios Universal dans les années 1930-40, le cinéaste s’attaque au mythe de Sherlock Holmes.

Réalisé en 1959, Le Chien des BaskervilleThe Hound of the Baserkervilles reste aujourd’hui un des fleurons du genre et un des films les plus célèbres du studio. Alors qu’il vient d’incarner le Baron Victor Frankenstein, le docteur Van Helsing et Dr Victor Stein dans les trois films mentionnés, l’immense comédien anglais Peter Cushing, qui tournera près d’une quinzaine de fois avec Terence Fisher, prête ses traits singuliers et son immense talent au célèbre détective, rôle qu’il reprendra dix ans plus tard dans la saison 2 d’une série télévisée de la BBC, puis en 1984 dans le téléfilm Les Masques de la mort. Il est l’incarnation idéale du personnage. Son célèbre compère, le Docteur Watson est quant à lui incarné par l’excellent André Morell, vu dans Le Pont de la rivière Kwai et Ben-Hur. Les deux comédiens sont également épaulés par l’illustre Christopher Lee, qui de son côté venait d’incarner à l’écran la créature de Frankenstein et le Comte Dracula, rôles qui l’avaient lancé deux ans plus tôt après une dizaine d’années de figuration.

Merveilleusement photographié en Technicolor par le chef opérateur Jack Asher et mis en musique par James Bernard, deux grands noms de la Hammer, Le Chien des Baskerville est un chef d’oeuvre du genre et également la première adaptation cinématographique en couleur du roman éponyme de Sir Arthur Conan Doyle. Pensé d’abord comme le premier volet d’une nouvelle saga de films consacrés à Sherlock Holmes avec Peter Cushing dans le rôle principal, Le Chien des Baskerville est finalement resté une adaptation unique en raison du mécontentement des cinéphiles adeptes des monstres de la Hammer, qui déploraient alors l’absence de créatures horrifiques. Cela n’empêche pas le film d’être un savoureux whodunit teinté de fantastique, filmé dans des décors gothiques sublimes. Le malaise est palpable dès l’installation particulièrement sadique de dix minutes, qui invite le spectateur à prendre connaissance de l’origine de la malédiction qui pèse sur les Baskerville.

En dépit des digressions avec le roman original, le récit se tient admirablement et tous les éléments fusionnent pour notre plus grand plaisir. Le mystère est prenant, l’atmosphère est suintante à souhait, les couleurs stylisées (mention spéciale aux giclées de sang), les immenses acteurs bouffent l’écran et prennent un évident plaisir à se renvoyer la balle.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray du Chien des Baskerville, disponible chez The Corporation, repose dans un boîtier classique de couleur bleue. A l’intérieur, nous trouvons un livret de 12 pages, proposant la fiche technique du film, les suppléments disponibles sur le disque, ainsi que les adaptations du Chien des Baskerville au cinéma et à la télévision. Le boîtier est glissé dans un surétui qui reprend le même visuel, élégant, de la jaquette. Le menu principal est animé et musical.

Pour cette sortie sur le territoire français du Blu-ray du Chien des Baskerville, The Corporation a repris un documentaire présent sur l’édition HD disponible outre-Manche chez Arrow Films. Il s’agit du Chien des studios HammerRelease the Hound ! (30’), réalisé en 2015 par Ewan Cant. Composé d’entretiens de l’acteur et écrivain Mark Gatiss, de l’auteur et critique Kim Newman, du troisième assistant-réalisateur Hugh Harlow, de Margaret Robinson, créatrice du masque du chien, ce module ne propose pas vraiment d’analyse sur l’oeuvre qui nous intéresse, mais revient surtout sur la figure de Sherlock Holmes. Certains propos, notamment tout ce qui concerne la création du maquillage du chien, sont vraiment trop longs, l’ensemble manque de rythme et peu d’anecdotes retiennent finalement d’attention. Cocréateur et coproducteur de la série Sherlock (avec Benedict Cumberbatch et Martin Freeman), dans laquelle il interprète également le rôle de Mycroft Holmes, Mark Gatiss s’avère le plus intéressant du lot.

Le trésor de cette interactivité demeure l’interview de Sir Arthur Conan Doyle (11’), réalisée en 1928 par Fox Movietone News, qui constitue l’un des premiers enregistrements synchronisant son et image. L’auteur et scientifique, s’exprime ici sur la création de son personnage mythique, avec un air quelque peu blasé et dépassé par ce succès (selon lui, certains croient même que le détective est une personne réelle) qui l’a contraint à écrire de nouvelles aventures après avoir fait mourir Sherlock Holmes. On sent l’écrivain beaucoup plus heureux de parler de son autre passion, le spiritualisme. Egalement scientifique, Sir Arthur Conan Doyle étudie alors cette branche depuis plus de 40 ans au moment de cet entretien et déclare vouloir y consacrer le reste de sa vie.

Un petit plus pour les amateurs de Sherlock Holmes, l’éditeur joint également un deuxième film consacré aux aventures de notre cher détective. Il s’agit de Silver Blaze ou Murder at the Baskervilles, Sherlock Holmes contre Moriarty dans nos contrées. D’une durée de 65 minutes, ce film est l’adaptation de la nouvelle Flamme d’argent, écrite en 1892 par Sir Arthur Conan Doyle pour le Strand Magazine, puis publiée dans le recueil Les Mémoires de Sherlock Holmes. Proposé comme une suite du Chien des Baskerville, ce film introduit les personnages de Sir Henry Baskerville, ainsi que le professeur Moriarty. C’est également le dernier d’une série de cinq films adaptés des aventures de Sherlock Holmes où Arthur Wontner joue le rôle du détective. Le favori d’un grand steeple est enlevé la veille de la course : le jockey et l’entraîneur sont trouvés assassinés. Sherlock Holmes est chargé de découvrir l’auteur de cette tragédie qui n’est autre que son ennemi Moriarty à qui il doit laisser la vie sauve en échange de celle du maladroit professeur Watson, tombé entre ses mains.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale et sur les cinq premières minutes de la version du Chien des Baskerville réalisée en 1939 par Sidney Lanfield, avec Basil Rathbone et Nicgel Bruce.

Dommage que l’éditeur n’ait pas pu récupérer les droits de l’interview de Christopher Lee sur le film, ainsi que deux extraits du roman lu par ce dernier.

L’Image et le son

Ce master HD 1.66 (16/9) au format 1080p du Chien des Baskerville présente une propreté quasi-irréprochable et les mêmes particularités que le Blu-ray Arrow. La magnifique photographie du film est signée par Jack Asher (Les Deux visages du Dr Jekyll, Les Maîtresses de Dracula, La Malédiction des pharaons), qui fait la part belle aux éclairages rouges, marrons, verts, roux, que l’on croirait parfois inspirés par certaines oeuvres du Caravage. Les décors gothiques bénéficient d’un nouveau relief et certains détails inédits sont appréciables. Les contours peuvent manquer de précision, même si les gros plans sont bien restitués. Les noirs paraissent tantôt concis tantôt poreux. Un léger grain cinéma est heureusement conservé donnant une texture non déplaisante à l’image, les contrastes paraissent raffermis et équilibrés, le piqué est souvent plaisant. Le codec AVC consolide l’ensemble avec brio et évite au maximum les fourmillements intempestifs, surtout sur les nombreuses scènes sombres, tandis que les fondus enchaînés demeurent fluides, sans décrochages. Un nouvel écrin idéal pour redécouvrir ce chef-d’oeuvre de la Hammer, présenté ici dans les meilleures conditions techniques à ce jour, à défaut d’être réellement optimales, à l’instar de la profondeur de champ qui déçoit quelque peu.

En anglais comme en français, les deux mixages sont proposés en DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Ces deux options acoustiques s’avèrent dynamiques et limpides, avec une belle restitution des dialogues et de la musique. Les effets sont solides bien que certains paraissent plus étouffés, mais le confort est assuré. Pas de souffle constaté. Au jeu des différences, la version originale l’emporte car plus riche et précise, même si son homologue s’avère peut-être plus propre. Mais cette dernière se focalise trop sur le report des voix et le doublage laisse quelque peu à désirer. Dans les deux cas, l’écoute demeure très correcte, parfois chuintante, sans véritable souffle parasite.

Crédits images : © MGM – The Corporation / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Danseuse, réalisé par Stéphanie Di Giusto

LA DANSEUSE réalisé par Stéphanie Di Giusto, disponible en DVD et Blu-ray le 1er février 2017 chez Wild Side Video

Acteurs : Soko, Gaspard Ulliel, Mélanie Thierry, Lily-Rose Depp, François Damiens, Louis-Do de Lencquesaing

Scénario : Stéphanie Di Giusto, Sarah Thibau, Thomas Bidegain d’après le roman Loïe Fuller, danseuse de la Belle Époque de Giovanni Lista

Photographie : Benoît Debie

Musique : Laura Obiols

Durée : 1h59

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Loïe Fuller est née dans le grand ouest américain. Rien ne destine cette fille de ferme à devenir la gloire des cabarets parisiens de la Belle Epoque et encore moins à danser à l’Opéra de Paris. Cachée sous des mètres de soie, les bras prolongés de longues baguettes en bois, Loïe réinvente son corps sur scène et émerveille chaque soir un peu plus. Même si les efforts physiques doivent lui briser le dos, même si la puissance des éclairages doit lui brûler les yeux, elle ne cessera de perfectionner sa danse. Mais sa rencontre avec Isadora Duncan, jeune prodige avide de gloire, va précipiter la chute de cette icône du début du 20ème siècle.

La Danseuse est un biopic romancé et ambitieux de la grande et pourtant méconnue danseuse américaine Loïe Fuller (1862-1928). Née Mary Louise Fuller à Hinsdale (Illinois), elle demeure une des pionnières de la danse moderne, avec notamment sa chorégraphie virevoltante où elle apparaissait vêtue de plusieurs centaines de mètres de soie blanche. Ayant rencontré le succès à Paris aux Folies Bergère avec ses danses dites serpentines, Loïe Fuller devient une des artistes les plus importantes et les mieux payées du monde du spectacle de la Belle Epoque. En plus du caractère inédit et avant-gardiste de ses chorégraphies, la danseuse est également metteur en scène et n’hésite pas à avoir recours à l’électricité – ainsi qu’aux mathématiques et même à la chimie – pour créer des numéros encore plus sophistiqués. Une véritable révolution des arts scéniques.

La réalisatrice Stéphanie Di Giusto signe un premier long métrage souvent remarquable, excellemment mis en scène, brillamment photographié et porté par une Soko en état de grâce. La première partie s’avère beaucoup plus prenante et attachante que l’après-Folies Bergère, centré sur la relation trouble entre Loïe Fuller et Isadora Dunca, qui pâtit de certaines baisses de rythme et du jeu plombé par Lily-Rose Depp (fille de Johnny Depp et de Vanessa Paradis), dont le regard vide et le manque de grâce fait pencher le second acte du mauvais côté de la balance. Heureusement, nous n’avons d’yeux que pour Soko, vibrante, magnétique, irréprochable, bouleversante, investie (un mois d’entraînement à raison de six heures par jour), qui capte la lumière comme jamais et qui confirme toute sa préciosité après À l’origine de Xavier Giannoli, Bye Bye Blondie de Virginie Despentes, Augustine d’Alice Winocour et dernièrement dans Voir du pays de Muriel et Delphine Coulin. Excellente directrice d’acteurs, Stéphanie Di Giusto offre également à Mélanie Thierry (comme d’habitude merveilleuse), François Damiens et Gaspard Ulliel, des personnages qui pourraient apparaître en retrait, mais qui s’avèrent très importants dans le parcours de Loïe Fuller.

Fascinée par ce combat unique d’une simple fille de fermier du Grand ouest américain, devenue une des plus grandes artistes de son temps, Stéphanie Di Giusto s’est emparée de ce sujet à bras le corps et aura passé pas moins de trois années rien que sur l’écriture du scénario. On sent la cinéaste hypnotisée par celle qui fut la muse du Tout-Paris, de Toulouse-Lautrec à Rodin, mal dans sa peau en raison d’un physique « ingrat » et qui préférait se dissimuler dans un tourbillon de voile, avant d’être finalement rattrapée par le succès, la jeunesse et le charisme de celle qui fut un temps son élève, Isadora Duncan, qui finira par l’éclipser au point d’être oubliée de tous. Elle repose aujourd’hui au cimetière du Père Lachaise, à quelques mètres seulement de celle qui sera devenue sa grande rivale.

A l’écran, les fulgurantes scènes de représentation sont divines, magnifiquement éclairées par le chef opérateur Benoît Debie, célèbre pour son travail avec Gaspar Noé sur Irréversible, Enter the Void et Love, mais aussi le « coloré» Spring Breakers de Harmony Korine. Le personnage de Loïe, prête à mettre sa santé en jeu pour son art, émeut à plus d’un titre grâce à l’interprétation tout en finesse de Soko. Dommage donc que la seconde partie déçoive et s’égare quelque peu. Sélectionné dans la section Un Certain Regard du dernier Festival de Cannes, La Danseuse, aura attiré plus de 200.000 spectateurs à sa sortie en septembre 2016. Porté par une critique souvent élogieuse, le très beau portrait de femme de Stéphanie Di Giusto est d’ores et déjà nommé dans six catégories à la prochaine cérémonie des César, notamment pour celui de la Meilleure actrice (Soko), Meilleure actrice dans un second rôle (Mélanie Thierry), Meilleur espoir féminin (Lily-Rose Depp) et Meilleur premier film.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de La Danse, disponible chez Wild Side Video, a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Dirigez-vous immédiatement vers le splendide making of (51’), exclusif à l’édition Blu-ray du film. Ce formidable documentaire suit les premières approches et les répétitions de la réalisatrice Stéphanie Di Giusto avec sa comédienne principale et la chorégraphe Jody Sperling, aujourd’hui la plus grande experte de Loïe Fuller. Plusieurs mois avant le début des prises de vues, la caméra suit ces trois femmes, en particulier Soko qui se plie à un entrainement intensif pendant plusieurs semaines. Les propos de la réalisatrice, des comédiens, du producteur Alain Attal (qui revient surtout sur les difficultés de financement du film), sans oublier les responsables des costumes et des décors, parsèment ce making of indispensable, très bien filmé, rythmé et marqué par de nombreuses et impressionnantes séquences de tournage.

Les quatre modules intitulés Isadora, Loïe, Gabrielle et Louis, d’une durée oscillant entre deux et trois minutes chacun, ne servent du coup à rien puisqu’ils sont essentiellement composés d’images et de propos tirés du making of précédent, sauf en ce qui concerne celui consacré au personnage de Louis, avec un court entretien de Gaspard Ulliel.

Cette section propose ensuite une dizaine de scènes coupées (16’), que l’on doit sélectionner une par une. Très belles, visiblement coupées pour des questions de rythme, elles s’avèrent soignées et valent le coup d’oeil, notamment Loïe dans son atelier de chimie, Loïe désemparée après le départ d’Isadora et une séquence où Gabrielle (Mélanie Thierry) manque de se noyer après avoir voulu récupérer des plans de Loïe – qui plonge pour la sauver – tombées dans une mare.

L’interactivité se clôt sur une superbe galerie de photos.

L’Image et le son

Le master HD (1080p) de La Danseuse restitue merveilleusement les volontés artistiques du talentueux chef opérateur Benoît Debie (Irréversible, Calvaire, Vinyan, Spring Breakers) en conservant un très léger grain, des couleurs à la fois chaudes et froides, des contrastes léchés ainsi qu’un relief constamment palpable. Ces volontés artistiques sont rudement prises en charge pour le passage du film sur le petit écran. La compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre large et les visages des comédiens, le piqué est aiguisé, les noirs denses et la copie éclatante. Les séquences nocturnes jouissent également d’une belle définition, même si les détails se perdent quelque peu.

Le confort acoustique est total grâce à une piste française DTS-HD Master Audio 5.1. souvent fracassante. Les voix sont claires et limpides sur la centrale, la spatialisation musicale est systématique, les basses énergiques pour les séquences de chorégraphies et la balance frontale dynamique. Les latérales assurent tout du long en distillant constamment de nombreux effets et ambiances naturelles. Un mixage qui vous permettra d’explorer chaque recoin de votre installation. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Wild Bunch Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Chansons du deuxième étage, réalisé par Roy Andersson

CHANSONS DU DEUXIEME ETAGE (Sånger från andra våningen) réalisé par Roy Andersson, disponible en Blu-ray le 6 décembre 2016 chez Potemkine Films

Acteurs : Lars Nordh, Stefan Larsson, Tommy Johansson, Jöran Mueller, Torbjörn Fahlström

Scénario : Roy Andersson

Photographie : István Borbás, Jesper Klevenås

Musique : Benny Andersson

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2000

LE FILM

Un soir quelque part dans notre hémisphère, une série d’événements étranges s’enchaînent sans logique apparente : un employé est licencié de façon humiliante, un immigré est violemment agressé dans la rue… Parmi ces personnages singuliers se détache Karl, au visage couvert de cendres. Il vient de mettre le feu à son magasin de meubles afin de toucher la prime d’assurance. Cette nuit-là, personne ne parvient à trouver le sommeil. Le lendemain, les signes d’un chaos imminent commencent à apparaitre. Karl prend conscience de l’absurdité du monde et combien il est dur d’être humain.

A ce jour, le cinéaste suédois Roy Andersson compte à son actif cinq longs métrages depuis ses débuts en 1970 avec le très remarqué Une histoire d’amour suédoise (Grand Prix du Festival de Berlin 1970), qu’il autofinance grâce à ses spots publicitaires. Ingmar Bergman le considérait d’ailleurs comme le plus grand réalisateur dans ce domaine. Pourtant, son travail dans le cinéma est tout aussi indispensable. 

Sorti en 2000, Chansons du deuxième étage marque le retour de Roy Andersson au cinéma, 25 ans après son deuxième long métrage réalisé en 1975, Giliap. C’est aussi le premier volet de la « Trilogie des Vivants ou comment être un être humain ». Alors que le soir tombe, une grande ville de l’hémisphère Nord devient le théâtre d’événements plus ou moins bizarres, parfois cruels, souvent inquiétants. Un vieil homme qui vient d’être licencié s’accroche désespérément aux pieds de son patron, sous les regards presque indifférents de ses collègues. Un immigré est tabassé en pleine rue, sans raison apparente, par des loubards aux allures de gentlemen. Un magicien qui devait «couper» un homme en deux rate son tour. Un homme visiblement épuisé met le feu à sa propre boutique dans le but de toucher l’assurance. Désormais sans travail, il erre dans les rues de la ville, paralysée par des embouteillages monstres…

Prix du Jury au Festival de Cannes en 2000, Chansons du deuxième étage installe ce qui sera désormais le style Andersson : succession de cadrages fixes, en grand angle et en une quarantaine de longs plans-séquences sophistiqués tournés en studio dans des décors stylisés, qui s’apparentent à des tableaux vivants. Andersson travaille comme un peintre et utilise sa caméra comme un pinceau. Il recherche constamment le plan parfait, tout comme la profondeur de champ et la perspective. Pas étonnant que le tournage de Chansons du deuxième étage se soit étendu sur quatre années ! Roy Andersson a pour habitude de ne jamais utiliser de scénario, ni de se reposer sur un planning de tournage. Le réalisateur préfère élaborer et peaufiner les scènes au fil de nombreuses répétitions, avec l’aide de ses comédiens, la plupart du temps non-professionnels, préférant les «gens authentiques et qui ont une véritable présence à l’écran». Ces délais hors-normes de production, sans compter le manque d’argent qui a occasionné plusieurs arrêts des prises de vue, font la marque de fabrique de Roy Andersson. Chaque couche doit être visible, du premier au dernier plan.

A l’instar des deux volets suivants, Nous, les vivants (2007) et Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence (Lion d’or à la Mostra de Venise 2014), les œuvres des peintres allemands Otto Dix et Georg Scholz ont influencé le cadre et l’atmosphère : le visage des comédiens est blafard et fardé ; les couleurs sont ternes et désaturées ; l’ambiance est froide, parfois glaciale, et lugubre ; l’humour noir ironique et ravageur prédomine, même quand la mort est présente. Une fois ces partis pris acceptés par le spectateur, l’ensemble respire, vit, nous touche et une mélancolie transpire à chaque plan.

En outre, cet humour burlesque et poétique, que n’auraient pas renié Jacques Tati, Eugène Ionesco ou Pierre Etaix, naît de cette bizarrerie finalement quotidienne, alors que le monde semble être au bord du chaos. Roy Andersson est un humaniste, même s’il est réputé comme un artisan acharné, parfois tyrannique, lorsqu’il lui faut obtenir ce qu’il estime être la perfection. Dans ce conte moral constitué d’une suite de sketchs, il s’intéresse à la confrontation des êtres, à leur conversation ou plutôt à l’absence de communication, voire au dialogue de sourds. Mais il croit en cette interaction, au bonheur et au rire.

Le style singulier de Roy Andersson met ainsi en relief l’absurdité de la vie, de la solitude, des désirs inassouvis et du manque d’amour dans un monde quasi incolore, funèbre et déprimant. Malgré tout, l’espoir de s’en sortir, de trouver l’interlocuteur et de penser que demain sera un autre jour, ne cessent de démentir toutes ces premières impressions. Chansons du deuxième étage est un bijou froid totalement inclassable qui trouve dès lors le moyen de réchauffer le cœur tout en incitant à la réflexion.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Chansons du deuxième étage, disponible chez Potemkine, a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

En 2001, Arte Vidéo avait édité Chansons du deuxième étage en DVD. Une galette qui comprenait moult suppléments : un commentaire audio du réalisateur, un documentaire sur le réalisateur : « Obsessions du deuxième étage », deux courts-métrages Monde de gloire et Quelque chose est arrivé, un making of, des scènes inédites, des tests et une scène alternative. Si le film fait peau neuve en Haute-Définition chez Potemkine, les suppléments de l’ancienne édition ont tous disparu ! Il faut se contenter d’un rapide entretien avec Roy Andersson (4’) durant lequel le cinéaste évoque l’humour particulier du film, l’envie de surprendre les spectateurs, le travail avec les acteurs non-professionnels.

Nous trouvons également deux publicités réalisées (en plan-séquence) par Roy Andersson, la première pour Trygg Hansa, une société d’assurance (44 secondes), le second pour HSB, une coopérative immobilière (30 secondes).

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p. Les rares scènes diurnes tournées en extérieur s’accompagnent d’un piqué aussi pointilleux que possible. La photo particulière est ici conforme aux souhaits du réalisateur, les contrastes sont aléatoires, les noirs denses, les teintes bleutées, froides, grisâtres et vertes sont merveilleusement mises en valeur. La copie est très propre et parvient à tirer quelques avantages de la Haute-Définition.

L’éditeur dispose d’un mixage suédois DTS-HD Master Audio 5.1. La piste ne déçoit pas par son envergure et son entrain, tant au niveau de la délivrance des dialogues que des effets latéraux. La balance frontale est riche et plonge facilement le spectateur dans l’ambiance surprenante du film.

Crédits images : © Potemkine Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Divines, réalisé par Houda Benyamina

DIVINES réalisé par Houda Benyamina, disponible en DVD et Blu-ray le 3 janvier 2017 chez Diaphana

Acteurs : Oulaya Amamra, Kevin Mischel, Jisca Kalvanda, Farid Larbi, Déborah Lukumuena, Yasin Houicha

Scénario : Houda Benyamina, Romain Compingt, Malik Rumeau

Photographie : Julien Poupard

Musique : Demusmaker

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Dans un ghetto où se côtoient trafics et religion, Dounia a soif de pouvoir et de réussite. Soutenue par Maimouna, sa meilleure amie, elle décide de suivre les traces de Rebecca, une dealeuse respectée. Sa rencontre avec Djigui, un jeune danseur troublant de sensualité, va bouleverser son quotidien.

C’est le choc du Festival de Cannes 2016. Le petit film que personne n’attendait et qui pourtant a créé un raz-de-marée auprès de la critique, quasi-unanime et des spectateurs. Récompensé par la Caméra d’or, trophée destiné à un premier film, Divine est le premier long métrage de la réalisatrice Houda Benyamina. L’action se déroule en banlieue parisienne. La jeune Dounia suit des cours pour devenir hôtesse d’accueil, mais envoie balader sa prof après l’avoir humilié devant toute sa classe. Elle ne rêve que de liberté, de respect et de pouvoir, que seul l’argent pourrait lui offrir. Aux côtés de sa meilleure amie Maimouna, elle souhaite proposer ses services auprès de Rebecca, la dealeuse charismatique du quartier, que ceux de son âge envient, Dounia la première. Son rêve de partir du camp de roms où elle vit avec sa mère semble à portée de main. Elle rencontre alors Djigui, le vigile du supermarché qu’elle aime charrier, jusqu’à ce qu’elle apprenne que ce beau jeune homme, rêve lui aussi de s’en sortir en devenant danseur professionnel.

A l’origine de Divines, il y a les émeutes qui ont agité la banlieue parisienne en 2005. La réalisatrice explique « Mon besoin de créer vient toujours d’un sentiment d’injustice. J’ai raisonné mes proches, mais j’avais moi aussi envie de sortir et de tout défoncer. Je me suis ensuite demandé pourquoi cette colère n’avait pas abouti à une véritable révolte ». Femme engagée, « mais pas révoltée », Houda Benyamina signe un premier film choc, qui ne peut laisser indifférent. Divines, dont le titre était à l’origine Bâtarde, est littéralement porté par le tempérament volcanique de la cinéaste, mais également par le naturel confondant des comédiens, Oulaya Amamra, la propre sœur de la réalisatrice, qui incarne Dounia, Déborah Lukumuena (Maimouna), Jisca Kalvanda (Rebecca) et Kevin Mischel (Djigui).

Si Divines n’échappe pas à certains défauts souvent liés à un premier long métrage, à savoir un trop-plein d’idées pas forcément toutes exploitées, quelques égarements, un désir d’en mettre plein la vue à travers une démonstration technique qui prend le pas sur l’émotion, une hystérie peu contrôlée (bien que contagieuse), Divines est un film extrêmement généreux, qui ne s’adresse pas une communauté, mais qui a le désir de toucher tous les spectateurs de tout âge, voulu avant tout comme une histoire d’amour et d’amitié, thèmes universels par excellence. Ici, ce sont quatre destins qui s’imbriquent, qui se confrontent, qui se repoussent, qui s’attirent sans cesse.

Divines est également un roman d’apprentissage, une éducation sentimentale, mais aussi un thriller, même si le film manque de conviction durant cette partie où Dounia tente de piéger un mec plein aux as, afin de lui voler son argent pour le compte de Rebecca. Ce qui n’empêche pas Divines d’être parfois violent, de mettre mal à l’aise, de bousculer (la fin tragique n’est pas sans évoquer celle du Parrain III), tout en faisant réfléchir et en divertissant les spectateurs. En ce sens, Houda Benyamina se rapproche du cinéma d’Abdellatif Kechiche, pas une mince référence. Une première œuvre riche, libre, souvent puissante, sombre, non dénuée d’humour et qui reste en tête bien après la fin de la projection. Une belle réussite, qui s’avère au final bien plus réussi que Bande de filles de Céline Sciamma auquel on pense forcément vu le sujet, le contexte et les personnages principaux.

Réalisé avec un budget de 2 millions d’euros, Divines, d’ores et déjà nommé sept fois à la prochaine cérémonie des César, a attiré plus de 300.000 spectateurs dans les salles.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Divines, disponible chez Diaphana, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

La section des suppléments propose tout d’abord quatre entretiens. Dans chaque interview nous retrouvons la réalisatrice Houda Benyamina. Elle est ainsi accompagnée de son coscénariste Romain Compingt (11’), puis de la scripte Julie Darfeuil (11’), de ses deux monteurs (8’) et enfin de son superviseur musical et compositeur (10’). Chaque aspect technique du film est posément abordé, mais également la genèse du film, l’écriture et l’évolution du scénario, la création des personnages, le travail avec les comédiens, les thèmes abordés, la recherche de la structure du film, le rythme, les décors. Un commentaire audio n’aurait pas été de trop tant l’équipe s’avère prolixe et surtout passionnante à écouter.

S’ensuivent quatre petites scènes coupées (7’), vraiment pas mal du tout, même si rien n’indique la raison de leur éviction au montage final. On y voit Dounia s’exercer à la boxe, Dounia qui imite une chanteuse de gospel, Dounia et Djigui déambuler dans le magasin avec des cagoules Aristochats, et une scène plus longue des deux personnages partagés entre la danse et le combat qui mène finalement au premier baiser.

Un tout petit making of (7’), compile des images du tournage avec la réalisatrice à l’oeuvre avec ses comédiens, quelques propos de l’équipe, puis la présentation de Divines au Festival de Cannes.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et les credits.

L’Image et le son

Diaphana livre une édition HD de Divines de très grande classe et même irréprochable. Full HD (1080p), cette édition restitue les superbes couleurs de la photo signée Julien Poupard (Voie rapide, Party girl, Les Ogres) qui fait la part belle aux teintes chatoyantes, parfois ambrées, le piqué est acéré, les détails abondants sur le cadre large et les contrastes tranchants. La luminosité des scènes diurnes flatte constamment la rétine, le relief est omniprésent.

Le mixage DTS-HD Master Audio 5.1 est immédiatement immersif et permet au spectateur de plonger dans le monde de Divines avec une musique percutante sur les enceintes latérales. Les voix sont d’une précision sans failles sur la centrale, la balance frontale est constamment soutenue, la composition spatialisée de bout en bout. La piste Stéréo devrait satisfaire ceux qui ne seraient pas équipés sur les enceintes arrière.

L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Diaphana / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Frantz, réalisé par François Ozon

FRANTZ réalisé par François Ozon, disponible en DVD et Blu-ray le 18 janvier 2017 chez France Télévisions Distribution

Acteurs : Pierre Niney, Paula Beer, Ernst Stötzner, Marie Gruber, Anton von Lucke, Johann von Bülow…

Scénario : François Ozon, Philippe Piazzo

Photographie : Pascal Marti

Musique : Philippe Rombi

Durée : 1h53

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Au lendemain de la guerre 14-18, dans une petite ville allemande, Anna se rend tous les jours sur la tombe de son fiancé, Frantz, mort sur le front en France. Mais ce jour-là, un jeune Français, Adrien, est venu se recueillir sur la tombe de son ami allemand. Cette présence à la suite de la défaite allemande va provoquer des réactions passionnelles dans la ville.

L’éclectique, prolifique et inclassable François Ozon est de retour avec Frantz. Avec cette œuvre troublante, mélancolique, dense, ambiguë, complexe, provocante et déstabilisante, seizième film du cinéaste en 18 ans, François Ozon signe un mélodrame librement inspiré d’une pièce de Maurice Rostand publiée en 1930, L’Homme que j’ai tué, déjà transposée au cinéma par Ernst Lubitsch avec Broken Lullaby (1932). Une fois n’est pas coutume, ce que l’on retient de Frantz est surtout sa forme. De ce point de vue, François Ozon a depuis longtemps acquis une indiscutable maturité. Sa mise en scène est pure, élégante, délicate, caressante, soulignée ici par la splendide photo N&B (parfois nappée de couleur quand la vie semble reprendre) du chef opérateur Pascal Marti (Une nouvelle amie, Roberto Succo). Sur le fond, Frantz demeure étrangement froid, même si l’immense sensibilité du réalisateur est indéniable. En jouant sur la musicalité de la langue, tantôt en allemand, tantôt en français, François Ozon en profite pour rendre hommage à l’un de ses cinéastes de chevet, Rainer Warner Fassbinder, lui-même auteur et metteur en scène très productif, pour ne pas dire boulimique.

Le cinéaste adopte ici le point de vue de la jeune veuve, Anna, merveilleusement incarnée par la jeune actrice allemande Paula Beer, vue dans The Dark Valley, western d’Andreas Prochaska, beauté magnétique et pleine de grâce qui vole la vedette à son partenaire Pierre Niney. Même si le César du meilleur espoir féminin lui tend les bras après avoir remporté le Prix Marcello-Mastroianni du Meilleur Espoir à la Mostra de Venise en 2016, on est également heureux de retrouver son partenaire dans un rôle sobre, loin de ses derniers égarements dans Un homme idéal et Five. Le N&B lui va bien et on sent le comédien très investi dans ce personnage pour lequel il a appris spécialement la langue allemande, le violon et la valse.

Même si Ozon a finalement conservé quelques séquences du film original qui s’attachent au soldat français, Frantz est avant tout le portrait d’une jeune femme, qui a perdu son fiancé sur le champ de bataille en France durant la Grande Guerre, qui doit apprendre à faire son deuil (tout comme les parents du défunt) alors qu’elle vient à peine de rentrer dans le monde adulte. Elle rencontre Adrien, un jeune français qui vient se recueillir sur la tombe (vide) de Frantz, l’homme avec qui elle devait se marier à son retour du front. Adrien rencontre les parents de Frantz et déclare être un ami très proche de leur fils, rencontré à Paris. Mais Adrien ne dit pas tout et Anna semble s’en apercevoir. Qui est-il ? Un amant de Frantz ? La deuxième partie, essentiellement axée sur le personnage d’Anna, reste moins « figée » quand celle-ci décide de se rendre en France afin de retrouver Adrien, personnage tourmenté et vieilli prématurément, traumatisé par ce qu’il a vécu dans les tranchées. Centré sur les non-dits, les secrets, le poids de la culpabilité et les mensonges, Frantz séduit mais pas immédiatement en raison de son aspect classique, rigide et même austère, mais qui obsède bien après le premier visionnage. La tristesse des personnages demeure, les regards et les respirations saccadées ne cessent de revenir en mémoire et donnent envie de s’y replonger. C’est aussi les pleurs de Paula Beer, la silhouette quasi-fantômatique et voûtée de Pierre Niney, tous ces éléments qui s’additionnent et bouleversent après coup.

Souvent inspiré par le cinéma d’Alfred Hitchcock, François Ozon en profite ici pour rendre un très bel hommage au maître du suspense, en l’occurrence VertigoSueurs froides, avec un tableau spécifique de Manet, Le Suicidé, devant lequel les personnages se perdent. Comme cette peinture qui semble hypnotiser ceux qui la regardent, Frantz est une œuvre à laquelle nous n’aurons de cesse de revenir pour essayer d’en percer tous les mystères, la poésie et la pudique émotion.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Frantz, disponible chez France Télévisions Distribution, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

C’est un peu chiche niveau bonus…on trouve tout d’abord un montage d’images tirées des essais costumes et lumière avec les comédiens. L’occasion d’admirer Paula Beer une fois de plus.

Quelques scènes coupées sans véritable intérêt – puisque rien n’indique la raison de leur éviction – sont ensuite proposées.

S’ensuivent une galerie d’affiches conceptuelles et un module filmé lors de la présentation de Frantz au Festival de Venise en 2016. Photocall, première du film et récompense pour Paula Beer lors de la cérémonie de clôture.

L’Image et le son

Pour son passage en Blu-ray, Frantz est proposé au format 1080p (AVC). L’image subjugue à plus d’un titre. Cette édition permet de voir ou de redécouvrir le film de François Ozon dans des conditions très soignées. La copie affiche d’emblée une propreté irréprochable ainsi qu’un N&B dense, lumineux et savamment contrasté et nuancé, y compris lors des rares passages en couleur. Les séquences en extérieur sont merveilleuses, le piqué est souvent acéré et les détails multiples. Le master HD est superbe et la profondeur de champ reste fort appréciable.

Le mixage DTS-HD Master Audio 5.1. instaure un confort acoustique solide et en parfaite adéquation avec le film. La splendide musique de Philippe Rombi bénéficie d’une spatialisation concrète, les dialogues solidement plantés sur la centrale et la balance frontale fluide et limpide. Les plages de silence sont impressionnantes, les ambiances naturelles ne sont pas oubliées et les effets annexes sont palpables. Le seul petit bémol provient des sous-titres français incrustés lors des échanges en allemand. L’éditeur joint également une piste DTS-HD Master Audio 2.0, une version en Audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Mars Film / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Soeur d’Ursula, réalisé par Enzo Milioni

LA SOEUR D’URSULA (La Sorella di Ursula) réalisé par Enzo Milioni, disponible en combo Blu-ray/DVD et Blu-ray le 2 novembre 2016 chez Le Chat qui fume

Acteurs : Barbara Magnolfi, Marc Porel, Stefania D’Amario, Anna Zinnemann, Antiniska Nemour, Yvonne Harlow, Vanni Materassi

Scénario : Enzo Milioni

Photographie : Vittorio Berninni

Musique : Mimi Uva

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Ursula et Dagmar Beyne, deux sœurs ayant récemment hérité, vont passer des vacances en Italie dans un magnifique hôtel sur la côte. Elles cachent un sombre passé : abandonnées par leur mère, elles ont vu leur père sombrer dans la dépression et se suicider. Tombée dans la névrose, Ursula fuit le contact des hommes et vit recluse dans sa chambre, tandis que sa sœur s’adonne à une libido effrénée. Parmi ses courtisans : Roberto Delleri, le directeur de l’hôtel, et Filippo Andrei, un loubard cocaïnomane au comportement étrange. Les vacances des deux sœurs ne seront pas de tout repos puisqu’on découvre bientôt, aux abords de l’hôtel, le cadavre mutilé d’une prostituée, puis les corps d’un jeune couple…

Réalisé en 1978, La Soeur d’UrsulaLa Sorella di Ursula est le premier long métrage du réalisateur Enzo Milioni, jusqu’alors scénariste du film au titre fleuri Non… je suis encore vierge ! (1971). Jouant avec les codes du giallo, La Soeur d’Ursula tire sur la corde en proposant surtout une histoire érotique et en compilant les scènes de sexe, toujours soulignées par le même thème musical, à l’instar des téléfilms diffusés sur M6 après Sexy Zap le dimanche soir dans les années 1990. Vous vous rappelez coquins ? Néanmoins, La Sorella di Ursula demeure typique du cinéma d’exploitation transalpin de l’époque avec une belle photographie vaporeuse, des comédiennes peu avares de leurs charmes et qui se déshabillent toutes les dix minutes, quelques meurtres violents et sanglants (toujours hors champ), visiblement commis par un homme au sexe surdimensionné.

Soyons honnêtes, avec son intrigue qui part dans tous les sens, ce petit giallo vaut essentiellement pour la beauté surréelle de Barbara Magnolfi (Olga dans Suspiria de Dario Argento), dont le regard vert subjugue et foudroie. Ce sont ces yeux fantastiques qui font surtout l’intérêt de La Soeur d’Ursula, ainsi que le charme vintage qui agit du début, il ne faut pas attendre trois minutes pour déjà apprécier le premier full frontal, jusqu’à la fin nawak et improbable, mais qui fonctionne malgré tout auprès d’une audience déjà conquise et donc indulgente. Aux côtés de Barbara Magnolfi, Stefania D’Amario (Les Déportées de la section spéciale SS, L’Enfer des zombies) et Marc Porel (Le Clan des Siciliens, La Horse, La Longue nuit de l’exorcisme) portent également le film vers le haut du Bis par leur charisme et leur indéniable talent, sans oublier la beauté des décors naturels de la côte Amalfitaine, au bord de la mer tyrrhénienne.

Le giallo est déjà mort, mais certains réalisateurs s’amusent encore avec ses cendres, tout en lorgnant sur un autre genre de cinéma Bis qui attire de nouveaux spectateurs, surtout depuis le triomphe international d’Emmanuelle en 1974. De l’aveu de Barbara Magnolfi, le résultat final ne correspond pas au scénario ambitieux initialement prévu, puisque selon elle les producteurs auraient imposé les scènes de sexe, très nombreuses et totalement gratuites au final, au metteur en scène Enzo Milioni, histoire de pimenter une intrigue policière teintée de fantastique qu’ils pensaient idiote et éculée. Ou comment couvrir ses arrières en découvrant ses actrices. Seulement voilà, les producteurs tendaient la carotte au réalisateur en lui promettant de lui financer son prochain long métrage, un projet personnel et vrai film d’auteur, qui ne verra jamais le jour.

Visionner La Soeur d’Ursulaqui d’ailleurs n’avait pas connu d’exploitation dans les salles françaises – de nos jours, c’est se retrouver face à un échantillon d’un cinéma désuet et disparu, mais agréable, parfois excitant et toujours divertissant, qui rend compte du revirement soudain des producteurs afin de mieux répondre aux attentes et au goût des spectateurs.

LE BLU-RAY

Si le film peut laisser quelque peu indifférent, cette édition combo Blu-ray/DVD concoctée par notre Chat noir à la clope est à tomber. L’élégant digipack se compose de trois volets, superbement illustrés, qui accueillent les deux disques. L’ensemble est glissé dans un étui cartonné du plus bel effet. Le menu principal, animé et musical, est identique sur le DVD et le Blu-ray. Petite erreur sur le verso de l’étui qui annonce que le supplément avec le réalisateur s’intitule « Ursula c’est moi ». Le film est proposé dans sa version intégrale.

Le Chat qui fume n’est pas venu les mains vides et nous livre quelques entretiens particulièrement généreux.

On commence par celui du réalisateur Enzo Milioni réalisé en 2008 (38’). Longuement, posément, le metteur en scène de La Soeur d’Ursula revient sur la genèse chaotique de son premier long métrage, une commande qui devait en réalité lui permettre de financer un film beaucoup plus personnel, dans lequel la comédienne Valentina Cortese devait tenir le premier rôle. Malgré la réussite commerciale de La Soeur d’Ursula, les producteurs qui lui avaient imposé de tourner des scènes érotiques non prévues, n’ont pas tenu leur parole pour son second long métrage. Ensuite, le cinéaste passe en revue le casting de son film et s’attarde sur chaque comédien. Il évoque ainsi le regard de Barbara Magnolfi, les problèmes de drogue de Marc Porel et comment il s’était mis d’accord avec l’acteur quand ce dernier voulait aller « à la chasse aux papillons ». Enzo Milioni évoque ensuite le bon accueil ainsi que la version du film qui circulait sous la manteau et qui comprenait des inserts pornographiques.

C’est avec un grand plaisir que nous retrouvons Barbara Magnolfi dans le supplément suivant. La comédienne née en France, d’un père italien et d’une mère française, parle parfaitement la langue de Molière et se livre avec franchise sur La Soeur d’Ursula. Franchise parce qu’elle se rappelle avoir été dupée sur le produit fini étant donné que le scénario sur lequel elle s’était engagée ne comportait aucune scène de sexe ! Tout d’abord, elle parle de son enfance avec une mère qui la délaissait, puis de ses débuts dans le cinéma avec notamment la rencontre avec Dario Argento qui l’engage pour Suspiria alors qu’elle n’a que 21 ans. Vient ensuite la rencontre avec l’acteur Marc Porel, qui sera son compagnon de 1977 à la mort prématurée de celui-ci en 1983 des suites d’une méningite consécutive à ses graves problèmes de drogue. Barbara Magnolfi déclare ne pas vouloir être associée au genre de film comme La Soeur d’Ursula puisque les scènes dénudées ont toutes été filmées à l’insu des comédiens. Estimant avoir été trahie, elle n’en veut pas au réalisateur, mais aux producteurs. L’actrice clôt cet entretien en parlant de sa vie aux Etats-Unis.

Plus anecdotique, Le Chat qui fume est allé demander à Philippe Chouvel, journaliste chez Psychovision, quels étaient ses trois gialli (mineurs) préférés (6’30). Ce dernier répond La Casa dalle finestre che ridono (Pupi Avati), L’Occhio nel Labirinto (Mario Caiano) et La Corrupción (Chris Miller). L’interviewé présente rapidement ces trois films et évoque le genre qu’il affectionne tout particulièrement, un « cinéma qui s’écoutait autant qu’il se regardait ».

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces, dont celle de La Soeur d’Ursula, uniquement axée sur les scènes érotiques.

L’Image et le son

Peu importe si La Soeur d’Ursula est un film mineur, Le Chat qui fume déroule le tapis rouge au film d’Enzo Milioni avec un superbe master Haute-Définition (1080p, AVC). Ce traitement royal permet même de revoir à la hausse ce giallo érotique. Dès le générique, la propreté s’avère sidérante, la copie est stable, le piqué aiguisé et la photo légèrement ouatée du chef opérateur Vittorio Bernini (Une suédoise sans culotte, La Nipote) est respectée et n’a vraisemblablement jamais été aussi resplendissante. Les quelques poussières et griffures qui ont pu échapper au scalpel numérique demeurent subliminales, la restauration subjugue du début à la fin, tout comme la luminosité, les couleurs et l’élégante tenue des contrastes.

Point de version française ici puisque La Soeur d’Ursula n’a pas été exploitée dans nos salles, même celles qui proposaient les films les plus coquins. Le mixage italien DTS HD Master Audio Mono aux sous-titres français respecte les partis pris d’époque, à savoir un doublage réalisé en postproduction, qui occasionne par moments un très léger décalage entre les dialogues et le mouvement des lèvres des comédiens. En dehors de cela, l’écoute demeure très propre avec parfois quelques sensibles saturations dans les aigus, mais rien de bien méchant.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Alvarez Kelly, réalisé par Edward Dmytryk

ALVAREZ KELLY réalisé par Edward Dmytryk, disponible en DVD et Blu-ray le 23 janvier 2017 chez Sidonis Calysta

Acteurs : William Holden, Richard Widmark, Janice Rule, Patrick O’Neil, Victoria Shaw, Roger C. Carmel, Richard Rust

Scénario : Franklin Coen, Elliott Arnold, Franklin Coen

Photographie : Joseph MacDonald

Musique : Johnny Green

Durée : 1h55

Date de sortie initiale : 1966

LE FILM

1864. L’éleveur mexicano-irlandais Alvarez Kelly est chargé de livrer à l’armée nordiste un troupeau de 2500 têtes mais les Sudistes qui manquent eux aussi de vivres sont décidés à s’emparer du troupeau. Grâce à Charity Warwick, une belle Sudiste, Kelly tombe dans un piège et se retrouve prisonnier du colonel Rossiter. Ce dernier lui conseille de changer de camp et de voler le troupeau pour le compte des Sudistes. Kelly étant réticent, Rossiter lui promet de lui amputer un doigt pour chaque jour de retard. Kelly est donc obligé d’accepter.

Un bandeau déroulant à l’écran annonce « Dans chaque guerre, à chaque époque, l’arme oubliée est la nourriture car pour tuer les soldats doivent manger, et pour vivre ils doivent manger. Un troupeau de vaches est aussi vital qu’une batterie de canons ». Là-dessus démarre la chanson des Brother Four « Alvarez Kelly rode over the rise, With a heart full of blarney and a gleam in his eyes, And wherever he stopped the gals kept droppin’ like flies, Till a lady from Richmond cut him down to size ». Formidable western réalisé par Edward Dmytryk (1908-1999) en 1966, Alvarez Kelly demeure un des plus grands films du cinéaste américain dont la carrière reste ponctuée par de nombreuses pépites comme Ouragan sur le Caine (1954), La Lance brisée (1954), La Main gauche du Seigneur (1955) et La Rue chaude (1962).

Edward Dmytryk, sympathisant de la gauche politique américaine, adhérant au parti communiste américain, figure parmi les célèbres Dix d’Hollywood. Convoqué par la Commission des Activités Anti-Américaines, il est condamné à six mois de prison, 500 dollars d’amende, puis s’exile en Grande-Bretagne à la fin des années 1940. Il revient peu de temps après aux USA, purge sa peine de prison et à l’instar d’Elia Kazan dénonce finalement certains acteurs, réalisateurs et scénaristes afin de s’affranchir des soupçons qui pèsent sur lui. C’est un scandale, sa carrière ne s’en remettra jamais totalement. Néanmoins, le cinéaste n’aura jamais arrêté de tourner jusqu’à la fin des années 1970. Alvarez Kelly est un divertissement élégant, qui repose à la fois sur le jeu et l’immense talent de ses deux têtes d’affiche, William Holden et Richard Widmark, qui rivalisent de charisme, mais aussi sur la beauté des paysages et des décors naturels de la Louisiane, où le film a été tourné intégralement.

A la fois western et film de guerre, Alvarez Kelly s’attache à un personnage qui ne fait pas de politique et qui vend ses services de spécialiste réputé dans la conduite du bétail, à celui qui saura lui offrir la plus grosse somme d’argent. C’est qu’en temps de guerre, l’approvisionnement en nourriture des troupes est un élément important et stratégique pour la victoire, ainsi qu’un aspect finalement peu traité au cinéma. A l’instar d’un mercenaire, Alvarez Kelly (William Holden) est un pro dans son boulot et ne se pose pas de question quant à celui qui l’embauche. Ainsi, il conduit depuis le Texas un important troupeau de bétail aux abords d’une plantation située près de Richmond (capitale des Sudistes), pendant la guerre de Sécession en 1864, pour le compte des Nordistes où sont implantés le Major Stedman (Patrick O’Neal) et ses troupes. Mais les Confédérés sont aux aguets et décident de s’emparer de cet approvisionnement pour leur compte. Leur armée se fait nécessiteuse, cette nourriture en abondance devient un enjeu important mais il leur faut aussi l’homme qui a les qualifications nécessaires pour convoyer le troupeau. Alvarez Kelly est enlevé par le colonel Tom Rossiter (Richard Widmark), borgne et hargneux. Ce dernier lui ordonne de détourner le troupeau au profit des Sudistes. Devant les hésitations de Kelly, Rossiter menace de lui sectionner un doigt pour chaque jour de retard, s’il n’accepte pas de former ses hommes.

William Holden se délecte dans la peau de ce profiteur de guerre, qui n’hésite pas à s’enrichir grâce à ce conflit qui s’enlise et qui affame les soldats dans les deux camps. Et si quelques dames croisent son chemin, c’est un petit plus non négligeable. Excellent technicien, Edward Dmytryk réalise ici son troisième western après La Lance brisée et L’Homme aux colts d’or, les deux films déjà interprétés par Richard Widmark. Le sujet, fondé sur des faits réels, est aussi passionnant que remarquablement traité, à la fois grand spectacle et drame intimiste, marqué par des dialogues souvent cinglants. De plus, la photo somptueuse et le cadre large participent également à la grande réussite de cette étrange chevauchée, dont l’impressionnante dernière séquence, celle de la ruée de bétail sur les troupes nordistes, reste dans toutes les mémoires.

Le western a changé en 1966 et Alvarez Kelly peut se targuer d’être un opus flamboyant, drôle, mélancolique, bourré d’aventures, remarquablement interprété et mis en scène.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray d’Alvarez Kelly, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Dans sa présentation (10’), Patrick Brion avoue avoir toujours été déçu par le film d’Edward Dmytryk. L’historien du cinéma commence tout d’abord par faire un tour d’horizon du western en cette année 1966, marquée notamment par l’hégémonie du genre en Italie, qu’affectionne également peu Patrick Brion. Ce dernier évoque les westerns réalisés par Edward Dmytryk, avant d’expliquer pour il trouve Alvarez Kelly peu réussi malgré un sujet formidable. Néanmoins, le critique loue cette édition Blu-ray qui permet de revoir le film dans de superbes conditions techniques, ce qui selon lui n’est pas sans redonner un intérêt à Alvarez Kelly.

Sidonis Calysta a réussi à mettre la main sur un documentaire d’une heure consacré à la vie et la carrière de William Holden. Intitulé William Holden : The Golden Boy, ce module réalisé en 1989, compile les témoignages de comédiens et réalisateurs prestigieux, tels que Robert Mitchum, Glenn Ford, Blake Edwards, Robert Wagner, Sidney Lumet, Robert Wise, Cliff Robertson, posés sur de nombreux extraits des films les plus célèbres de William Holden, sans oublier les archives personnelles commentées par Scott Holden, l’un des fils du comédien. De facture classique, ce documentaire oublie de nombreux films, y compris le magnifique Breezy de Clint Eastwood. Il n’en demeure pas moins informatif.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et une galerie de photos et d’affiches.

L’Image et le son

Quelle restauration ! Ce master HD (1080p) permet aux spectateurs de redécouvrir Alvarez Kelly dans de superbes et inédites conditions techniques, même si les puristes risquent de rechigner devant le lissage parfois excessif du grain original. Les volontés artistiques du mythique chef opérateur Joseph MacDonald (La Poursuite infernale, Niagara, La canonnière du Yang-Tsé) sont néanmoins respectées et nous avons l’impression de redécouvrir complètement ce western d’Edward Dmytryk. La copie est souvent sidérante de beauté et de stabilité, le nouvel éclat des couleurs est saisissant. Les noirs sont concis, le piqué vif et acéré, la propreté impressionnante, les détails sur le cadre large sont légion et les contrastes pointus, y compris sur les séquences en intérieur. Les gammes chatoyantes sont harmonieuses et le relief omniprésent. Signalons tout de même quelques plans où le grain semble plus appuyé, visiblement sur des stock-shots, tout comme de sensibles fourmillements durant les scènes où les comédiens ont tourné devant une transparence.

Malgré la réussite du doublage français, privilégiez évidemment la version originale, plus dynamique et équilibrée que son homologue, notamment en ce qui concerne la délivrance des dialogues. La piste française place les voix trop en avant, au détriment des effets annexes et de la musique. L’éditeur a quand même mis le paquet en proposant deux pistes DTS-HD Master audio bien nettoyées, bien que l’ensemble puisse paraître « trop » propre et artificiel. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Blood Father, réalisé par Jean-François Richet

BLOOD FATHER réalisé par Jean-François Richet, disponible en DVD et Blu-ray le 23 janvier 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Mel Gibson, Erin Moriarty, Diego Luna, Michael Parks, William H. Macy, Miguel Sandoval

Scénario : Peter Craig, Andrea Berloff d’après le roman de Peter Craig

Photographie : Robert Gantz

Musique : Sven Faulconer

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

John Link n’a rien d’un tendre : ex-motard, ex-alcoolique, ex-taulard, il a pourtant laissé tomber ses mauvaises habitudes et vit reclus dans sa caravane, loin de toute tentation.
C’est l’appel inattendu de sa fille Lydia, 17 ans, qui va lui faire revoir ses plans de se tenir tranquille…
Celle-ci débarque chez lui après des années d’absence, poursuivie par des narcotrafiquants suite à un braquage qui a mal tourné.
Lorsque les membres du cartel viennent frapper à la porte de John, ils sont loin de se douter à qui ils ont affaire…

Il serait faux de dire que Blood Father signe « le retour » de Mel Gibson. En effet, si le comédien ne tourne plus autant que dans les années 1980-90, il n’a pour ainsi dire jamais arrêté d’un côté ou de l’autre de la caméra. Après le thriller Hors de contrôle (Martin Campbell) et le drame Le Complexe du castor (Jodie Foster), Mel Gibson a ensuite fait place à l’action avec le jouissif Kill the Gringo (Adrian Grunberg), la séquelle Machete Kills (Robert Rodriguez) et le décevant Expendables 3 (Patrick Hughes) dans lequel il incarne le bad guy que doivent affronter Sylvester Stallone et sa clique. Alors que se profilait à l’horizon la sortie de son nouveau film en tant que réalisateur, le formidable Tu ne tueras point, Mel Gibson a eu le temps de jouer les papas protecteurs dans Blood Father de Jean-François Richet.

L’écrivain Peter Craig adapte lui-même son propre roman. Capable du meilleur (The Town) comme du pire (les deux derniers volets de la saga Hunger Games), Peter Craig livre à notre cinéaste national un scénario de pure série B. Cela faisait plus de dix ans que Jean-François Richet n’avait pas tourné pour un studio américain, après sa première et très réussie incursion avec le remake d’Assaut de John Carpenter. Suite au succès international du diptyque (bancal) consacré à Jacques Mesrine, Richet attendait une proposition alléchante. Emballé par l’histoire de Blood Father, il propose le premier rôle à Mel Gibson et lui envoie les Blu-ray des Mesrine. Le comédien accepte immédiatement la proposition. Et il faut dire que sans lui Blood Father n’aurait pas grand intérêt. A maintenant 60 ans, Mel Gibson est encore plus charismatique et magnétique qu’avant avec son visage creusé par les rides et sa barbe hirsute grisonnante. Son jeu est toujours aussi intense, ses yeux brillent de la même flamme que dans le premier volet de la franchise L’Arme fatale, bref Mel Gibson est devenu un monstre d’Hollywood.

Intégralement tourné dans les décors naturels du Nouveau Mexique, Blood Father n’a aucune autre prétention que de divertir les spectateurs. Jean-François Richet signe un thriller basique, mais solidement réalisé, brutal, carré, bien photographié, non dénué d’humour et d’émotions, et de très bons numéros d’acteurs, surtout entre Mel Gibson et William H. Macy, qui font oublier l’erreur de casting avec le fade Diego Luna en petite frappe pathétique. La jeune actrice Erin Moriarty s’en sort bien dans le rôle de la fille fugueuse et dopée, qui a fait une grosse bêtise et qui vient se réfugier auprès de son père buriné, ancien taulard et alcoolique, qui tient maintenant un petit salon de tatouage dans sa roulotte. Mais ceux qui en ont après sa fille ne s’attendaient pas à ce que son papounet sorte la pétoire.

Pas besoin d’en savoir plus sur les personnages, puisque Mel Gibson apporte avec lui près de 40 ans de cinéma et de personnages emblématiques, dont John Link serait en fait une sorte de synthèse. On pense à Mad Max, L’Arme fatale, Comme un oiseau sur la branche, Payback et plus récemment au susnommé Kill the Gringo. Mel Gibson est et restera un immense acteur. Blood Father remplit son contrat, sans se forcer, mais avec un atout de premier choix et qui se place nettement au-dessus du lot des quinqua-sexa-justiciers comme dans l’improbable trilogie Taken ou récemment de The Revenge avec un Travolta moumouté.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Blood Father, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. La jaquette reprend le visuel de l’affiche française, excepté le Steelbook qui arbore celui du visuel US.

En plus de la bande-annonce en version française, l’éditeur livre une interview (10’) de Jean-François Richet et Mel Gibson enregistrés au Festival de Cannes en 2016, entrecoupée par d’autres propos – en français cette fois – du réalisateur seul en scène. Les deux collaborateurs sont en pleine promo et reviennent sur la genèse du projet, sur la motivation des personnages, sur les thèmes du film. Dans son entretien individuel, Richet parle de Mel Gibson et du travail avec le comédien. On aurait aimé beaucoup plus de suppléments et notamment retrouver le making of diffusé sur Canal+.

L’Image et le son

La photographie de Blood Father est signée Robert Gantz, chef opérateur complice de Jean-François Richet depuis Assaut sur le central 13. Ce master HD est à la hauteur des espérances et restitue les partis pris esthétiques originaux à travers des contrastes riches et léchés, une colorimétrie vive et scintillante, des noirs denses, une luminosité de tous les instants, un piqué aux petits oignons, un léger grain et une profondeur de champ appréciable. Le plus impressionnant s’avère la restitution des gros plans, en particulier sur Mel Gibson. Le codec AVC consolide l’ensemble avec fermeté, le relief des matières est élégant et ne cesse de flatter la rétine.

Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre deux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 français et anglais, efficaces autant dans les scènes d’affrontements secs que dans les séquences plus calmes. Les quelques pics de violence, poursuites et fusillades peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales, avec les balles qui environnent le spectateur. Les effets annexes sont très présents et dynamiques, les voix solidement exsudées par la centrale, tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun. La spatialisation est en parfaite adéquation avec le ton du film. A titre de comparaison, la version originale l’emporte sur son homologue du point de vue délivrance des dialogues et richesse des effets. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale. L’éditeur joint également deux pistes Stéréo, qui s’en sortent admirablement malgré le seul usage des enceintes avant, ainsi qu’une piste en Audiodescription et des sous-titres français destinés au public sourd et malentendant. Le changement de langue est verrouillé à la volée et nécessite le retour au menu contextuel. Que les puristes soient rassurés, le grand Jacques Frantz assure toujours le doublage français de Mel Gibson.

Crédits images : © SND / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Maison des étrangers, réalisé par Joseph L. Mankiewicz

LA MAISON DES ÉTRANGERS (House of Strangers) réalisé par Joseph L. Mankiewicz, disponible en DVD et Blu-ray le 2 novembre 2017 chez ESC Conseils

Acteurs : Edward G. Robinson, Susan Hayward, Richard Conte, Luther Adler, Paul Valentine, Efrem Zimbalist Jr., Debra Paget

Scénario : Philip Yordan d’après le roman de Jerome Weidman

Photographie : Milton R. Krasner

Musique : Daniele Amfitheatrof

Durée : 1h41

Date de sortie initiale : 1949

LE FILM

Max Monetti, ancien avocat, vient de purger sept années de prison, une peine qu’il a prise à la place de son père Gino, mort durant son incarcération. Max se remémore le passé, Gino Monetti a été accusé d’activités bancaires frauduleuses et se retrouve au banc des accusés, ses trois autres fils, employés du père, trop désireux de lui succéder à la banque se sont désolidarisés de lui et de Max qui s’employait à défendre Gino. Max se fait arrêter après avoir essayé de soudoyer une femme du jury pour sauver son père. Avant de mourir, Gino saura attiser la haine de Max envers ses trois frères. À présent Max est décidé à se venger d’eux mais Irène Bennett, son ancienne maîtresse, essaye de l’en dissuader…

Tout d’abord scénariste (Alice au pays des merveilles de Norman Z. McLeod, L’Ennemi public n°1 de W.S. Van Dyke), puis producteur (Furie de Fritz Lang, Indiscrétions de George Cukor), Joseph L. Mankiewicz (1909-1993) passe derrière la caméra en 1946 avec Le Château du dragon, en remplacement d’Ernst Lubitsch, victime d’une crise cardiaque. Suite à ce premier et grand succès, Mankiewicz jette son dévolu sur une pièce de Lee Strasberg, qu’il adapte avec Howard Dimsdale. Ce sera Quelque part dans la nuit, un film noir dans le style du Faucon maltais de John Huston (1941) et du Grand sommeil de Howard Hawks, par ailleurs sorti quelques semaines après le film de Mankiewicz. Suivront Un mariage à Boston (1947), L’Aventure de madame Muir (1947), Escape (1948) et Chaînes conjugales (1949). Autant dire que Joseph L. Mankiewicz a le vent en poupe à la fin des années 1940. Il clôt cette fabuleuse décennie avec La Maison des étrangersHouse of Strangers, fabuleux drame familial qui annonce notamment Le Parrain plus de 20 ans avant.

New York, 1939. Max Monetti est de retour. Cet ancien avocat vient de purger sept ans de prison. Son père Gino, humble coiffeur sicilien devenu un grand banquier respecté à la force du poignet , a été soupçonné de pratiques illégales. Ces accusations ont précipité sa mort pendant la détention de Max. Joe, Pietro et Tony, les trois autres fils de Gino, qui avaient évincé leur propre père et enregistré la banque à leur nom, voient d’un mauvais oeil le retour du fils prodigue. La Maison des étrangers est un récit dense, passionnant et demeure dans la mémoire des cinéphiles grâce à l’immense interprétation du comédien Edward G. Robinson, récompensé par le Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes en 1949. Basé sur le roman de Jerome Weidman, transposé par Joseph L. Mankiewicz lui-même, House of Strangers laisse pantois d’admiration par la virtuosité de la mise en scène (la transition vers le passé est splendide), la beauté de la photographie de Milton R. Krasner (Le Retour de l’Homme invisible, Le Spectre de Frankenstein, La Femme au portrait) et l’intensité des comédiens avec notamment Susan Hayward, qui retrouvera Mankiewicz en 1967 pour le délicieux Guêpier pour trois abeilles, Richard Conte, Luther Adler et Paul Valentine. Mais comme nous l’avons dit, celui qui s’élève au-dessus de tous est l’immense Edward G. Robinson qui bouffe l’écran à chaque apparition avec sa silhouette reconnaissable et son accent italien. Bien avant Marlon Brando dans le rôle mythique de Don Vito Corleone, Edward G. Robinson compose un patriarche sicilien qui a embrassé le rêve américain. Lui qui était simple coiffeur sans un sou dans son pays est devenu un homme puissant, qui brasse des millions de dollars, tout en venant en aide aux plus démunis dans le quartier new-yorkais grouillant de Little Italy. Il règne sur sa famille, sa femme et leurs quatre fils, avec une main de fer et crée la jalousie des frères de Max en se montrant plus attentionné avec lui, tout en le couvrant d’éloges. Ou comment léguer la haine en héritage.

Chef d’oeuvre sombre et pessimiste, même si Mankiewicz montre que la vengeance n’est pas un plat qui se mange froid, mais qui ne se mange pas, La Maison des étrangers subjugue, choque, émeut et laisse une empreinte indélébile dans le coeur des spectateurs.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de La Maison des étrangers, disponible chez ESC Conseils, repose dans un très élégant boîtier classique de couleur noire. La jaquette estampillée « Hollywood Legends » ne manque pas de classe. Le menu principal est animé et musical.

Le film est accompagné d’une passionnante présentation de La Maison des étrangers par Olivier Père (30’). Le directeur cinéma d’Arte dresse tout d’abord un portrait du réalisateur Joseph L. Mankiewicz et revient sur ses débuts au cinéma. Puis Olivier Père en vient au film qui nous intéresse en indiquant que House of Strangers demeure souvent dans l’ombre des films plus célèbres du cinéaste, en l’occurrence par le grand succès précédent de Chaînes conjugales. S’il ne bénéficie pas du même statut que ses autres grands classiques, ce septième long métrage méconnu n’en demeure pas moins un autre chef d’oeuvre de Mankiewicz. Ensuite, Père croise le fond avec la forme, se penche sur les personnages, la structure du film, le casting, et dresse un parallèle avec Le Parrain que Francis Ford Coppola réalisera plus de vingt ans après.

L’Image et le son

Un Blu-ray au format 1080p (AVC). Ce nouveau master restauré en HD au format respecté 1.33 de La Maison des étrangers est honnête, mais il faut bien avouer que l’image reste marquée par des griffures et des rayures verticales, des effets de pompage, un fourmillement, des poussières et autres scories, sans oublier un piqué émoussé. Toutefois, diverses séquences parviennent à sortir du lot, à l’instar du match de boxe, et la copie finit par trouver une stabilité et un équilibre convenables. La définition ne manque pas d’attraits, les détails sont élégants, tout comme le grain original heureusement conservé. Signalons que le Blu-ray de La Maison des étrangers proposé par ESC Conseils est une exclusivité mondiale.

L’unique piste anglaise bénéficie d’un encodage en DTS HD-Master Audio Mono 2.0. Si quelques saturations et craquements demeurent inévitables surtout sur les dialogues aigus, l’écoute se révèle fluide et limpide. Notons toutefois un léger bruit de fond, ainsi que diverses sautes de son et problèmes de traduction, parfois trop approximative, sans parler de certaines répliques même pas traduites et de fautes d’accentuation. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © ESC Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr