Test Blu-ray / La Garçonnière, réalisé par Billy Wilder

LA GARÇONNIÈRE (The Apartment) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray chez Rimini Editions le 27 février 2018

Avec :  Jack Lemmon, Shirley MacLaine, Fred MacMurray, Ray Walston, Jack Kruschen, David Lewis, Hope Holiday, Joan Shawlee, Naomi Stevens…

Scénario : Billy Wilder, I.A.L. Diamond

Photographie : Joseph LaShelle

Musique : Adolph Deutsch

Durée : 2h05

Date de sortie initiale : 1960

LE FILM

C.C. Baxter est employé à la Sauvegarde, grande compagnie d’assurance. Dans l’espoir d’un avancement il prête souvent son appartement à ses supérieurs qui y emmènent leurs petites amies. Un jour le chef du personnel le convoque et lui apprend qu’il sait tout et lui demande aussi sa clé. Baxter est enfin promu. Mais ce qu’il ignorait c’est que le chef du personnel emmenait dans son appartement la femme dont il était amoureux.

Avant de s’exiler à Hollywood suite à l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir, Samuel Wilder dit Billy Wilder (1906-2002), scénariste austro-hongrois débarque à Paris où il tourne son premier long métrage en 1934, Mauvaise graine, avec Danielle Darrieux. Arrivé sur la terre de l’Oncle Sam et ne parlant quasiment pas anglais, il parvient tout de même à se faire engager à la Paramount Pictures comme scénariste et script-doctor. Il est très vite remarqué par Ernst Lubitsch, pour lequel Billy Wilder écrit La Huitième femme de Barbe-Bleue et Ninotchka. En 1942, il passe derrière la caméra pour Uniformes et jupons courtsThe Major and the Minor, comédie sur fond de guerre qu’il écrit avec son complice Charles Brackett. C’est un succès et la carrière de réalisateur de Billy Wilder est lancée. S’ensuivent Les Cinq secrets du désert (1943), le film noir Assurance sur la mortDouble Indemnity (1944), le documentaire Death Mills (1945), sur la découverte des camps de concentration nazis par les Alliés, le drame Le Poison (1945), récompensé par la Palme d’or au festival de Cannes, mais aussi par quatre Oscars, ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur acteur pour Ray Milland et du meilleur scénario adapté. Billy Wilder s’octroie ensuite une récréation avec la comédie musicale La Valse de l’empereur avec Bing Crosby et Joan Fontaine, avant de se consacrer à La Scandaleuse de Berlin avec Marlene Dietrich. Le succès international est au rendez-vous. La décennie suivante, Billy Wilder accélère la cadence et enchaîne entre autres Boulevard du crépuscule (1950), Stalag 17 (1953), Sabrina (1954), Sept ans de réflexion (1955), Ariane (1957). Puis, Billy Wilder fait une rencontre déterminante, celle avec le comédien Jack Lemmon, qu’il engage pour donner la réplique à Marilyn Monroe et Tony Curtis dans l’extraordinaire Certains l’aiment chaud (1959). A partir de ce triomphe mondial, le cinéaste entame alors les années 1960 et une nouvelle étape de sa carrière en signant La GarçonnièreThe Apartment, critique acerbe et féroce du monde du travail et sur les pauvres conditions des petits employés. Et c’est un nouveau chef d’oeuvre dans l’une des plus remarquables filmographies de toute l’histoire du cinéma.

C. C. Baxter (Jack Lemmon), dit « Buddy », employé d’une importante compagnie d’assurances new-yorkaise, met son appartement à disposition de ses supérieurs comme garçonnière par complaisance et servilité; il obtient alors des avantages professionnels…et il faut bien payer le loyer. La gestion des quatre « co-locataires » est un casse-tête, son appartement de célibataire est laissé sens dessus-dessous, ses voisins et sa logeuse sont indignés de ce défilé de jolies filles. Son DRH Jeff D. Sheldrake (Fred MacMurray), apprenant cela, lui demande également de lui prêter l’appartement et lui octroie une promotion en échange. Mais C. C. ignore que Sheldrake souhaite utiliser cette garçonnière pour y retrouver Fran (Shirley MacLaine), une liftière de la compagnie, dont Baxter est vainement épris.

La Garçonnière, c’est comme qui dirait la perfection du 7e art. Cinq Oscars, dont celui du meilleur Film sont venus couronnés le 17e film de Billy Wilder. Le réalisateur mêle la comédie au drame avec une virtuosité de chaque instant. Si l’on rit très souvent, le fond de La Garçonnière est triste, voire tragique puisque le héros, magistralement incarné par un immense Jack Lemmon, renonce à sa vie intime, au point de ne plus pouvoir dormir chez lui dans son propre lit, pour espérer en retour un poste bien placé dans sa société. Dans La Garçonnière, les personnages sont animés par la course à la réussite, au point de s’oublier eux-mêmes. A la fois comédie romantique et drame social, The Apartment possède une tonalité sombre et mélancolique qui a toujours effleuré dans le cinéma de Billy Wilder, et pas seulement dans ses œuvres les plus dramatiques.

Billy Wilder raconte comment deux êtres solitaires, au bord de la dépression, se rencontrent, pour finalement retrouver l’espoir, l’entraide, et bien sûr l’amour. Perdus dans les incroyables décors d’Alexandre Trauner, magnifiquement photographiés par Joseph LaShelle, avec une utilisation du CinemaScope qui appuie la profondeur de champ et donc la perte de l’individu, les protagonistes se confrontent, se rentrent dedans, s’observent, s’apprivoisent, puis prennent finalement le temps de se connaître. Deux électrons libres agités autour de l’atome-entreprise, qui décident de stopper leur course effrénée pour faire le point sur eux-mêmes. Alors que les spectateurs n’attendent qu’une chose, que Jack Lemmon et la merveilleuse Shirley MacLaine – récompensée par la Coupe Volpi de la meilleure interprétation féminine à la Mostra de Venise en 1960 – s’embrassent à l’écran, Billy Wilder décide de préserver cette intimité. Il termine son film sur une déclaration d’amour qui n’a pas de réponse directe, du moins pas avant le THE END sur lequel nous quittons Fran et CC.

Dialogues cocasses et tordants, comédie tendre et cynique sur l’amour, critique du puritanisme hypocrite, le mensonge, les faux-semblants, la mécanique Wilder fonctionne à plein régime. La Garçonnière est un film immense.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de La Garçonnière, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui très élégant. Le menu principal est animé sur la scène d’ouverture du film en version française. N’oublions pas le livret de 32 pages concocté par Marc Toullec, qui résume tous les arguments avancés au fil des nombreux suppléments.

Saluons l’éditeur qui nous permet non seulement de bénéficier du chef d’oeuvre de Billy Wilder dans une magnifique copie, mais également de prolonger ce plaisir avec près de 2h30 de suppléments.

On commence par une passionnante conversation (46’) sur La Garçonnière, entre Mathieu Macheret (Le Monde) et Frédéric Mercier (Transfuge). Face à face, les deux journalistes-critiques cinéma croisent le fond et la forme du film de Billy Wilder, en le replaçant tout d’abord dans la carrière du maître. Puis, les interventions des deux confrères se complètent parfaitement, l’un et l’autre rebondissant sur les arguments avancés, sans aucun temps mort. La genèse du film, l’écriture du scénario, les thèmes explorés, les partis pris, les intentions, le casting, la collaboration Billy Wilder-Jack Lemmon, la psychologie des personnages principaux, les décors d’Alexandre Trauner, le rejet des conventions et bien d’autres sujets sont abordés avec une passion contagieuse !

Le second bonus donne la parole à Didier Naert, peintre et architecte, qui revient sur sa rencontre, sa collaboration (en 1975 sur L’Homme qui voulut être roi de John Huston) et sur le travail du chef-décorateur Alexandre Trauner sur La Garçonnière (24’). Didier Naert évoque les débuts de Trauner dans le monde du cinéma, ses rencontres déterminantes (Marcel Carné), ses œuvres les plus célèbres. Puis, les associations de Trauner (alors directeur artistique et décorateur) avec Billy Wilder sur La Garçonnière et Irma la douce sont abordées.

Place à la comédienne Hope Holiday (13’), qui interprète Margie Mac Dougall (la femme du bar) dans La Garçonnière, qui intervient ici pour partager ses souvenirs liés au tournage du film de Billy Wilder. Egalement présente au générique d’Irma la Douce, l’actrice née en 1933 se remémore son casting pour obtenir un rôle dans La Garçonnière, puis raconte quelques anecdotes liées au tournage et sur sa collaboration avec Jack Lemmon. Très émue, la gorge serrée, Hope Holiday se met à pleurer en se remémorant tant de bons moments.

Vous pouvez enchaîner avec un essai vidéo centré sur la collaboration Billy Wilder / Jack Lemmon, réalisé par le critique David Cairns (20’). Cette analyse constituée d’extraits et de photographies n’évoque pas seulement La Garçonnière, mais également toutes les autres associations du tandem.

Le module suivant est consacré au comédien Jack Lemmon (1925-2001). Constitué de photos, d’extraits de films et d’interventions du biographe Joe Baltake, de l’historien du cinéma Robert Osborne, des actrices Shirley MacLaine et Hope Holiday, sans oublier le fils de Jack Lemmon, ce petit documentaire de 13 minutes et réalisé en 2007, rend un formidable hommage à l’un des comédiens les plus attachants de l’histoire du cinéma.

En plus de la bande-annonce originale (qui démarre par la dernière séquence du film!), cette section se clôt sur un segment rétrospectif réalisé en 2007 avec les mêmes protagonistes que dans les modules précédents, auxquels s’ajoutent Kevin Lally (auteur d’un livre sur Billy Wilder), Molly Haskell (critique de cinéma), Walter Mirisch (producteur de La Garçonnière), Drew Casper (professeur à l’école de cinéma et de télévision à l’Université de la Californie du Sud). Chacun revient sur la genèse, l’écriture, la mise en scène et tout ce qui concerne La Garçonnière de Billy Wilder.

L’Image et le son

La restauration numérique de La Garçonnière est très impressionnante. Le nouveau master HD (codec AVC, 1080p) au format respecté se révèle extrêmement pointilleux en terme de piqué, de gestion de contrastes (noirs denses, blancs lumineux), de détails ciselés, de clarté et de relief. La propreté de la copie est souvent sidérante, la nouvelle profondeur de champ permet d’apprécier la composition des plans de Billy Wilder et les décors d’Alexandre Trauner. La photo signée Joseph LaShelle (Laura, Hangover Square, Irma la Douce) retrouve une nouvelle jeunesse doublée d’un superbe écrin, et le grain d’origine a heureusement été conservé. Seul petit bémol, l’ouverture constituée de stock-shots reste marquée par des griffures et des points, mais cela reste vraiment anecdotique, car ce Blu-ray est vraiment superbe.

Le remixage de la version originale en DTS-HD Master Audio 5.1 ne profite surtout qu’à la musique du film. Et encore, l’écoute reste essentiellement frontale. N’hésitez pas à sélectionner la piste anglaise DTS-HD Master Audio 2.0 qui contente non seulement les puristes, mais qui se révèle également soignée, fluide et largement suffisante pour créer un grand confort acoustique. La version française DTS-HD Master Audio 2.0 est évidemment anecdotique, même si l’immense Roger Carel prête sa voix extraordinaire à Jack Lemmon, comme cela avait été déjà le cas pour Certains l’aiment chaud et plus tard pour Irma la Douce. Cette piste est plus feutrée, accompagnée d’un léger souffle et de scories.

Crédits images : © Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. All Rights Reserved / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Roar, réalisé par Noel Marshall

ROAR réalisé par Noel Marshall, disponible en combo Blu-ray-DVD-Livret chez Rimini Editions le 6 mars 2018

Avec :  Tippi Hedren, Noel Marshall, Melanie Griffith, John Marshall, Jerry Marshall, Kyalo Mativo, Frank Tom…

Scénario : Noel Marshall

Photographie : Jan de Bont

Musique : Terrence P. Minogue

Durée : Version française (1h28) / Version originale (1h34)

Date de sortie initiale : 1981

LE FILM

Dans le cadre de son étude portant sur les félins sauvages, Hank, scientifique américain, est parti s’installer en Afrique pour vivre parmi ces animaux à la réputation extrêmement dangereuse. Sa maison est un refuge pour plus d’une centaine de fauves que le chercheur élève en toute liberté. Restés aux États-Unis, sa femme Madelaine et ses enfants Melanie, John et Jerry décident de venir lui rendre visite. Mais à leur arrivée, Hank n’est pas là pour les accueillir. À la place, ils découvrent avec effroi les autres habitants qui, en l’absence du maître de maison, ont totalement pris le contrôle du lieu…

« Le film le plus dangereux jamais réalisé » scandait l’affiche à sa sortie en 1981 et maintenant la jaquette du DVD. Les prises de vues de Roar, réalisé par Noel Marshall, ont été effectuées sur cinq années et ont nécessité un budget de 17 millions de dollars et l’aide de 150 fauves. L’histoire du tournage est d’ailleurs plus intéressante que le film lui-même, même si le résultat final demeure ahurissant. Il est vrai que ce seul et unique long métrage de Noel Marshall, habituellement producteur (notamment derrière L’Exorciste), est très impressionnant. Le réalisateur, sa femme Tippi Hedren et sa fille Melanie Griffith, déambulent au milieu de plusieurs dizaines de lions, tigres, panthères, léopards, pumas et guépards, sans aucune protection. En 1970, l’actrice révélée par Alfred Hitchcock dans Les Oiseaux, tourne Satan’s Harvest de et avec George Montgomery qui se déroule en Afrique. Les prises de vues sont difficiles et éprouvantes, Tippi Hedren se retrouve face à un lion, ce qui provoque un tournant dans sa vie. Elle décide alors, avec son mari Noel Marshall, de tourner un film sur ce sujet, Roar, entourée de fauves dans leur milieu naturel. Ce n’est que le début d’une grande aventure qui va s’étaler sur plusieurs années.

Imaginez un remake des Oiseaux avec Hedren où les volatiles seraient remplacés par des fauves ; voilà à quoi ressemble Roar. S’ils souhaitent d’abord travailler avec des animaux sauvages dressés à Hollywood, l’histoire, centrée sur une quarantaine de lions déambulant dans la même maison, obligent les comédiens et la production à avoir recours à leurs propres bestiaux. Ainsi, le couple sauve et élève des jeunes félins dans leur propriété californienne, principalement rescapés des zoos et du monde du cirque, où ils grandissent en toute liberté. Certains dorment même avec le couple.

Comme la « famille » s’agrandit, Tippi Hedren achète un ranch où d’autres félidés, et même des éléphants, y sont recueillis. Le duo hypothèque leurs biens pour accomplir ce projet tourné dans leur ranch. Merveilleusement photographié par Jan de Bont, Roar est une œuvre unique. Un carton d’introduction indique que l’écriture et la réalisation reviennent de droit aux animaux non dressés et en totale liberté devant la caméra. Le nom des fauves est présent au générique à l’instar du reste du casting humain, essentiellement constitué de la famille Marshall. Rétrospectivement, Roar apparaît comme étant un immense et dangereux caprice. Entre les morsures (38 points de suture à la tête pour Hedren, 50 pour Mélanie Griffith), les blessures diverses et les fractures (Hedren se casse une jambe en tombant d’un éléphant), plus de 70 accidents de tournage sont recensés, y compris Jan de Bont scalpé par un fauve lui valant 120 points de suture au cuir chevelu.

Noel Marshall souhaite tourner cette fiction comme un documentaire et s’en remet totalement à ses compagnons imprévisibles. Chaque séquence est donc improvisée, cela se ressent fortement. Si certaines scènes, filmées à l’aide de quatre voire huit caméras, s’étirent parfois en longueur, d’autres ont l’air particulièrement décousues avec un montage très cut. Le tournage connaît ensuite d’autres difficultés, notamment un incendie qui ravage une partie du ranch, ainsi qu’une inondation suite à la rupture d’un barrage. Celui-ci détruit les décors et tue malheureusement plusieurs lions. Les années passent, les millions de dollars s’envolent. Mais persuadés du succès de Roar, Hedren et Marshall parviennent à boucler le tournage en 1980. Cette production insensée sort enfin sur les écrans l’année suivante, à l’exception des Etats-Unis en raison d’une brouille financière avec les distributeurs américains. C’est un échec commercial cuisant, probablement l’un des plus importants de l’industrie cinématographique ; Roar ne rapporte que 2 millions alors qu’il en a coûté 17.

Aujourd’hui, ce drame d’aventure est devenu un véritable objet de curiosité, une folie impensable à concrétiser. Si le récit est prétexte à valoriser les animaux alors que les acteurs se débattent souvent face caméra pour éviter de se faire dévorer et lacérer, l’investissement de l’équipe est de tous les instants. Les passionnés des fauves en auront donc ici pour leur argent.

LE BLU-RAY

2 ans et demi après avoir édité Roar en DVD, Rimini Editions ressort le film de Noël Marshall dans un combo Blu-ray-DVD-Livret de 24 pages écrit par Marc Toullec, consacré aux incroyables conditions de tournage. Le menu principal est animé et musical et propose de visionner le film soit dans sa version française (84’) ou dans sa version originale (90’).

Aucun supplément.

L’Image et le son

Ce transfert Blu-ray offre à Roar un petit dépoussiérage numérique même si la définition est loin d’être parfaite. Par rapport à l’édition SD, les contrastes retrouvent une certaine densité, la luminosité HD est bienvenue et la colorimétrie n’a jamais été aussi vive et saturée. Seulement le grain demeure trop appuyé sur les plans de ciel (d’un bleu cyan plutôt sidérant il faut bien l’avouer), le piqué manque de fermeté, surtout sur les séquences sombres. Comme souvent, c’est le générique qui a subi le plus les outrages du temps mais ce master, bien nettoyé, stable et dépourvu de scories, trouve ensuite et heureusement un équilibre convenable. Notons également que diverses séquences ont été trop lissé, donnant aux visages un aspect cireux et artificiel.

Du point de vue acoustique, la piste française s’en sort étonnamment mieux avec des dialogues plus aérés et un coffre plus puissant. La version anglaise est propre, mais certains échanges demeurent aléatoires et le volume tend à varier au cours d’une même séquence. La version courte est uniquement disponible en version française, tandis que les deux options acoustiques sont proposées à la fois en Stéréo et en DTS-HD Master Audio 5.1 plus anecdotique.

Crédits images : © Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray (édition Bildstörung) / Laurin, réalisé par Robert Sigl

LAURIN réalisé par Robert Sigl, disponible en Blu-ray chez Bildstörung

Avec :  Dóra Szinetár, Brigitte Karner, Károly Eperjes, Hédi Temessy, Barnabás, Kati Sir, Endre Kátay, János Derzsi…

Scénario : Ádám Rozgonyi, Robert Sigl

Photographie : Nyika Jancsó

Musique : Hans Jansen, Jacques Zwart

Durée : 1h23

Date de sortie initiale : 1989

LE FILM

Quelle immense découverte ! Quelle beauté ! Chef d’oeuvre dissimulé du cinéma allemand, Laurin, est le premier long métrage (à ce jour le seul pour le cinéma) réalisé en 1989 par Robert Sigl, après deux courts-métrages, Die Hütte et Der Weihnachtsbaum. Né en 1962, le cinéaste, également comédien, signe un film exceptionnel, à la frontière de plusieurs genres, qui s’inscrit dans la droite lignée de L’Esprit de la ruche (1973) de Victor Erice. Film fantastique, drame sur le deuil, thriller teinté de giallo avec certains éclairages baroques qui rappellent le cinéma de Dario Argento et de Mario Bava, Laurin laisse pantois le spectateur par sa beauté plastique et se révèle par strates jusqu’à un final bouleversant.

Au début du siècle dernier dans un petit village portuaire, la petite Laurin subit les aléas de son père entre ses activités de pêcheur et ses retours, trop brefs, au foyer familial. Désespérée des départs de son mari, la mère de Laurin se perd dans la nuit noire et se retrouve alertée par des cris d’enfants déchirant la forêt environnante ; quant à sa fille, elle aperçoit le visage d’un petit garçon hurlant à la mort à travers la fenêtre de sa chambre, avant de voir une ombre l’emporter…à tout jamais. Cette même nuit, la mère de Laurin décède dans de mystérieuses circonstances…

Dès le générique avec la splendide composition de Hans Jansen et Jacques Zwart, Laurin happe le spectateur pour ne plus le lâcher durant 83 minutes. Les séquences photographiées comme des œuvres du Caravage, Rembrandt et Vermeer instaurent une atmosphère trouble et troublante. Tel un peintre, Robert Sigl compose des plans à la beauté foudroyante matinée de gothique, au milieu de somptueux décors naturels hongrois. Les spectateurs et cinéphiles français qui découvriront Laurin le verront comme un véritable cadeau, à l’instar d’un dialogue intimiste qui s’instaure directement avec le cinéaste.

A la fin des années 1980, Laurin est quasi-anachronique. Si l’oeuvre mystérieuse de Robert Sigl n’est pas explicite, elle n’est en aucun cas hermétique et parlera différemment au spectateur selon son vécu. La forme s’apparente à un enchaînement de rêves, parfois de cauchemars. Récit initiatique, Laurin suit le processus de deuil d’une petite fille de 10 ans, qui vient de perdre sa mère, tandis qu’elle découvre également la brutalité du monde qui l’entoure. Film sur la perte de l’innocence, Laurin parvient à rendre palpable la crasse derrière une esthétique hyper-léchée, appuyant ainsi le fait que la beauté du monde dissimule en réalité des actes morbides. Dóra Szinetár, la jeune comédienne qui interprète le rôle-titre, cloue le spectateur de son regard sombre qui n’est pas sans rappeler celui d’Ana Torrent dans L’Esprit de la ruche comme nous l’indiquions, mais également dans Cría cuervos de Carlos Saura (1976), deux films évidemment très liés. Le spectre de La Nuit du Chasseur de Charles Laughton plane également sur cette histoire.

Tour à tour inquiétant et envoûtant, mélancolique et ambigu, Laurin, récompensé par le Prix du Film Bavarois est un thriller horrifique complexe, mais absolument passionnant, qui ravit autant le coeur et l’esprit, qui flatte les sens du début à la fin. Difficile d’évoquer plus en détails ce « conte de fées pour adulte narré du point de vue d’un enfant » de Robert Sigl sans en révéler davantage, ce qui dénaturerait l’expérience à part entière de Laurin, magnifique trésor du cinéma de genre à réhabiliter de toute urgence.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray chroniqué ici est disponible en import et bénéficie d’une piste de sous-titres français. Vous n’avez donc aucune excuse pour passer à côté de cette merveilleuse édition concoctée par Bildstörung. Deux disques sont présents dans le boitier, glissé dans un surétui cartonné très élégant. Le premier Blu-ray comprend évidemment le film avec le commentaire audio du réalisateur Robert Sigl (non sous-titré). Tout le reste des suppléments est placé sur un second disque. Le menu principal du disque 1 est animé sur la superbe musique du film, celui du second est fixe et musical.

Seul le film dispose de sous-titres français, ce qui est déjà énorme et inespéré. En plus du commentaire audio de Robert Sigl évoqué, l’éditeur propose moult suppléments :

– « Robert Sigl erzählt… » (interview du réalisateur, 28’)


– « 
Der Weihnachtsbaum » (court-métrage de Robert Sigl, 19’) + galerie photos


– Interviews de l’actrice Dóra Szinetár
(17’30), de l’acteur Barnabás Tóth (9’30) et du caméraman Nyika Jancsó (15’), disponibles en anglais, sous-titrées en allemand

– Interview croisée des historiens de cinéma Jonathan Rigby (31’) & Olaf Möller (17’30)
– Making of
(9’30)

– Scènes coupées agrémentées du commentaire de Robert Sigl (19’)
– Aufnahmen von der Verleihung des Bayrischen Filmpreis
(2’30)
– Galerie Photos
Livret de 20 pages

Merci à monsieur Patrick Lang de m’avoir mis ce Blu-ray à disposition !

L’Image et le son

Le master HD (1080p) de Laurin provient d’une restauration 2K réalisée à partir du négatif original 35mm. La beauté de la copie participe évidemment à la découverte du film de Robert Sigl. Quelques-uns rechigneront devant le piqué parfois émoussé, divers flous sporadiques ou la gestion aléatoire des noirs, tantôt denses, tantôt bouchés, mais force est de constater que Bildstörung propose un vrai confort de visionnage. Le grain est quasi-omniprésent, mais que serait l’incroyable photo signée Nyika Jancsó, chef opérateur hongrois, sans cette texture argentique qui ne cesse de ravir les yeux ! Certains plans sortent particulièrement du lot avec des détails riches et précis sur les décors naturel, mais également sur les visages des comédiens et les étoffes. Les contrastes (surtout sur les séquences sombres) apparaissent en parfait accord avec les volontés artistiques originales qui rendent largement indispensable l’élévation du film en Haute Définition, d’autant plus que la copie affiche une remarquable propreté et délivre des clairs-obscurs réellement saisissants.

Cette édition comporte les versions allemande et anglaise. Laurin a été tourné en anglais, mais les sous-titres français traduisent le doublage allemand. Toutefois, nous préférerons visionner Laurin en anglais, qui se suit très bien avec les sous-titres français. Les deux versions disponibles sur le Blu-ray jouissent d’un écrin DTS-HD Master Audio de très bonne qualité. Du point de vue dynamique, la version anglaise l’emporte sur son homologue. Dans les deux cas, la musique est joliment restituée et les saturations évitées.

Crédits images : © Bildstörung / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

 

 

 

Test Blu-ray / The Square, réalisé par Ruben Östlund

THE SQUARE réalisé par Ruben Östlund, disponible en DVD et Blu-ray chez M6 Vidéo le 28 février 2018

Avec :  Claes Bang, Elisabeth Moss, Dominic West, Terry Notary, Christopher Laessø, Marina Schiptjenko, Daniel Hallberg, Sofie Hamilton…

Scénario : Ruben Östlund

Photographie : Fredrik Wenzel

Durée : 2h31

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Christian est un père divorcé qui aime consacrer du temps à ses deux enfants. Conservateur apprécié d’un musée d’art contemporain, il fait aussi partie de ces gens qui roulent en voiture électrique et soutiennent les grandes causes humanitaires. Il prépare sa prochaine exposition, intitulée « The Square », autour d’une installation incitant les visiteurs à l’altruisme et leur rappelant leur devoir à l’égard de leurs prochains. Mais il est parfois difficile de vivre en accord avec ses valeurs : quand Christian se fait voler son téléphone portable, sa réaction ne l’honore guère… Au même moment, l’agence de communication du musée lance une campagne surprenante pour The Square : l’accueil est totalement inattendu et plonge Christian dans une crise existentielle.

Alors c’est ça la Palme d’or 2017 ? Eeeeh ben…Si le but était de récompenser l’un des films les plus mauvais, pédants, interminables et mégalos du Festival de Cannes, alors oui le cinquième long métrage du réalisateur, scénariste, monteur, producteur et directeur de la photographie Ruben Östlund (né en 1974) méritait sa suprême récompense. Révélé en 2014 par Snow Therapy (prix du Jury Un Certain Regard), le cinéaste a carrément pété un câble et signe un film uniquement destiné à flatter ses pairs dans le but de se faire caresser dans le sens du poil. Froid, on pourrait même dire frigorifique, jamais intéressant, interminable, hermétique, The Square est symbolique de ce qu’est devenu le plus célèbre Festival de Cannes, plaire avant tout à l’élite et rejeter le divertissement populaire.

Christian, père divorcé, est le conservateur d’un musée d’art contemporain installé dans le palais royal de Stockholm. Il prépare une exposition intitulée « The Square », simple carré à l’intérieur duquel les spectateurs seront appelés à être altruistes et à mieux prendre en compte les besoins des autres : « Le Carré est un sanctuaire de confiance et de bienveillance. En son sein, nous avons tous les mêmes droits et les mêmes devoirs ». Or, après avoir aidé lui-même dans la rue une femme qui prétendait être attaquée, il constate qu’il s’agissait d’un piège : son téléphone, son portefeuille et ses boutons de manchette en or ont disparu. Bien que Christian soit un homme qui fasse l’aumône aux mendiants d’Europe centrale, il est pris d’une forme de vengeance jubilatoire à leurs égards. En parallèle le vernissage approche : Anne, une journaliste américaine, l’interviewe sur les finalités et les devoirs affichés d’un musée d’art contemporain. Elle se rapproche de lui au cours de la soirée inaugurale de l’exposition. Ils finissent par coucher ensemble, mais Christian se sent déstabilisé par le comportement libre et féministe de la jeune femme. Par ailleurs, un homme atteint du syndrome de Tourette trouble le bon déroulement de la conférence inaugurale de l’artiste invité et célébré. De plus, la soirée de gala organisée par Christian pour récolter des fonds tourne mal : l’artiste Oleg censé imiter un gorille dans le cadre d’une performance artistique va trop loin et fait peur aux convives. Pendant ce temps, une agence de marketing a préparé la campagne de promotion de l’exposition « The Square ». Christian, trop préoccupé par son ressentiment et ses affaires personnelles, laisse publier sur YouTube une vidéo de promotion qu’il n’a même pas regardée au préalable. Or cette vidéo, qui cherche par tous les moyens à créer le « buzz », choque le pays entier par sa violence : on y voit une petite fille blonde sans domicile fixe qui explose dans le carré en un terrible attentat.

Ruben Östlund explique ses intentions : « Tout comme Snow Therapy, The Square est un film dramatique et satirique. Je voulais faire un film élégant en me servant de dispositifs visuels et rhétoriques pour bousculer le spectateur et le divertir. Sur le plan thématique, le film aborde plusieurs sujets, comme la responsabilité et la confiance, la richesse et la pauvreté, le pouvoir et l’impuissance, l’importance croissante que l’on accorde à l’individu par opposition à la désaffection vis-à-vis de la communauté et la méfiance à l’égard de l’État en matière de création artistique et de médias ». Le problème avec The Square, c’est que le réalisateur se tire lui-même une balle dans le pied. En voulant critiquer le monde de l’art contemporain, Ruben Östlund signe un objet destiné uniquement à une certaine élite qui se pâmera devant des images lisses dignes d’une expo vidéo. En fait, en voulant parler de beaucoup de choses, comme l’isolement et le repli sur elles-mêmes des classes privilégiées, Östlund finit par ne parler de rien.

Les images s’enchaînent sans rythme, l’ennui s’installe dès le premier quart d’heure alors que le film dure 2h30 ! Autant dire que le calvaire est infernal et que rien, à part l’apparition de la géniale Elisabeth Moss et le jeu investi de Claes Bang, ne relève l’intérêt de la « chose ». Ce n’est pas non plus la fameuse séquence de l’homme-singe qui réveillera les spectateurs déjà endormis depuis belle lurette. En l’écoutant, Ruben Östlund indique vouloir parler de l’individualisme grandissant dans les sociétés contemporaines, du fossé toujours plus profond entre les classes sociales. Des sujets pas inintéressants certes, d’autant plus quand la Suède est encore considérée – à tort – comme l’un des pays les plus égalitaires au monde, mais pourquoi ces partis pris ? Pourquoi avoir recours à de tels procédés qui excluent forcément les spectateurs qui n’ont pas accès à une certaine forme de culture ? Pourquoi jouer au plus intelligent et de ce fait rejeter la possibilité d’un dialogue ?

Ruben Östlund – qui s’inspire d’ailleurs d’un véritable projet artistique comme celui montré dans le film, exposé dans le sud de la Suède – se contredit quand il explique vouloir divertir son audience. The Square se veut satirique et ironique, il n’est juste qu’ennui et nombriliste. Seule une certaine « presse spécialisée », qui ne s’est d’ailleurs pas gênée pour se rouler dedans en poussant des cris de joie a porté The Square jusqu’au Graal ultime. Ou quand la Palme de l’intelligentsia – qu’on imagine aisément se diriger vers le buffet garni en sortant de la salle en oubliant rapidement que le réalisateur avait voulu au départ se foutre de leurs tronches – l’emporte sur la Palme du coeur, des sentiments et de l’âme comme 120 battements par minute. C’est à n’y plus rien comprendre, mais cela fait très longtemps que le Festival de Cannes est devenu une caricature de ce qu’il était (rendez-nous La Grande bouffe !) et qu’il n’a plus aucun intérêt. Cela passerait si le réalisateur avait à coeur de cracher dans la soupe, mais il semble atteint du même narcissisme exacerbé que son confrère scandinave Nicolas Winding Refn, ce qui fausse d’emblée le propos et surtout la sincérité de The Square.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de The Square, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

En ce qui concerne les suppléments, passons rapidement sur les trois galeries déroulantes (photos de tournage, rétrospective des critiques positives et les ébauches d’affiches internationales) qui font office de remplissage, pour évoquer tout d’abord le making of de la scène centrale du film, par ailleurs reprise pour l’affiche. Intitulé de manière prétentieuse « Making of d’une scène d’anthologie », ce documentaire de douze minutes donne un aperçu de la journée de répétition et des trois jours de tournage qui ont été nécessaires au réalisateur Ruben Östlund et à son équipe pour mettre en boite cette séquence déconcertante où la performance d’un homme-singe tourne mal au cours d’un dîner mondain. Le metteur en scène s’entretient avec ses comédiens et indique qu’il ne s’est jamais autant amusé sur un plateau.

S’ensuit une compilation des essais et scènes de casting de certains comédiens (5’), ainsi que divers entretiens (9′) de Ruben Östlund, Elisabeth Moss et Claes Bang réalisés lors de la présentation de The Square au Festival de Cannes. La genèse du film, les conditions de tournage, le casting, le travail avec le réalisateur sont passés en revue.

L’Image et le son

Tourné avec la caméra Arri Alexa XT, The Square débarque donc en Blu-ray. Les partis pris sont à l’image du film, froids, glacials, sans aucune aspérité. A côté de ça, la clarté est de mise, le piqué quasi-chirurgical, les contrastes denses et le relief omniprésent.

Les mixages anglais/suédois et français DTS-HD Master Audio 5.1 se révèlent particulièrement riches et instaurent un large confort acoustique. Dans les deux cas, la spatialisation musicale demeure évidente, les latérales soutiennent l’ensemble comme il se doit, les ambiances naturelles ne manquent pas tandis que le caisson de basses intervient à bon escient. Deux DTS-HD Master Audio 2.0, forcément moins enveloppantes, sont également disponibles. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © SND M6 Vidéo / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Mortelles confessions, réalisé par Pete Walker

MORTELLES CONFESSIONS (House of Mortal Sin) réalisé par Pete Walker, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Artus Films le 6 mars 2018

Avec :  Anthony Sharp, Susan Penhaligon, Stephanie Beacham, Norman Eshley, Sheila Keith, Hilda Barry…

Scénario : Pete Walker, David McGillivray

Photographie : Peter Jessop

Musique : Stanley Myers

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1976

LE FILM

Jenny Welch vit avec sa soeur Vanessa, et mène une vie amoureuse instable après qu’elle s’est faite quitter par son amant. Elle se met alors à fréquenter un vieil ami d’enfance, Bernard, devenu prêtre. Devant la faiblesse de la jeune femme, il l’invite à aller en confessions avec le père Meldrum, un prêtre acariâtre et frustré. Ce dernier va alors prendre pour mission divine de « purifier » Jenny et de préserver leur étrange relation.

Encore plus radical, encore plus sombre et pessimiste que FlagellationsHouse of Whipcord, voici Mortelles confessionsHouse of Mortal Sin, toujours écrit par David McGillivray et réalisé par le cinéaste britannique Pete Walker en 1978. Le temps de la sexploitation est bien loin et le réalisateur confirme son talent pour mettre en scène l’horreur et la peur au quotidien. Mortelles confessions va encore plus loin dans le malaise lié à l’hégémonie des institutions. Par son titre, House of Mortal Sin, découle de House of Whipcord et prend le spectateur à la gorge du début à la fin en se focalisant sur le personnage d’un prêtre fou, qui séquestre sa vieille mère et qui n’hésite pas à tuer ses ouailles qui se sont écartées du droit chemin. Pete Walker s’en prend ici au célibat des prêtres et se penche sur la folie qui peut s’emparer de l’homme sexuellement frustré. Thriller tendu, audacieux et violent, emblématique de la situation politique britannique alors extrêmement rigoriste et rétrograde, Mortelles confessions est un vrai bijou.

Jenny (Susan Penhaligon) rencontre inopinément Bernard (Norman Eshley), un ancien copain devenu prêtre en quête de logement. Habitant avec sa sœur Vanessa (Stephanie Beacham), elle l’héberge. Son petit ami l’ayant quitté, Jenny souhaite parler avec Bernard de ce qui la rend malheureuse. Au confessionnal, elle tombe sur le père Xavier Meldrum (Anthony Sharp) qui lui indique « Ne soyez pas gênée de parler sexualité avec moi ! ». Ce dernier va vouloir la prendre sous son aile, avec pour seul objectif de prendre pour action divine de purifier la jeune fille et de s’attaquer à tout ce qui entravera à une éventuelle liaison. Du chantage, Meldrum va très vite passer au meurtre en s’en prenant aux proches de Jenny. Quand il rentre chez lui, le prêtre passe du temps avec sa mère souffrante (et séquestrée), surveillée par la gouvernante borgne Miss Brabazon (glaçante Sheila Keith, actrice fétiche de Pete Walker) qui aime la martyriser. De son côté, Bernard tombe amoureux de Vanessa et décide de donner sa démission.

Pete Walker n’a peur de rien et surtout pas de dire haut et fort de ce que tout le monde pense habituellement tout bas. Le célibat des prêtres et donc la question de la sexualité chez les hommes d’église, mais également leur immunité et leur impunité se trouvent au coeur de Mortelles confessions. Cette frustration et cette schizophrénie sont incroyablement rendues par Anthony Sharp, comédien anglais vu chez Stanley Kubrick (Barry Lyndon, Orange mécanique), dans le James Bond non-officiel Jamais plus jamais et dont la carrière à la télévision et au théâtre en rendrait jaloux plus d’un. Exceptionnel, flippant, repoussant, Anthony Sharp incarne un monstre humain, rendu cinglé par une des règles archaïques de sa profession. Il faut dire qu’on comprend son trouble devant les charmes de Susan Penhaligon et ceux de la pulpeuse Stephanie Beacham, oui oui, la Sable Colby de la série Dynastie !

Pete Walker rue dans les brancards et use du thriller psychologique teinté de giallo (quelques scènes sont très brutales) mâtiné d’un formidable cynisme pour appuyer son message, même si le réalisateur a toujours nié faire du cinéma politique et social. Aujourd’hui, Mortelle confessions, ainsi que la filmographie de Pete Walker, méritent d’être franchement reconsidérés.

LE BLU-RAY

Avec Flagellations (dernièrement chroniqué dans nos colonnes) et Mortelles confessions, l’éditeur Artus Films signe ses premiers pas dans le domaine de la Haute-Définition. Les films de Pete Walker sont bien pris en charge puisque disponibles dans de beaux combos Blu-ray-DVD. Le visuel de Mortelles confessions est attractif et la jaquette glissée dans un boîtier classique de couleur bleue. Le menu principal est fixe et muet.

Après David Didelot, place à Alain Petit. L’historien du cinéma propose une présentation de Mortelles confessions (19’). Si certains propos sur Pete Walker font écho avec ceux entendus lors du brillant exposé de son confrère sur la galette de Flagellations, Alain Petit ne manque pas d’arguments pour défendre à son tour les œuvres du cinéaste qu’il affectionne tout autant. Le fond et la forme sont ainsi mis en parallèle. On apprend également que le rôle du prêtre Meldrum avait été proposé à Peter Cushing, qui avait été obligé de réfuser car malheureusement déjà pris sur un autre film. Le casting est également passé au peigne fin.

L’Image et le son

A l’instar de Flagellations, Artus Films déroule le tapis rouge au film de Pete Walker avec un très beau master Haute-Définition (1080p, AVC). Ce traitement permet de (re)découvrir Mortelles confessions dans les meilleures conditions techniques possibles. Dès le générique, la propreté est indéniable, la copie est stable, le grain original flatteur, le piqué aiguisé et la photo souvent ouatée du chef opérateur Peter Jessop (Schizo, Frightmare) est respectée. Les quelques poussières et griffures qui ont pu échapper à la restauration demeurent subliminales. N’oublions pas l’élégante tenue des contrastes.

Point de version française ici. Le mixage anglais DTS HD Master Audio Mono 2.0 aux sous-titres français (non imposés) instaure une écoute propre avec parfois quelques sensibles chuintements dans les aigus, mais rien de bien méchant.

Crédits images : © Artus Films Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Les Nouvelles Aventures de Cendrillon, réalisé par Lionel Steketee

LES NOUVELLES AVENTURES DE CENDRILLON réalisé par Lionel Steketee, disponible en DVD et Blu-ray chez Pathé le 21 février 2018

Avec :  Marilou Berry, Arnaud Ducret, Josiane Balasko, Didier Bourdon, Vincent Desagnat, Jérôme Commandeur, Joséphine Draï, Camille Verschuere…

Scénario : Daive Cohen

Photographie : Stéphane Le Parc

Musique : Maxime DesprezMichaël Tordjman

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

C’est l’anniversaire de Julie mais elle semble être la seule à s’en souvenir… Jusqu’à ce que Marco, l’homme qu’elle aime secrètement, l’appelle et lui annonce qu’il va passer chez elle pour lui déposer son fils car la baby-sitter a eu un contretemps. Julie est effondrée, tout le monde la considère comme une boniche. Seule avec ce petit garçon, particulièrement odieux, Julie décide de lui raconter l’histoire de Cendrillon… enfin presque.

Il fallait s’y attendre. Ou pas. Le triomphe des Nouvelles Aventures d’Aladin (4,5 millions d’entrées) a donné quelques idées aux producteurs, dont celle d’étendre cet « univers » à l’instar du Marvel Cinematic Universe aux Etats-Unis ! Ouais, bon, on ne sait pas si le concept ira bien loin, toujours est-il que Les Nouvelles Aventures de Cendrillon ont donc vu le jour immédiatement après. S’il n’a pas connu le même destin dans les salles avec un peu plus de 800.000 entrées, cette nouvelle relecture du conte de Charles Perrault est contre toute attente plus amusant que le truc doré avec Kev Adams.

Tout d’abord, la mise en scène de Lionel Steketee, ancien premier assistant sur de grosses productions comme Le Pacte des loups, Hôtel Rwanda, Perdus dans l’espace, Lucky Luke et Fatal, puis coréalisateur à succès de Case départ et Le Crocodile du Botswanga est bien plus agitée et efficace que celle d’Arthur Benzaquen pour Les Nouvelles Aventures d’Aladin. Le cinéaste fait fi d’un budget somme toute plus modeste, mais parvient à insuffler un rythme à sa comédie du début à la fin. Pas étonnant que la production l’ait rappelé pour cette fois mettre en scène la suite des aventures d’Aladin, intitulée Alad’2.

Autre point positif de cette mouture, les seconds rôles. Si Marilou Berry est la tête d’affiche du film, son jeu hystérique, son non-jeu diront certains avec raison, a de quoi taper sur les nerfs. Non, l’actrice n’a pas plus d’humour aujourd’hui que quand elle était en surpoids. Un régime draconien n’a jamais apporté du talent en retour. Ok pour la partie Cendrillon en souillon mais alors non en Cendrillon princesse. Heureusement, elle est très bien épaulée par sa mère, Josiane Balasko, géniale marâtre qui s’en donne à coeur joie dans la méchanceté et l’hypocrisie (et qui fait un petit clin d’oeil à la troupe du Splendid), Arnaud Ducret joue un prince Marco foncièrement abruti et porté sur les grosses poitrines, Didier Bourdon excelle dans le rôle du roi libidineux, toujours prêt à raconter ses anciennes prouesses sexuelles à son fils. Egalement au générique, Vincent Desagnant est le prince Gilbert, frère aîné du prince Marco, qui rêve de devenir bouffon et de ce fait enchaîne les vannes pourries avec innocence et décontraction. Ajoutez au générique un Jérôme Commandeur qui semble être le seul à avoir la tête sur les épaules et qui en tant que duc, tente de maintenir l’équilibre fragile du royaume. Une comédie chorale qui ne repose pas uniquement sur son personnage principal. C’est déjà ça de pris.

En revanche, gros point négatif pour sa représentation de la bonne fée représentée par un personnage gay (Andy Cocq, toujours dans le même rôle) qui vit dans le Marais, comprenez donc le marais comme Shrek, dont l’humour particulièrement douteux laisse à désirer.

Dire que l’histoire de Cendrillon est dépoussiérée est un euphémisme. Les grandes lignes sont toutefois respectées, les décors (dont le magnifique château de Pierrefonds) et les costumes plutôt soignés et le scénariste Daive Cohen, également l’auteur des Nouvelles Aventures d’Aladin (un clin d’oeil est d’ailleurs fait au film), paraît plus libre de faire des blagues – disons le mot – de cul avec un côté plus décalé qui fait parfois mouche. Certes, Les Nouvelles Aventures de Cendrillon ne renouvelle rien, il n’en a pas la prétention, mais l’humour y est bon enfant, tout comme les anachronismes et les comédiens ont l’air de s’amuser. Si le score du film au box-office n’a pas été si déshonorant, on ne sait pas si cet « univers étendu » passera un nouveau conte à la moulinette. Tout dépendra de l’accueil d’Alad’2.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray des Nouvelles Aventures de Cendrillon, disponible chez Pathé, repose dans un boîtier classique de couleur bleue. La jaquette reprend le même visuel coloré que l’affiche du film. Le menu principal est dynamique et lumineux, animé et musical.

En ce qui concerne les suppléments, l’éditeur propose tout d’abord un minuscule bêtisier d’une minute. Certaines mauvaises langues diront qu’on y rit plus que sur le film en entier.

Une featurette d’une minute compile les propos du réalisateur Lionel Steketee, des comédiens Marilou Berry, Josiane Balasko et Arnaud Ducret sur les personnages.

Le making of de 19 minutes remplit son contrat, à savoir dévoiler l’envers du décor avec des images de tournage, des répétitions et des interviews de l’équipe.

L’Image et le son

Ce transfert HD (1080p, AVC) est superbe. L’univers coloré est bien retranscrit avec une prédominance de couleurs chaudes, vives et pétillantes, les contrastes sont au beau fixe, la profondeur de champ abyssale et le piqué agréable. Ce master s’avère un bel objet, le relief est omniprésent, les détails foisonnants, les séquences en extérieur sont magnifiques et étincelantes.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 distille les voix des comédiens avec un beau ramdam, tandis que les latérales ont fort à faire avec la bande-originale. Une spatialisation suffisamment immersive avec un caisson de basses qui délivre ses effets avec efficacité et des ambiances solides sur les frontales. La piste Stéréo est tout aussi pointilleuse en ce qui concerne la restitution des dialogues. Une version Audiovision ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : © 2017 74 FILMS – PATHE FILMS – TF1 FILMS PRODUCTION / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Les Oies sauvages, réalisé par Andrew V. McLaglen

LES OIES SAUVAGES (The Wild Geese) réalisé par Andrew V. McLaglen, disponible en DVD et Blu-ray chez Movinside le 10 octobre 2017

Avec :  Richard Burton, Roger Moore, Richard Harris, Hardy Krüger, Stewart Granger, Winston Ntshona, John Kani, Jack Watson, Frank Finlay…

Scénario : Reginald Rose d’après le roman de Daniel Carney

Photographie : Jack Hildyard

Musique : Roy Budd

Durée : 2h14

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

En Afrique du Sud, à la suite d’un coup d’état, le président Limbani est capturé par son rival, Ndofa. Sir Edward Matherson, un banquier londonien dont les intérêts financiers sont menacés, charge le colonel Faulkner d’aller délivrer Limbani. Faulkner s’adjoint deux amis, Shawn Fynn et Rafer Janders, et recrute une cinquantaine de mercenaires. L’opération est un succès. Limbani est libéré. Il ne reste plus qu’à le faire monter à bord d’un avion à destination de l’Europe. Mais, très vite, les choses se gâtent…

Si son nom n’est pas vraiment connu du grand public, le réalisateur anglo-américain Andrew V. McLaglen (1920-2014) a pourtant signé quelques pépites et classiques très prisés par les cinéphiles. Fils de Victor McLaglen, ancien boxeur poids lourd devenu comédien, Oscar du meilleur acteur pour Le Boxeur, chef d’oeuvre de John Ford dont il devient très proche, Andrew V. McLagen accompagne souvent son père sur les plateaux de cinéma et contracte très vite le virus du 7e art. Il grandit en côtoyant et en admirant John Ford et John Wayne, et décide très vite de devenir metteur en scène. Il est tout d’abord assistant-réalisateur, y compris sur L’Homme tranquille (1952) et passe enfin à la réalisation avec son premier long métrage, Légitime défenseGun the Man Down (1956), un western où il dirige James Arness et Angie Dickinson. Les séries télévisées Perry Mason et surtout Rawhide lui permettent de se perfectionner et de peaufiner son style. Il signe son retour au cinéma en 1963 avec le célèbre Le Grand McLintock avec John Wayne, Maureen O’Hara et Yvonne De Carlo. La consécration publique vient réellement en 1965 avec Les Prairies de l’honneurShenandoah et ce en dépit de critiques virulentes venues de la presse qui déclarent notamment que le réalisateur plagie le style de son modèle John Ford. Cela n’empêche pas le film d’être un grand succès (mérité), mais aussi de marquer le début d’une grande amitié et d’une collaboration fructueuse entre Andrew V. McLagen et le comédien James Stewart.

Dans les années 1970, le cinéaste persiste et signe dans le western avec Chisum, Le Dernier train pour Frisco, Rio Verde, Les Cordes de la potence et La Loi de la haine. Il se voit alors proposer Les Oies sauvagesThe Wild Geese, adapté de l’oeuvre de Daniel Carney par Reginald Rose, l’auteur de Douze hommes en colère, mais également scénariste de L’Homme de l’Ouest d’Anthony Mann en 1958. L’histoire est alors prétexte pour réunir quelques grands noms du cinéma pour un film d’aventures qui allait devenir alors une référence.

Le Colonel vétéran Allen Faulkner (Richard Burton), un mercenaire britannique, est embauché par Sir Edward Matherson (Stewart Granger) avec pour mission d’aller en Afrique centrale (dans un pays fictif proche du Burundi) libérer Julius Limbani, un homme censé pouvoir relever son pays. Faulkner recrute alors cinquante mercenaires, les « Oies sauvages », pour mener à bien sa mission. Parmi ces mercenaires : le pilote Shaun Fynn (Roger Moore), le Sud-Africain Pieter Coetzee (Hardy Krüger), et Rafer Janders (Richard Harris) un vieil ami de Faulkner qui prépare la mission. Avec l’accord tacite du gouvernement britannique, les mercenaires sont d’abord envoyés au Swaziland pour s’y entraîner. Ils se rendent ensuite dans leur pays de destination. Là, les Oies sauvages s’infiltrent dans la prison du Zembala et libèrent Limbani. Ils doivent ensuite s’emparer d’un aéroport pour rentrer à Londres. Pendant ce temps en Angleterre, Sir Edward Matherson négocie avec le gouvernement du Zembala et trahit les mercenaires. Ainsi l’avion qui devait les prendre est rappelé à la dernière minute, laissant les Oies sauvages seuls au milieu d’un territoire hostile.

Imaginez cette affiche ! Roger Moore cigare au bec, Richard Harris semblant crier Taïaut !, Hardy Krüger en pleine réflexion et Richard Burton prêt à défourailler ! Le quatuor star – sans compter leurs fabuleux partenaires – entouré d’explosions, de parachutistes et d’avion en fâcheuse posture ! Les aventures de ces Expendables des années 1970 restent encore jubilatoires quarante ans après. Assisté à la mise en scène par le monteur John Glen (réalisateur de cinq formidables James Bond dans les années 1980), Andrew V. McLagen signe un très bon film de guerre et d’action. Mené tambour battant durant plus de deux heures, interprété par des comédiens visiblement heureux de se donner la réplique qui ne manque pas de punchlines, Les Oies sauvages fait partie de ces films que l’on a plaisir à revoir.

S’il est évident que cette production n’est ni plus ni moins qu’une grosse série B de luxe, le casting phénoménal apporte toute la crédibilité nécessaire pour pardonner le caractère nawak de certaines séquences. Mention spéciale à Roger Moore qui campe tout de même un personnage plus « sérieux » et sombre que son James Bond plus pince-sans-rire et à qui le style sied à ravir. On en vient presque à regretter qu’il n’ait pas plus abordé cette face cachée pour l’agent 007. Roger Moore retrouvera le cinéaste pour le génial Les Loups de haute mer et Le Commando de Sa Majesté, tous deux sortis en 1980. L’alchimie avec ses partenaires est évidente, les paysages sont superbes, le récit rondement mené, les scènes d’action musclées, l’émotion et l’humour jamais oubliés, la chanson de Joan Armatrading et la musique de Roy Budd sont entêtantes, bref, Les Oies sauvages, très grand succès commercial de l’année 1978, reste un film culte au charme intact et toujours aussi divertissant. Ce ne sera pas le cas des Oies sauvages 2 réalisé sept ans plus tard, désastre artistique, mais c’est une autre histoire.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray des Oies sauvages, disponible chez Movinside, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. Visuel très beau et attractif reprenant celui de l’affiche originale. Le menu principal est animé sur la chanson du film. Le film d’Andrew V. McLaglen était déjà sorti en Blu-ray chez Filmedia. Malheureusement, l’édition Movinside n’a pas repris l’intégralité des suppléments. Manquent à l’appel le commentaire audio d’Euan Lloyd, John Glen et Roger Moore, ainsi que le documentaire sur le producteur Euan Lloyd.

Nous retrouvons en revanche le documentaire d’époque (24’30), qui donne un bel aperçu du plateau, de l’ambiance et des conditions de tournage en Afrique (avec 300 techniciens et comédiens) et le travail du réalisateur avec les comédiens. Quelques propos du producteur Euan Lloyd et de Roger Moore (qui fêtait ses 50 ans avec l’équipe) s’entrecroisent avec des images filmées entre les prises.

S’ensuit un petit reportage sur la Première du film au cinéma de Leicester Square de Londres. Le gratin mondain et de têtes couronnées déambule sur le tapis rouge, tandis qu’une voix annonce les nouveaux arrivants. Le tout organisé au profit d’une association d’aide pour les enfants handicapés. Après la projection, tout ce beau monde (ou presque) se retrouve dans un grand hôtel de la ville pour s’empiffrer, boire comme des trous et danser en chemise à col pelle à tarte (7’).

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Il semble que ce master soit le même que celui précédemment sorti chez Filmedia. Le titre indique que la copie provient d’une source allemande. Points positifs : la propreté est de mise, les couleurs sont plutôt belles et chaudes, l’image stable et la clarté éloquente sur toutes les séquences africaines. Points négatifs : le DNR est encore passé par là et le grain original est bien trop lissé à notre goût. Résultat, les visages manquent de naturel et d’aspérité, les détails sont pauvres.

Point de Haute-Définition pour le son avec deux mixages LPCM 2.0 anglais et français. Si la version originale est bien supérieure, la piste française convoque des géants du doublage avec Jean-Claude Michel pour Richard Burton, Claude Bertrand pour Roger Moore, William Sabatier pour Richard Harris et Marc Cassot pour Hardy Krüger. Dans les deux cas, le confort est assuré, mais sans esbroufe, ce qui est dommage pour les scènes d’action.

Crédits images : © Victory Films MMV. All Rights reserved / Movinside /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Espions sur la Tamise, réalisé par Fritz Lang

ESPIONS SUR LA TAMISE (Ministry of Fear) réalisé par Fritz Lang, disponible en DVD et combo Blu-ray/DVD chez Eléphant Films le 6 février 2018

Avec :  Ray Milland, Marjorie Reynolds, Carl Esmond, Hillary Brooke, Percy Waram, Dan Duryea…

Scénario : Seton I. Miller d’après le roman de Graham Greene

Photographie : Henry Sharp

Musique : Victor Young

Durée : 1h27

Date de sortie initiale : 1944

LE FILM

Londres, Deuxième Guerre mondiale. Stephen Neale sort d’un hôpital psychiatrique. Pour se persuader qu’il n’est pas fou et forcer son destin à s’éclaircir, il décide de se distraire dans une fête foraine. Il y gagne un gâteau dans lequel se cache un microfilm qui ne lui était pourtant pas destiné et que des agents secrets nazis vont tenter de récupérer par tous les moyens…

Grand amateur du travail de Sigmund Freud, Fritz Lang n’aura de cesse au cours de sa longue et prolifique carrière, de se pencher sur la question du meurtre, des assassins, de la culpabilité. En 1933, Joseph Goebbels propose au cinéaste le poste de directeur du département cinématographique de son ministère, celui de la propagande. Fritz Lang refuse. La légende dit que le réalisateur aurait déclaré à Goebbels que sa mère était juive. Il s’enfuit en France avant de s’installer aux Etats-Unis. Furie, son premier film américain et réquisitoire contre le lynchage, montre l’engagement du réalisateur. Suivront J’ai le droit de vivre (1937), Casier judiciaire (1938), Le Retour de Frank James (1940), Les Pionniers de la Western Union (1941) puis Chasse à l’homme la même année. Avec ce film, Fritz Lang entame une tétralogie antinazie avec Les Bourreaux meurent aussi, Espion sur la Tamise (1944) et Cape et Poignard (1946).

Après Chasse à l’homme, la carrière américaine de Fritz Lang patine et ses projets n’aboutissent pas. Le cinéaste milite pour aider ses compatriotes intellectuels à venir se réfugier aux Etats-Unis. Au même moment, Reinherd Heydrich, protecteur adjoint du Reich en Bohême-Moravie, adjoint d’Himmler, surnommé “le Bourreau”, meurt dans un attentat organisé par la résistance tchèque le 4 juin 1942. Fritz Lang décide d’en faire le sujet de son prochain film et de rendre ainsi un vibrant hommage à la résistance. Les Bourreaux meurent aussiHangmen Also Die!, longtemps envisagé sous le titre Never Surrender ou tout simplement No Surrender (repris dans la dernière séquence du film avec le célèbre “NOT THE END” dans le montage intégral) est réalisé en 1943 sur un scénario écrit par John Wexley et surtout l’immense dramaturge Bertolt Brecht, également allemand exilé aux Etats-Unis, dont il s’agit de l’unique collaboration avec Hollywood. Toutefois, il n’est pas mentionné en tant que scénariste au générique suite à une décision du syndicat des scénaristes américains.

Compromis entre réalité historique et divertissement hollywoodien, le film de Fritz Lang traite de la traque de l’assassin de Reinhard Heydrich sous forme d’une fiction prétexte à mettre en valeur le courage de chaque homme, femme et enfant, tous unis contre le Troisième Reich. Fritz Lang instaure une atmosphère oppressante, où la résistance s’organise à chaque coin de rue. Une œuvre captivante et formidable, noire et âpre, au suspense haletant, à la frontière de l’expressionnisme et du cinéma hollywoodien classique, mais profondément européenne dans l’âme.

En revanche, Espions sur la TamiseMinistry of Fear, connu également sous le titre français Le Ministère de la peur, troisième volet de cette tétralogie consacrée à la lutte contre le nazisme, apparaît comme étant le plus anecdotique. Pur film de commande, thriller d’espionnage, Fritz Lang n’a aucun droit de regard sur le scénario, ni sur le casting concernant cette adaptation du roman de Graham Greene, par le scénariste (et producteur) Seton I. Miller (L’Insoumise, Scarface, Le Cygne noir). Malgré tout, le film demeure solidement réalisé, très bien interprété et excellemment photographié.

Durant la Seconde Guerre mondiale, à Londres, Stephen Neale est relâché après un séjour de deux ans en hôpital psychiatrique, après avoir aidé son épouse malade à mourir sans souffrance. De retour à la vie normale, et désireux de goûter aux joies simples de la vie, il se laisse attirer par le charme et l’ambiance d’une fête foraine. Après y avoir rencontré une voyante, il joue et remporte un beau gâteau. Ce dont il ne se doute pas, c’est qu’il n’aurait jamais dû accepter l’innocente pâtisserie qui renferme, en fait, un microfilm destiné à des espions nazis. S’ensuit alors une course-poursuite engagée par les agents secrets du Reich pour retrouver les compromettants et précieux documents ainsi que son infortuné propriétaire.

Durant 1h30, on sent que le cinéaste n’est guère intéressé par ce qu’il filme, ce qu’il avouera publiquement des années plus tard. Rien n’est vraisemblable et Fritz Lang ne le cache pas. De ce fait, en grand professionnel, le réalisateur allemand ne s’embarrasse pas de psychologie et privilégie l’action, les rebondissements, l’histoire d’amour et l’aventure. Sans temps mort, on suit donc les comédiens Ray Milland et Marjorie Reynolds, pourchassés par les nazis dont ils vont remonter le réseau. Avec ce personnage ordinaire plongé malgré lui dans une histoire extraordinaire, l’ombre d’Alfred Hitchcock plane sur Espions sur la Tamise, parfois proche des 39 marches et de Correspondant 17. Mais contrairement au maître britannique et en dépit de l’investissement de Ray Milland, on ne croît guère aux quiproquos rocambolesques qui ponctuent la trajectoire de Stephen Neale dès sa sortie de l’institut psychiatrique. Les séquences de la kermesse et du voyage en train sont superbes et indéniablement languiennes, mais le reste du film patine quelque peu, même si encore une fois le spectateur n’a pas le temps de s’ennuyer.

Les événements s’enchaînent trop vite et de façon mécanique, tandis que le personnage demeure stoïque, comme si tout ce qui lui arrivait lui était finalement banal. Si la rencontre avec la jeune réfugiée autrichienne n’apporte pas grand-chose au final, à part pour plaire aux amateurs de bluettes, Espions sur la Tamise passe également du coq à l’âne sans embarras, dans l’unique but de divertir les spectateurs. Ce qu’il réussit haut la main !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Espions sur la Tamise, disponible chez Eléphant Films, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Ce titre intègre tout naturellement l’exceptionnelle collection Cinéma Master Class.

Aux côtés d’une galerie de photos, de bandes-annonces et des credits du disque, l’éditeur propose une présentation d’Espions sur la Tamise par le journaliste Eddy Moine (13’). Cinéphile passionné comme son père, Eddy Moine, filmé en plan fixe et lisant son texte, ne manque pas d’arguments ni d’anecdotes et encore moins de références et de titres pour évoquer le huitième long métrage américain de Fritz Lang. Dans un premier temps, le journaliste parle du cinéma de propagande anti-nazi qui fleurissait à Hollywood au début des années 1940. Puis Espions sur la Tamise est disséqué sur le fond comme sur la forme, et replacé dans l’oeuvre de Fritz Lang. Durant cette intervention très sympathique et éclairante, Eddy Moine n’hésite pas à critiquer le manque de charisme de Marjorie Reynolds et malgré quelques points négatifs déclare tout de même qu’il s’agit d’un des meilleurs films du genre.

L’Image et le son

Exit l’édition DVD Carlotta sortie en 2007. Soutenu par un encodage AVC solide, ce très beau master (1.33, 4/3) parvient à tirer parti de la HD et impose une clarté élégante ainsi qu’une restauration notable. La gestion des contrastes est équilibrée, les scories et accrocs (points blancs et noirs, rayures verticales) ont quasiment tous disparu, la propreté de l’image demeure souvent impressionnante. Les blancs sont lumineux, les yeux des comédiens brillent avec un nouvel éclat, le N&B est dense et stylisé, la palette de gris étant étendue tout du long jusqu’à la dernière bobine. Si le piqué demeure aléatoire, le grain est habilement restitué, les quelques flous sporadiques ne perturbent jamais l’homogénéité de la copie et les arrière-plans sont assurés. Hormis quelques effets de pompage, la qualité technique apparaît ici optimale pour un film des années 40.

Comme pour l’image, le son a également été restauré de fond en comble. Résultat : aucun souci acoustique constaté sur ce mixage anglais DTS-HD Master Audio 2.0. Le confort phonique de cette piste unique est total, les dialogues sont clairs et nets, très rarement étouffés, les effets annexes probants et les plages de silence très impressionnantes. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Eléphant Films /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Ça, réalisé par Andy Muschietti

ÇA (It) réalisé par Andy Muschietti, disponible en DVD, Blu-ray et 4K Ultra HD chez Warner Bros. le 24 janvier 2018

Avec :  Bill Skarsgård, Jaeden Lieberher, Finn Wolfhard, Jack Dylan Grazer, Sophia Lillis, Jeremy Ray Taylor, Wyatt Oleff, Chosen Jacobs…

Scénario : Chase Palmer, Cary Fukunaga, Gary Dauberman d’après le roman Ça de Stephen King

Photographie : Chung Chung-hoon

Musique : Benjamin Wallfisch

Durée : 2h14

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

À Derry, dans le Maine, sept gamins ayant du mal à s’intégrer se sont regroupés au sein du « Club des Ratés ». Rejetés par leurs camarades, ils sont les cibles favorites des gros durs de l’école. Ils ont aussi en commun d’avoir éprouvé leur plus grande terreur face à un terrible prédateur métamorphe qu’ils appellent « Ça »…
Car depuis toujours, Derry est en proie à une créature qui émerge des égouts tous les 27 ans pour se nourrir des terreurs de ses victimes de choix : les enfants. Bien décidés à rester soudés, les Ratés tentent de surmonter leurs peurs pour enrayer un nouveau cycle meurtrier. Un cycle qui a commencé un jour de pluie lorsqu’un petit garçon poursuivant son bateau en papier s’est retrouvé face-à-face avec le Clown Grippe-Sous … 

Tout d’abord, revenons en arrière. C’est une madeleine pour beaucoup de (télé)spectateurs, une mini-série culte qui compte des millions de fans à travers le monde et qui en gagne sans cesse de nouveaux, notamment en France où elle est très régulièrement diffusée sur la TNT après avoir été programmée pendant des années sur M6, sa première diffusion à la télé française remontant à octobre 1993 : Ça, plus connu en France sous le titre « Il » est revenu. Périodiquement, la ville de Derry dans le Maine est hantée par une terrible créature, un clown pervers capable de changer à loisir d’apparence afin de personnifier les peurs les plus intimes de ses victimes. Dans les années 1950, des événements tragiques se produisent à nouveau. S’attaquant uniquement aux enfants, qui disparaissent ou qui sont retrouvés morts dépecés, «Ça» est un jour vaincu par un groupe de sept jeunes amis de onze ans, six garçons et une fille, ayant fait la promesse de toujours poursuivre l’odieuse entité, qui a disparu dans les égouts abandonnés. Trente ans plus tard, alors que chacun mène une vie paisible aux quatre coins du pays, «Ça» réapparaît à nouveau à Derry. Conformément à leur promesse, le groupe des sept devra se reformer à l’âge de 40 ans pour affronter ses peurs d’enfants.

En 1990, cette adaptation est un événement. Certes, les plus passionnés du chef d’oeuvre absolu de Stephen King publié en 1986 trouveront toujours à redire sur sa transposition, le ton édulcoré pour toucher une plus large audience, les changements inévitables apportés pour le passage du livre à l’écran, mais Ça demeure une véritable référence et finalement le livre et la mini-série en deux parties se complètent parfaitement. D’ailleurs, ceux qui auront vu la mini-série avant de lire le roman, projetteront inévitablement le visage des comédiens au fil de mots du maître de l’horreur.

Le casting est remarquable, que ce soit les enfants ou les adultes, tous extrêmement attachants et solidement dirigés par Tommy Lee Wallace (Halloween 3 : Le Sang du sorcier, Vampire, vous avez dit vampire ? 2), qui par ailleurs soigne sa mise en scène et regorge d’inventions pour faire peur et divertir. L’alchimie entre les deux groupes est indéniable et participe à l’immersion du spectateur dans cette histoire fantastique, qui en a traumatisé plus d’un, au point d’en devenir coulrophobiques, autrement dit phobique des clowns. Il faut dire que Tim Curry est particulièrement angoissant dans le rôle-titre et signe une de ses plus grandes performances après The Rocky Horror Picture Show de Jim Sharman et Legend de Ridley Scott. Si ses apparitions sont finalement limitées sur plus de trois heures, chacune demeure marquante et donne de nombreuses sueurs froides, tant aux personnages qu’aux spectateurs.

Si la télévision ne bénéficiait pas des mêmes budgets et de la même liberté créatrice qu’aujourd’hui, Ça« Il » est revenu fait partie de ces rares productions devenues des classiques dès leur première diffusion. Avec son aspect film-noir, notamment avec le personnage de Mike Hanlon qui mène son enquête et dont les mémoires sont dites en voix-off, combiné à une histoire fantastique, d’horreur, d’épouvante, dramatique, d’amour et d’amitié (les retrouvailles du Club des paumés 30 ans après sont très émouvantes), Ça traverse les décennies sans prendre de rides – à part au niveau des effets spéciaux, mais est-ce bien là le plus important ? – et reste précieux dans le coeur des spectateurs.

En juillet 2015, alors qu’il travaille sur une nouvelle transposition du roman de Stephen King, le réalisateur Cary Fukunaga (la première saison de True Detective) quitte finalement le projet suite à des divergences avec la production, qui trouve alors ses idées trop sombres, d’autant plus que le studio souhaitait faire un seul et unique long métrage et non deux comme le désirait le réalisateur. Dommage, d’autant plus le comédien Will Poulter (glaçant dans Detroit de Kathryn Bigelow), qui devait interpréter Pennywise, quitte également le navire. Néanmoins, la Warner Bros. fait finalement appel au cinéaste argentin Andrés Muschietti, révélé par Mamá, pour reprendre le flambeau. Moins torturée, moins sanglante et sexuelle que l’approche de son prédécesseur, Andrés Muschietti livre néanmoins une version très prenante du roman de Stephen King. A titre de comparaison, cette nouvelle mouture 2017 fait moins peur que le téléfilm original et effraie beaucoup moins que le livre. Néanmoins, marqué par des références aux productions Amblin (la première partie a d’ailleurs été déplacée dans les années 1980), Ça version 2017 peut compter sur un casting admirable, avec tout d’abord la nouvelle incarnation du Clown par Bill Skarsgård.

Fils de l’acteur Stellan Skarsgård et frère d’Alexander (True Blood, Melancholia, Tarzan), le jeune comédien de 27 ans s’avère remarquable et sa prestation ne cherche jamais à rivaliser ou à égaler celle inoubliable de Tim Curry. Il s’agit d’un autre Pennywise, plus monstrueux, et bien que ses apparitions restent dispersées sur 2h15, Bill Skarsgård crève l’écran. Cette première partie se focalise uniquement sur l’enfance des personnages, contrairement au téléfilm qui croisait les deux époques. Le chapitre 2 prévu dans les salles en septembre 2019, se concentrera sur la partie adulte, avec quelques flashbacks sur les personnages enfants. Le nouveau club des ratés se compose d’exceptionnels comédiens, bourrés de talent et au charisme magnétique : Jaeden Lieberher – Bill Denbrough (Midnight Special), Finn Wolfhard – Richie Tozier (Mike Wheeler dans la série Stranger Things), Sophia Lillis – Beverly Marsh (immense révélation), Jack Dylan Grazer – Eddie Kaspbrak, Wyatt Oleff – Stan Uris, Jeremy Ray Taylor – Ben Hanscom et Chosen Jacobs – Mike Hanlon. Un casting haut de gamme et tous très prometteurs.

Pour celles et ceux qui attendaient une adaptation fidèle au roman, sachez que ce n’est pas le cas ici. Si la première séquence, celle qui oppose le petit Georgie au Clown dans le caniveau se révèle être plus sanglante, Ça 2017 surfe plutôt sur la nostalgie des divertissements des années 1980, dans ses partis pris et dans son atmosphère. Certes, cela peut paraître déconcertant, mais le film d’Andy Muschietti est un fabuleux et très attachant divertissement, excellemment mis en scène, photographié et interprété, drôle, poétique, mélancolique et qui contient son lot de séquences morbides à défaut d’être réellement effrayantes.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Ça, disponible chez Warner Bros., est disposé dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un fourreau cartonné. Le menu principal est fixe et musical.

Contrairement au Blu-ray d’Il est revenu sorti en 2016, l’éditeur ne vient pas les mains vides et propose une heure de suppléments.

Le premier module se focalise sur la transformation et la performance de Bill Skarsgård en Pennywise (16’), à travers quelques images de tournage et les propos des comédiens, de la productrice Barbara Muschietti (sœur du cinéaste) et du réalisateur Andy Muschietti. Pas un mot sur l’ancienne version et le travail de Tim Curry, mais Bill Skarsgård indique point par point comment il a su s’approprier ce rôle emblématique. Chose amusante, l’acteur a su faire des économies à la production en se passant d’effets visuels pour la lèvre inférieure pendante du personnage, ainsi que son strabisme et même pour l’ensemble des cascades. Pour l’anecdote, Bill Skarsgård n’est arrivé sur le plateau que deux mois après le début des prises de vue et n’est apparu devant ses jeunes partenaires qu’au dernier moment afin de préserver la surprise.

Le documentaire suivant donne cette fois la parole à l’ensemble du club des losers (16’). Les merveilleux jeunes acteurs interviennent à tour de rôle pour parler de leurs personnages, mais aussi et surtout de la véritable alchimie et l’amitié nées sur le plateau. De nombreuses images de tournage viennent également illustrer l’ensemble.

Place au maître Stephen King en personne (14’), qui propose un retour sur les origines et ses inspirations de son roman Ça. Nous sommes étonnés d’apprendre que de nombreux faits divers survenus à Bangor (dans le Maine) ont grandement inspiré l’histoire, tout comme la topologie de la ville.

Les scènes coupées ou rallongées (15’) n’apportent pas grand-chose, si ce n’est un prologue tourné comme un gag raté (en gros Georgie récupère son bateau et Pennywise pousse un juron devant son échec) et la Bar Mitsvah dans son intégralité de Stan durant laquelle le jeune homme fustige l’aveuglement des adultes sur les mystérieuses d’enfants à Derry depuis toujours.

L’Image et le son

Sublime. Warner Bros. soigne son master HD qui se révèle exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, y compris sur séquences sombres, avec une image sans cesse affûtée. La clarté demeure frappante, le piqué est acéré, les gros plans riches, les contrastes denses et la colorimétrie reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les volontés artistiques du chef opérateur Chung-hoon Chung (Mademoiselle, Stoker, Old Boy). Ce Blu-ray offre de fabuleuses conditions pour revoir le film d’Andy Muschietti et profiter de la superbe photographie. L’apport HD sur ce titre est évidemment indispensable.

Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1 (ou Dolby Atmos si votre installation vous le permet) est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances fusent de tous les côtés, la musique de Benjamin Wallfisch (Blade Runner 2049, A Cure for Life) bénéficie d’un traitement de faveur avec une large ouverture, plongeant instantanément le spectateur dans l’ambiance. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale tandis que les effets ne cessent d’être balancés de gauche à droite, et des enceintes avant vers les arrières. N’oublions pas le caisson de basses, qui se mêle ardemment à ce spectacle acoustique aux effets fracassants.

Crédits images : © WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. /  Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Zardoz, réalisé par John Boorman

ZARDOZ réalisé par John Boorman, disponible en DVD et Blu-ray chez Movinside le 13 novembre 2017

Avec :  Sean Connery, Charlotte Rampling, John Alderton, Sara Kestelman, Sally Anne Newton, Niall Buggy, Bosco Hogan, Jessica Swift…

Scénario : John Boorman

Photographie : Geoffrey Unsworth

Musique : David Munrow

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

2293. La Terre a été totalement dévastée et la société est divisée en plusieurs castes : les Brutes, les Exterminateurs et les Barbares qui vouent un culte sans limites au dieu Zardoz. Tous oeuvrent pour les Éternels, un groupe d’humains immortels. Ce nouvel équilibre social va être bouleversé lorsque Zed, un Exterminateur, décide de pénétrer chez les Éternels, défiant ainsi le dieu Zardoz…

Pour la plupart, Zardoz se résume à l’accoutrement de Sean Connery dans le film. En effet, difficile d’échapper aux photogrammes du comédien avec sa grosse moustache à la Burt Reynolds (à qui le rôle avait d’abord été proposé), son catogan, sa cartouchière placée sur son torse velu, son cache-sexe rouge bombé et ses cuissardes en vinyle. D’ailleurs, nombreux sont ceux à avoir classé Zardoz – sans l’avoir vu – dans la catégorie nanar, ce qu’il n’est absolument pas. Malgré tout, le sixième long métrage de John Boorman, réalisé deux ans après Délivrance, demeure une vraie curiosité, souvent hermétique, qui vaut essentiellement pour ses recherches plastiques. Mais quand si l’on creuse un peu, on se rend compte que Zardoz va bien plus loin.

D’entrée de jeu, nous voilà plongés en 2293. Ce que nous pouvons comprendre : 300 ans après l’effondrement de la civilisation industrielle, dans un futur post-apocalyptique, la population humaine est divisée entre les Éternels, des humains ayant atteint l’immortalité grâce à la technologie, et les Brutes. Ces derniers vivent sur une terre ravagée et fournissent de la nourriture aux Éternels, peuplés de savants et d’intellectuels, qui vivent dans des régions isolées du reste du monde par un mur invisible et appelées « Vortex » et passent une existence luxueuse mais apathique. Arthur Frayn (Niall Buggy), l’Éternel chargé de gérer les « terres extérieures », se fait passer auprès des Brutes pour un dieu nommé Zardoz, qui se manifeste sous la forme d’un énorme masque de pierre volant. Ayant sélectionné des brutes, il a constitué un groupe d’exterminateurs, chargé de réduire en esclavage les autres humains, et auxquels il fournit des armes en échange de la nourriture qu’ils collectent. Zed (Sean Connery) est un de ces exterminateurs. Il se cache à bord du masque de pierre lors d’un voyage. Arrivé au Vortex, Zed est étudié en tant que spécimen : les Éternels n’ayant pas eu de contact depuis des siècles avec l’extérieur, ils essaient de comprendre comment les Brutes ont évolué. Il se retrouve au cœur d’une dissension entre deux Éternelles, Consuella (Charlotte Rampling) et May (Sara Kestelman), et doit effectuer des tâches pour Friend (John Alderton).

Zed découvre au fur et à mesure que cette société en apparence lissée et idéale est en fait violente et désespérée. Les Éternels sont dirigés et protégés de la mort par une intelligence artificielle appelée « le Tabernacle », un gros cristal qui est relié à l’esprit de tous les Éternels et qui conserve leur mémoire dans ses réflexions lumineuses. Du fait de leur immortalité, les Éternels ont arrêté de procréer et les hommes sont devenus impuissants. Certains sont victimes d’une maladie, qui les plonge en catatonie. Les dissidents, ceux qui refusent le système ou bien introduisent la discorde, sont vieillis, voire sont exclus et sont délibérément rendus séniles.

Voilà, bienvenue dans Zardoz, dont le nom provient du livre L. Frank Baum, The WiZARD of OZ, que le personnage de Sean Connery découvre dans une bibliothèque en ruine à l’extérieur du Vortex. Cette révélation le met alors face aux réalités, tout n’est que supercherie, d’autant plus que Zed, contrairement à ce que pensent les Eternels, n’est pas non plus un être primitif. Analyser ainsi Zardoz permet de réévaluer le film de John Boorman. Des manipulations politiques destinées à voiler la réalité, afin d’engranger des ressources naturelles. Plus près de nous, cela rappelle furieusement l’invasion de l’Irak en 2003 sous l’administration W. Bush. Mais Zardoz est une œuvre tellement étrange, difficile d’accès et marquée par une esthétique kitsch, que chacun est en fait libre d’y voir et de ressentir ce qu’il a envie. Les personnages et divinités ne sont pas ce qu’ils paraissent être, tout n’est que faux-semblants et superstitions, ce qui permet à la société de demeurer au lieu de penser et de réfléchir.

Zed apparaît comme le grain de sable qui va faire enrayer une machine jusqu’alors trop bien huilée. Son apparition dans le Vortex va ainsi rendre leur mortalité aux Éternels. Du point de vue formel, John Boorman joue avec les moyens mis à sa disposition et des effets spéciaux certes désuets, mais qui n’en restent pas moins bourrés de charme. On s’amusera des scènes dans le Tabernacle ou des trips psychédéliques qui rappellent parfois le Barbarella de Roger Vadim. Magnifiquement photographié par l’immense chef opérateur Geoffrey Unsworth, Zardoz, écrit, produit et mis en scène par John Boorman, est une fable philosophique qui ne laisse pas indifférent avec ses images éthérées sur fond de 7e symphonie de Beethoven et Sean Connery qui court torse-poil au ralenti avec sa queue-de-cheval qui se balance sur ses épaules. Pas un chef d’oeuvre de la science-fiction certes, en aucun cas un navet et encore moins un nanar, mais un film culte assurément.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Zardoz, disponible chez Movinside, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. Visuel très beau et attractif. Le menu principal est un peu plus cheap, animé et muet…

Spécialiste du cinéma américain et notamment du Nouvel Hollywood, Jean-Baptiste Thoret replace le sixième long métrage de John Boorman dans son contexte cinématographique, en croisant habilement le fond et la forme. Toujours aussi didactique, spontané et captivant, notre interlocuteur explique que John Boorman a ouvert sa propre boîte de Pandore avec Zardoz. Jean-Baptiste Thoret trouve le film passionnant, dissèque les thèmes explorés par le cinéaste, détaille les conditions de production et l’implication de Sean Connery – dont le costume a longtemps été moqué et l’est d’ailleurs encore aujourd’hui – qui souhaitait s’éloigner encore et toujours du personnage de James Bond. Une formidable présentation (26’).

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Bon…en tant que puristes, nous ne pouvons pas laisser passer ça. Le bulldozer DNR est passé par là une fois de plus chez l’éditeur et la texture argentique de la merveilleuse photographie de l’immense Geoffrey Unsworth (Superman, Cabaret) a été lissée quasiment intégralement. C’est bien beau de proposer des films rares en Haute-Définition, mais pourquoi dénaturer les partis pris esthétiques et volontés artistiques ? Pour satisfaire certains consommateurs qui ne jurent que par une image sans aspérité ? Comme si le film avait été tourné en numérique ! Si la propreté de la copie est indéniable, on ne peut que tiquer tout du long face à l’aspect cireux des visages et sa définition chancelante. Certes, les photographies souvent éthérées du chef opérateur britannique ont toujours donné du fil à retordre aux éditeurs, mais là on frôle le blasphème. Les détails manquent à l’appel, la gestion des contrastes est aléatoire, tout comme le piqué. Un conseil pour Movinside, STOPPEZ le réducteur de bruit ! Le Blu-ray est néanmoins au format 1080p.

Les mixages anglais et français LPCM 2.0 distillent parfaitement la musique de David Munrow, ainsi que la 7e symphonie de Ludwig van Beethoven. Néanmoins, la piste française se focalise sans doute trop sur le report des voix (Jean-Claude Michel double Sean Connery), au détriment des ambiances annexes. La piste originale est très propre, sans souffle, dynamique et suffisamment riche pour instaurer un très bon confort acoustique.

Crédits images : © Twentieth Centyru Fox Home Entertainment / Movinside Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr